Titre : Ekhö, monde miroir, T4 : Barcelona
Scénariste : Christophe Arleston
Dessinateur : Alessandro Barbucci
Parution : Septembre 2015
« Ekhö » est le fruit d’un concept efficace. Cette série fait vivre les aventures d’une jolie demoiselle dans une réalité parallèle à la nôtre. Chaque opus fait voyager le lecteur à travers le monde. New York, Paris et Los Angeles ont abrité les pérégrinations de Fourmille et ses acolytes. Dans le dernier tome datant du mois de septembre dernier, c’est la capitale catalane qui accueillait tout ce petit monde. Intitulé Barcelona, l’album est accompagné d’une couverture présentant un bâtiment rappelant la légendaire Sagrada Familia.
Les choix narratifs des auteurs font que chaque intrigue peut être découverte indépendamment. Cette nouvelle histoire est précédée d’une page présentant l’univers d’Ekhö et les protagonistes principaux. Fourmille est l’héroïne. Elle a été catapultée dans ce monde au début de la saga en même temps que Yuri avec qui ils s’entendent comme chien et chat. La particularité de la demoiselle est de voir son corps accueillir bien souvent l’esprit de personnes décédées dans des circonstances obscures. Cette « rencontre » marque toujours le début de l’enquête qui sert de fil conducteur à la trame. Dans ce quatrième épisode, Fourmille est habitée par un chat. C’est une grande première et une bonne chose a priori. La richesse naît de la diversité.
Christophe Arleston est le scénariste de cette série. Comme beaucoup de bédéphile, je le connais à travers son travail sur « Lanfeust de Troy ». J’ai toujours gardé un œil sur son œuvre et ai pris plaisir à découvrir « Leo Loden », « Le chant d’Excalibur » ou encore « Les Maîtres Cartographes ». Par contre, certaines de ses productions sont de qualité inégale. « Les Naufragés d’Ythaq » ou « Les Forêts d’Opale » en sont des exemples marquants. Les premiers tomes sont réussis, les suivants frôlent l’imposture. Bref, cet auteur est talentueux mais n’arrive pas à assumer qualitativement la fréquence de parution qu’il s’impose. Néanmoins, « Ekhö » possède une identité agréable et divertissante qui m’a aisément persuadé de m’offrir ce voyage à Barcelona.
Des mondes parallèles.
Le concept de monde parallèle est un jouet idéal pour l’imagination d’Arleston. Dans chacune de ses histoires, le scénariste a toujours adoré offrir des allusions plus ou moins fines à notre quotidien et notre société. Avec Ekhö, l’espace d’expression dans ce domaine est sans limite. Les décors et le fonctionnement sociétal sont tous détournés de notre monde. La seule frontière est celle que se fixe l’auteur. Cet aspect-là est un des attraits les plus forts de le la saga. Ce quatrième tome possède évidemment cette richesse. Nous n’avons aucun mal à nous immerger dans une Catalogne qui nous est familière tout en souriant aisément du détournement des codes qui est fait. Certains gags sont moins réussis que d’autres. Mais leur densité fait qu’on accepte facilement les variations dans la finesse humoristique.
L’identité de l’album passe également par le trait tout en rondeur d’Alessandro Barbucci. Son style entre parfaitement dans le canevas heroïc fantasy chez les éditions Soleil. Il fait d’ailleurs partie du haut de gamme dans le genre. Les filles sont ravissantes, les décors plein de détails, l’action pleine de dynamisme. Les planches sont agréables et raviront un public très large. Les couleurs sont vives sans être révolutionnaires. Elles accompagnent parfaitement la bonne humeur que dégage la lecture.
Finalement, le seul léger bémol de l’album concerne l’intrigue en elle-même. Je l’ai trouvé un petit peu brouillonne. Les auteurs cherchent à multiplier les rebondissements. Mais les enchainements manquent quelque peu de subtilité. De plus, les moments hystériques des personnages et les scènes de poursuites ou de batailles gagneraient à être entrecoupés de moments plus légers. Cela permettrait au lecteur de reprendre son souffle plutôt que de vivre le quotidien d’un diable de Tasmanie. Le rythme de lecture est un petit peu saccadé. C’est dommage car cela empêche la trame de prendre une plus grande ampleur.
Pour conclure, Barcelona s’inscrit dans la continuité des opus précédents. Une certaine routine s’installe. Elle n’est pas désagréable même si j’espère toujours que la série change de braquet. J’ai toujours plaisir à retrouver Fourmille et ses amis mais j’apprécierai d’être davantage surpris. Peut-être la prochaine fois ? Mais cela est une autre histoire…
Ce qui manque à cette série, c’est un fil rouge pertinent et accrocheur. C’est le même problème qu’avec les Trolls de Troy actuels.
L’absence de fil rouge ne me dérange pas si chaque album possédait une identité et une originalité propre. L’univers pourrait servir de « fil rouge ». La fragilité de la série réside de mon point de vue davantage dans le manque de finesse et de densité du scénario…