Une vie sans Barjot

UneVieSansBarjot


Titre : Une vie sans Barjot
Scénariste : Appollo
Dessinateur : Stéphane Oiry
Parution : Mars 2011


La fin de l’adolescence et le passage Ă  l’ñge adulte est un grand classique de la bande-dessinĂ©e. À croire que les auteurs sont de grands ados qui ont toujours eu beaucoup de mal Ă  faire leur deuil de cette Ă©poque. « Une vie sans Barjot » raconte la derniĂšre nuit de Mathieu dans sa ville natale avant son dĂ©part pour les Ă©tudes Ă  la capitale. Le tout pĂšse une soixantaine de pages et est paru chez Futuropolis.

La soirĂ©e commence par un concert dans un bar. Tout le monde semble plus ou moins se connaĂźtre. Bienvenue en province, symbole de la banlieue dans le livre. En effet, Mathieu vient d’avoir son bac et son passage Ă  l’ñge adulte sera la montĂ©e Ă  la capitale. Il va donc perdre ses amis et
 NoĂ©mie, la fille dont il est secrĂštement amoureux depuis des annĂ©es.

La fin de l’adolescence en une soirĂ©e.

UneVieSansBarjot1C’est un rĂ©cit sur l’adolescence qui nous est proposĂ©. Mathieu et ses copains sont suffisamment attachants pour nous tenir en haleine, eux qui Ă©cument les fins de soirĂ©e pour retrouver NoĂ©mie. Au final, « Une vie sans Barjot » ne raconte pas grand-chose et fait fonctionner pas mal de clichĂ©s. Mais cette ambiance de dĂ©ambulation nocturne ne laisse pas indiffĂ©rent. La fin casse d’ailleurs un peu cette sensation de fin d’époque. Dommage.

La narration est ainsi purement chronologique et son rythme adopte celui des hĂ©ros. Peu d’ellipses, tout se suit et forme un tout. Le dĂ©coupage en quatre bandes des planches renforce cette impression de temporalitĂ©. On marche avec les personnages, on attend avec eux
 En cela, « Une vie sans Barjot » forme un tout parfaitement cohĂ©rent avec son sujet !

Le dessin de StĂ©phane Oiry est vraiment adaptĂ© au rĂ©cit. Je ne connaissais pas ce dessinateur, mais son trait m’a conquis. Son dessin tout en noirs est parfaitement mis en valeur par une colorisation en bichromie qui permet un dĂ©coupage des scĂšnes. Beaucoup sont bleues (pour l’extĂ©rieur) et les changements vers le jaune ou le rouge apportent un contraste intĂ©ressant.

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« Une vie sans Barjot » est une bande-dessinĂ©e sympa. Loin d’ĂȘtre rĂ©volutionnaire dans son propos ou dans son ambition, elle fait le travail. Elle rappellera certains souvenirs aux nostalgiques qui regrettent encore cette fille Ă  qui ils n’ont pas su dĂ©clarer leur flamme


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note3

Little Tulip

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Titre : Little Tulip
Scénariste : JérÎme Charyn
Dessinateur : François Boucq
Parution : Novembre 2014


 « Little Tulip », Ă  sa sortie, a fait couler beaucoup d’encre. Le one-shot, rĂ©alisĂ© par Charyn (au scĂ©nario) et Boucq (au dessin), Ă©tait dĂ©crit comme puissant, noir et formidablement dessinĂ©. Paru dans la collection « Signé » au Lombard, le livre pĂšse pas moins de 84 pages. C’est la troisiĂšme collaboration des deux auteurs.

Paul est amĂ©ricain. Alors qu’il n’est qu’un enfant, sa famille Ă©migre Ă  Moscou oĂč ils vont subir de plein fouet la rĂ©volution soviĂ©tique. CondamnĂ©s pour espionnage, ils sont envoyĂ©s au goulag en SibĂ©rie. SĂ©parĂ© de ses parents, Paul va tenter de survivre, s’aidant de son seul atout : son talent de dessinateur. Il va obtenir des protections des gangs locaux en tant que tatoueur attitrĂ©.

Viscéral et puissant.

LittleTulip2C’est une histoire implacable qui se dĂ©veloppe ici. L’humanitĂ© dans ce quelle a de plus animale. Viols, meurtres, domination
 Tout y passe. On dĂ©couvre le quotidien du camp, lĂ  oĂč les prisonniers s’organisent en clans pour survivre et se dominer les uns les autres.

ParallĂšlement Ă  l’histoire du goulag, on suit Paul Ă  une Ă©poque plus contemporaine. Ainsi, on sait qu’il a survĂ©cu dĂšs le dĂ©part et qu’il est revenu aux Etats-Unis. Cette partie constitue une sorte de polar, Paul aidant les policiers pour dessiner des portraits robots. Moins prenante que celle du goulag, elle reprend les thĂšmes du tatouage et de la vengeance.

Cet univers ultra-violent est soutenu par le dessin puissant de Boucq. HabituĂ© Ă  ces genres de thĂšmes (on pense à « Bouncer » par exemple), il a un vĂ©ritable talent pour montrer l’ĂȘtre humain dans sa dĂ©chĂ©ance. Les corps sont particuliĂšrement Ă  l’honneur ici et son trait dynamique et rugueux marche Ă  merveille. Il est heureux que Boucq sache si bien choisir ses scĂ©naristes !

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« Little Tulip » est un ouvrage puissant et viscĂ©ral qui ne fait jamais dans la demi-mesure. Dans ce livre, tout acte se fait dans le sang et l’épilogue ne peut ĂȘtre que vengeance. Un bel ouvrage de bande-dessinĂ©e, avec un dessin au diapason de son scĂ©nario.

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note4

AĂąma, T4 : Tu seras merveilleuse, ma fille

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Titre : AĂąma, T4 : Tu seras merveilleuse, ma fille
Scénariste : Frederik Peeters
Dessinateur : Frederik Peeters
Parution : Octobre 2014


AĂąma est l’une des sĂ©ries de science-fiction les plus excitantes de ces derniĂšres annĂ©es. ScĂ©narisĂ©e et dessinĂ©e par Frederik Peeters, elles mettent en scĂšne un paumĂ©, Verloc  Nim, qui part sur une planĂšte dĂ©serte avec son frĂšre. Sur cette planĂšte, une expĂ©rience ultra-secrĂšte a lieu. « Tu seras merveilleuse, ma fille » est le quatriĂšme et dernier tome qui vient clore la sĂ©rie. Il est Ă©ditĂ© chez Gallimard et pĂšse une centaine de pages.

Si les deux premiers tomes se concentraient sur une SF classique, oĂč les personnages dĂ©couvraient le rĂ©sultat d’une expĂ©rience qui dĂ©gĂ©nĂ©rait, le troisiĂšme opus prenait un virage onirique. AprĂšs avoir placĂ© des fondements travaillĂ©s et cohĂ©rents, Frederik Peeters avait fait des choix scĂ©naristiques discutables, abandonnant le rĂ©alisme au profit des questionnements mĂ©taphysiques. Ce quatriĂšme tome continue dans cette voie.

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Verloc Nim fusionne avec l’AĂąma. Curieusement, il la contient suffisamment. Il devient une sorte de super ĂȘtre omniscient dont le seul but est de fusionner avec sa fille. Sans trop d’explication, Verloc Nim devient donc un ĂȘtre capable d’à peu prĂšs tout. Il bondit de partout, voit tout, entend tout
 J’ai bien du mal Ă  accrocher Ă  ce genre de postulats un peu faciles. Quant aux rĂ©flexions psychologiques, elles sont dĂ©jĂ -vus depuis longtemps.

Un virage radical pour la fin de la série.

Ce terreau permet en revanche Ă  Frederik Peeters de faire exploser sa maestria graphique. Quelques doubles pages viennent sublimer le livre et son trait reste toujours aussi puissant. Les scĂšnes de combat et de vol, trĂšs (trop ?) nombreuses, montrent combien l’auteur maĂźtrise son dessin, le mouvement et le dĂ©coupage.

L’ouvrage se concentrant uniquement sur Verloc Nim, il perd ainsi toute la puissance psychologique que la sĂ©rie avait, faisant vivre des personnages originaux et trĂšs bien travaillĂ©s. L’aspect psychologique se cantonne donc Ă  des gĂ©nĂ©ralitĂ©s, bien loin de ce Ă  quoi on avait l’habitude dans la sĂ©rie.

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Ce quatriĂšme tome de « AĂąma » est une vraie dĂ©ception. L’auteur a pris un virage radical au troisiĂšme tome qu’il confirme ici. Si certains seront certainement conquis par ce livre, d’autres resteront clairement sur le bord du chemin, profitant des planches magnifiques de l’auteur sans vraiment y trouver un sens. Quel dommage ! 

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note2

Le goût du chlore

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Titre : Le goût du chlore
Scénariste : Bastien VivÚs
Dessinateur : Bastien VivĂšs
Parution : Mai 2008


« Le goĂ»t du chlore » est l’une des premiĂšres bande-dessinĂ©es de Bastien VivĂšs. Parue en 2008, elle a permis Ă  l’auteur de prendre son envol depuis avec de nombreux projets couronnĂ©s de succĂšs. Dans cet ouvrage paru chez KSTR, on retrouve deux jeunes gens qui se rencontrent Ă  la piscine. Le tout pĂšse pas moins de 135 planches.

Dans la BD, on suit un jeune homme qui a un problĂšme de dos. Son kinĂ© le pousse alors Ă  aller nager, ce qu’il n’a pas vraiment envie. Il faut dire qu’il ne nage pas bien et qu’il a bien du mal Ă  motiver des amis pour l’accompagner. Il dĂ©couvre alors le « milieu » de la piscine municipale, avec des hommes en reprĂ©sentation, des vieilles femmes et
 Une fille.

LeGoutDuChlore1« Le goĂ»t du chlore » est une romance. Si pudique qu’elle en perd un peu d’intĂ©rĂȘt. Il y a trĂšs peu de dialogues dans l’ouvrage et une grande partie concerne la natation. En effet, la jeune fille enseigne au garçon comment mieux nager. L’intĂ©rĂȘt de l’un pour l’une est Ă©vident, l’inverse semble plus long Ă  se dĂ©terminer.

Si on enlĂšve les scĂšnes chez le kinĂ©, plutĂŽt anecdotiques, tout se passe dans la piscine municipale. Les personnages sont presque tout le temps en train de nager ou de barboter. Cela permet Ă  Bastien VivĂšs de laisser parler son obsession des corps (que l’on retrouvera plus tard dans « Polina »). Un corps sportif et attirant d’un cĂŽtĂ©, plus ingrat et chĂ©tif de l’autre. L’auteur dĂ©cide d’adopter le rythme rĂ©el du lieu. Ainsi, on nage plus qu’on parle dans l’ouvrage. Et au bout d’un moment, la lassitude nous atteint Ă  force de voir chaque mouvement dĂ©composĂ©, que ce soit pour la nage ou toute autre chose. Mais on n’est pas loin de l’exercice de style. Bastien VivĂšs fournit donc un travail intĂ©ressant qui ne plaira pas Ă  tout le monde.

Au niveau dessin, on retrouve le trait dynamique de Bastien VivĂšs. J’ai trouvĂ© l’ensemble assez inĂ©gal. Certaines cases sont trĂšs rĂ©ussies et puissantes. D’autres sont vraiment limites, mĂȘme si elles sont liĂ©es au parti pris de l’auteur. Ce dernier Ă©crit en fin d’ouvrage avoir rĂ©alisĂ© l’album Ă  l’étĂ© 2007, ce qui expliquerait ce cĂŽtĂ© inĂ©gal. La colorisation en vert/bleu de les dĂ©cors mais en valeur les corps couleur chair des protagonistes. Mais l’ensemble reste assez froid.

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On peut souvent lire que « Le goĂ»t du chlore » retranscrit parfaitement l’ambiance d’une piscine municipale oĂč des gens trĂšs diffĂ©rents vont nager et oĂč le temps est rythmĂ© par les longueurs. Mais c’est bien lĂ  le problĂšme. Quand on va nager, le temps est souvent long et on s’ennuie un peu. VoilĂ  l’effet que m’a fait cet ouvrage.

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note2

L’Ă©chappĂ©e – GrĂ©gory Mardon

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Titre : L’Ă©chappĂ©e
Scénariste : Grégory Mardon
Dessinateur : Grégory Mardon
Parution : Avril 2015


« L’échappĂ©e » est un pavĂ© de plus de 200 pages scĂ©narisĂ© et dessinĂ© par GrĂ©gory Mardon. Le livre narre l’histoire d’un homme qui s’échappe de sa vie pour aller voir la mer. C’est le point de dĂ©part d’une aventure surprenante
 Le tout est publiĂ© chez Futuropolis pour un prix de 27 €.

« L’échappĂ©e » a la particularitĂ© d’ĂȘtre entiĂšrement muet. On pourrait prendre cela pour un exercice de style, mais cette absence de parole Ă  un vĂ©ritable sens. Cela explique le nombre important de pages, le dessin devant exprimer beaucoup d’actions et de sentiments.

Le dessin remplace les mots.

LEchappee2L’histoire est dĂ©coupĂ©e en plusieurs chapitres, chacun Ă©tant reprĂ©sentĂ© par une couleur. Le dessin est bichromique, ce qui permet de bien dĂ©finir les diffĂ©rentes ambiances. L’histoire commence en ville, alors que l’homme mĂšne une vie des plus modernes : mĂ©tro, boulot, dodo. Mais l’appel de la mer va briser cet enchaĂźnement (la cassure est parfaitement reprĂ©sentĂ© par la couverture). Difficile d’en dire plus sans spoiler la suite, mieux vaut laisser la surprise.

Le dessin est bien dans l’air du temps. Le trait au pinceau, Ă©pais, est Ă©lĂ©gant et dynamique. Le travail de GrĂ©gory Mardon est avant tout dans le mouvement et l’expression que dans le dĂ©tail. Ainsi, la BD se lit vite une premiĂšre fois. On s’attarde un peu plus en deuxiĂšme lecture, mais on s’aperçoit qu’on n’est pas passĂ© Ă  cĂŽtĂ© de dĂ©tails particuliers. La lecture est donc trĂšs premier degrĂ©.

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« L’échappĂ©e » est une belle rĂ©ussite. À la fois remarquable de par sa contrainte initiale, l’histoire est finalement plus originale que ce que le pitch initial laissait penser. Dommage que son prix, excessif, puisse bloquer l’achat chez de nombreux lecteurs et empĂȘcher un plus ample succĂšs.

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note4

Tu mourras moins bĂȘte, T4 : Professeur Moustache Ă©tale sa science

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Titre : Tu mourras moins bĂȘte, T4 : Professeur Moustache Ă©tale sa science
Scénariste : Marion Montaigne
Dessinatrice : Marion Montaigne
Parution : Septembre 2015


AprĂšs avoir explosĂ© sur la blogosphĂšre, Marion Montaigne a reçu un succĂšs mĂ©ritĂ© pour « Tu mourras moins bĂȘte », ses recueils de vulgarisation scientifique. Outre l’humour omniprĂ©sent, l’auteure aime remplir ses pages de rĂ©fĂ©rences cinĂ©mas, sĂ©ries ou simplement people. Le tout est publiĂ© chez Delcourt pour 250 pages.

Depuis son changement d’éditeur, Marion Montaigne ne s’impose plus de thĂšme gĂ©nĂ©ral. On aborde donc tout et n’importe quoi, l’auteure se faisant plaisir avec ses sujets de prĂ©dilection. On retrouve donc beaucoup les explications geek (« Jurassic Park », « Le Seigneur des Anneaux », « Star Wars » ) et le pipi caca. Ainsi, on sent que Montaigne prend un plaisir infini Ă  nous parler des pets


Rire de la science par l’absurde.

TuMourrasMoinsBete4bToutes les explications dĂ©marrent par une fausse carte postale dessinĂ©e par nombre d’invitĂ©s. Chacun pose une question, Ă  laquelle rĂ©pond la dessinatrice. Si certains thĂšmes sont trĂšs gĂ©nĂ©raux, d’autres partent un peu dans tous les sens. Au final, ce n’est pas plus mal, les notes ne suivant pas non plus un schĂ©ma systĂ©matique qui ennuierait le lecteur. Car force est de constater qu’aprĂšs quatre tomes bien fournis, Marion Montaigne continue Ă  ĂȘtre aussi drĂŽle et didactique Ă  la fois. MĂȘme si ce que l’on apprend a, dans ce tome, finalement peu d’intĂ©rĂȘt. Comme un symbole, le livre se ferme sur la sexualitĂ© des dinosaures, une façon de mixer deux grands sujets traitĂ©s dans ses livres


Au niveau du dessin, on retrouve le trait particuliĂšrement relĂąchĂ© de Marion Montaigne et colorisĂ© Ă  l’aquarelle. C’est clairement ce qui peut rebuter le plus au premier abord, mais son efficacitĂ© est Ă©vidente. C’est lĂ  le plus important.

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Ce tome confirme (si besoin Ă©tait) tout le talent de Marion Montaigne pour la vulgarisation. Et plus que pour apprendre des choses, on lit avant tout « Tu mourras moins bĂȘte » pour rire avec l’auteure de la science et de tous les questionnements que cela peut apporter. Et si c’est absurde, c’est encore meilleur !

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note5

Panique organique

PaniqueOrganique


Titre : Panique organique
Scénariste : Marion Montaigne
Dessinatrice : Marion Montaigne
Parution : Octobre 2007


Marion Montaigne est une auteure qui s’est crĂ©Ă© un nom dans la vulgarisation scientifique. MĂȘlant bande-dessinĂ©e, sciences et humour, elle a su capter l’attention du public avec son blog « Tu mourras moins bĂȘte » (parfaitement mis sur papier ensuite). Depuis, elle a sorti « Riche, pourquoi pas toi ? » qui lui permettait de toucher aux sciences sociales. Mais dĂšs 2007, l’auteure sortait dĂ©jĂ  un livre intitulĂ© « Panique organique » qui proposait une histoire dĂ©jantĂ© dans le corps humain. PubliĂ© chez Sarbacane, le tout pesant une petite centaine de pages.

Nous dĂ©marrons donc dans le corps d’un enfant qui mange ses cĂ©rĂ©ales. L’une de bactĂ©ries de l’estomac, fatiguĂ© de cette existence rĂ©pĂ©titive, dĂ©cide de s’échapper. En effet, le petit garçon a eu le malheur d’avaler le jouet qui Ă©tait dans la boĂźte de cĂ©rĂ©ales. C’est une fusĂ©e
 C’est parti pour une aventure au plus profond du corps


Une aventure d’humour didactique

Si le dĂ©but de l’aventure laisse prĂ©sager une aventure d’humour didactique (le rein est bien prĂ©sentĂ© par exemple), le tout devient vraiment barrĂ© au fur et Ă  mesure. Alors certes on apprend des choses rĂ©guliĂšrement, mais l’aspect didactique laisse souvent la place Ă  l’aventure et Ă  l’action dĂ©bridĂ©e. 

On a clairement affaire ici Ă  un ouvrage plutĂŽt jeunesse. Les explications sont plutĂŽt simples et l’action est non-stop. Le double discours existe quand mĂȘme (le passage Ă  l’adolescence est vraiment destinĂ© Ă  ĂȘtre drĂŽle pour des adultes me semble-t-il
), mais il n’est pas omniprĂ©sent. Les derniĂšres pages, complĂštement dĂ©bridĂ©es manquent ainsi un peu de consistance. MalgrĂ© tout, on sourit Ă  plusieurs reprises. Mais on est tellement habituĂ© Ă  rire devant un livre de Marion Montaigne que l’on en devient trĂšs exigeant !

Concernant le dessin, on retrouve un trait simple et dynamique de l’auteure, colorisĂ© Ă  l’informatique. C’est moins relĂąchĂ© et moins personnel que ses derniĂšres productions, mais la lecture est trĂšs agrĂ©able et lisible. Le dĂ©coupage est plus classique avec un gaufrier et des cases tracĂ©es. Bref, c’est finalement assez diffĂ©rent de ce que peut nous proposer Marion Montaigne actuellement.

« Panique Organique » confirme l’intĂ©rĂȘt de Marion Montaigne pour les ouvrages didactiques. Paru en 2007, juste avant « La vie des bĂȘtes » (oĂč clairement elle est plus percutante au niveau de l’humour), c’est un ouvrage jeunesse de bonne qualitĂ©. La partie didactique n’est pas lourde et peut mĂȘme passer derriĂšre l’aspect purement aventure. Et il faut bien avouer que les ados adorent ce livre. Une lecture sympathique. avatar_belz_jol

note3

Riche, pourquoi pas toi ?

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Titre : Riche, pourquoi pas toi ?
Scénariste :
Marion Montaigne
Dessinatrice : Marion Montaigne
Parution : Octobre 2013


Marion Montaigne s’est fait connaĂźtre avec son blog « Tu mourras moins bĂȘte », qui traitait en bande-dessinĂ©e et avec humour de la science. EditĂ© sous format papier (deux tomes parus Ă  ce jour), ces ouvrages ont pleinement mĂ©ritĂ© leur succĂšs. MalgrĂ© tout, Marion Montaigne fait une pause dans la vulgarisation scientifique pour aborder ce nouveau livre : « Riche, pourquoi pas toi ? ». Plus que « comment devenir riche ? », c’est plutĂŽt une bande-dessinĂ©e qui explique pourquoi, justement, on n’est pas riche ! Deux auteurs sont associĂ©s Ă  Marion Montaigne : Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot. C’est sur les travaux de ces deux sociologues que se base ce nouveau livre. Le tout est Ă©ditĂ© chez Dargaud pour 133 pages.

Outre se baser sur les ouvrages du couple Pinçon / Pinçon-Charlot, Marion Montaigne les fait mĂȘme intervenir ! Ces derniers s’occupent d’une famille qui va alors gagner au Loto et devenir riche. De nombreuses questions sont alors abordĂ©es lors de l’ouvrage composĂ© de chapitres : qu’est-ce qu’un riche ? Comment devient-on bourgeois ? etc.

Marion Montaigne dĂ©laisse donc la vulgarisation scientifique pour la vulgarisation sociologique (mĂȘme si en soit, la sociologie est une science). C’est clairement ce qu’elle fait de mieux, puisqu’elle le fait Ă©galement pour la jeunesse (« La Vie des BĂȘtes »). Ceux qui connaissent l’auteure sont donc en terrain connu. L’humour sert ici Ă  apprendre. Comme toujours, Marion Montaigne aime garnir ses ouvrages de rĂ©fĂ©rences actuelles, au risque de voir ses ouvrages mal vieillir. La plupart des rĂ©fĂ©rences sont ici particuliĂšrement simples d’accĂšs, donc cela ne pose pas de problĂšme en lecture. Cependant, le sujet permet un peu moins de dĂ©lire que la science. Bref, n’espĂ©rez pas trouver exactement la mĂȘme chose que le blog que Marion Montaigne. Mais on n’y perd pas au change.

Une conclusion déprimante

MalgrĂ© le nombre important de pages et la densitĂ© des informations, le tout se dĂ©vore sans peine et les idĂ©es fortes font mouche. Outre l’aspect sociologique, l’aspect psychologique est trĂšs important ici. Et la conclusion assĂ©nĂ©e par l’auteure est avant tout dĂ©primante pour tout un chacun. Mais hĂ©las tellement vraie


Au niveau du dessin, le trait relĂąchĂ© de Marion Montaigne est toujours aussi dynamique et adaptĂ© Ă  sa narration. La couleur est faite de simples aplats numĂ©riques. C’est un peu dommage lorsque l’on connaĂźt les capacitĂ©s Ă  l’aquarelle de l’auteure. Sans doute fallait-il aller vite.

« Riche pourquoi pas toi » confirme si c’était encore nĂ©cessaire les capacitĂ©s didactiques de Marion Montaigne. Assorti d’une bonne dose militante (sous couvert d’études sociologiques quand mĂȘme !), cet ouvrage a donc un accent diffĂ©rent que les « Tu mourras moins bĂȘte ». Clairement, ici on rit, mais on n’est pas lĂ  que pour rire


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note4

Canardo, T22 : PiĂšge de miel

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Titre : Canardo, T22 : PiĂšge de miel
Scénariste : Benoßt Sokal
Dessinateurs : BenoĂźt Sokal & Pascal Regnauld
Parution : Octobre 2012


« Canardo » est une sĂ©rie que j’apprĂ©cie Ă©normĂ©ment. Suivre les enquĂȘtes de ce dĂ©tective au physique de palmipĂšde et Ă  l’allure de Colombo procure un plaisir certain. Je suis assez admiratif de la capacitĂ© de son auteur, Sokal, Ă  conserver une qualitĂ© d’écriture toujours Ă©levĂ©e plus de trente ans aprĂšs les premiĂšres aventures de son hĂ©ros. J’étais donc confiant et impatient de me plonger dans cette nouvelle Ă©popĂ©e intitulĂ©e « PiĂšge de miel ». Sa parution date du mois de septembre dernier. Le pĂšre historique de la saga s’associe une nouvelle fois Ă  Pascal Regnauld pour faire naitre cet opus.

Comme dans une grande partie de ses histoires rĂ©centes, Canardo se trouve proche du plat pays. La Belgique est le nouveau lieu star des pĂ©rĂ©grinations du cĂ©lĂšbre enquĂȘteur. Cela permet de faire apparaitre une ambiance grise et triste. On a le sentiment que le soleil n’est jamais de sortie. On ne peut pas dire que Sokal milite pour l’office de tourisme belge. Je me garderais de toute comparaison avec la rĂ©alitĂ© sur les plans gĂ©ographiques et mĂ©tĂ©orologiques mais je tiens Ă  prĂ©ciser que j’apprĂ©cie toujours d’ĂȘtre envoutĂ© par cette atmosphĂšre. Le travail sur les couleurs participe activement Ă  la force de cette derniĂšre. Le dĂ©paysement est immĂ©diat. On ressent un vrai plaisir Ă  retrouver cet univers qui nous est familier et qui ne nous laisse pas insensible.

Une partie de Cluedo des plus passionnantes.

Le hĂ©ros Ă©tant dĂ©tective, il lui faut donc trouver une affaire pour expliquer sa charismatique prĂ©sence sur les lieux. Il est ici en mission. On apprend rapidement qu’il surveille de prĂšs un ministre au physique peu avenant. Une parentĂ© avec notre cher ancien-futur prĂ©sident de la France ne serait qu’un hasard malencontreux. Canardo arrange une rencontre entre ce ponte et une femme splendide qui s’avĂšre ĂȘtre une prostituĂ©e de luxe. Tout cela sent le guet-apens. Mais l’intrigue prend vite une tournure diffĂ©rente quand tout ce beau monde est pris par une tempĂȘte de neige. La solution de repli pour passer la nuit est une curieuse rĂ©sidence isolĂ©e et habitĂ©e par une famille noble Ă  dĂ©faut d’ĂȘtre riche.

Tout est donc rĂ©uni pour nous plonger dans une partie de Cluedo des plus passionnantes. Il n’y a pas de crime mais tous les autres ingrĂ©dients sont prĂ©sents. L’unitĂ© de lieu est imposĂ©e par la mĂ©tĂ©o. De plus, ce lieu possĂšde un charme certain. C’est un chĂąteau perdu au milieu de la forĂȘt. On retrouve une galerie de personnages importante. Chacun donne lieu Ă  des interrogations. Les secrets semblent nombreux et les cadavres doivent inonder les placards. Notre ami palmipĂšde semble vouer Ă  arbitrer tout ce petit monde et les diffĂ©rentes interactions qui vont lier les uns avec les autres. Cet Ă©tat des lieux attise donc notre curiositĂ© et fait que notre immersion est immĂ©diate. DĂšs les premiĂšres pages, par les dĂ©cors, les personnages et l’atmosphĂšre, on est conquis.

Notre plaisir ne diminuera jamais au fur et Ă  mesure que les pages dĂ©filent. A aucun moment, notre attention et notre attrait ne s’attĂ©nuera. La narration ne souffre d’aucun temps mort. Bien au contraire, l’intensitĂ© ne cesse d’augmenter. Chaque personnage, par son apparition dans l’intrigue, relance la trame. Le dĂ©nouement est Ă  la hauteur du chemin qui y mĂšne. Il n’y a aucune dĂ©ception. La derniĂšre page est un modĂšle de conclusion tant sur le plan graphique que du texte. Ce nouvel opus ravira les adeptes du cĂ©lĂšbre dĂ©tective. Ils y retrouveront tous les ingrĂ©dients qu’ils ont l’habitude de savourer. Pour ceux qui n’ont encore jamais rencontrĂ© Canardo, je ne peux que vous conseiller de dĂ©couvrir « PiĂšge de miel ». Il s’agit d’un excellent cru pour un premier rendez-vous avec le cĂ©lĂšbre palmipĂšde


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note5

Canardo, T23 : Le vieux canard et la mer – BenoĂźt Sokal, Pascal Regnauld & Hugo Sokal

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Titre : Canardo, T23 : Le vieux canard et la mer
Scénariste : Hugo Sokal
Dessinateurs : BenoĂźt Sokal & Pascal Regnauld
Parution : Octobre 2013


Canardo et moi, c’est une grande et vieille histoire d’amour. J’ai d’abord dĂ©couvert les premiers ouvrages, noirs, sales et dĂ©sabusĂ©s
 Une vraie rĂ©vĂ©lation ! Le tout a dĂ©sormais bien changĂ©, sans pour autant me dĂ©ranger. LassĂ© du dessin, Sokal a acquis l’aide de Pascal Regnauld afin de se concentrer sur le scĂ©nario. Car c’est avant tout les dialogues qui intĂ©ressent l’auteur. On a donc dĂ©sormais un Canardo trĂšs ancrĂ© dans la Belgique et une bande-dessinĂ©e qui est avant tout une satire sociale Ă  l’humour bien trempĂ©. Ici, c’est Hugo Sokal qui s’occupe du scĂ©nario. Il avait dĂ©jĂ  co-scĂ©narisĂ© les prĂ©cĂ©dents opus. Les rĂŽles sont un peu flou dans « Canardo », mĂȘme s’il semble acquis que Pascal Regnauld assure la majoritĂ© du dessin, bien que son nom ne soit crĂ©ditĂ© qu’en terme de « collaboration » dans l’ouvrage
 PassĂ©s ces considĂ©rations sur qui fait quoi, voyons si ce millĂ©sime, intitulĂ© « Le vieux canard et la mer », vaut la lecture. Le tout est toujours publiĂ© chez Casterman sous la forme d’un album tout ce qu’il y a de plus classique.

Dans cet ouvrage, l’inspecteur Canardo fait la nounou
 Sa sƓur est Ă  la clinique et il doit s’occuper de son petit neveu. Ce dernier, comme tous les petits de son Ăąge, est fan de Momo le MĂ©rou (dont le parallĂšle avec NĂ©mo est Ă©vident) dont le merchandising fonctionne Ă  plein tubes. Si bien que la pĂȘche au mĂ©rou Ă  pois rouges est dĂ©clarĂ©e interdite
 HĂ©las, le Koudouland a une Ă©conomie qui dĂ©pend entiĂšrement de cette pĂȘche. Et le Belgambourg, ancienne puissance coloniale, ne l’entend pas de cette oreille
 Elle missionne Canardo sur place.

Une grande densitĂ© de rĂ©flexions sociĂ©tales et d’humour.

Cette histoire fait la part belle au neveu de Canardo qui devient un personnage central de cette bande-dessinĂ©e. A travers lui, il critique vertement les nouvelles gĂ©nĂ©rations et les conflits inhĂ©rents Ă  la culture et consommation de masse. D’autres termes se mĂȘlent comme la cĂ©lĂ©britĂ© facile et factice dans notre univers mondialisé  La densitĂ© des rĂ©flexions et l’humour avec lequel tout cela est traitĂ© est la vraie force de l’ouvrage. J’ai trouvĂ© cette partie particuliĂšrement rĂ©ussie. On sourit beaucoup, il y a des idĂ©es Ă  foison
 Car Ă  cĂŽtĂ© de cela, on suit Ă©galement la grande duchesse, un des personnages les plus rĂ©ussis de la sĂ©rie, qui vient rendre visite Ă  son « ami » prĂ©sident. Bonjour le nĂ©ocolonialisme et tout ce qui va avec
 « Canardo » sait vraiment ici capter l’air du temps et mettre le doigt sur les dĂ©rives de nos sociĂ©tĂ©s.

Au niveau du dessin, Pascal Regnault fait le travail. On est en terrain connu. Je trouve cependant la gestion des phylactĂšres un peu hasardeuse. Ce n’est pas nouveau, mais l’aspect « photoshop » des bulles en est parfois gĂȘnant. Je trouve aussi les couleurs un peu trop criardes. Clairement, le passage Ă  l’informatique de certains aspects de la sĂ©rie n’a pas Ă©tĂ© une franche rĂ©ussite. Cependant, cela ne gĂȘne pas la lecture pour autant, loin de lĂ . L’univers animalier de Canardo est un modĂšle du genre.

J’ai Ă©tĂ© trĂšs enthousiaste Ă  la lecture de ce « Canardo ». Le cru 2013 est un bon cru, avec beaucoup d’humour et d’allusion Ă  notre monde. C’est toujours Ă©tonnant de voir qu’aprĂšs tant d’annĂ©es et d’évolutions, je puisse ĂȘtre autant heureux de lire cette sĂ©rie qui, clairement, ne se repose par sur ses lauriers. Un exemple Ă  suivre !

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note4