Titre : Block 109, S.H.A.R.K.
Scénariste : Vincent Brugeas
Dessinateur : Ryan Lovelock
Parution : FĂ©vrier 2012
Ronan Toulhoat et Vincent Brugeas sont les auteurs dâune uchronie particuliĂšrement rĂ©ussie : « Block 109 ». Ce roman graphique paru il y a plus de quatre ans prend ses libertĂ©s avec lâHistoire en faisant assassiner Adolf Hitler le 22 mars 1941. Suite Ă son succĂšs, la sĂ©rie a fait des petits. Cinq spin-off sont nĂ©s depuis. Le dernier en date, Ă©ditĂ© cette annĂ©e chez Akileos, sâintitule « S.H.A.R.K. ». Câest sur cet album que se porte ma critique.
La quatriĂšme de couverture Ă©voque le contexte de lâhistoire : « Novembre 1946, le prisonnier Worth, membre du S.H.A.R.K., un parti politique raciste australien, est transfĂ©rĂ© au centre de dĂ©tention de Rabbit Flat, le plus grand camp de prisonniers dâAustralie regroupant prĂšs de 4000 dĂ©tenus de guerre allemands, dont une majoritĂ© de SS, ainsi que des activistes du S.H.A.R.K. »Â
à chaque opus son identité.
Chaque nouvel opus de la saga sâinsĂšre dans des contextes gĂ©ographiques et politiques diffĂ©rents. Chacun possĂšde une identitĂ© propre et la plupart du temps emballante. Le dernier Ă©pisode en date nâĂ©chappe Ă la rĂšgle en immergeant le lecteur en Australie au milieu dâune prison perdue au milieu de nulle part. Je dois vous avouer que le dĂ©cor mâattirait beaucoup. La perspective dâĂȘtre enfermĂ©e dans un huis clos carcĂ©ral semblait ĂȘtre un terreau fertile Ă une atmosphĂšre oppressante et envoĂ»tante. Il sâagit dâune recette scĂ©naristique classique mais qui, bien exĂ©cutĂ©e, peut offrir une savoureuse dĂ©gustation.
La narration dĂ©but par lâapparition dâun nouveau « locataire ». Worth est amenĂ© Ă jouer un rĂŽle central au cours des Ă©vĂ©nements qui nous sont contĂ©s. Sa prĂ©sence sur la couverture confirme ce statut Ă venir. Il sâagit dâune tĂȘte brĂ»lĂ©e qui a des rapports conflictuels avec lâautoritĂ©. Ce nâest pas original mais toujours efficace. A peine arrivĂ©, il envisage dĂ©jĂ de se faire la malle. Pour cela, il doit entrer en contact avec Otto, un ancien de la SS, qui sâavĂšre ĂȘtre le patron officieux des lieux.
Lâintrigue se construit donc autour de la mise en place dâun putsch. Evidemment, tout cela nâest pas un long fleuve tranquille. Otto et Worth doivent apprendre Ă se connaĂźtre et doser leurs confiances respectives. Il y a aussi le montage pratique de leur tentative de prise de pouvoir. Les auteurs font exister un grand nombre de personnages secondaires plutĂŽt rĂ©ussis. Ils participent Ă la crĂ©dibilitĂ© de cet univers. NĂ©anmoins, lâatmosphĂšre nâatteint jamais la densitĂ© que le pitch laissait espĂ©rer. Rien nâest bĂąclĂ©, loin sâen faut. Le travail est sĂ©rieux et appliquĂ©. Mais la sauce ne prend jamais autant que dĂ©couverte de la trame le prĂ©sageait. Lâhistoire se dĂ©roule avec plaisir mais sans ĂȘtre aussi dense que dâautres Ă©pisodes de la saga.
Ce nouveau tome se démarquait des précédents par un changement de dessinateur. TrÚs occupé par « Chaos Team », Ronan Toulhoat passait son tour pour illustrer ce « S.H.A.R.K ». Le travail est donc ici confié à Ryan Lovelock dont je découvre le trait à cette occasion. La transition se fait sans mal tant le style du nouveau est dans la ligné de celui de son prédécesseur. Que ce soit les personnages ou les décors, tout est réussi. Que ce soit les gros plans ou les visions larges, ils sont remarquables. De plus, les dessins participent activement à la nervosité qui habite les planches.
Pour conclure, « S.H.A.R.K. » est un acte intĂ©ressant de la grande piĂšce quâest « Block 109 ». MalgrĂ© tout, je nây ai pas retrouvĂ© lâintensitĂ© et la force de « OpĂ©ration Soleil de Plomb » ou « New York 1947 ». Il satisfera les adeptes de la sĂ©rie et rassurera les lecteurs qui apprĂ©hendaient lâabsence de Ronan Toulhoat aux dessins. Ryan Lovelock est aisĂ©ment adoubĂ© aprĂšs sa performance graphique dans cet album. « Block 109 » confirme son statut dâuchronie de qualitĂ©. Il ne me reste plus quâĂ espĂ©rer que les prochains tomes confirmeront cet Ă©tat de fait. Mais cela est une autre histoireâŠ
Note : 13/20