Manuel de la jungle – Nicoby & Joub

ManuelDeLaJungle


Titre : Manuel de la jungle
Scénaristes : Nicoby & Joub
Dessinateurs : Nicoby & Joub
Parution : Mai 2015


Joub et Nicoby avait plutĂŽt bien rĂ©ussi leur biographie « Dans l’atelier de Fournier ». Ils s’y prĂ©sentaient, interviewant l’auteur sur son passĂ©. Cela est en train de devenir une de leur spĂ©cialitĂ©. Au point qu’ils partent rĂ©aliser un livre sur la jungle, en Guyane. Joub vivant Ă  Cayenne, ils ont l’idĂ©e de retrouver deux instituteurs baroudeurs et de partir quelques jours dans l’Enfer vert afin de voir combien ce terme est galvaudĂ©. Le tout est donc scĂ©narisĂ© par Nicoby et Joub. Le premier dessine, le second colorise le tout. C’est paru chez Dupuis pour 140 pages de bande-dessinĂ©es au prix de 19 euros.

ManuelDeLaJungle1Le rĂ©cit prĂ©sente donc deux citadins emportĂ©s par deux baroudeurs. Évidemment, les premiers ont trĂšs peur des bestioles : serpent, araignĂ©es, crocodiles, etc. MĂȘme si cette menace n’est pas la plus importante
 Le livre dĂ©marre donc par un vĂ©ritable manuel, les expĂ©rimentĂ©s expliquant aux nouveaux le fonctionnement de la survie dans ce milieu, entre chasse et binouze.

Un titre trompeur.

Mais l’histoire finit par tourner vers autre chose : la dĂ©nonciation des orpailleurs clandestins. Du coup, le livre est un peu scindĂ© en deux et manque de cohĂ©rence. De mĂȘme, les anecdotes nombreuses abondent dans le livre et coupent le rythme. On sent une forme de fourre-tout, intĂ©ressant certes, mais qui manque de travail de fond pour en faire un bouquin en tant que tel. Ainsi, le titre « Manuel de la jungle » est trompeur, mais c’est ce que devait ĂȘtre le livre au dĂ©part.

MalgrĂ© tout, la vie dans la jungle a un intĂ©rĂȘt rĂ©el et on apprend beaucoup de choses. La deuxiĂšme partie, plus militante, donne aussi Ă  rĂ©flĂ©chir. Le tout se dĂ©vore d’une traite, l’humour est prĂ©sent et on apprend Ă©normĂ©ment sur la jungle. Dommage que les auteurs se reprĂ©sentent toujours comme apeurĂ©s, voulant mettre fin Ă  l’expĂ©rience au plus vite. Finalement, on se dit que ce voyage de quelques jours ne les aura pas changĂ©s. Surtout, ils paraissent encore plus terrorisĂ©s Ă  la fin. Peut-ĂȘtre est-ce la rĂ©alitĂ©, mais le tout ne va pas trĂšs loin dans l’analyse. Joub et Nicoby ont choisi un rĂ©cit de voyage sans trop chercher Ă  approfondir le propos en aval.

Concernant le dessin, j’aime beaucoup le trait de Nicoby, sublimĂ© par les aquarelles de Joub. Les ambiances sont posĂ©es, aussi bien dans la jungle, sur la pirogue, la nuit
 Une vraie rĂ©ussite. En revanche, on ressent relativement peu le cĂŽtĂ© « paradis des sens » vantĂ© par la quatriĂšme de couverture. Ce n’est pas Ă©vident avec du dessin de faire ressentir cela, mais dans les faits, la jungle est jolie mais on ne la ressent pas.

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« Manuel de la jungle » est un ouvrage qui dĂ©vie de son intention premiĂšre. HĂ©sitant entre un apprentissage par des citadins de la jungle et une dĂ©nonciation des clandestins du lac, il manque un peu de cohĂ©rence. De mĂȘme, il cĂšde Ă  la mode actuel en prĂ©sentant une pagination excessive. Ainsi, la scĂšne du restaurant, au dĂ©part, n’a aucun intĂ©rĂȘt et rallonge artificiellement l’ouvrage. Mais si vous ĂȘtes un amateur des livres de Joub et Nicoby, ne boudez pas votre plaisir, on retrouve l’humour des deux compĂšres et ce trait rond qui va si bien avec.

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Note : 13/20

Barracuda, T2 : Cicatrices – Jean Dufaux & JĂ©rĂ©my

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Titre : Barracuda, T2 : Cicatrices
Scénariste : Jean Dufaux
Dessinateur : Jérémy
Parution : Octobre 2011


Le deuxiĂšme tome de « Barracuda » s’intitule « Cicatrices ». Je l’attendais avec une certaine impatience  tant le premier opus m’avait plu et intriguĂ©. Cette sĂ©rie est nĂ©e de l’association de Jean Dufaux et JĂ©rĂ©my. Le premier se charge du scĂ©nario et est la principale raison pour laquelle je me suis plongĂ© dans cette saga. En effet, depuis ma lecture de « Murena », je voue un attrait certain pour les Ɠuvres de cet auteur. Quant Ă  JĂ©rĂ©my, je l’avais dĂ©couvert en lisant le premier tome de l’histoire intitulĂ© « Esclaves ». Cet ouvrage de bonne qualitĂ© est Ă©ditĂ© chez Dargaud et son prix avoisine les quatorze euros. La couverture du bouquin est trĂšs rĂ©ussie. Elle nous prĂ©sente un pirate au visage recousu gĂ©nĂ©rant une certaine apprĂ©hension chez le lecteur. Notre curiositĂ© est fortement attisĂ©e car ce personnage n’apparaissait pas dans le livre prĂ©cĂ©dent.

Avant de plonger pleinement dans cet album, je vous cite le rĂ©sumĂ© qui prĂ©cĂšde la premier page de « Cicatrices ». « Lors de l’attaque de leur vaisseau par les pirates du capitaine Blackdog, une aristocrate espagnole, Dona Emilia Del Scuebo, sa fille Maria et leur serviteur Emilio sont faits prisonniers. Tous les trois sont emmenĂ©s sur l’üle de Puerto Blanco, dans les mers des CaraĂŻbes, pour y ĂȘtre vendus. Ferrango, le riche marchand d’esclaves, achĂšte Maria et lui fait subir les pires traitements. La mĂšre de celle-ci, secourue par des moines de l’üle, mourra peu de temps aprĂšs. Emilio qui se fait passer pour une fille, Ă©vitant ainsi de se faire tuer, est achetĂ© par l’étrange Mister Flynn. Le fils de Blackdog, Raffy, gravement blessĂ© par Maria, doit lui aussi rester sur l’üle pour y ĂȘtre soignĂ©. Parti Ă  la recherche du plus gros diamant du monde, son pĂšre a repris la mer sans lui
 faisant fi de la malĂ©diction du Kashar ! »

Comme ce rĂ©sumĂ© le montre, le premier tome Ă©tait plutĂŽt dense. Il faisait intervenir un nombre assez fourni de personnages. De plus, l’histoire est suffisamment rythmĂ©e pour que de nombreux Ă©vĂ©nements accompagnent notre lecture. La consĂ©quence Ă©tait qu’on avait une hĂąte certaine de dĂ©couvrir la suite. Les premiĂšres phrases de « Cicatrices » nous annoncent que trois annĂ©es sont passĂ©es depuis la derniĂšre page de « Esclavages ». Cet album se dĂ©roule quasiment intĂ©gralement Ă  Puerto Blanco. Il est original d’ĂȘtre dans une histoire de pirates qui ne quittent finalement pas la terre ferme.

Comme dans l’opus prĂ©cĂ©dent, la trame se construit autour des trois adolescents Emilio, Maria et Raffy. Chacun a fait son petit bout de chemin en grĂ© de son caractĂšre. Leur statut a Ă©voluĂ©. Les deux esclaves ne le sont plus. Maria est la maitresse dominatrice de Ferrango, ce qui fait d’elle une femme de pouvoir Ă  l’échelle de l’üle. Emilio, toujours grimĂ© sous les traits d’Emilia, est une espĂšce de pupille de Mister Flynn en formation. Quant Ă  Raffy, il contient dĂ©sespĂ©rĂ©ment sa colĂšre et sa haine Ă  l’idĂ©e de voir son pĂšre ĂȘtre parti sans lui dans sa quĂȘte quasiment lĂ©gendaire.

Ce saut temporel oblige finalement l’histoire Ă  nous faire une nouvelle fois les prĂ©sentations. Alors qu’on pouvait penser cette Ă©tape avait eu lieu prĂ©cĂ©demment, les auteurs s’y replongent dans cet opus. Cela donne mĂȘme l’impression que le premier tome n’était qu’un prĂ©ambule. Cela pourrait paraitre dommageable car cela repousse quelque peu la montĂ©e en puissance de l’intrigue. Ce n’est finalement pas tant le cas que cela du fait de la richesse du scĂ©nario. Je trouve que l’ensemble est dense et se construit comme une toile d’araignĂ©e. La variĂ©tĂ© des personnages est toujours aussi savamment menĂ©e et leurs interactions sont passionnantes. On est tenu en haleine de la premiĂšre Ă  la derniĂšre page. Le fait de construire l’histoire en suivant celles de trois « hĂ©ros » fait que la lecture ne souffre d’aucun temps mort.

J’ai retrouvĂ© avec plaisir les dessins de JĂ©rĂ©my. Je trouve qu’il accompagne parfaitement la narration. Ses dĂ©cors crĂ©ent parfaitement l’univers de Puerto Blanco qui est criant de rĂ©alisme. On a vraiment l’impression d’errer dans les rues de cette Ăźle rĂ©gie par les lois de la piraterie. De plus, les personnages sont plutĂŽt rĂ©ussis. Ils sont de caractĂšre trĂšs diffĂ©rent et le trait du dessinateur arrive Ă  nous offrir le grand spectre d’expressions qui en dĂ©coule. La fragilitĂ© et la douceur d’Emilio diverge fortement de la peur que gĂ©nĂšre la froideur dominatrice de Marie ou de la fureur de Raffy. Son trait nous offre une lecture agrĂ©able.

En conclusion, « Cicatrices » est un album trĂšs rĂ©ussi. La qualitĂ© habille chacune de ses pages. L’histoire est passionnante et on s’y plonge avec appĂ©tit. NĂ©anmoins, j’ai impatience de dĂ©couvrir le prochain opus pour savoir si l’intrigue va changer de braquet et ce qu’est devenu Blackdog dans sa quĂȘte du Kashar. En effet, cette derniĂšre n’est absolument pas traitĂ© dans cet ouvrage. En tout cas, « Barracuda » peut espĂ©rer devenir une Ɠuvre qui compte dans la longue histoire des pirates dans la bande dessinĂ©e. Les adeptes en seront ravis


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Note : 17/20

Barracuda, T1 : Esclaves – Jean Dufaux & JĂ©rĂ©my

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Titre : Barracuda, T1 : Esclaves
Scénariste : Jean Dufaux
Dessinateur : Jérémy
Parution : Octobre 2010


« Esclaves » est le titre du premier tome d’une des derniĂšres sĂ©ries scĂ©narisĂ©es par Jean Dufaux. Cette derniĂšre s’intitule « Barracuda ». Avant mĂȘme de lire le nom de son auteur, cet album avait attirĂ© mon regard par sa couverture. On y dĂ©couvrait un pirate particuliĂšrement rĂ©aliste qui ne peut pas laisser indiffĂ©rent celui qui le regarde dans les yeux. Cet album est Ă©ditĂ© chez Dargaud, il coĂ»te environ quatorze euros. Jean Dufaux est un auteur cĂ©lĂšbre du neuviĂšme grĂące Ă  des sĂ©ries comme « Murena », « Djinn », « Croisade », « Jessica Blandy » ou encore « Complaintes des Landes perdues ».Cela offrait le gage d’une certaine qualitĂ© pour cette nouvelle saga nĂ©e l’annĂ©e derniĂšre. Par contre, les dessins sont l’Ɠuvre d’un inconnu Ă  mes yeux nommĂ© JĂ©rĂ©my.

L’histoire dĂ©bute par l’attaque d’un navire par des pirates. Leur chef est Blackdog et sa devise est la suivante : « Pas de pitiĂ©, pour personne, jamais ». Il est secondĂ© par son fils Raffy. Les seuls Ă  ĂȘtre Ă©pargnĂ©s sont une noble espagnole et deux adolescents et un prĂȘtre. Elle prĂ©tend possĂ©der la carte pour mener au diamant du Kashar. La jeune fille est amenĂ©e Ă  ĂȘtre vendue comme esclave. Le jeune garçon dĂ©guisĂ© en fille suivra le mĂȘme trajet. C’est ainsi qu’ils accostent Ă  Puerto Blanco oĂč leurs destins vont se sĂ©parer et se dĂ©cider au cours d’enchĂšres sur un marché 

Une aventure de pirates

Le principal attrait de cette sĂ©rie est d’ĂȘtre une aventure de pirate. La couverture laisse prĂ©sager que le personnage principal Ă  du charisme. On n’est pas déçu sur ce plan-lĂ . On prend plaisir Ă  naviguer sur son navire et on est curieux d’accoster sur ses Ăźles rĂ©gulĂ©es par les lois de la piraterie. L’immersion dans cet univers est incontestablement une grande rĂ©ussite. La grande galerie de personnages est crĂ©dible. De plus, les dĂ©cors apparaissent rĂ©alistes. On n’a aucun mal Ă  se croire au milieu de ses flibustiers sur une terre aux lois peu orthodoxes et aux codes sociaux plutĂŽt inquiĂ©tants. 

Au-delĂ  de ce dĂ©paysement, « Esclaves » nous offre une intrigue intĂ©ressante. La trame se construit autour du trio d’adolescents que sont Raffy, Emilia et Maria. Le premier est le fils de Blackdog. Il semble dĂ©pourvu de sentiments sorti de la haine et de la colĂšre. Le second, Emilia, est en fait Emilio. DĂ©guisĂ© en femme pour sa survie, il mĂšne donc une double vie qui ne le laisse pas indiffĂ©rent. Enfin, Maria, fille de noble est la plus charismatique Ă  mes yeux. Elle a le regard dur et malgrĂ© son jeune Ăąge et sa condition gĂ©nĂšre le malaise auprĂšs de ceux qui s’approchent d’elle. La richesse de ses trois personnages apparait remarquable. Voir leurs destins s’entremĂȘler rend la lecture passionnante. On suit trois personnages aux personnalitĂ©s complexes Ă©voluer dans un milieu dur et compliquĂ©. Tous les ingrĂ©dients sont prĂ©sents pour nous ravir.

Le dĂ©cor est bon, les protagonistes sont envoĂ»tants, il ne restait plus qu’à se voir offrir une trame rĂ©ussie. C’est le cas. Le fait que l’histoire commence par un abordage nous met tout de suite dans le bain. Le rythme ne diminue jamais. On se trouve au beau milieu d’un marchĂ© aux esclaves. Puis la premiĂšre nuit passĂ©e sur l’üle est d’une grande intensitĂ© dramatique. La lecture est assez intense. Au cours des pages qui dĂ©filent, on voit apparaĂźtre des informations mais Ă©galement les jalons de la trame qui construira le tome suivant. Cela fait qu’une fois l’ouvrage terminĂ©, on a une vraie envie de se plonger dans le second opus.

Comme je l’ai prĂ©cisĂ© prĂ©cĂ©demment, la couverture m’a Ă©bloui. J’avais donc une impatience certaine de partir Ă  la rencontre de cet univers nĂ© de la plume de JĂ©rĂ©my. Les premiĂšres pages m’ont apparu froides par rapport Ă  l’impression que m’avait laissĂ©e le visage de Blackdog lors de notre premiĂšre « rencontre ». Mais ce sentiment s’est attĂ©nuĂ© au fur et Ă  mesure des pages et au fur et Ă  mesure de mes relectures de l’album. Le dessinateur possĂšde un vrai talent pour traduire la duretĂ©. Que ce soit par les visages, les couleurs ou les attitudes, on comprend Ă  tout moment qu’on ne se trouve pas au pays des Bisounours. Je trouve que JĂ©rĂ©my fait en sorte qu’on n’oublie jamais l’endroit oĂč on se trouve et la communautĂ© qui y habite.

Au final, « Esclaves » est un ouvrage passionnant qui nous offre une histoire assez envoĂ»tante. La lecture est trĂšs prenante et on prend Ă©normĂ©ment de plaisir Ă  dĂ©couvrir les Ă©vĂ©nements se dĂ©roulant Ă  Puerto Blanco. Cette sĂ©rie a un vrai potentiel comparable Ă  celui de « Murena » dans un univers diffĂ©rent. Je suis donc curieux de me plonger dans le deuxiĂšme album paru rĂ©cemment intitulĂ© « Cicatrices ». Mais cela est une autre histoire


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Note : 17/20

Les Sentinelles, T1 : Juillet-AoĂ»t 1914, Les Moissons de l’Acier – Xavier Dorison & Enrique Breccia

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Titre : Les Sentinelles, T1 : Juillet-AoĂ»t 1914, Les Moissons de l’Acier
Scénariste : Xavier Dorison
Dessinateur : Enrique Breccia
Parution : Mai 2009


C’est en regardant la trĂšs sympathique Ă©mission « Un monde de bulles » que j’ai dĂ©couvert avec plaisir Xavier Dorison Ă©voquer la sĂ©rie « Les sentinelles ». Etant un grand fan de ce scĂ©nariste depuis que j’ai dĂ©couvert « Le troisiĂšme testament » ou « Sanctuaires », j’ai Ă©coutĂ© avec curiositĂ© ce dernier nous conter la construction de cette saga dont je n’avais jamais entendu parler. Une fois son interview terminĂ©e, je me suis engagĂ© Ă  m’immerger dans cette sĂ©rie au plus vite. Ma dĂ©couverte a dĂ©butĂ© hier soir avec la lecture du premier chapitre intitulĂ© « Juillet-AoĂ»t 1914 – Les moissons d’acier ». EditĂ© chez Delcourt, cet album de bonne qualitĂ© est composĂ© d’une soixantaine de pages. Il est vendu Ă  un prix tout juste infĂ©rieur Ă  quinze euros. La couverture nous prĂ©sente un soldat dĂ©ployant un drapeau français. Son visage est couvert par un casque. Je la trouve trĂšs rĂ©ussie. Elle est l’Ɠuvre de Enrique Breccia, que je dĂ©couvre Ă  l’occasion de cette lecture.

MalgrĂ© le titre, l’histoire dĂ©bute en 1911 au Maroc sur un champ de bataille. On dĂ©couvre un soldat, le visage masquĂ© qui avance d’un pas rĂ©gulier sans sembler tenir compte des balles qui fusent et des cadavres qui tombent autour de lui. Mais tout Ă  coup, il s’effondre. On le croit mort, ce n’est pas le cas. Il explique Ă  un de ses acolytes qu’il n’a plus de batterie, qu’il ne peut donc plus Ă©chapper Ă  son destin. Alors que les ennemis s’apprĂȘtent Ă  arriver sur les lieux, il demande Ă  ĂȘtre exĂ©cutĂ© par son ami qui s’exĂ©cute. On croit comprendre que ce soldat est le fruit d’une expĂ©rimentation scientifique mis au point par un colonel de l’ArmĂ©e française. Ce projet connaitra un second souffle trois ans plus tard quand le fondateur des Sentinelles dĂ©couvre la dĂ©couverte rĂ©volutionnaire d’un petit lieutenant de rĂ©serve


Des super hĂ©ros “made in France”.

« Les Sentinelles » est une sĂ©rie intĂ©ressante car elle nous offre un des premiers super hĂ©ros « made in France ». Suite Ă  des expĂ©riences menĂ©es dans des laboratoires secrets, un colonel et un savant Ă  sa botte ont pour objectif de crĂ©er une espĂšce de super soldat. Le fait de l’intĂ©grer dans la grande Histoire Ă  travers la pĂ©riode de la premiĂšre guerre mondiale dĂ©veloppe un attrait certain. L’histoire s’adresse Ă  un public sensible Ă  ce genre de grande trame historique et dense dans laquelle s’insĂšre parfaitement une dimension fictionnelle travaillĂ©e. Il est Ă©vident que l’humour et la lĂ©gĂšretĂ© ne sont pas de sortie. On est en temps de guerre et le dessinateur fait en sorte qu’on ne l’oublie jamais.

Le scĂ©nario est de grande qualitĂ©. Les premiĂšres pages qui jouent le rĂŽle de prologue sont intenses. A travers les dessins et l’atmosphĂšre qui transpire de la lecture, on est tout de suite dans le vif du sujet. Notre intĂ©rĂȘt est happĂ©. Notre curiositĂ© ne cessera jamais d’ĂȘtre sĂ©duite tout au long du dĂ©filement des pages. La grande toile se met en place. Les personnages apparaissent, les enjeux se dĂ©couvrent. La densitĂ© est grande. La narration ne souffre d’aucun temps mort bien au contraire. On est immergĂ© dans une histoire passionnante. La finalitĂ© de cet opus est de nous prĂ©senter Taillefer, le nouveau super soldat. Le rythme de la dĂ©couverte est bien dosĂ© et la derniĂšre page nous laisse sur un sentiment de frustration de ne pas pouvoir en profiter davantage.

Comme je l’ai sous-entendu prĂ©cĂ©demment, les dessins sont remarquables. DĂšs la premiĂšre case, on est bouleversĂ©. Il se dĂ©gage rĂ©ellement quelque chose des pages. La crasse et la violence qui s’en dĂ©gage sont intenses et ne laissent pas indemnes. La dimension « boucherie » est vraiment trĂšs rĂ©ussie. Rien n’apparaĂźt surrĂ©aliste ou excessif. Bien au contraire, c’est une gifle de rĂ©alisme qu’on prend de plein fouet. Je trouve Ă©galement les personnages trĂšs rĂ©ussis. On n’a aucun mal Ă  se les approprier. Les dessins leur donnent une vraie Ă©paisseur. Je pense que je vais me pencher de plus prĂšs sur les parutions nĂ©es de la plume d’Enrique Breccia.

En conclusion, j’ai trouvĂ© ce premier opus remarquable. Il s’agit Ă  mes yeux d’un petit chef d’Ɠuvre. Le scĂ©nario, les dessins, le thĂšme, les personnages
 Tout est bien construit, intense et travaillĂ©. A l’heure actuelle, trois tomes sont parus. Je ne pense pas que je vais tarder Ă  dĂ©vorer les deux qu’il me reste Ă  lire. Pour ceux qui dĂ©couvrent l’univers de Xavier Dorison Ă  travers cet album, je ne peux que conseiller de dĂ©couvrir « Le troisiĂšme testament » qui vous immergera dans le Moyen-Ăąge pour une tĂ©tralogie qui est un chef d’Ɠuvre du neuviĂšme art


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Note : 18/20

Les sentinelles, T4 : Avril 1915 : Les Dardanelles – Xavier Dorison & Enrique Breccia

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Titre : Les sentinelles, T4 : Avril 1915 : Les Dardanelles
Scénariste : Xavier Dorison
Dessinateur : Enrique Breccia
Parution : Octobre 2014


« Les Sentinelles » marque l’entrĂ©e des superhĂ©ros Ă  la française dans la Grande Guerre. Xavier Dorison confirme l’ampleur de son imagination. D’une part, il n’hĂ©site pas Ă  s’approprier les codes de ses surhommes d’habitude associĂ©s Ă  la culture amĂ©ricaine. D’autre part, ils les insĂšrent au beau milieu de la PremiĂšre Guerre Mondiale, concept jusqu’alors improbable. Les trois premiers Ă©pisodes de cette sĂ©rie ont transformĂ© l’essai et fait naĂźtre une saga de grande qualitĂ©. Chaque opus est un petit bijou et se lit avec appĂ©tit. Chacun dĂ©livre une grande variĂ©tĂ© de saveurs pour la plus grande joie de ses lecteurs.

LesSentinelles4bCela faisait trois ans et demi que la parution d’une nouvelle mission des Sentinelles Ă©taient attendue. L’espoir Ă©tait assouvi en octobre dernier avec la sortie du quatriĂšme chapitre intitulĂ© « Avril 1915 Les Dardanelles ». Wikipedia m’a appris que les Dardanelles fut un « affrontement [
] qui opposa l’Empire Ottoman aux troupes britanniques et françaises dans la pĂ©ninsule de Gallipoli dans l’actuelle Turquie du 25 avril 1915 au 9 janvier 1916 ». Cela confirme la volontĂ© de Dorison d’intĂ©grer ses hĂ©ros dans la rĂ©alitĂ© du conflit.

Intégrer les héros dans la réalité du conflit.

« Cette bataille-lĂ  devait ĂȘtre gagnĂ©e d’avance
 Le dĂ©barquement du Commonwealth sur les plages truques des Dardanelles devait assurer une victoire aussi rapide qu’indiscutable. Face aux Ottomans, la France n’avait-elle pas dĂ©ployĂ© ses plus glorieux soldats ? Les Sentinelles ! C’était sans compter l’aide des allemands Ă  leur alliĂ© turc, sans compter la chaleur, les fiĂšvres, les maladies et les falaises imprenables
 Sans compter la nouvelle arme du gĂ©nie germanique : Cimeterre. Cette fois-ci, les plus grands hĂ©ros français vont devoir renoncer Ă  la victoire pour apprendre la dure leçon de la dĂ©faite
 » VoilĂ  le synopsis prĂ©sentĂ© par la quatriĂšme de couverture de l’album. Je dois vous dire que j’y ai perçu un menu appĂ©tissant.

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La premiĂšre force du bouquin est la profondeur de ses personnages. Que ce soit Taillefer, le Merle ou Djibouti, chacune des trois Sentinelles possĂšde une personnalitĂ© passionnante. Le rĂ©alisme de chacun d’entre eux est remarquable. Ils sont attachants. Leurs faiblesses sont centrales malgrĂ© leurs superpouvoirs. Leur sens des valeurs ne laisse pas indiffĂ©rent. Une bonne histoire est avant un bon hĂ©ros. « Les Sentinelles » ont la chance d’en avoir trois.

Les Dardanelles imposent une unitĂ© de lieu. Nous ne quittons pas cette plage turque qui ressemble au fur et Ă  mesure des pages Ă  un cimetiĂšre en plein dĂ©veloppement. Cette sensation d’attente, cette disparition de tout espoir, ce fatalisme grandissant
 Tout est sublimĂ© par la narration de Dorison. Il arrive Ă  faire Ă©voluer ses personnages au grĂ© des Ă©vĂ©nements sans marquer de rupture trop forte. La rĂ©alitĂ© de la guerre transpire des planches. Elle ne nous laisse pas indemne. Le travail graphique d’Enrique Breccia sublime le dĂ©sespoir de cette bataille qui ne peut pas ĂȘtre gagnĂ©e mais que les autoritĂ©s refusent de perdre


L’intrigue en elle-mĂȘme est habilement construite. Les enjeux sont rapidement posĂ©s. Tout ce petit monde est rĂ©uni pour gagner plus qu’une bataille : une guerre. Dorison ne fait pas uniquement exister ses Sentinelles. Il laisse une place intĂ©ressante aux soldats britanniques ou australiens. L’immersion dans l’époque apparaĂźt crĂ©dible. Nous sommes touchĂ©s par bon nombre de protagonistes. L’auteur ne choisit pas son camp. Il nous fait dĂ©couvrir des horreurs. Certains passages sont quasiment muets pour laisse totalement la place au trait de Breccia. Il peut ainsi faire passer des sentiments forts par ses seules illustrations. Cet album marque un Ă©quilibre entre le texte et le dessin d’une rare finesse.

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Vous l’aurez compris, cet ouvrage m’a conquis. Je le trouve d’une grande qualitĂ©. Avant de m’y plonger, j’ai relu ses trois prĂ©dĂ©cesseurs. J’ai Ă©tĂ© impressionnĂ© par la force et l’intensitĂ© qui s’en dĂ©gage. « Avril 1915 Les Dardanelles » ne dĂ©roge pas Ă  cette rĂšgle. Il confirme que « Les Sentinelles » est une sĂ©rie unique dans son genre qui arrive Ă  sublimer un concept de dĂ©part original et novateur. Il ne reste plus maintenant qu’à attendre la suite. Mais cela est une autre histoire


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Note : 18/20

Les Aventures de Philip et Francis, T1 : Menace sur l’Empire – Nicolas Barral & Pierre Veys

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Titre : Les Aventures de Philip et Francis, T1 : Menace sur l’Empire
Scénariste : Pierre Veys
Dessinateur : Nicolas Barral
Parution : Mars 2005


Si je vous parle de Philip et Francis, les plus bĂ©dĂ©philes d’entre vous penserons tout de suite Ă  Blake et Mortimer, les cĂ©lĂšbres hĂ©ros nĂ©s de l’imagination d’Edgard P. Jacobs. Mon avis d’aujourd’hui va parler de leurs « cousins » nĂ©s sous les plumes de Pierre Veys et Nicolas Barral. Ces derniers ont Ă©crit chez Dargaud un tome intitulĂ© « Menaces sur l’Empire » dans la sĂ©rie nommĂ©e « Les aventures de Philippe et Francis ». D’un format classique et vendu au prix de presque quatorze euros, cette saga se prĂ©sente comme trĂšs librement inspirĂ©e des personnages crĂ©Ă©s par Jacobs. « Menaces sur l’empire » est le premier tome de cette sĂ©rie parodique qui en comporte pour l’instant deux.

La quatriĂšme de couverture de l’ouvrage nous offre un rĂ©sumĂ© de l’intrigue particuliĂšrement clair : « Depuis quelques semaines, d’étranges phĂ©nomĂšnes secouent le cƓur de l’empire britannique. Londres vit des heures tragiques : les femmes se rebellent et entreprennent des actions spectaculaires et dĂ©lirantes pour se libĂ©rer du joug de la domination masculine
 On s’aperçoit ainsi que la stabilitĂ© de la sociĂ©tĂ© anglaise dĂ©pend entiĂšrement de la discipline stricte qu’elles respectaient jusqu’alors. Ce changement de comportement annonce-t-il une catastrophe sans prĂ©cĂ©dent ? D’oĂč vient cette terrible menace ? Qui a intĂ©rĂȘt Ă  saper les fondements de cette brillante civilisation ? » 

Il est Ă©vident que cet album prend toute son ampleur quand il est lu par des adeptes de la sĂ©rie dont ils s’inspirent. Une mĂ©connaissance des deux hĂ©ros et de l’esprit de leurs histoires empĂȘche de profiter pleinement de l’humour qui accompagne notre lecture. Du fait de son aspect parodique, il est Ă©vident que le ton de la narration est lĂ©ger. NĂ©anmoins, cela n’empĂȘche pas l’histoire d’ĂȘtre composĂ©e d’une trame structurĂ©e. Cet album se veut indĂ©pendant et dĂ©crit du dĂ©but Ă  la fin une aventure de nos deux hĂ©ros.

Une trame construite fidÚlement sur les jalons posés par Jacob.

La lecture des premiĂšres pages nous fait dĂ©couvrir des personnages familiers et pourtant plein de surprises. Ce cher Mortimer est un scientifique qui ne pense qu’à manger et qui semble avoir bien du mal Ă  se concentrer sur les problĂšmes du royaume. De son cĂŽtĂ©, Blake est loin d’ĂȘtre le membre des services secrets que nous avons l’habitude de croiser. Il est ici un homme qui habite encore chez sa mĂšre et qui ne semble pas possĂ©der un charisme remarquable. NĂ©anmoins, malgrĂ© ces diffĂ©rences, les auteurs respectent les codes de la sĂ©rie. La trame est construite plutĂŽt fidĂšlement aux jalons posĂ©s par Jacob. Les diffĂ©rents personnages y possĂšdent leur place habituelle. La surprise rĂ©side davantage Ă  la maniĂšre avec laquelle ils occupent leur place. Les auteurs arrivent Ă  manipuler avec une certaine rĂ©ussite les clichĂ©s de la sĂ©rie. Je n’ai eu aucun mal Ă  me plonger dans cette aventure et ai pris Ă©normĂ©ment de plaisir Ă  voir tous ces personnages de bandes dessinĂ©es raillĂ©s et tournĂ©s en bourrique.

CĂŽtĂ© dessins, le trait est bien moins classique que celui si cĂ©lĂšbre de Jacob. Les traits des personnages sont plus arrondis. Leurs visages sont plus expressifs. Sur cet aspect-lĂ , la sĂ©rie est moins froide. NĂ©anmoins les couleurs, les dĂ©cors sont globalement fidĂšles Ă  la sĂ©rie de dĂ©part. En feuilletant rapidement l’ouvrage, on pourrait s’y mĂ©prendre. Cela rend d’ailleurs le pastiche d’autant plus rĂ©ussi. En effet, en respectant beaucoup de codes, en laissant bon nombres de repĂšres aux lecteurs, les auteurs lui permettent de rire d’autant plus facilement de cet ouvrage.

En conclusion, j’ai passĂ© un moment trĂšs agrĂ©able en lisant cet opus. Je ne regrette vraiment pas de me l’ĂȘtre fait offrir. Il est Ă©vident que les personnes non familiĂšres de l’univers de Blake et Mortimer n’ont que peu d’intĂ©rĂȘt Ă  s’y plonger. Pour les autres, je vous garantis une lecture trĂšs sympathique. Je trouve que cet album rĂ©pond parfaitement aux attentes qu’on place en lui. De plus, il ne baisse pas en qualitĂ© tout au long de l’avancĂ©e de l’histoire. C’est Ă  signaler parce que trop souvent dans les ouvrages caricaturaux, le soufflet humoristique disparaĂźt trop tĂŽt. Ce n’est pas ici le cas. Il ne me reste donc plus qu’à vous souhaiter une agrĂ©able rencontre avec ces « cousins » de nos cĂ©lĂšbres serviteurs de la couronne britannique


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Note : 13/20

Les aventures de Philip et Francis, T3 : S.O.S. mĂ©tĂ©o – Pierre Veys & Nicolas Barral

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Titre : Les aventures de Philip et Francis, T3 : S.O.S. météo
Scénariste : Pierre Veys
Dessinateur : Nicolas Barral
Parution : Septembre 2014


Un des indicateurs d’une sĂ©rie appartenant Ă  l’Histoire du neuviĂšme art est le fait que ses codes ont transpirĂ© de ses albums au point de servir de support Ă  la dĂ©rision et au pastiche. « Blake & Mortimer » possĂšde cette caractĂ©ristique depuis la naissance il y a quelques annĂ©es de sa jumelle caricaturale intitulĂ©e « Les aventures de Philip et Francis ». Elle est le fruit de la collaboration du scĂ©nariste Pierre Veys et du dessinateur Nicolas Barral. Ma critique d’aujourd’hui porte sur son troisiĂšme Ă©pisode « S.O.S. MĂ©tĂ©o » paru en septembre dernier chez Dargaud.

La quatriĂšme de couverture nous offre la mise en bouche suivante : « Tout le monde la sait : le professeur Mortimer est gentil. TrĂšs gentil. Un peu trop, mĂȘme. Ce qui fait que beaucoup de ses proches en abusent largement. Le capitaine Blake s’impose chez Mortimer avec un sans-gĂȘne assumĂ©. Nasir, le fidĂšle serviteur, tient tĂȘte Ă  son maĂźtre, et ose mĂȘme Ă©voquer le hideux concept d’augmentation de ses gages. Les commerçants indĂ©licats le traitent avec mĂ©pris. Les voyous du quartier le martyrisent et l’humilient depuis des annĂ©es
 Mais cela a assez durĂ© ! GrĂące Ă  une terrible invention scientifique, notre charmant professeur va se transformer en une crĂ©ature monstrueuse ! Prisonnier de ses instincts criminels incontrĂŽlables, Mortimer va-t-il l’ennemi public numĂ©ro un ? »

Des références qui raviront les habitués de leurs aventures.

PhilipEtFrancis3b« S.O.S. MĂ©tĂ©o » est clairement un hommage Ă  « S.O.S. MĂ©tĂ©ore » un des plus opus les rĂ©ussis de la saga. Il est d’ailleurs clairement Ă©voquĂ© au cours de l’histoire. La cĂ©lĂšbre machine crĂ©Ă©e par le scientifique Miloch est prĂ©sente. Les rĂ©fĂ©rences Ă  l’univers des cĂ©lĂšbres hĂ©ros britanniques sont frĂ©quentes et raviront les habituĂ©s de leurs aventures. Une connaissance de la sĂ©rie de Jacobs me paraĂźt indispensable pour saisir l’ensemble du spectre humoristique de l’album. Il s’agit d’un pastiche de qualitĂ© dans le sens oĂč les codes originaux sont dĂ©tournĂ©s Ă  de nombreux moments et de nombreuses maniĂšres. L’idĂ©e de dĂ©part est originale et elle s’avĂšre bien exploitĂ©e.

PhilipEtFrancis3cNĂ©anmoins, l’ouvrage peut se lire comme une histoire indĂ©pendante dĂ©nuĂ©e de toute filiation prestigieuse. L’intrigue peut se dĂ©couvrir comme une parodie d’enquĂȘte policiĂšre. Tous les aspects du genre sont tournĂ©s en dĂ©rision. Le travail d’écriture de Pierre Veys est suffisamment important pour offrir une quantitĂ© de gags apprĂ©ciable. L’avancĂ©e est rythmĂ©e et la trame ne possĂšde aucun temps mort. Le sourire guide la lecture du dĂ©but Ă  la fin. C’est un album qui se lit avec bonne humeur.

« S.O.S. MĂ©tĂ©o » est un vrai moment de divertissement. Le scĂ©nario n’est pas lutionnaire, les personnages ne possĂšdent pas une profondeur abyssale, l’atmosphĂšre n’est pas envoutante. MalgrĂ© cela le dĂ©roulement des pages se fait avec plaisir et la curiositĂ© est constante au fur et Ă  mesure que les Ă©vĂ©nements se rĂ©vĂšlent. Sur le plan graphique, le trait de Nicolas Barral accompagne parfaitement la narration. Son dessin participe Ă  l’ambiance dĂ©lurĂ©e et sympathique qui transpire de chaque planche. Son style ne bouleverse pas le neuviĂšme art mais valorise correctement le travail scĂ©naristique.

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Pour conclure, « S.O.S. MĂ©tĂ©o » est un album de qualitĂ©. En dĂ©couvrant le menu, les papilles sont Ă©veillĂ©es. AprĂšs dĂ©gustation, je me suis dit que le plat Ă©tait Ă  la hauteur des attentes. Je pense que tout adepte de « Blake & Mortimer » gagnerait Ă  se plonger dans cet hommage haut en couleur. Ce nouvel album confirme la qualitĂ© du travail collaboratif de Pierre Veys et Nicolas Barral et j’attends avec impatience la suite des pĂ©rĂ©grinations de ces deux hĂ©ros dĂ©lurĂ©s


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Note : 13/20

Le grand rouge – Wouzit

LeGrandRouge


Titre : Le grand rouge
Scénariste : Wouzit
Dessinateur : Wouzit
Parution : Mars 2011


CrĂ©Ă© en 2009, le site web Manolosanctis avait donnĂ© plein d’espoirs aux dessinateurs de BD amateurs, heureux de trouver une plateforme de publication en ligne d’une rare efficacitĂ©. Mais surtout, Manolosanctis s’est muĂ© l’espace de quelques temps en Ă©diteur, ce qui causa sa perte. L’éditeur ferma, le site web avec. Si tous les livres de l’éditeur ne sont pas mĂ©morables, force est de constater que quelques auteurs atypiques avaient Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ©s par l’éphĂ©mĂšre maison d’édition, que ce soit par des albums personnels ou collectifs. Parmi eux, Wouzit, qui publia « Le grand mort » chez Manolosanctis, un one-shot de 120 pages.

LeGrandRouge1Tout commence alors qu’Ivan Ă©choue sur une Ăźle qui se rĂ©vĂšle des plus Ă©tranges. Il va alors tenter de survivre dans cet environnement peu hospitalier, tel un Robinson. Le livre nous dĂ©voile alors comme ce petit malfrat s’est retrouvĂ© dans cette situation, capturĂ© et condamnĂ© pour avec son compagnon William.

Construite sous forme de chapitres comme autant de flashbacks, la narration saute donc d’un univers Ă  l’autre. D’un cĂŽtĂ©, Ivan est perdu seul sur une Ăźle et on essaie de comprendre ce qu’est cette Ăźle. De l’autre, Ivan fuit et on se demande s’il va s’en sortir, prĂ©sageant que cette histoire passĂ©e expliquera l’histoire future. Cette narration montre sa pertinence en mĂ©nageant le suspense. Car Wouzit prend son temps et les rĂ©vĂ©lations qu’attend le lecteur seront bien tardives.

Une narration et un rythme parfaitement maßtrisés.

Sans ĂȘtre forcĂ©ment des plus impressionnants, le scĂ©nario est donc parfaitement servi par un procĂ©dĂ© de flashbacks bien menĂ©. Le rythme fait ici toute la diffĂ©rence. Surtout que les parties sur l’üle sont souvent muettes, contrairement aux parties en ville. C’est d’ailleurs une des forces de l’ouvrage : Wouzit parvient Ă  raconter les choses en muet. Il n’use quasiment jamais des onomatopĂ©es, si bien que les scĂšnes d’action sont trĂšs silencieuses !

Au niveau du dessin, le style de Wouzit est particulier et assez simple. On oscille entre un dessin qui se veut moderne et une ligne claire plus classique. MalgrĂ© tout, les cases sont fouillĂ©es et sa construction de l’üle force le respect par sa crĂ©ativitĂ©. Cette Ăźle nous paraĂźt terriblement Ă©trange alors qu’elle n’est pas finalement si Ă©loignĂ©e de nos codes. L’utilisation des couleurs en aplats simples renforce l’aspect ligne claire, mĂȘme si le travail est vraiment abouti. La colorisation, simple au premier abord, est trĂšs rĂ©ussie, donnant des ambiances avec beaucoup de subtilitĂ©, que ce soit pour les scĂšnes sur l’üle ou les scĂšnes de nuit.

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C’est un livre des plus sympathiques qui nous est donc proposĂ©. Sans ĂȘtre transcendant au niveau du dessin ou du scĂ©nario, toute la rĂ©alisation permet Ă  l’ouvrage de passer un cap. La narration et le rythme sont bien menĂ©s, le style de dessin et les choix de couleurs sont pertinents. Du beau travail.

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Note : 14/20

Le loup des mers – Riff Reb’s

LeLoupDesMers


Titre : Le loup des mers
ScĂ©nariste : Riff Reb’s
Dessinateur : Riff Reb’s
Parution : Novembre 2012


Les rĂ©cits de piraterie ont toujours exercĂ© une forme de fascination auprĂšs du lectorat. La rudesse des hommes, la nature impitoyable et la mer, Ă  perte de vue. Ainsi, alors que le sujet avait poussĂ© Jack London Ă  Ă©crire un roman sur le sujet, Riff Reb’s s’empare de l’histoire de ce dernier pour la mettre en images. N’ayant pas lu le roman dont il est question, je me garderai de toute comparaison. Le livre, prĂ©sentĂ© sous un format comics, pĂšse pas moins de 130 pages et est publiĂ©e dans la collection Noctambule aux Ă©ditions Soleil.

L’histoire commence alors que Humphrey Van Weyden prend le bateau pour rejoindre l’un des ses amis. L’homme est un gentleman, critique littĂ©raire de mĂ©tier. Seulement, le voyage tourne court suite Ă  une mauvais grain entraĂźnant un naufrage dramatique pour l’homme. Ce dernier est recueilli alors par Loup Larsen, un pirate qui enrĂŽle l’homme de force comme mousse.

Un lien fait de haine et de fascination.

On suit alors la survie d’Humphrey Ă  bord du navire. LĂ -dessus, rien de nouveau sous les tropiques. D’abord trop fragile, il va finir par s’aguerrir, se faire des alliĂ©s et monter dans la hiĂ©rarchie. Son cĂŽtĂ© intellectuel plaĂźt Ă  Loup Larsen qui, sous ses dehors cruels, possĂšde une culture des plus impressionnantes. Un lien se crĂ©e entre les deux hommes, fait de haine et de fascination. Clairement, c’est lĂ -dessus que le livre propose toute sa force. Le sujet est traitĂ© avec subtilitĂ©. Les changements d’attitude des personnages entre eux sont finement amenĂ©s, jusqu’au bout de l’aventure.

LeLoupDesMers2Cependant, outre les relations humaines, on est pris d’empathie pour Humphrey et le vĂ©ritable suspense de l’ouvrage est ici : pourra-t-il se soustraire de Loup Larsen ? Une quĂȘte qui paraĂźt impossible tant le capitaine possĂšde un cĂŽtĂ© surnaturel exacerbĂ© par son charisme. Si bien que le lecteur tombe aussi sous le charme de ce personnage fort et atypique.

La construction de l’ouvrage est basĂ© essentiellement sur une narration omniprĂ©sente qui cite, je le suppose, des passages du livre. On lit donc l’histoire racontĂ©e par Humphrey. Le livre est constituĂ© de dix-sept chapitres agencĂ©s chronologiquement.

Graphiquement, Riff Reb’s frappe trĂšs fort. MĂ©lange de diffĂ©rentes techniques, son graphisme est simplement splendide. Outre ses personnages, aux attitudes fortes, c’est dans la reprĂ©sentation de la mer qu’il explose littĂ©ralement. Plus les scĂšnes semblent difficiles Ă  dessiner, plus elles sont rĂ©ussies. Les tempĂȘtes sont ainsi magistralement rendues. Le tout est colorisĂ© de façon monochrome, chaque chapitre possĂ©dant sa propre couleur. Un choix payant tant l’ouvrage est fort sur ce point-lĂ . Outre la duretĂ© du propos, Riff Reb’s accentue le tout avec un dessin Ă  la fois personnel et puissant. Du grand art.

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Si le sujet du « Loup des mers » n’est pas vraiment original, il faut avouer qu’il est traitĂ© ici avec beaucoup d’intensitĂ©. DotĂ© d’une narration fluide et d’un graphisme splendide, on dĂ©vore ce livre de la premiĂšre Ă  la derniĂšre page, se prenant rĂ©guliĂšrement des claques devant le talent de l’auteur. A lire absolument !

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Note : 18/20

Templiers, T1 : La chute – Jordan Mechner & LuUyen Pham

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Titre : Templiers, T1 : La chute
Scénariste : Jordan Mechner
Dessinateur : LuUyen Pham
Parution : Janvier 2014


Les Templiers m’ont toujours intriguĂ©. Toute histoire les mettant en jeu m’attire. Ils cumulent un bon nombre d’arguments Ă  mes yeux : le Moyen-Âge est une Ă©poque qui me plaĂźt, la dimension religieuse est toujours intĂ©ressante, le mystĂšre qui les entoure attise la curiosité  Enfin, il est aisĂ© de greffer une petite dose d’ésotĂ©risme pour finaliser la recette.

C’est pourquoi, au hasard de mes pĂ©rĂ©grinations dans les rayons de librairie, j’ai Ă©tĂ© appĂątĂ© par un ouvrage Ă  la couverture sobre. D’un format davantage proche de celui d’un roman que d’un album de bandes dessinĂ©es, il s’intitule « Templiers ». Ce seul titre a Ă©veillĂ© mon attrait. En le feuilletant, je suis tombĂ© sous le charme des dessins. En quelques pages, j’avais commencĂ© Ă  voyager dans le temps et avait plaisir Ă  me retrouver dans les pas de ces cĂ©lĂšbres chevaliers.

templiers1aLa quatriĂšme de couverture prĂ©sente les mots suivants : « Les Chevaliers du Temple. VĂ©nĂ©rĂ©s pour leur noblesse, leur fĂ©rocitĂ© dans la bataille, et leur dĂ©votion religieuse, les Templiers Ă©taient des chevaliers de Dieu, exempts de tout pĂ©chĂ© et Ă  l’ñme pure. Du moins la plupart d’entre eux. Martin n’est pas exactement la plus opiniĂątre ou le plus pieux des chevaliers, mais il parvient Ă  s’échapper quand le roi de France dĂ©cide d’abattre l’Ordre des Templiers afin de mettre la main sur leur lĂ©gendaire trĂ©sor. AprĂšs un temps de souffrance et d’errance, il retrouve d’anciens compagnons et met au point un plan des plus audacieux
 voler le plus grand trĂ©sor du monde au nez du roi. »

Le bouquin est le premier tome de l’histoire. Il s’intitule « La chute ». EditĂ© chez Akileos, il se compose de deux cents quarante pages. J’ai souvent du mal avec une telle structure. Il est en effet rare qu’un album arrive Ă  conserver une qualitĂ© constante sur une telle longueur. En tout cas, sorti de « Blast », je ne vois pas parmi mes lectures rĂ©centes un autre exemple d’opus aussi long Ă  m’avoir conquis. Ce livre se dĂ©coupe en chapitres qui offrent des repĂšres intĂ©ressants dans la lecture.

L’avantage d’allonger l’intrigue sur plus de deux cents pages est de permettre la construction de beaucoup de personnages qu’ils soient centraux ou secondaires. La trame est relativement dense et fait exister un grand nombre de protagonistes. Le travail graphique de LeUyem Pham que je dĂ©couvre ici fait exister chaque membre de l’aventure et implique ainsi fortement le lecteur. La sympathie dĂ©gagĂ©e par Martin et ses amis apporte un Ă©cot certain au plaisir de la dĂ©couverte de leurs pĂ©rĂ©grinations.

On entre vite dans le vif du sujet.

L’intrigue ne se rĂ©sume pas Ă  suivre les pas de personnages auxquels on s’est attachĂ©. La trame ne perd pas de temps Ă  se mettre en place. Le scĂ©nariste Jordan Mechner ne s’autorise pas Ă  un long round d’observation. MalgrĂ© le grand nombre de pages, il ne perd pas de temps Ă  plonger ses hĂ©ros dans le vif du sujet. La consĂ©quence est que l’immersion du lecteur est rapidement profonde. Les Ă©vĂ©nements s’enchaĂźnent Ă  un rythme soutenu. Martin est un fugitif. Il est donc en permanence sur le qui-vive. L’histoire ne s’autorise donc aucun temps mort pour notre plus grand plaisir. Le suspense, sans ĂȘtre insoutenable, est toujours prĂ©sent. La narration est agrĂ©able et les pages dĂ©filent sans qu’on s’en rende compte.

Le travail graphique qui m’avait conquis lors de ma premiĂšre rencontre avec l’ouvrage a enchantĂ© ma dĂ©couverte du tome. Je trouve que le trait de Pham accompagne parfaitement le cĂŽtĂ© rythmĂ© des scĂšnes et l’aventure qui transpire de chaque page. L’identitĂ© des personnages s’accordent aussi parfaitement avec l’atmosphĂšre gĂ©nĂ©rale. Les dĂ©cors suggĂšrent aisĂ©ment le dĂ©paysement autour temporel que gĂ©ographique.

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Au final, « Templiers » est un premier opus intĂ©ressant. Je me suis laissĂ© prendre par l’intrigue et suis curieux de lire la suite. La bonne nouvelle est que le deuxiĂšme Ă©pisode est sorti en avril dernier. Il ne me reste donc plus qu’à me le procurer. Mais cela est une autre histoire


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Note : 15/20