Guide sublime

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Titre : Guide sublime
Scénariste : Fabrice Erre
Dessinateur : Fabrice Erre
Parution : Mai 2015


Fabrice Erre est un des auteurs de bandes dessinées qui me fait le plus rire. Qu’il conte le quotidien d’un enseignant dans « Une année au lycée », celui de Zorro dans « Z comme Diego », ou narre la conquête spatiale dans « Mars », il sollicite intensément mes zygomatiques. J’ai donc accueilli avec un grand enthousiasme l’apparition dans les rayons de librairie « Guide sublime » en mai dernier. Il s’agit d’un ouvrage dont le format s’apparente davantage à celui d’un roman que d’un album classique. Edité chez Dargaud, le bouquin se compose de cent soixante-huit pages. Dès les premières pages, on y apprend que les strips de ce livre ont initialement été publiés dans la revue numérique « Mauvais esprit ».

Le Guide sublime est un dictateur. C’est son quotidien politique que nous sommes amenés à découvrir. Chaque planche présente un moment de la vie de ce chef d’état despote. Chacune peut être lue de manière indépendante. Cette structure narrative permet une lecture intense et rythmée.  Il s’agit donc d’un opus qui peut se picorer. Il n’est pas nécessaire de le terminer d’une traite. Je pense qu’il est plus pertinent de s’y plonger par petite dose. Cela permettra de savourer chaque bouchée plutôt que de risquer l’indigestion.

Le quotidien d’un dictateur.

GuideSublime1En effet, le caractère très excessif du personnage principal fait que j’ai eu le sentiment constant d’être immergé au beau milieu d’une crise d’hystérie. Le Guide hurle en permanence des décisions aussi incohérentes que dénuées de sens. Ne le voir jamais s’arrêter ou s’apaiser fait que cette lecture fatigue par moment. Cette frénésie transpire des pages. Par contre, le lire par petite touche permet de profiter davantage de l’humour caractéristique généré par la plume de Fabrice Erre.

Le casting de l’entourage du guide sublime nous est quasiment intégralement présenté sur la couverture. On y découvre ses ministres, sa garde rapprochée et une curieuse infirmière aux formes chaloupées. Il ne manque qu’un collègue dictateur, l’empereur Bogolo, qui jouera un rôle central dans la démarche de propagande de son acolyte. L’auteur ne s’embarrasse pas de personnages secondaires sans contact direct avec le chef. Fabrice Erre nous fait entrer dans les arcanes du pouvoir géré par ce fada mégalomane.

La thématique est un terreau attrayant pour faire pousser une œuvre drôle et délurée. Les premières pages démarrent sur les chapeaux de roue. Les caractéristiques de ce cher Guide sont sans équivoque : il est complètement fou ! Il fait honneur à toutes les caricatures du genre. La première planche nous le fait découvrir complètement hystérique en train de hurler que sa première décision sera de rendre obligatoire le port de la moustache. Le trait de Fabrice Erre traduit complètement le côté possédé du souverain. La mise en bouche est sans équivoque : le programme est annoncé.

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Pour conclure, je conseille de lire cet album par petite touche. Cela permettra de savourer l’imagination de Fabrice Erre sans pour autant subir le côté effréné de ce Guide sublime. L’auteur construit beaucoup de ces gags dans le même canevas. Cela peut faire ronronner la lecture si on la fait d’une seule traite. Je place cet album en-dessous des précédents opus de cet auteur. Néanmoins, il est reste habité par son univers caractéristique. Et ce n’est déjà pas si mal…

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Z comme Don Diego, T1 : Coup de foudre à l’hacienda – Fabcaro & Fabrice Erre

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Titre : Z comme Don Diego, T1 : Coup de foudre à l’hacienda
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : Fabrice Erre
Parution : Avril 2012


« Z comme Diego » est une nouvelle série née en avril dernier. Son premier tome s’intitule « Coup de foudre à l’hacienda ». Edité chez Dargaud, cet ouvrage se compose d’une quarantaine de pages. Son prix avoisine onze euros. Le nom de son scénariste a attiré mon regard vers cet album. Il s’agit de Fabcaro dont j’avais apprécié « Jean-Louis et son encyclopédie » ou « Steve Lumour, l’art de la winne ». J’avais trouvé ses opus très drôles. Dans « Coup de foudre à l’hacienda », il ne se charge pas des dessins. Cette tâche est confiée à Fabrice Erre dont je découvre le travail à cette occasion. Les couleurs naissent de la plume de Sandrine Greff. La couverture nous présente un Don Diego désabusé. Il est entouré de Zorro qu’on suppose être des usurpateurs. En effet, qui ne sait pas que Don Diego est à Zorro, ce qu’est Peter Parker à Spiderman…

La quatrième de couverture nous présente le synopsis suivant : « Don Diego, alias Zorro, avait déjà bien du mal à gérer sa double personnalité : l’arrivée de la belle senora Sexoualidad n’allait certainement pas arranger les choses… Une parodie avec de l’action, du rire, de l’émotion, des chevaux, des épées, des combinaisons, de la paella, de la bière et des hommes invisibles. »

zcommedondiego1bEn me plongeant dans « Coup de foudre à l’hacienda », deux sentiments contradictoires se mêlaient. J’étais curieux de découvrir cette parodie de Zorro qui est vraiment le héros de mon enfance. J’ai toujours gardé une tendresse pour la série télévisée en noir et blanc datant des années cinquante. Le petit monde de Don Diego, Bernardo, le sergent Garcia et des autres m’ont toujours passionnée et fait rire. Parallèlement, j’appréhende de ce type de série qui prétend jouer avec les codes d’un univers établi et connu. Souvent, le soufflé retombe très vite et la dimension commerciale de ce choix scénariste prend rapidement le pas sur l’imagination de l’auteur. J’étais donc curieux de voir si Fabcaro allait arriver à manipuler avec talent tous les aspects de cette célèbre communauté.

Des vannes variées à aucun moment répétitives.

L’ouvrage nous présente deux gags par page. Chacun se décompose en six cases carrées de taille identique. Cela impose à la trame de chaque scène d’être dense et bien construite parce que l’auteur n’a pas non plus trop de temps pour les digressions. Je vous avoue que les premiers gags m’apparaissent prévisibles et presque décevants. Mais rapidement une atmosphère agréable se dégage de la lecture et notre immersion dans l’univers créé par les auteurs se fait plus intense. La densité de qualité est plutôt bonne et chaque page fait naitre un sourire ou un rire franc. Fabcaro arrive à offrir des vannes variées qui ne s’avèrent à aucun moment répétitive. C’est une performance parce le défaut de la redite est souvent irrémédiable dans ce genre d’ouvrage.

Le scénariste arrive à construire sa parodie en exploitant parfaitement les codes de la série originale. Tous les personnages avec leurs caractéristiques propres sont exploités. L’aspect humoristique est l’atout principal de cet ouvrage qui chatouillent nos zygomatiques aisément. A défaut de nous faire pleurer de rire, la bonne humeur dégagée par la lecture est des plus agréables. De plus, le fait que Fabcaro utilise tous les aspects de « Zorro » m’offre une plongée en enfance que je savoure avec appétit. Je n’ai pas envie de vous donner des exemples qui vous gâcheraient la découverte. Mais sachez qu’on rigole avec plaisir des maladresses de tous les protagonistes.

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Le dessin  de Fabrice Erre correspond parfaitement au public visé par cet ouvrage. Tous les membres de la famille peuvent trouver quelque chose dans cet opus. Néanmoins, j’ai eu du mal à être conquis par son trait au début. Je le trouvais un peu brouillon et trop excessif. Mais une fois envahi par l’atmosphère de la série, son trait quasi caricatural correspond parfaitement au propose tenu par Fabcaro. Je pense donc qu’à défaut de marquer les esprits, les illustrations nées du trait de Fabrice Erre accompagne parfaitement le moment divertissant de lecture offert par cet ouvrage.

En conclusion, « Coup de foudre à l’hacienda » est une réussite. Il s’agit d’un ouvrage de qualité qui génère de la bonne humeur. Tout n’est pas homérique et l’ensemble n’est pas un chef d’œuvre. Malgré tout, dans la thématique de la parodie, il s’agit à mes yeux d’un des meilleurs du genre. Il est difficile de s’approprier un univers et de le tourner en dérision. Fabcaro s’en sort vraiment bien. Je pense donc que je lirai avec joie le second tome qui devrait paraitre dans quelques mois. Mais cela est une autre histoire… 

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Note : 13/20

Une année au lycée – Fabrice Erre

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Titre : Une année au lycée
Scénariste : Fabrice Erre
Dessinateur : Fabrice Erre
Parution : Avril 2014


Fabrice Erre est dessinateur de bande-dessinée. Mais comme nombre de ses collègues, il possède un « vrai » métier lui permettant de vivre dignement : enseignant d’histoire-géographie en lycée. Forcément, la tentation de raconter son quotidien face aux élèves était trop tentant. Voilà qu’il nous propose un ouvrage autobiographique, « Une année au lycée ». Le tout est publié chez Dargaud et pèse pas moins de 153 pages !

L’auteur démarre donc l’année avec la fin des vacances et termine le tout avec le début des vacances. On retrouve donc les premiers contacts avec la classe jusqu’au bac. Fabrice Erre a l’avantage d’avoir des secondes, des terminales (qui préparent le bac) et d’être professeur principal. Cela permet de balayer un large spectre de situations. Dès le départ, l’auteur nous prévient : oui, tout est romancé (heureusement d’ailleurs). Chaque scène est donc un condensé de vécu, clairement concentré pour en améliorer l’aspect comique.

On sent le vécu !

Fabrice Erre joue la carte de l’autodérision dès le départ. Il se dessine bien plus vieux qu’il ne l’est et n’hésite pas à se montrer sous un jour peu reluisant. Et c’est là où la bande-dessinée est réussie. Erre est un professeur normal : aussi bien il peut avoir des fulgurances pour adapter son cours à ses élèves (et même faire preuve d’ouverture dans les discussions), aussi bien il merdouille bien par moments ! L’humour fonctionne très bien et il n’est pas rare de rire devant les gags et remarques lues. C’est là où « Une année au lycée » supplante des BDs comme « Les profs ». On sent le vécu, l’absurde des remarques, les situations qui dérapent…

L’auteur nous propose deux types de scènes. Les premières sont classiques et montrent le prof avec ses collègues ou les élèves. Les deuxièmes sont des purs délires où Erre fait des parallèles entre un univers (la guerre par exemple) et l’enseignement. Elles sont globalement aussi réussie et cela permet de rythmer l’album qui pourrait paraître répétitif si les scènes de classe s’enchaînaient méthodiquement.

Au niveau du dessin, c’est quand même un peu léger. Les délires sont plus travaillés graphiquement mais les scènes de classe sont peu ouvertes à l’expérimentation graphique. L’auteur se contente de dessiner les personnages, qu’il fait très expressifs. En soit, ce choix est pertinent car l’auteur se focalise sur les réactions et les dialogues, qui font l’essence d’une classe. Le tout est colorisé en bichromie (sauf des exceptions lors des délires de l’auteur).

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« Une année au lycée » est un ouvrage réussi. En utilisant parfaitement les absurdités du monde du lycée, Fabrice Erre lui donne de la force par son trait. Quand on voit la tête du prof, très satisfait de voir les élèves grévistes ne pas arriver à faire se calmer une classe, tout est dit ! Un bel ouvrage, forcément un peu réservé à ceux pour qui l’éducation nationale n’est pas qu’un souvenir de jeunesse.

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Note : 16/20

Et pour poursuivre l’expérience : http://uneanneeaulycee.blog.lemonde.fr/

Mars ! – Fabrice Erre & Fabcaro

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Titre : Mars !
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : Fabrice Erre
Parution : Août 2014


J’ai découvert le duo formé par Fabrice Erre et Fabcaro en lisant les deux chapitres de « Z comme Diego », digression humoristique dans l’univers du célèbre héros masqué. J’avais beaucoup ri en suivant les maladresses de l’incompétent Diego dans son rôle de Zorro. Récemment, j’ai retrouvé avec plaisir Fabrice Erre quand il décrit son quotidien d’enseignant dans le sympathique et divertissant « Une année au lycée ». C’est donc avec plaisir que j’ai vu par hasard dans les rayons d’une librairie « Mars ! ». Cet ouvrage coécrit par les deux auteurs est de format carré et se compose de soixante-quatre planches. Edité chez « Fluide Glacial », il coûte quinze euros.

L’histoire est simple. Elle nous conte l’envol d’une navette française vers Mars. Nous suivons donc le point de vue des astronautes, du président de la République, des ingénieurs au sol et du français lambda qui vit l’événement devant sa télévision. Je ne vous dévoilerai pas tout ce qui se passe mais sachez que tout ce beau monde ne sort pas grandi de cette aventure spatiale !

La désacralisation de la conquête spatiale est hilarante.

Mars1De la même manière que dans « Z comme Diego », les pages se décomposent en scénette de trois cases contant chacune une anecdote délurée et décalée autour de ce projet d’ampleur. L’aéronautique n’en sort pas grandi mais par contre nos zygomatiques adorent ! La densité humoristique du propos est forte et la qualité constante du début à la fin. Les rebondissements et les surprises sont nombreux ! La désacralisation de la conquête spatiale est hilarante.

Cette lecture s’adresse à un public très large. Les vannes utilisent une grande variété d’ingrédients pour faire rire. L’immense majorité des chutes sont surprenantes. Chaque nouvelle scène alimente la curiosité du fait de sa qualité comique. L’attrait constant facilite l’immersion dans l’univers de cette aventure spatiale pas comme les autres. L’humour alimente l’humour et les rires se succèdent au rythme de défilement des pages.

Mars3Comme que je l’évoquais précédemment, les auteurs ne se contentent pas de nous faire le quotidien du cockpit de la station et du poste de commandement au sol. Nous découvrons également les arcanes de la gestion politique pour le moins originale de nos dirigeants. Nous ne passons pas non plus à côté des sentiments vécus par le français moyen qui voit devant sa télévision l’Histoire s’écrire. Cette diversité de points de vue alimente le concentré de drôleries qui compose ce  « Mars ! ».

Le dessin de Fabrice Erre est aisément reconnaissable. Je sais que certains lecteurs le trouvent bâclé et s’avèrent assez hermétique à son style. Je peux le comprendre aisément. Néanmoins, personnellement, je trouve que le trait coïncide parfaitement à avec le ton déluré et décalé de l’album. En tout cas, les couleurs vives qui accompagnent la lecture sont appréciables et participent à la bonne humeur dégagée.

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Pour conclure, « Mars ! » est une belle réussite. J’ai passé un très bon moment en le lisant et n’hésiterai pas à m’y plonger à nouveau pour redécouvrir les pérégrinations de ce groupe de bras cassés. Je ne peux donc que vous inciter à partir à la rencontre de cette aventure pas comme les autres…

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Note : 16/20