LAP ! – AurĂ©lia Aurita

LAP


Titre : LAP !
Scénariste : Aurélia Aurita
Dessinatrice : Aurélia Aurita
Parution : Janvier 2014


Les prĂ©cĂ©dents livres d’AurĂ©lia Aurita ne m’avaient pas laissĂ© un souvenir forcĂ©ment positif. Mais en voyant son livre « LAP ! » (sous-titrĂ© « un roman d’apprentissage »), je n’ai pu m’empĂȘcher de retourner lire un livre de cette dessinatrice. En effet, le LAP est l’acronyme du LycĂ©e AutogĂ©rĂ© de Paris. C’est un lycĂ©e particulier oĂč les profs et les Ă©lĂšves sont (thĂ©oriquement) Ă  Ă©galitĂ© et oĂč chacun s’occupe du fonctionnement du lycĂ©e (mĂ©nage, cuisine
). C’est aussi et surtout un endroit expĂ©rimental oĂč une autre façon d’enseigner est testĂ©e depuis maintenant trente ans. Étant enseignant, j’étais curieux de connaĂźtre un peu mieux le fonctionnement du LAP. Le tout est Ă©ditĂ© aux Impressions Nouvelles et pĂšse environ 140 pages pour un format A5.

Le parallĂšle avec « Retour au CollĂšge » de Riad Sattouf s’impose immĂ©diatement. AurĂ©lia Aurita est lĂąchĂ©e en cours et parmi les Ă©lĂšves et un lien se crĂ©e rapidement. Difficile d’ĂȘtre objective, surtout que l’auteure est encore jeune et que les Ă©lĂšves ont, par essence mĂȘme, un rapport aux adultes particuliers. AprĂšs une mise en situation classique sous forme d’assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale, on dĂ©couvre peu Ă  peu le fonctionnement du LAP avec ses votes, ses embrouilles, ses cours originaux. Le tout est dĂ©crit assez objectivement, dans le sens oĂč les aspects nĂ©gatifs sont signalĂ©s rĂ©guliĂšrement. Cependant, l’auteure n’hĂ©site pas Ă  se reprĂ©senter trĂšs perturbĂ©e par ce qu’il se passe au lycĂ©e. C’est le syndrĂŽme du jeune prof : l’envie que tout le monde rĂ©ussisse, la difficultĂ© de mettre une barriĂšre et ne pas trop tomber dans l’affectif avec les Ă©lĂšves. Clairement, au LAP, c’est encore plus fort ! Il n’est mĂȘme pas cachĂ© que des relations prof/Ă©lĂšve ont rĂ©guliĂšrement Ă©clatĂ©.

La partie gestion mise en avant

AurĂ©lia Aurita semble avoir Ă©tĂ© traumatisĂ©e par l’enseignement puisqu’elle est trĂšs mal Ă  l’aise quand il faut assister Ă  un cours. Du coup, elle n’en parle que de façon anecdotique et c’est bien dommage. C’est avant tout la partie gestion qui est mise en avant. Alors certes, le lycĂ©e est autogĂ©rĂ© et sa partie gestion est bien Ă©videmment au cƓur du projet. Mais les enseignements font Ă©galement la part belle aux expĂ©rimentations. Finalement, c’est un grand recueil de tĂ©moignages qui nous est prĂ©sentĂ©. Pour rester objective, la dessinatrice analyse finalement peu ce qu’elle voit. On la sent sĂ©duite par le lieu et les gens (d’autant plus qu’elle n’est qu’observatrice, ce qui est un rĂŽle plus confortable). Mais il y a un vrai manque de recul, de comparaison avec les lycĂ©es classiques.

Concernant le dessin, je trouve qu’AurĂ©lia Aurita fait du beau travail. Je n’étais pas fan de son trait, mais elle a progressĂ© et propose un dessin expressif et pertinent, surtout que le livre est fait Ă  90% de dialogues. Le lavis accompagne bien le trait dynamique de l’auteure.

Mi-figue, mi-raisin pour ce « LAP ! ». Si ce qui nous est prĂ©sentĂ© est intĂ©ressant et la lecture est plaisante, on sent quand mĂȘme que tout un pan de ce lycĂ©e n’est pas traitĂ©. Ainsi, on n’est presque jamais en salle de classe. Repaire de gauchistes pour les uns, Ă©tablissement novateur pour les autres, il y a peu de chance que la lecture du livre vous fasse changer d’avis. Cela risque plus de confirmer vos a priori. A lire si vous aimez les documentaires en bande-dessinĂ©e.

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Note : 13/20

Fraise et Chocolat, T1 – AurĂ©lia Aurita

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Titre : Fraise et chocolat
Scénariste : Aurélia Aurita
Dessinatrice : Aurélia Aurita
Parution : Mars 2006


L’autobiographie en bande-dessinĂ©e s’est fortement dĂ©veloppĂ©e ces derniĂšres annĂ©es. Genre Ă  la mode, il a vu aussi les auteurs casser les barriĂšres de l’intimitĂ© Ă  des niveaux plus ou moins importants. AurĂ©lia Aurita, toute jeune auteure Ă  l’époque des faits, publie « Fraise et chocolat » en 2006, histoire d’une rencontre avec un homme et de leur passion commune. C’est parti pour 140 pages d’ébats sexuels passionnĂ©s


L’ouvrage dĂ©marre alors qu’AurĂ©lia arrive au Japon. Elle a Ă©tĂ© invitĂ©e par FrĂ©dĂ©ric, avec qui elle entretient une correspondance depuis quatre mois. Elle espĂšre faire mentir les voix qui s’élĂšvent contre elle, comme quoi elle aurait Ă©tĂ© invitĂ©e pour que FrĂ©dĂ©ric « puisse [la] sauter ». En effet, elle est la seule auteure dĂ©butante invitĂ©e dans le projet


Une avalanche de confidences sans aucun tabou.

Le ton est donnĂ© d’entrĂ©e. Le rĂ©cit des coucheries, sans aucun tabou, est primordial dans l’ouvrage. Les termes « fraise et chocolat » sont d’ailleurs de savoureuses mĂ©taphores que je vous laisse deviner
 La passion entre les deux amants est particuliĂšrement forte mais trĂšs sexuelle. Rien ne nous est Ă©pargné : fellation, cunnilingus, sodomie et d’autres fantasmes qu’il serait cruel de rĂ©vĂ©ler. Cependant, cette avalanche de confidence aboutit Ă  un sentiment de malaise Ă©vident : le lecteur se sent voyeuriste. Si certains apprĂ©cieront de dĂ©couvrir la vie sexuelle d’un jeune couple, d’autres seront peut-ĂȘtre gĂȘnĂ©s que dans le fond, on frise l’indigestion. Certes, AurĂ©lia Aurita ajoute de multiples rĂ©flexions sur sa passion, mais la surabondance de sexe noie le poisson.

J’ai trouvĂ© Ă©galement l’ouvrage finalement trĂšs vulgaire. Je n’ai aucun problĂšme avec la reprĂ©sentation de la sexualitĂ©, mĂȘme crue. Je lis beaucoup d’ouvrages qui sont trĂšs explicites visuellement et cela ne me gĂȘne pas. Mais ici, ça m’a vraiment dĂ©rangĂ©. Quand AurĂ©lia Aurita essaye de se voir dans la glace avec un gode dans le cul, j’avoue avoir du mal Ă  comprendre l’intĂ©rĂȘt de le raconter. Je reste dubitatif devant sa fiertĂ© quand « FrĂ©dĂ©ric Boilet a joui dans [son] cul ». Je pense que l’on atteint lĂ  une des limites des rĂ©cits autobiographiques. LĂącher son intimitĂ© sans garde-fou, sans humour, sans recul n’est pas forcĂ©ment intĂ©ressant. Et pourtant, l’auteure multiplie les rĂ©flexions sur le couple histoire d’apporter autre chose, mais cela ne nous intĂ©resse pas plus que ça : faire l’amour tout le temps est-il un problĂšme ? Doit-on partager autre chose ? On ne peut pas dire qu’on touche ici Ă  l’originalitĂ©.

Au niveau du dessin, je connaissais dĂ©jĂ  le style d’AurĂ©lia Aurita et on ne peut pas dire qu’il m’avait sĂ©duit. Le style trĂšs relĂąchĂ© (c’est un euphĂ©misme) est franchement gĂȘnant dans ses imperfections. Son dessin est trĂšs inĂ©gal. Le noir et blanc, rehaussĂ© de gris manque un peu de profondeur mais il faut avouer que le trait, dynamique et expressif, s’adapte plutĂŽt bien aux Ă©bats amoureux. Il est cependant dommage que l’érotisme de l’ensemble passe avant tout par le traitement explicite plus que par le dessin en lui-mĂȘme.

ProfondĂ©ment exhibitionniste, « Fraise et chocolat » m’a laissĂ© au mieux indiffĂ©rent et au pire mal Ă  l’aise. J’ai manquĂ© d’empathie pour ce couple pourtant atypique. N’étant pas sensible Ă  l’humour de l’auteure, ni aux Ă©motions qu’elle souhaite vĂ©hiculer, je suis passĂ© complĂštement Ă  cĂŽtĂ© de l’ouvrage.

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Note : 6/20

AĂąma, T3 : Le dĂ©sert des miroirs – FrĂ©dĂ©rik Peeters

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Titre : Aùma, T3 : Le désert des miroirs
Scénariste : Frédérik Peeters
Dessinateur : Frédérik Peeters
Parution : Octobre 2013


A sa sortie, « AĂąma » s’est imposĂ© comme une excellente sĂ©rie de science-fiction. AprĂšs un premier tome trĂšs rĂ©ussi, FrĂ©dĂ©rik Peeters avait su confirmer l’essai avec brio. Si bien que c’est plein de confiance que j’ai commencĂ© la lecture de ce troisiĂšme tome intitulĂ© « Le dĂ©sert des miroirs ». On nous avait laissĂ© en plein suspense et c’est avec hĂąte que je lisais le bouquin. Ce dernier est toujours publiĂ© chez Gallimard pour un total de 86 pages.

aama3cLes hommes ont crĂ©Ă©, avec l’aĂąma, de la vie sur une planĂšte qui n’en possĂ©dait pas. ChargĂ©s de retrouver cet aĂąma, le groupe se retrouve attaquĂ© par ces nouvelles formes de vie. Nous reprenons donc l’histoire en plein combat. AprĂšs une dizaine de pages, le groupe reprend son chemin, amenuisĂ©.

Le tome deux faisait montait la tension au fur et Ă  mesure des pages. Ce n’est pas vraiment le cas ici, bien au contraire. AprĂšs un dĂ©but plein d’action, le tout se pose fortement avant de partir dans l’onirisme. Le genre d’histoire oĂč chacun fait des rĂȘves qui lui apportent des rĂ©ponses, voire lui permet de connaĂźtre l’avenir. J’ai pour ma part complĂštement dĂ©crochĂ© devant ce que je considĂšre comme une facilitĂ© scĂ©naristique. Alors que la sĂ©rie Ă©tait construite sur une base cohĂ©rente, elle part ici dans quelque chose de bien moins intĂ©ressant. Ainsi, le repas entre Verloc et son frĂšre est un prĂ©texte Ă  flashbacks et explications sur leur enfance


Moins de clarté dans la narration.

De mĂȘme certaines ellipses et explications aama3amanquent un peu de clartĂ©. Le passage vers certains lieux est souvent flou. C’est dommage car c’était un des points forts de la sĂ©rie de faire Ă©voluer le paysage et les endroits de façon cohĂ©rente et crĂ©dible. On a l’impression que l’auteur s’embarrasse moins des dĂ©tails.

La sĂ©rie garde bien sĂ»r certaines de ses qualitĂ©s. Les personnages continuent Ă  osciller toujours entre sympathie et antipathie. Leur humanitĂ© est assez exceptionnelle. Aucun n’est parfait, ni mĂȘme vraiment bon et chacun suit sa propre voie. La psychologie des personnages est d’autant plus le cƓur de la sĂ©rie dans cet album.

Le dessin de FrĂ©dĂ©rik Peeters est toujours de haute volĂ©e. Aussi bien Ă  l’aise dans la crĂ©ation de mondes fantasmĂ©s que dans l’action ou l’émotion, il frappe une nouvelle fois fort. Et que dire de son dĂ©coupage dynamique, inventif et d’une efficacitĂ© qui n’est plus Ă  prouver.

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J’ai Ă©tĂ© profondĂ©ment déçu par ce tome. DotĂ© d’une narration moins claire et d’un onirisme auquel je n’ai pas adhĂ©rĂ©, j’ai eu bien plus de mal Ă  entrer dans l’histoire et Ă  me sentir pris par les Ă©vĂ©nements. Clairement, ce tome est un pivot qui ravira les uns et dĂ©plaira aux autres. A vous de voir oĂč vous vous situez !

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Note : 12/20

AĂąma, T2 : La multitude invisible – Frederik Peeters

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Titre : AĂąma, T2 : La multitude invisible
Scénariste : Frederik Peeters
Dessinateur : Frederik Peeters
Parution : Octobre 2012


Frederik Peeters avait frappĂ© un grand coup avec le premier tome d’ « AĂąma ». Il avait accouchĂ© d’un rĂ©cit de science-fiction dense et original, basĂ© sur des personnages intĂ©ressants et charismatiques. Ce deuxiĂšme tome, intitulĂ© « La multitude des choses », transformera-t-il l’essai ? Toujours Ă©ditĂ© aux Ă©ditions Gallimard, cette suite compte une nouvelle fois un peu plus de 80 pages.

Nous retrouvons donc Velroc et son frĂšre Conrad sur la planĂšte Ona(ji) en recherche de la substance aĂąma et de celle qui l’a volĂ©e afin de l’utiliser en grandeur nature. La planĂšte se recouvre alors de nouvelles formes de vie. Et plus le groupe se rapproche de l’épicentre, plus cette vie est complexe, dense et donc dangereuse.

aama2aC’est un passionnant voyage que nous propose Frederik Peeters. Dans ce tome encore, l’histoire est avant tout basĂ©e sur les relations entre les personnages. Tout dĂ©marre d’ailleurs lĂ -dessus. Des histoires de coucheries qui mettent le groupe en pĂ©ril alors qu’il y a bien plus grave Ă  s’occuper
 Ainsi est « AĂąma ». La science-fiction et l’univers crĂ©Ă© par l’auteur servent avant tout une Ă©popĂ©e humaine. Seul personnage un peu diffĂ©rent, Churchill irradie de son charisme les pages de l’ouvrage. Ce singe/robot est particuliĂšrement rĂ©ussi. A la fois surpuissant et terriblement humain. Le seul ĂȘtre raisonnable du groupe ?

aama2bCe deuxiĂšme tome est Ă©galement l’occasion de mieux connaĂźtre Volric. Ce dernier narre son histoire et les flashbacks permettent de mieux comprendre les problĂšmes qu’il a avec sa fille. Cet aspect est particuliĂšrement rĂ©ussi. J’ai Ă©tĂ© trĂšs touchĂ© par son histoire qui, si elle se passe dans un univers futuriste, est pourtant terriblement d’actualitĂ©. Ces flashbacks permettent Ă©galement de varier les ambiances, passant de la planĂšte sauvage Ă  la mĂ©tropole pullulant.

Une montĂ©e en tension tout au long de l’ouvrage.

La force de cet album tient Ă©galement dans la montĂ©e en tension tout au long de l’ouvrage. Commençant par un simple voyage dĂ©tendu oĂč Velroc raconte sa vie Ă  Myo, le stress et le danger d’installe petit Ă  petit jusqu’à l’apothĂ©ose de fin. Et pourtant, difficile de savoir oĂč va vraiment nous mener cet ouvrage. Tel Velroc, on est parachutĂ© dans une aventure sans vraiment en comprendre les tenants et les aboutissants. En cela, la narration est exemplaire.

Le dessin au pinceau de Frederik Peeters est un vrai plaisir. Les personnages sont bien identifiĂ©s et expressifs. Il passe sans peine des mĂ©tropoles urbaines au paysage dĂ©sertique de la planĂšte Ona(ji). Les scĂšnes d’action sont bien rendues. Une mention spĂ©ciale est Ă  accorder aux couleurs. Bien que faites d’aplats trĂšs simples (mettant du coup en valeur le trait de Peeters), elles participent grandement Ă  l’ambiance. Ainsi, les tons jaune/orangĂ© de la planĂšte s’enrichissent de nouvelles teintes au fur et Ă  mesure que la vĂ©gĂ©tation apparaĂźt. Cette derniĂšre est d’ailleurs trĂšs rĂ©ussie et possĂšde une cohĂ©rence tout au long de l’ouvrage, mĂȘme si l’auteur semble avoir pris un certain plaisir Ă  reprĂ©senter une nature vulvaire et phallique


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Au final, ce deuxiĂšme tome confirme tous les espoirs placĂ©s dans cette sĂ©rie. DotĂ© d’un univers rĂ©ussi, de personnages marquants et d’un graphisme maĂźtrisĂ©, « AĂąma » devrait s’imposer comme une sĂ©rie de science-fiction majeure si elle continue avec un tel niveau de qualitĂ©. Mais aprĂšs un deuxiĂšme tome aussi rĂ©ussi, on ne peut ĂȘtre que confiant.

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Note : 18/20

AĂąma, T1 : L’odeur de la poussiĂšre chaude – Frederik Peeters

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Titre : AĂąma, T1 : L’odeur de la poussiĂšre chaude
Scénariste : Frederik Peeters
Dessinateur : Frederik Peeters
Parution : Octobre 2011


Lorsque le premier tome d’ « AĂąma » est sorti, je me rappelle avoir Ă©tĂ© marquĂ© par sa couverture montrant trois personnages, dont une sorte de singe fumant un cigare
 Les critiques de l’époque Ă©tant on ne peut plus Ă©logieuse sur l’ouvrage, je m’étais empressĂ© de me le procurer. Le tout est scĂ©narisĂ© et dessinĂ© par Frederik Peeters et est publiĂ© chez Gallimard. Ce premier tome, intitulĂ© « L’odeur de la poussiĂšre chaude », pĂšse plus de 80 pages. C’est de science-fiction dont il va ĂȘtre question ici.

aama1cVelroc se rĂ©veille sur une planĂšte aride. A cĂŽtĂ© de lui, un singe dont la peau des jambes est nue. Et Velroc a perdu la mĂ©moire. Il va alors relire son calepin oĂč il note ce qui lui est arrivĂ©. Tout commence au niveau 1, lieu de perdition des ĂȘtres humains. Velroc abuse des drogues et gĂźt dans une flaque aprĂšs s’ĂȘtre visiblement battu. Et voilĂ  que son frĂšre lui tombe dessus. Son frĂšre qui, lui, a rĂ©ussi, et qu’il n’a plus vu depuis 10 ans. Ce dernier va alors lui proposer de l’accompagner dans une mission Ă  l’autre bout de la galaxie qui, Ă©videmment, va mal tourner.

Laisser le lecteur comprendre les mĂ©canismes de l’univers.

La science-fiction est un genre difficile. Beaucoup de choses ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© faites et, souvent, les auteurs sont un peu trop didactiques pour montrer la richesse de leur monde. Ici, Frederik Peeters reste en surface et laisse le lecteur comprendre les mĂ©canismes de son univers. L’histoire avance et on dĂ©couvre peu Ă  peu comment est rĂ©gie la sociĂ©tĂ©. La subtilitĂ© de l’entreprise est belle Ă  voir. Surtout que dĂšs que l’on part pour la planĂšte, Velroc fait office de naĂŻf et on dĂ©couvre avec lui les Ă©vĂ©nements.

aama1aAu-delĂ  de la science fiction pure, c’est avant tout les relations humaines qui sont au centre de cet ouvrage. Frederik Peeters utilise son univers pour servir une histoire et des personnages et non pas l’inverse. Et c’est tout ce qui fait la force de l’ouvrage. Le scĂ©nario est dense et n’hĂ©site pas Ă  digresser pour prĂ©senter les faces d’ombre de Velroc. En cela, ce premier tome est une grande rĂ©ussite. Il parvient Ă  prĂ©senter profondĂ©ment les personnages, un univers, mais aussi Ă  avancer dĂ©jĂ  beaucoup dans l’aventure. En comparaison, je trouve qu’on est au niveau du « Cycle de Cyann », pour comparer avec une sĂ©rie de science-fiction du mĂȘme type.

Le dessin de Peeters apporte une touche supplĂ©mentaire Ă  son scĂ©nario. Le dĂ©coupage est intelligent, le dessin marquant et le trait au pinceau trĂšs Ă©lĂ©gant. Les personnages sont trĂšs reconnaissables et expressifs. Une mention particuliĂšre est accordĂ©e au robot simiesque Churchill. Les dĂ©cors vont du dĂ©sert Ă  la ville tentaculaire, montrant la maĂźtrise pleine de l’auteur. Bref, j’ai Ă©tĂ© conquis par ce dessin qui sert parfaitement la narration et l’univers.

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Ce premier tome d’« AĂąma » est une grande rĂ©ussite. Contrairement Ă  beaucoup d’ouvrages, l’histoire a dĂ©jĂ  bien avancĂ© et le lecteur peut ĂȘtre confiant pour la suite. La densitĂ© du scĂ©nario, la complexitĂ© des personnages et le dessin de haut niveau font que l’on peut espĂ©rer voir Ă©merger l’une des meilleures sĂ©ries de science-fiction de ces derniĂšres annĂ©es. 

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Note : 18/20

Top BD des blogueurs – Octobre 2014

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Le Top BD des blogueurs est un collectif rassemblant des blogs de critiques de bande-dessinĂ©es. DĂšs qu’un titre possĂšde au moins trois notes, il entre dans le top. Vous pouvez dĂ©couvrir chaque mois les cinquante titres les mieux notĂ©s.
1- (N) La lune est blanche 19.17
Emmanuel Lepage, François Lepage, Futuropolis
2- (N) Yossel, 19 avril 1943       19
Joe Kubert, Delcourt
Jiro Taniguchi, Casterman
4- (N) Sharaz-de   18.67
Sergio Toppi, Mosquito
5- (=) Asterios Polyp     18.65
David Mazzuchelli, Casterman
6- (=) Persépolis    18.64
Marjanne Satrapi, L’Association
7- (=) Ceux qui me restent  18.63
Damien Marie, Laurent Bonneau, Bamboo
8- (=) Le loup des mers 18.55
Riff Reb, Soleil
9- (=) Idées Noires       18.5
Franquin, Fluide Glacial
10- (=) NonNonBù         18.5
Shigeru Mizuki, Cornélius
11- (=) Maus        18.49
Art Spiegelmann, Flammarion
12- (=) Le pouvoir des Innocents Cycle 2- Car l’enfer est ici   18.41
13- (=) Tout seul            18.38
Christophe ChaboutĂ©, Vents d’Ouest
14- (=) Le sommet des dieux       18.33
Yumemuka Bura, JirĂŽ Taniguchi, Casterman
Tome 1,Tome 2,Tome 3, Tome 4, Tome 5.
Emmanuel Lepage, Futuropolis
16- (=) Daytripper           18.27
Fabio Moon, Gabriel Ba, Urban Comics
17- (=) V pour Vendetta  18.22
Alan Moore, David Lloyd, Delcourt
18- (=) Le Grand pouvoir du Chninkel   18.19
Van Hamme, Rosinski, Casterman
19- (=) Universal War One   18.14
Denis Bajram, Soleil
BenoĂźt Zidrou, Roger, Dargaud
21- (-) Les vieux fourneaux tome 1   18.11
Wilfrid Lupano, Paul Cauuet, Dargaud
22- (=) Les ombres     18.1
Zabus, Hippolyte, Phébus
23- (=) Abélard     18.04
RĂ©gis HautiĂšre, Renaud Dillies, Dargaud
Jérémy Bastian, Editions de la Cerise
25- (=) Le muret    18
Pierre Bailly, CĂ©line Fraipont, Casterman
26- (=) Il était une fois en France    17.98
Fabien Nury, Sylvain Vallée, Glénat
27- (=) Habibi       17.95
Craig Thompson, Casterman
28- (=) Herakles    17.92
Edouard Cour, Akileos
29- (=) Les derniers jours d’un immortel     17.92
Fabien Vehlmann, Gwen de Bonneval, Futuropolis
30- (=) Gaza 1956     17.92
Joe Sacco, Futuropolis
31- (+)Melvile     17.88
Romain Renard, Le Lombard
32- (=) Scalped            17.86
Jason Aaron, R.M. Guerra, Urban Comics
33- (=) Manabé Shima 17.83
Florent Chavouet, Editions Philippe Picquier
34- (=) Trois Ombres       17.78
Cyril Pedrosa, Delcourt
L. Seksik, G. Sorel, Casterman
36- (=) Anjin-san    17.75
Georges Akiyama, Le LĂ©zard Noir
37- (=) Joker                17.75
Brian Azzarello, Lee Bermejo, Urban Comics
38- (=) Mon arbre     17.75
SĂ©verine Gauthier, Thomas labourot, Delcourt
39- (=) L’histoire des trois Adolf,              17.75
Osamu Tezuka, Tonkam
40- (=) Blankets  17.73
Craig Thompson, Casterman
L. Brunschwig, L. Hirn, Futuropolis
42- (=) Holmes               17.7
Luc Brunschwig, Cecil, Futuropolis
43- (=) Calvin et Hobbes,              17.7
Bill Watterson, Hors Collection
44- (=) Les seigneurs de Bagdad  17.7
Brian K. Vaughan, Niko Henrichon, Urban Comics
45- (-) Urban              17.69
Luc Brunschwig, Roberto Ricci, Futuropolis
Tome 1, Tome 2, Tome 3,
46- (=) Washita     17.69
Tome 1, Tome 2, Tome 3, Tome 4, Tome 5.
47- (=) Lorenzaccio              17.67
RĂ©gis Peynet, 12 Bis
48- (=) Match!   17.67
Grégory Panaccione, Editions Delcourt
49- (N) Mots rumeurs, mots cutter    17.67
Charlotte Bousquet, Stéphanie Rubini, Gulf Stream Editeur
50- (=) Tokyo Home  17.67
Thierry Gloris, Cyrielle, Kana

Comme tout le monde – Rudy Spiessert, Denis LapiĂšre & Pierre-Paul Renders

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Titre : Comme tout le monde
Scénaristes : Denis LapiÚre & Pierre-Paul Renders
Dessinateur : Rudy Spiessert
Parution : Octobre 2007


Au dĂ©part, il y a un scĂ©nario. De ce scĂ©nario originel accoucheront deux Ɠuvres : la premiĂšre sera un film, la seconde une bande-dessinĂ©e. « Comme tout le monde » n’a pas laissĂ© beaucoup de souvenirs aux cinĂ©philes, qu’en est-il de sa version dessinĂ©e qui se veut une « version longue » de son cousin sur grand Ă©cran. L’ensemble pĂšse quand mĂȘme 140 pages, ce qui laisse aux auteurs le temps de dĂ©velopper les enjeux et les personnages. PubliĂ© chez Dupuis, le livre est dessinĂ© par Rudy Spiessert et scĂ©narisĂ© par Denis LapiĂšre et Pierre-Paul Renders.

CommeToutLeMonde2Tout commence par une Ă©mission, la bien nommĂ©e « comme tout le monde ». Sur le principe de « La famille en or », les participants doivent trouver la rĂ©ponse la plus souvent citĂ©e par un panel de sondĂ©s. Or, le grand champion Jalil ne se trompe jamais. Au point qu’il dĂ©finit la plus pur français moyen. Une aubaine pour les marques qui peuvent l’utiliser comme panel Ă  moindre coĂ»t. Mais Ă  son insu


 Voyeurisme & célébrité

« Comme tout le monde » s’intĂšgre parfaitement dans un monde de voyeurisme et de tĂ©lĂ©-rĂ©alitĂ©. La cĂ©lĂ©britĂ© du français moyen qui exhibe son intimitĂ© est traitĂ©e ici. Si le sujet de la bande-dessinĂ©e n’est simplement jamais crĂ©dible, on se prend au jeu de cette histoire qui sait nous dĂ©voiler les secrets petit Ă  petit. Quelques retournements de situation sont bien vus et surprendront le lecteur. En cela, la pagination importante est adaptĂ©e, permettant de dĂ©velopper pleinement tous les aspects de l’histoire.

CommeToutLeMonde1C’est peut-ĂȘtre au niveau des personnages que l’ensemble pĂȘche un peu. Jalil, trop moyen, manque vraiment de charisme. C’est son personnage, certes, mais on n’a finalement que trĂšs peu de sympathie pour lui, au contraire de sa jeune compagne, Ă  laquelle on s’attache. Mais le tout manque cruellement d’analyse. Claire accepte de se mettre en couple pour de l’argent, sans que la notion de prostitution ne soit relevĂ©e. C’est bien un livre de chez Dupuis qui reste bien gentillet. On aurait pu imaginer une critique mordante, ce ne sera pas le cas. Dommage, car le sujet est plutĂŽt intĂ©ressant et la narration bien menĂ©e.

Au niveau du dessin, Rudy Spiessert est à lui seul un argument pour le bouquin. Clairement influencé par Dupuy et Berberian, il propose un dessin simple en apparence mais trÚs riche, à la mise en scÚne soignée. Une véritable découverte et un auteur à suivre assurément.

« Comme tout le monde » est un ouvrage qui se lit d’une traite, mĂ©nageant son suspense intelligemment. HĂ©las, on sent qu’avec un sujet pareil, le livre aurait pu ĂȘtre plus intĂ©ressant en Ă©tant plus sombre ou cynique. Une sympathique dĂ©couverte.

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Note : 14/20

Le singe de Hartlepool – Wilfrid Lupano & JĂ©rĂ©mie Moreau

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Titre : Le singe de Hartlepool
Scénariste : Wilfrid Lupano
Dessinateur : Jérémie Moreau
Parution : Septembre 2012


Pendant les guerres napolĂ©oniennes, un navire français navigue prĂšs des cĂŽtes anglaises. A bord, un singe habillĂ© d’un uniforme français fait office de mascotte. La haine de l’anglais est alors Ă  son comble. Ainsi, le mousse, osant chantonner une mĂ©lodie en anglais, se voit jetĂ© par-dessus bord
 Quelques instants plus tard, c’est tout le navire qui sombre suite Ă  un orage soudain. Seul rescapé : le singe. Celui-ci va se retrouver sur les cĂŽtes anglaises, prĂšs d’un village nommĂ© Hartlepool. Les habitants vont alors dĂ©cider de pendre ce Français.

lesingedehartlepool1InspirĂ© d’une histoire vraie (ou du moins d’une lĂ©gende, difficile d’ĂȘtre certain de la vĂ©racitĂ© des faits), « Le singe de Hartlepool » est une vĂ©ritable fable contre la bĂȘtise humain en gĂ©nĂ©ral et le nationalisme en particulier. N’ayant jamais vu un Français de leurs vies, les habitants vont trouver Ă  se convaincre que ce singe est un ĂȘtre humain français. Quitte Ă  faire appel Ă  un ancien combattant sĂ©nile pour trouver des arguments


Les auteurs, Wilfrid Lupano au scĂ©nario et JĂ©rĂ©mie Moreau au dessin, ont dĂ©cidĂ© de jouer le jeu Ă  fond. Ici, c’est une fable. La plupart des gens (ici, de vĂ©ritables ploucs) sont complĂštement stupides et haineux. Seuls certains personnages parviennent Ă  sortir de cet Ă©tat de fait : certains enfants et le mĂ©decin, symbole de culture et donc de tolĂ©rance. Clairement, les auteurs font le choix d’une morale claire et affirmĂ©e et c’est tant mieux.

Le ton de l’album est clairement cynique. L’humour y est fortement prĂ©sent malgrĂ© l’aspect dramatique de l’histoire. On rit souvent, voire mĂȘme de bon cƓur, devant les remarques des villageois. On rit de la bĂȘtise humaine et Ă  la fois, on s’en dĂ©sespĂšre.

“Bien qu’il ne parle pas, le singe est le personnage le plus complexe de l’histoire.”

Notre empathie est souvent requise dĂšs que le singe apparaĂźt. Victime innocente, subissant le courroux d’animaux se revendiquant intelligents, il est le personnage le plus complexe de l’histoire, bien qu’il ne parle pas. Et en cela, c’est la grande rĂ©ussite de l’album. Les auteurs ont parfaitement su retranscrire la dualitĂ© des chimpanzĂ©s. PoussĂ© dans ses retranchements, le singe est bestial, il mord jusqu’au sang, griffe, bref, lutte pour sa vie. Mais il est Ă©galement parfois terriblement humain avec son regard perdu dans le vide. Éternelle victime de l’homme (enlevĂ© Ă  sa famille, puis pendu en Angleterre), il paraĂźt pourtant bien plus humain que ses bourreaux.

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Outre une narration et un ton captivants, il faut avouer que le dessin est l’un des points forts de cet album. J’ai pleinement accrochĂ© au graphisme personnel et expressif de JĂ©rĂ©mie Moreau. Il est en parfaite adĂ©quation avec le propos, sachant se montrer expressif dans les moments les plus ridicules ou plus intimiste dans les passages les plus empathiques. Pour un premier album, c’est d’autant plus impressionnant. Un dessinateur que je suivrai avidement dĂ©sormais.

« Le singe de Hartlepool » est un one-shot de qualitĂ©. MaĂźtrisĂ© de bout en bout sur tous les points, il maĂźtrise le mĂ©lange des genres avec brio. A la fois Ă©cƓurĂ©, amusĂ© et attristĂ©, le lecteur repart avec le plein d’émotion ! 

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Note : 17/20

Les vieux fourneaux, T1 : Ceux qui restent – Wilfrid Lupano & Paul Cauuet

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Titre : Les vieux fourneaux, T1 : Ceux qui restent
Scénariste : Wilfrid Lupano
Dessinateur : Paul Cauuet
Parution : Avril 2014


 Wilfrid Lupano est l’un des scĂ©naristes qui monte. For de plusieurs succĂšs et sachant s’entourer de dessinateurs talentueux, il est devenu synonyme d’auteur Ă  suivre. « Les vieux fourneaux » ne dĂ©roge pas Ă  la rĂšgle. DotĂ©e de critiques trĂšs positives et du Prix des libraires de bande dessinĂ©e 2014, il n’en fallait pas plus pour que je m’y intĂ©resse. Il est accompagnĂ© au dessin par Paul Cauuet, que je ne connaissais pas. Le tout est publiĂ© chez Dargaud pour un total de 56 pages. Ce tome 1 est nommĂ© « ceux qui restent ». Le succĂšs de la sĂ©rie a, depuis, vu paraĂźtre une suite. Je prĂ©cise tout de suite que ce premier tome se suffit Ă  lui-mĂȘme.

LesVieuxFourneaux1aLe titre de l’album est assez explicite : on s’intĂ©resse ici Ă  une bande de personnes ĂągĂ©es qui viennent rendre hommage Ă  l’une de leur amie, dĂ©cĂ©dĂ©e. Le thĂšme de « vieux fourneaux » prend d’autant plus de sens lorsque l’on apprend qu’ils ont tous travaillĂ© dans la mĂȘme usine et ont montrĂ© un activisme syndical particuliĂšrement important. Mais quand l’un d’eux pĂšte les plombs lorsque le notaire dĂ©voile certains secrets, ses copains se serrent les coudes pour lui Ă©viter de faire une connerie.

“Des portraits plein de vie et de caractĂšre.”

Trois grands thĂšmes viennent se tĂ©lescoper dans cette sĂ©rie. La vieillesse bien Ă©videmment, mais aussi l’amitiĂ© et la lutte des classes.  Au milieu de tout ça, la petite fille de Lucette vient apporter sa fraĂźcheur et son dĂ©calage par rapport Ă  nos vieux bonhommes. Ces portraits sont plein de vie et cohĂ©rents, chacun ayant son caractĂšre et, surtout, son histoire.

LesVieuxFourneaux1cDans cet album, chaque personnage est prĂ©sentĂ© de façon satisfaisante pour assouvir notre plaisir de lecture. Cependant, on sent que les auteurs en ont sous le pied. Ils savent Ă©viter de produire trop de flashbacks inutiles et se concentre sur le prĂ©sent. Sans ĂȘtre absolument le plus intĂ©ressant dans l’ouvrage, le fil rouge possĂšde suffisamment de suspense pour nous donner envie de lire la suite. Mais ce sont bien les situations cocasses dues Ă  l’ñge des protagonistes qui font tout le sel du bouquin.

Au niveau du dessin, Paul Cauuet réalise un travail remarquable. Bien aidé par une couleur qui met en valeur son trait, il croque des personnages semi-réalistes souvent proches de la caricature.  Son dessin est à la fois riche et dynamique et le dessinateur excelle aussi bien dans les dessin des personnages que des décors. Une véritable découverte !

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« Les vieux fourneaux » est une bande-dessinĂ©e rĂ©ussie. DotĂ© de personnages hauts en couleur et d’un dessin parfaitement adaptĂ©, elle aurait pu ĂȘtre un one-shot percutant. Mais les auteurs ont prĂ©fĂ©rĂ© en faire une sĂ©rie. EspĂ©rons que la suite saura confirmer les qualitĂ©s de ce premier tome drĂŽle et attachant.

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Note : 16/20

Johnny Jungle, T2 – Jean-Christophe Deveney & JĂ©rĂŽme Jouvray

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Titre : Johnny Jungle, T2
Scénariste : Jean-Christophe Deveney
Dessinateur : JĂ©rĂŽme Jouvray
Parution : Septembre 2014


Le premier tome de « Johnny Jungle » avait Ă©tĂ© une bonne surprise. Narrant l’histoire d’un Ă©quivalent de Tarzan champion de natation et de cinĂ©ma (vous avez dit « Johnny Weismuller » ?), cette histoire faisait preuve de beaucoup d’humour dĂ©calĂ©. A la fermeture du premier opus du diptyque, on se demandait presque l’intĂ©rĂȘt de continuer le tout, malgrĂ© la fin surprenante. Alors, cette deuxiĂšme partie transforme-t-elle l’essai ?

Johnny n’est pas vraiment parvenu Ă  se faire Ă  la vie citadine. Acteur star, il succombe trop facilement aux jeunes actrices qui lui sont associĂ©es, mettant Ă  mal sa vie avec Jane. Et quand les enfants illĂ©gitimes commencent Ă  faire leurs apparitions, c’est le bouquet


Ce tome s’intĂ©resse Ă  la dĂ©gringolade du personnage. AprĂšs son ascension, cette chute Ă©tait inĂ©vitable. On le voit vieillir et devenir has been. Si bien que ce livre est beaucoup moins drĂŽle que le premier. TeintĂ© de nostalgie et de regrets, il met l’émotion plus en avant. HĂ©las, les blagues sont quand mĂȘme lĂ , mais nous atteignent beaucoup moins. La lecture est loin d’ĂȘtre dĂ©sagrĂ©able, mais il est difficile de ne pas ĂȘtre déçu lorsqu’on le compare au premier. Ainsi, aprĂšs une vingtaine de pages, je me suis surpris Ă  me dire que l’histoire n’avançait pas vraiment. Heureusement, la suite est plus pertinente. MalgrĂ© tout, ce tome est loin de confirmer nos attentes.

La comparaison entre les deux ouvrages fait mal.

Ce diptyque peut ĂȘtre vu de cette façon : le premier tome correspond Ă  la partie d’innocence du personnage. Il dĂ©couvre les choses avec Ă©merveillement et on rit avec lui. Le deuxiĂšme tome est la dĂ©sillusion. Ainsi, le principe de deux livres serait pleinement pertinent. Cependant, ce tome manque de rebondissement et les pĂ©ripĂ©ties sont loin de s’accumuler. Il manque aussi de personnages pittoresques (comme le rĂ©alisateur escroc du premier tome par exemple). Cette dichotomie m’a dĂ©rangĂ©, la comparaison entre les deux ouvrages fait mal.

MalgrĂ© tout, on retrouve une analyse au vitriol d’Hollywood avec ses acteurs ratĂ©s, ses budgets limitĂ©s par la crise et ses films de propagande pendant la Seconde Guerre Mondiale. Certaines trouvailles font mouche, mais leur densitĂ© est plus faible. Surtout, la surprise n’est plus lĂ .

Concernant le dessin, j’ai trouvĂ© l’ensemble inĂ©gal. Si le premier tome m’avait enchantĂ©, c’est moins le cas ici. Le trait de JĂ©rĂŽme Jouvray est toujours aussi agrĂ©able, mais les intĂ©rieurs notamment sont trĂšs vides. Le manque de jungle se fait cruellement sentir ! Du coup, la couleur (assurĂ©e par Anne-Claire Jouvray) est beaucoup moins marquante que dans le premier opus. C’est surtout une impression d’inĂ©gale qualitĂ© qui nous imprĂšgne. Certaines planches sont toujours aussi belles et dynamiques. D’autres semblent dĂ©sespĂ©rĂ©ment vides. Peut-ĂȘtre que le temps imparti pour dessiner cet album Ă©tait-il trop court ? Car l’ensemble fait quand mĂȘme 76 pages.

La chute de « Johnny Jungle » est traitĂ©e avec nostalgie. Mais les auteurs semblent beaucoup moins Ă  l’aise dans ce registre. Difficile de s’attacher Ă  un personnage qui succombe en permanence Ă  ses pulsions. Maintenant qu’il vieillit, il est difficile d’avoir de l’empathie pour son immaturitĂ©. J’ai retrouvĂ© une partie du plaisir que j’avais eu pour le premier tome, mais la dĂ©ception est bien rĂ©elle. Dommage.

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Note : 10/20