Prototype – Ralf König

Prototype


Titre : Prototype
Scénariste : Ralf König
Dessinateur : Ralf König
Parution : Septembre 2011


Ralf König est un auteur que j’aime beaucoup. SpĂ©cialisĂ© dans la description du milieu gay, l’allemand produit ici « Prototype », sortant de son sujet habituel. Le prototype est Adam, le premier homme. Alors, que donne ce livre hors des sentiers battus ? Ralf König est-il aussi pertinent et drĂŽle lorsqu’il aborde des sujets thĂ©ologiques ?

Le livre s’articule essentiellement sur les dialogues entre Dieu et le serpent Lucky (alias Lucifer). Dieu crĂ©e sa nouvelle crĂ©ature, mais Lucky est plutĂŽt critique dessus, poussant Dieu a de nombreux changements. La suite, on la connaĂźt : Eve, la pomme, l’exil, etc.

Un relecture du mythe sympathique.

prototype2Dans « Prototype », König se moque donc de la crĂ©ation de l’Homme en la prenant au pied de la lettre. Dieu ajoute et supprime des fonctionnalitĂ©s au fur et Ă  mesure. Capricieux et visiblement irascible, notre PĂšre en prend pour son grade
 Comme dans tout livre un tant soit plus blasphĂ©matoire qui se respecte, l’esprit malin paraĂźt bien plus sympathique et plein de bon sens ! Ainsi, la relecture du mythe est finalement assez lĂ©gĂšre, malgrĂ© une grosse entorse Ă  l’histoire officielle sur le fruit dĂ©fendu !

Ralf König base tout son livre sur les dialogues, souvent absurdes au vue de la situation. C’est son point fort et l’ironie inonde les pages de l’ouvrage. Si on sourit souvent, on ne peut constater que le manque d’originalitĂ© de l’ensemble. Les ouvrages reprenant la GĂ©nĂšse sont trĂšs nombreux et force et de constater que celui-ci n’apporte rien de neuf. Reste des dialogues sympathiques et quelques passages bien sentis ! La thĂšse du livre en soit est plus originale, bien qu’un peu tirĂ©e par les cheveux.

Au niveau du dessin, on retrouve le trait tout en rondeur de l’auteur. Le sujet n’apporte pas forcĂ©ment un maestria graphique, mais les expressions des personnages restent un vrai dĂ©lice. On notera des couleurs assez criardes. Est-ce l’impression ou un choix esthĂ©tique ? Difficile de le savoir. En tout cas, Ralf König possĂšde un trait parfaitement adaptĂ© Ă  son propos.

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« Prototype » ne rĂ©volutionne rien. MalgrĂ© tout, la lecture est plaisante et l’humour fait mouche. Une lecture sympathique pour les amateurs de relecture biblique. Ni plus, ni moins.

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Note : 13/20

Le jeu vidĂ©o – Bastien VivĂšs

LeJeuVidéo


Titre : Le jeu vidéo
Scénariste : Bastien VivÚs
Dessinateur : Bastien VivĂšs
Parution : DĂ©cembre 2011


Bastien VivĂšs a tenu ce qui Ă©tait certainement l’un des meilleurs blogs BD de la blogosphĂšre. Utilisant le copier-coller pour crĂ©er de longues conversations souvent absurdes, il a parfaitement su utiliser le principe du dĂ©filement vertical pour crĂ©er un effet de temporalitĂ© (renforcĂ© par les cases muettes). Fin 2011, la collection Shampooing lui ouvre les portes avec la publication de ses notes de blog. Et lĂ , curieusement, il est dĂ©cidĂ© de sortir pas moins de six volumes pesant prĂšs de 200 pages dont les parutions sont Ă©talĂ©es sur un peu plus d’un an. A dix euros le bouquin, ça fait cher le recueil de blog
 Trop pour moi qui dĂ©cidais de les lire en bibliothĂšque. Surtout que l’aspect thĂ©matique des ouvrages est plus ou moins rĂ©ussi. IntĂ©ressons-nous ici au jeu vidĂ©o dans ce qui est le premier opus publiĂ©.

LeJeuVidĂ©o1Le livre se prĂ©sente sous un format poche rappelant le manga. Chaque page comporte deux dessins (voire mĂȘme un seul pour des questions de mise en page) apposĂ©s verticalement. Chaque scĂšne prĂ©sente de nombreux copier-coller ou presque. Certaines modifications apparaissent entre deux cases parfois, mais cela reste lĂ©ger. Cela explique la pagination, car il n’y a pas tant de scĂšnes que ça. C’est clairement un choix d’édition et on comprend bien vite qu’avec un autre format, on aurait eu droit Ă  un seul recueil Ă  vingt euros.

Street fighter & joystick

MalgrĂ© cet effet de rĂ©pĂ©tition, le lecteur en a pour son argent. Les nombreux dialogues rendent la lecture relativement lente et si on a l’impression de tourner les pages Ă  toute vitesse, le bouquin nous occupe un certain temps. Pour « Le jeu vidĂ©o », Bastien VivĂšs est trĂšs Ă  l’aise et il n’y a pas vraiment de dĂ©chets dans ses histoires. La qualitĂ© des scĂšnes est constante et on sourit beaucoup. Mieux vaut connaĂźtre un peu les annĂ©es 90 car il en est beaucoup fait mention. On parle de joystick et de Street Fighter (visiblement un jeu qui a marquĂ© l’auteur). L’aspect nostalgique est trĂšs prĂ©sent, notamment dans les conflits gĂ©nĂ©rationnels.

Le dessin de Bastien VivĂšs est ici rĂ©ussi, mĂȘme si les copier-coller rendent l’exercice un peu biaisĂ©. Son dessin ultra-dynamique fait de touches de noir est reconnaissable et remarquable. Cela reste quand mĂȘme trĂšs statique. Il est cependant impressionnant de voir que l’auteur peut nous faire rire sans mĂȘme utiliser les expressions de ses personnages


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Si les choix Ă©ditoriaux sont contestables, la qualitĂ© de l’ouvrage ne l’est pas. DrĂŽle et un brin nostalgique, « Le jeu vidĂ©o » se lit avec grand plaisir et vous rappellera vos moments de jeunesse devant la console, un magazine sur les genoux, Ă  essayer de faire un coup spĂ©cial jusqu’à l’épuisement.

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Note : 15/20

L’infiniment moyen – Fabcaro

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Titre : L’infiniment Moyen
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : Fabcaro
Parution : Avril 2011


Dans « L’infiniment moyen », Didier Tronchet dit dans sa prĂ©face que Fabcaro « met beaucoup d’application Ă  ne pas ĂȘtre connu ».Et c’est bien dommage, car Fabcaro a du talent Ă  revendre ! « L’infiniment moyen » est un recueil de planches dĂ©jĂ  parues entre 2003 et 2011, notamment dans Psikopat, Bedaine et CQFD. Un florilĂšge sur 8 ans de dessin, on pourrait craindre un ensemble disparate. Heureusement, ce n’est pas du tout le cas.

« L’infiniment moyen » comporte trois types de planches. Les premiĂšres sont muettes et la chute est souvent un contre-pied complĂštement absurde. Les deuxiĂšmes sont plus classiques, avec dialogues et chutes finales (oĂč l’auteur se met parfois en scĂšne). Enfin, quelques illustrations complĂštent le tableau. Le tout est Ă©videmment entiĂšrement humoristique.

Un humour oscillant entre humour classique et humour franchement glauque.

La variation des situations et des personnages peut ĂȘtre pris comme un dĂ©faut et pourtant il est aussi rĂ©vĂ©lateur de la capacitĂ© de Fabcaro Ă  faire des blagues en crĂ©ant un contexte rapidement. Pas d’univers sur lequel se reposer, pas de blagues rĂ©currentes, uniquement de l’instantanĂ©. Et force est de constater que le tout est trĂšs drĂŽle, oscillant entre le classique et le franchement glauque. Il y en a pour tous les goĂ»ts.

Je tiens Ă  fĂ©liciter les personnes qui ont participĂ© Ă  la maquette de cet ouvrage. En effet, les diffĂ©rents types de planches sont parfaitement Ă©quilibrĂ©s entre illustration, muet et parlant. On croirait presque que c’est un ouvrage dessinĂ© pour l’occasion. On dĂ©couvre ainsi un Fabcaro possĂ©dant un vĂ©ritable univers, une ambiance pleine d’humour noir et dĂ©calĂ©. On est souvent surpris et les rires sont frĂ©quents lors de la lecture. Encore une fois, Fabcaro confirme tout le bien que je pense de lui.

Le style graphique de l’auteur est toujours aussi sympathique. Le trait est dynamique, tout en noir et blanc. C’est un vrai plaisir. Une mention spĂ©ciale est Ă  accorder aux visages qui semblent toujours sur la brĂšche, que ce soit d’angoisse, de colĂšre ou de dĂ©sespoir. Les personnages ne semblent jamais sereins (et ceux qui semblent heureux sont source d’angoisse pour les autres). Cela participe fortement Ă  l’ambiance noire qui se dĂ©gage des planches.

Au final, « L’infiniment moyen » est un recueil des plus rĂ©ussis. Certes, ce n’est peut-ĂȘtre pas le meilleur moyen de dĂ©couvrir Fabcaro, mais il comblera sans peine les adeptes de l’auteur et les lecteurs amateurs d’humour grinçant.

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Note : 15/20

L’Album de l’AnnĂ©e – Fabcaro

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Titre : L’Album de l’AnnĂ©e
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : Fabcaro
Parution : FĂ©vrier 2011


Il existe un exercice classique chez les auteurs de BD, c’est de rĂ©aliser un dessin par jour pendant un an. Nombreux sont ceux Ă  s’y essayer (notamment depuis l’avĂšnement des blogs BD), mais peu sont ceux qui vont au bout. Mais si faire ses 365 dessins est un but, un autre objectif est Ă©videmment de leur donner un vĂ©ritable intĂ©rĂȘt. Et pour ça, il faut un vĂ©ritable talent ! Ce talent, Fabcaro l’a sans aucun doute. Alors que vaut son ouvrage « L’album de l’annĂ©e », regroupant 365 dessins retraçant une annĂ©e de sa vie ?

Cet ouvrage, publiĂ© aux Ă©ditions de La CafetiĂšre, fait 53 pages, comme le nombre de semaines dans une annĂ©e. Intelligemment, l’ouvrage est dĂ©coupĂ© comme un agenda. On a droit au numĂ©ro de la semaine, les dates, un petit dessin de Fabcaro Ă  son bureau pour dessiner et une citation (par exemple : « Avril sous les eaux, Tintin au Congo »). VoilĂ  pour l’habillage. Mine de rien, cette prĂ©sentation a un vrai sens et augmente l’intĂ©rĂȘt de l’ouvrage. Outre les citations, les petits dessins forment Ă  eux seuls une petite histoire et mĂ©ritent une seconde lecture
 En plus de cet en-tĂȘte, on retrouve donc Ă  chaque fois sept dessins. En gros, un descriptif rapide (« je boucle mon album « Jean-Louis » sur le rotules) et un dessin qui l’illustre (Fabcaro, Ă©croulĂ© sur son bureau, essaye en vain d’ouvrir une biĂšre pour fĂȘter ça).

Des running-gags à trois mois d’intervalle

Il est Ă©vident qu’avec ce genre d’ouvrage, chaque illustration ne possĂšde pas un intĂ©rĂȘt Ă©norme et tout n’est pas drĂŽle. L’important est que l’auteur parvienne Ă  faire rire rĂ©guliĂšrement. Mission rĂ©ussie ! Fabcaro parvient rĂ©guliĂšrement Ă  nous faire sourire et rire avec son humour tout en autodĂ©rision. Or, ce n’est pas Ă©vident car Ă  certains moments, il n’a vraiment rien Ă  raconter ! Il utilise alors l’intĂ©rĂȘt d’un dessin par jour pour amener une rĂ©pĂ©tition bienvenue
 D’ailleurs, il est impressionnant de voir comme le projet est remarquablement gĂ©rĂ© sur une telle durĂ©e. Fabcaro parvient Ă  mettre des gags de rĂ©pĂ©tition Ă  trois mois d’intervalle
 Du grand art !

Evidemment, l’aspect autobiographique est essentiel ici. Les nĂ©vroses de Fabcaro sont d’autant plus visibles (il se prĂ©sente comme hypocondriaque). Cependant, ce qui change avec ses autres ouvrages autobiographiques, c’est que certains Ă©vĂšnements dramatiques arrivent pendant cette annĂ©e 2009. Au point que l’auteur se demande s’il doit continuer l’ouvrage. On le sent particuliĂšrement angoissĂ©, voire dĂ©primĂ© et on le voit lutter pour poursuivre sa bande-dessinĂ©e. Cela donne un aspect touchant, diffĂ©rent de l’autodĂ©rision habituelle.

C’est aussi l’occasion d’apprĂ©hender la vie d’un artiste auteur de bande-dessinĂ©e. Fabcaro y parle beaucoup de son travail (hĂ©sitations, nouveaux projets, angoisses, bouclages, etc). Pour ceux qui s’y intĂ©ressent un minimum, c’est trĂšs intĂ©ressant par exemple de voir que Fabcaro dĂ©clare avoir un « style de merde tout figé », ou encore qu’il dĂ©teste faire les couleurs


Graphiquement, c’est impeccable. Les dessins sont imprimĂ©s petit mais ne posent pas de problĂšme de lecture. On retrouve le trait de Fabcaro, noir et blanc et relĂąchĂ©. Evidemment, comme tout est petit, les dĂ©cors et dĂ©tails sont rares. Mais avec peu, Fabcaro sait renforcer son propos avec un dessin toujours expressif.

Si « L’album de l’annĂ©e » n’est pas l’album de l’annĂ©e, il est une preuve de plus que Fabcaro est un auteur de grand talent. Cet ouvrage se dĂ©vore de la premiĂšre Ă  la derniĂšre page sans jamais lasser. Pour les fans de l’auteur, c’est un livre Ă  ne pas manquer. Pour ceux qui ne connaissent pas encore Fabcaro, je vous conseille de dĂ©marrer par ses premiĂšres autobiographies.

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Note : 15/20

Habibi – Craig Thomson

Habibi


Titre : Habibi
Scénariste : Craig Thomson
Dessinateur : Craig Thomson
Parution : Octobre 2011


Craig Thomson avait marquĂ© les esprits avec la sortie de « Blankets », un rĂ©cit autobiographique fleuve oĂč il abordait entre autres son enfance et le fondamentalisme religieux. Changement d’ambiance ici avec « Habibi » sorti en 2011. C’est toujours aussi long (plus de 600 pages), mais c’est une fiction se passant dans un pays imaginaire tirĂ© des mille et une nuits Ă  une Ă©poque Ă©galement indĂ©terminĂ©e. Les rĂ©fĂ©rences Ă  la Bible laissent place au Coran. Le tout est publiĂ© chez Casterman dans la collection Écritures.

« Habibi » est l’histoire d’un petit noir, Habibi (aussi appelĂ© Zam) et de Dodola, une jeune femme arabe. Cette derniĂšre recueille Zam alors qu’il est encore un petit garçon. Elle-mĂȘme n’est mĂȘme pas encore vraiment une jeune fille, bien qu’elle ait Ă©tĂ© mariĂ©e. Elle est surtout une esclave en fuite. « Habibi » raconte donc leur destinĂ©es, sous forme d’une grande fable oĂč le pire leur arrive mais oĂč l’Amour finit toujours par triompher.

Deux personnages au lien unique.

Habibi3L’intĂ©rĂȘt du livre est basĂ© sur une relation trĂšs particuliĂšre qui unit les deux ĂȘtres. Dodola est Ă  la fois une mĂšre, une grande sƓur, une amie
 Puis, elle devient une source d’excitation pour Zam qui a bien du mal Ă  supporter ses coupables pensĂ©es. La duretĂ© de l’histoire (prostitution, viol, mutilation et j’en passe) donne de la force au propos, sur tout qu’il n’y a rien de vraiment gratuit dans la violence, tout sert l’histoire. Le tout s’englobe dans un milieu oĂč le dĂ©sert est roi et oĂč l’eau vaut de l’or.

A cĂŽtĂ© de tout ça, Craig Thomson ajoute des passages sur le Coran, les carrĂ©s magiques, l’écriture arabe
 Ces passages servent Ă  faire des parallĂšles entre l’histoire des protagonistes et les lĂ©gendes du Coran et de l’Ancien Testament. Cela donne un aspect onirique Ă  l’ouvrage, mais pour ma part cela m’a profondĂ©ment gĂȘnĂ©. Cela coupe rĂ©guliĂšrement la lecture et la narration et on finit par les lire en diagonales pour revenir Ă  l’histoire. L’auteur veut montrer qu’il connaĂźt la culture musulmane visiblement, mais Ă  vouloir ĂȘtre Ă©rudit, on en devient pompeux. Surtout que ces pages sont des prĂ©textes Ă  une surenchĂšre graphique (souvent magnifique) qui ne sert guĂšre la narration. Et comme on est devant un pavĂ© de plusieurs centaines de pages, on aurait apprĂ©ciĂ© quelques coupes.

Concernant le graphisme, c’est simplement splendide. Le trait au pinceau est une merveille et la narration est maĂźtrisĂ©e au plus haut point. Certaines planches sont classiques, d’autres beaucoup plus dynamique. Craig Thomson a l’intelligence de ne pas surcharger en permanence mais avec parcimonie, rendant les passages les plus forts d’autant plus impressionnants. Une vraie rĂ©vĂ©lation graphique, dans un noir et blanc des plus remarquables.

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« Habibi » est clairement un ouvrage Ă  lire. Puissant par son texte, dotĂ© de personnages attachants aux liens si particuliers et parfaitement maĂźtrisĂ© graphiquement, il vous captivera Ă  coup sĂ»r. Il est dommage que les passages oniriques et les nombreuses digressions n’alourdissent l’ensemble dĂ©jĂ  bien fourni en pagination.

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Note : 16/20

Amour, Passion & CX Diesel – Fabcaro & James

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Titre : Amour, Passion & CX Diesel
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : James
Parution : Avril 2011


J’ai dĂ©couvert il y a peu dans « Fluide Glacial » la bande-dessinĂ©e« Amour, Passion & CX Diesel ». CharmĂ© par l’humour absurde des planches, je me suis empressĂ© d’en faire l’acquisition. Cette BD est scĂ©narisĂ©e par Fabcaro, que j’avais dĂ©couvert avec « Jean-Louis et son encyclopĂ©die » et dessinĂ© par James, dont j’apprĂ©cie le dessin depuis que j’ai lu « Dans mon open-space ».

L’histoire de « Amour, Passion et CX Diesel » parodie les soaps operas amĂ©ricains type « Dallas » ou « Les feux de l’amour ». La famille Gonzales est en effet en Ă©moi : le patriarche, Harold, est atteint de la maladie d’Alzheimer. Sa mort semble alors imminente. ImmĂ©diatement, l’hĂ©ritage va devenir un enjeu crucial des diffĂ©rents enfants et leurs conjoints. Notamment la fameuse CX Diesel qui attise toutes les convoitises


On comprend en lisant le pitch que cette bande-dessinĂ©e est complĂštement dĂ©calĂ©e. Loin du luxe habituel des sĂ©ries amĂ©ricaines, on se retrouve dans une famille franchouillarde un peu (beaucoup ?) minable sur les bords. Leur grande bĂȘtise et leurs coups bas rappelleront inĂ©vitablement les grandes comĂ©dies italiennes telles que « Affreux, bĂȘtes et mĂ©chants ». Les hommes sont particuliĂšrement stupides, les femmes s’en sortant Ă  peine mieux.

La bĂȘtise des personnages portĂ©e Ă  l’absurde

L’aspect parodique est parfaitement assumĂ©. Ainsi, un enfant naĂźt dans la famille et trois hommes croient en ĂȘtre le pĂšre (avec le postier en prime). Les infidĂ©litĂ©s sont frĂ©quentes et tout le monde semble se dĂ©tester. La bĂȘtise des personnages est portĂ©e Ă  l’absurde. Ainsi, Jean-Mortens, bien que noir, n’est pas considĂ©rĂ© comme tel (mĂȘme lorsqu’il essaie de faire son coming-out
). L’ouvrage tient avant tout de sa galerie de personnage. Du pĂšre qui oublie tout, au beau-frĂšre chĂŽmeur qui s’invente un mĂ©tier, en passant par la belle-sƓur infidĂšle au dernier degrĂ©, sans oublier le frĂšre patron d’une boĂźte de nuit minable.

amourpassion-CXdiesel3L’hĂ©ritage est le fil rouge de la BD mais d’autres intrigues sont menĂ©es petit Ă  petit, rendant la lecture trĂšs agrĂ©able. Le tout est prĂ©sentĂ© par sĂ©quences de six cases carrĂ©es, amenant immanquablement une chute. Le tout est parfaitement maĂźtrisĂ© de bout en bout amenant jusqu’à la conclusion finale que je ne rĂ©vĂšlerai pas ici. L’humour est omniprĂ©sent et dense. On n’a pas d’impression de remplissage comme c’est parfois le cas dans ce genre d’ouvrages.

Le dessin de James est trĂšs Ă©lĂ©gant et adaptĂ© aux gags. Son trait simple et animalier renforce d’autant plus le cĂŽtĂ© parodique de l’ouvrage. Cependant, comme tout passe par le dialogue, on a une impression parfois statique de l’ensemble. Le dessin peine Ă  se renouveler parfois. Ce dernier est cependant mis en valeur par la colorisation de  BenGrrr. Alors qu’on s’attendrait Ă  des couleurs vives, les auteurs ont optĂ© pour des couleurs pastel beaucoup plus douces. Un choix judicieux Ă©tant donnĂ© le rĂ©sultat.

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« Amour, passion & CX Diesel » est donc une bonne parodie, complĂštement absurde. En ne se donnant pas de limite, les auteurs font mouche. Les mesquineries des uns et des autres sont vraiment ridicules et nous feront rire plus d’une fois. Comme dirait un des personnages : « Toujours la CX Diesel ! Ne peux-tu pas avoir un peu plus d’ambition ? »

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Note : 14/20

-20% sur l’esprit de la forĂȘt – Fabcaro

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Titre : -20% sur l’Esprit de la ForĂȘt
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : Fabcaro
Parution : Septembre 2011


Auteur actuellement trĂšs prolifique, Fabcaro a dĂ©veloppĂ© ses Ɠuvres sur la base d’un humour absurde et dĂ©calĂ©. Outre sa sĂ©rie d’ouvrages autobiographiques, l’auteur a Ă©crit « La clĂŽture », une bande-dessinĂ©e expĂ©rimentale oĂč personnages se mĂȘlent dans un joyeux bordel qui ne se comprend qu’une fois les derniĂšres pages lues. Fabcaro rĂ©cidive dans le mĂȘme style avec « -20% sur l’esprit de la forĂȘt », paru chez « 6 pieds sous terre », une maison spĂ©cialisĂ©e pour les expĂ©rimentations.

« -20% sur l’esprit de la forĂȘt » est difficile Ă  dĂ©finir. Sous couvert d’un bordel sans nom difficilement comprĂ©hensible au dĂ©part, c’est avant tout une Ɠuvre pleine d’humour et de tendresse sur la fin de l’enfance. On retrouve ainsi un Fabcaro qui joue aux cowboys. Suite Ă  une mauvaise imitation de Jean-Pierre Bacri, il se retrouve poursuivi par toutes les polices de l’état. Il faut dire qu’il a battu son adversaire (un playmobil) dans un duel Ă  mort oĂč il lui avait lancĂ© une feuille…

Incompréhensible et absurde au départ.

Un minimum d’ouverture d’esprit sera nĂ©cessaire pour apprĂ©cier cette BD ! ComplĂštement incomprĂ©hensible et absurde au dĂ©part, elle prend peu Ă  peu du sens. Ainsi, Fabcaro explique que quand il jouait dans les escaliers (avec ses playmobils justement !), il entendait en mĂȘme temps ce qui passait Ă  la tĂ©lĂ©vision. RĂ©sultat, quoi de plus normal que d’intĂ©grer des scĂšnes des Ă©missions de tĂ©lĂ© en plein milieu de l’histoire ?

20-surlespritdelaforet1Heureusement, on est rapidement happĂ© par l’humour ravageur de l’auteur. Fabcaro manie l’absurde comme peu en sont capables et fait mouche sans peine. MalgrĂ© un dĂ©calage souvent Ă©norme par rapport Ă  la trame principale, il parvient quand mĂȘme Ă  faire rire. Si bien qu’on s’accroche rapidement sans trop d’efforts jusqu’à ce que tout prenne sens. Car sens il y a ! Au fur et Ă  mesure, on dĂ©couvre un Fabcaro dont le mĂ©tier est incompris, empĂȘtrĂ© dans un quotidien trĂšs loin de ses idĂ©aux. Et quand les derniĂšres pages arrivent, on se retrouve Ă©mu, touchĂ© par cette histoire qui ne peut que nous rappeler notre propre enfance perdue. AprĂšs un ouvrage foutraque plein d’humour absurde, l’auteur nous donne une dose de nostalgie incroyable. D’un coup. Du grand art !

Le dessin de Fabcaro, trĂšs relĂąchĂ© et expressif est toujours un rĂ©gal. Il renforce sans peine son humour. Son noir et blanc est trĂšs Ă©lĂ©gant et bien plus riche qu’il peut paraĂźtre au premier abord. L’auteur s’autorise mĂȘme quelques digressions bienvenues.

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« -20% sur l’esprit de la forĂȘt » est une Ɠuvre exigeante et difficile d’accĂšs. Clairement expĂ©rimentale, elle n’oublie pas pour autant son but premier. DotĂ©e d’un vrai message, bourrĂ©e d’humour et Ă  l’impact Ă©motionnel insoupçonnĂ©, elle prouve l’immense talent de Fabcaro, capable de faire de ses ouvrages les moins accessibles les plus passionnants. Difficile en tout cas de refermer cette BD sans y repenser Ă  de nombreuses reprises. Et vous, de combien avez-vous bradĂ© votre esprit de la forĂȘt ?

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Note : 19/20

AĂąma, T1 : L’odeur de la poussiĂšre chaude – Frederik Peeters

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Titre : AĂąma, T1 : L’odeur de la poussiĂšre chaude
Scénariste : Frederik Peeters
Dessinateur : Frederik Peeters
Parution : Octobre 2011


Lorsque le premier tome d’ « AĂąma » est sorti, je me rappelle avoir Ă©tĂ© marquĂ© par sa couverture montrant trois personnages, dont une sorte de singe fumant un cigare
 Les critiques de l’époque Ă©tant on ne peut plus Ă©logieuse sur l’ouvrage, je m’étais empressĂ© de me le procurer. Le tout est scĂ©narisĂ© et dessinĂ© par Frederik Peeters et est publiĂ© chez Gallimard. Ce premier tome, intitulĂ© « L’odeur de la poussiĂšre chaude », pĂšse plus de 80 pages. C’est de science-fiction dont il va ĂȘtre question ici.

aama1cVelroc se rĂ©veille sur une planĂšte aride. A cĂŽtĂ© de lui, un singe dont la peau des jambes est nue. Et Velroc a perdu la mĂ©moire. Il va alors relire son calepin oĂč il note ce qui lui est arrivĂ©. Tout commence au niveau 1, lieu de perdition des ĂȘtres humains. Velroc abuse des drogues et gĂźt dans une flaque aprĂšs s’ĂȘtre visiblement battu. Et voilĂ  que son frĂšre lui tombe dessus. Son frĂšre qui, lui, a rĂ©ussi, et qu’il n’a plus vu depuis 10 ans. Ce dernier va alors lui proposer de l’accompagner dans une mission Ă  l’autre bout de la galaxie qui, Ă©videmment, va mal tourner.

Laisser le lecteur comprendre les mĂ©canismes de l’univers.

La science-fiction est un genre difficile. Beaucoup de choses ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© faites et, souvent, les auteurs sont un peu trop didactiques pour montrer la richesse de leur monde. Ici, Frederik Peeters reste en surface et laisse le lecteur comprendre les mĂ©canismes de son univers. L’histoire avance et on dĂ©couvre peu Ă  peu comment est rĂ©gie la sociĂ©tĂ©. La subtilitĂ© de l’entreprise est belle Ă  voir. Surtout que dĂšs que l’on part pour la planĂšte, Velroc fait office de naĂŻf et on dĂ©couvre avec lui les Ă©vĂ©nements.

aama1aAu-delĂ  de la science fiction pure, c’est avant tout les relations humaines qui sont au centre de cet ouvrage. Frederik Peeters utilise son univers pour servir une histoire et des personnages et non pas l’inverse. Et c’est tout ce qui fait la force de l’ouvrage. Le scĂ©nario est dense et n’hĂ©site pas Ă  digresser pour prĂ©senter les faces d’ombre de Velroc. En cela, ce premier tome est une grande rĂ©ussite. Il parvient Ă  prĂ©senter profondĂ©ment les personnages, un univers, mais aussi Ă  avancer dĂ©jĂ  beaucoup dans l’aventure. En comparaison, je trouve qu’on est au niveau du « Cycle de Cyann », pour comparer avec une sĂ©rie de science-fiction du mĂȘme type.

Le dessin de Peeters apporte une touche supplĂ©mentaire Ă  son scĂ©nario. Le dĂ©coupage est intelligent, le dessin marquant et le trait au pinceau trĂšs Ă©lĂ©gant. Les personnages sont trĂšs reconnaissables et expressifs. Une mention particuliĂšre est accordĂ©e au robot simiesque Churchill. Les dĂ©cors vont du dĂ©sert Ă  la ville tentaculaire, montrant la maĂźtrise pleine de l’auteur. Bref, j’ai Ă©tĂ© conquis par ce dessin qui sert parfaitement la narration et l’univers.

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Ce premier tome d’« AĂąma » est une grande rĂ©ussite. Contrairement Ă  beaucoup d’ouvrages, l’histoire a dĂ©jĂ  bien avancĂ© et le lecteur peut ĂȘtre confiant pour la suite. La densitĂ© du scĂ©nario, la complexitĂ© des personnages et le dessin de haut niveau font que l’on peut espĂ©rer voir Ă©merger l’une des meilleures sĂ©ries de science-fiction de ces derniĂšres annĂ©es. 

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Note : 18/20

Tu mourras moins bĂȘte, T1 : La science, c’est pas du cinĂ©ma ! – Marion Montaigne

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Titre : Tu mourras moins bĂȘte, T1 : La science, c’est pas du cinĂ©ma !
Scénariste : Marion Montaigne
Dessinatrice : Marion Montaigne
Parution : Septembre 2011


Marion Montaigne s’est crĂ©Ă© une forte rĂ©putation dans la blogosphĂšre grĂące Ă  ton blog « Tu mourras moins bĂȘte ». Dans ce dernier, elle se reprĂ©sente en Professeur Moustache (avec un moustache donc, curieux pour une femme !) ayant pour but de vulgariser la science. Avec un thĂšme original, Marion Montaigne s’est ainsi garanti une forte visibilitĂ©. Ajoutez Ă  cela beaucoup d’humour et vous avez un blog Ă  succĂšs !

Comme beaucoup de blogs cĂ©lĂšbres, « Tu mourras moins bĂȘte » est dĂ©sormais Ă©ditĂ© en format papier chez Ankama Editions. Cette conversion d’un numĂ©rique gratuit vers un objet papier payant est toujours dĂ©licate et pas toujours rĂ©ussie. Qu’en est-il ici ?

Ce premier tome est intitulĂ© « La science, c’est pas du cinĂ©ma ». Marion Montaigne s’attaque donc aux films et aux sĂ©ries qui, souvent, vulgarisent eux-mĂȘmes la science. On retrouve donc plusieurs chapitres : action, science-fiction et sĂ©ries tĂ©lĂ© (oĂč on retrouvera une analyse de Jurassic Park
). Ce regroupement en chapitres n’est pas forcĂ©ment trĂšs judicieux car il reprend des thĂšmes proches, apportant un peu de redite. Un mĂ©lange simple aurait peut-ĂȘtre Ă©tĂ© plus pertinent.

On prend alors pleinement conscience du travail effectué.

Car ce premier tome est trĂšs fourni. 255 pages sont au rendez-vous avec beaucoup de textes. Bref, il y a peu de chances que vous le lisiez d’une traite. On prend alors pleinement conscience du travail qu’effectue rĂ©guliĂšrement Marion Montaigne sur son blog. Alors que sur internet, la lecture verticale est choisie, ici on retrouve une lecture plus traditionnelle. Le tout est segmentĂ© (le plus souvent en trois cases verticales) et on s’aperçoit que de nombreuses pages constituent une seule note de blog.

La vulgarisation scientifique menĂ©e par Marion Montaigne est efficace et facilement comprĂ©hensible. Quelques chiffres et donnĂ©es sont soutenus par un humour grinçant trĂšs efficace. Il n’est pas rare que l’on rit devant les aventures du Professeur Moustache. C’est vraiment lĂ  oĂč rĂ©side la grande qualitĂ© de cet ouvrage : on apprend des choses tout en rigolant. Seul bĂ©mol : les liens que Marion Montaigne ajoutaient Ă  la fin de chaque note qui faisaient office de bibliographie ne sont Ă©videmment pas disponibles ici. Pour ma part, je n’allais pas les visiter et ça ne m’a jamais empĂȘchĂ© d’apprĂ©cier son blog !

Ce premier tome est orientĂ© sĂ©ries/films et possĂšde donc de nombreuses rĂ©fĂ©rences. MĂȘme si connaĂźtre les films en question n’est pas forcĂ©ment nĂ©cessaire pour apprĂ©cier les diffĂ©rentes histoires, c’est quand mĂȘme mieux. Concernant les films, je les avais (presque) tout vus ou au moins, j’en connaissais les grandes lignes. En revanche, je ne connaissais absolument pas les sĂ©ries et cela ne m’a pas empĂȘchĂ© de rire.

Le dessin, trĂšs relĂąchĂ© de Marion Montaigne avec des touches de couleur, n’est pas sans rappeler Reiser. De mĂȘme que ses techniques narratives d’ailleurs. Tout le monde n’aimera pas ce style de dessin Ă  l’aspect brouillon. Personnellement, je trouve que c’est un rĂ©gal !

Chaque dĂ©but de note commence par une carte postale qui pose une question au Professeur Moustache. Pour l’occasion, ce sont des auteurs qui les ont dessinĂ©es. On ne peut que saluer cette initiative. De mĂȘme, l’ouvrage en lui-mĂȘme est de trĂšs bonne qualitĂ©. Le papier est Ă©pais, l’ouvrage bien finalisĂ©. Clairement, l’acheteur n’aura pas l’impression de se faire avoir !

Au final, ce passage au format papier est rĂ©ussi. L’ouvrage est de bonne qualitĂ© et l’humour de Marion Montaigne fait mouche. Certes, les rĂ©pĂ©titions sont plus flagrantes en papier que sur une mise Ă  jour d’un blog, mais l’humour fait mouche bien souvent.

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Note : 15/20

Les ForĂȘts d’Opale, T7 : Les Dents de Pierre – Christophe Arleston & Philippe Pellet

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Titre : Les ForĂȘts d’Opale, T7 : Les Dents de Pierre
Scénariste : Christophe Arleston
Dessinateur : Philippe Pellet
Parution : Novembre 2011


« Les dents de pierre » est le septiĂšme tome de « Les forĂȘts d’Opale ». Cette sĂ©rie est nĂ©e il y a une dizaine d’annĂ©es de l’association de Christophe Arleston et Philippe Pellet. Le premier est un des auteurs les plus cĂ©lĂšbres de ces vingt derniĂšres annĂ©es grĂące au succĂšs de sĂ©rie telle que « Lanfeust de Troy », « Troll de Troy », « Le chant d’Excalibur » ou « Les naufragĂ©s d’Ythaq ». J’ai dĂ©couvert par contre les dessins de Philippe Pellet Ă  travers la sĂ©rie qui m’intĂ©resse aujourd’hui. L’album que j’évoque aujourd’hui est le dernier en date de cette sĂ©rie. Sa parution chez Soleil date de novembre dernier. D’un format classique, il se compose d’une petite cinquantaine de pages et est vendu Ă  prix proche de quatorze euros. La couverture nous plonge dans une ambiance sombre dans laquelle on reconnait la ravissante Sleilo. Elle semble apeurĂ©e par la vision d’un cadavre squelettique habillĂ© d’un long manteau. Cet opus nous offrirait-il des rĂ©vĂ©lations ?

La sĂ©rie est prĂ©sentĂ©e par les mots suivants sur la quatriĂšme de couverture : « Opale est le monde des forĂȘts. Le clergĂ© de la LumiĂšre y fait rĂ©gner un pouvoir assis sur la puissance des Pierres Magiques. Mais Darko est celui qui doit rĂ©aliser la ProphĂ©tie et faire revenir les Titans pour libĂ©rer les Cinq Royaumes
 AidĂ© du barde Urfold, de la jolie jongleuse Sleilo et du monstrueux Ghörg. Darko est plongĂ© dans une aventure oĂč se joue le destin d’un monde
 Une grande saga vivante, de la pure fantasy ! »

Ce rĂ©sumĂ© est le mĂȘme pour chaque album de la sĂ©rie. Il va sans dire que depuis le dĂ©but, ce cher Darko a fait du chemin. Il n’est plus le jeune garçon naĂŻf d’un village perdu dans la forĂȘt. Il a pris conscience de ses pouvoirs, commence Ă  les maitriser. Il prend conscience de son destin. Le groupe qu’il formait avec Urfold et Sleilo a recrutĂ© un nouveau membre prĂ©nommĂ© Tara. Elle est gĂ©nĂ©ral paladin et ne laisse pas indiffĂ©rent notre hĂ©ros. Les diffĂ©rents opus ont Ă©tĂ© autant d’étapes dans sa quĂȘte. Il cherche Ă  redonner vie aux Titans afin de libĂ©rer Opale de la gestion corrompue et dictatrice du clergĂ© de la LumiĂšre. Le dernier tome avait offert une vraie surprise en voyant le mĂ©chant mourir suite Ă  la manipulation de son ancien maitre. Cela pose une nouvelle sĂ©rie de questions dont j’espĂ©rais trouver quelques rĂ©ponses dans ce nouvel ouvrage.

Le dĂ©but ce tome est intĂ©ressant car nos hĂ©ros doivent affronter la Dorsale, Ă©norme chaine montagneuse. L’attrait de cette expĂ©dition est de nous changer de dĂ©cors. On quitte les forĂȘts et les citĂ©s mĂ©diĂ©vales pour un territoire inquiĂ©tant et d’un blanc immaculĂ©. On s’éloigne de la civilisation et j’espĂ©rais donc dĂ©couvrir un nouvel univers sur tous les plans. J’attendais Ă©galement que la trame change de braquet et ne se contente pas de nous offrir une nouvelle ampleur qui ne fait, finalement, pas tant que cela avancer le schmilblick. Pour rĂ©sumer la variation des lieux devait entrainer une prise d’ampleur de l’intrigue.

L’ensemble apparaĂźt brouillon.

La montagne de mes attentes va accoucher d’une toute petite souris qui n’avance pas. En effet, une fois l’album refermĂ©, j’ai vraiment le sentiment d’en ĂȘtre au mĂȘme point qu’en dĂ©couvrant la premiĂšre page. Les deux ou trois informations que nous offre cet ouvrage sur l’histoire auraient pu ĂȘtre narrĂ©es en une dizaine de pages plutĂŽt qu’en quasiment cinquante ! SincĂšrement, l’ensemble apparait brouillon. Je trouve que beaucoup de scĂšnes ressemblent Ă  du remplissage. Il est dĂ©jĂ  arrivĂ© que les auteurs nous offrent des « moments de transition » dans les tomes prĂ©cĂ©dents. Mais souvent, cela nous offrait un moment drĂŽle ou prenant qui fait qu’on Ă©tait tolĂ©rant sur le fait que l’intrigue n’avançait pas assez vite. Dans « Les dents de pierre », le cĂŽtĂ© lĂ©ger et divertissant est quasiment inexistant. Il n’est pas pour autant remplacer par une dimension dramatique qui aurait s’avĂ©rait captivante. On n’a ni l’un ni l’autre et en plus les Ă©vĂ©nements sont souvent sans intĂ©rĂȘt et semblent ĂȘtre dissociĂ©s de tout fil conducteur.

Le contenu narratif est donc d’une faiblesse rare. Il ne restait plus qu’à espĂ©rer que la forme compense la dĂ©ception du fond. Philippe Pellet nous offre une nouvelle fois des illustrations rĂ©ussies. Les dĂ©cors neigeux sont rĂ©ussis. De la mĂȘme maniĂšre, la partie de l’histoire se dĂ©roulant dans les grottes possĂšde gĂ©nĂ©ralement une vraie atmosphĂšre. Les autres parties sont moins originales concernant les lieux. Cela permet malgrĂ© tout au dessinateur de nous confirmer une nouvelle fois son talent dans sa transcription de ses ambiances de tavernes ou Ă©quivalent. Concernant les personnages, on a plaisir Ă  les retrouver. Je trouve d’ailleurs qu’il y a une vraie progression dans leurs traits par rapport Ă  notre rencontre dans le premier tome.

En conclusion, cet ouvrage m’a profondĂ©ment déçu. Il ne possĂšde quasiment aucun intĂ©rĂȘt dans l’avancĂ©e de l’histoire. Sorti du plaisir de retrouver les personnages, il y a relativement peu de choses Ă  en sortir. Les derniers tomes avaient montrĂ© des attraits certains. La chute est dure. Il ne me reste plus qu’à attendre patiemment la parution du prochain tome en espĂ©rant que l’arrĂȘt marquĂ© par « Les dents de la pierre » ne soit d’un accident de parcours. Mais cela est une autre aventure


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Note : 7/20