Titre : Le roi des ribauds, T1 : Livre I
Scénariste : Vincent Brugeas
Dessinateur : Ronan Toulhoat
Parution : Février 2015
« Le Roy des Ribauds » est une série apparue dans les librairies l’année dernière. Edité chez Akileos, cet ouvrage de près de cent cinquante pages présente une couverture intrigante. D’un fond noir apparaît un homme partiellement éclairé par une lueur qui pourrait être celle d’un feu. Il est face à nous, le regard dur, le visage marqué. Il tient une épée dans la main droite. Du sang en coule. Bref, il ne s’agit pas d’un rigolo. On peut supposer qu’il s’agit du Roy des Ribauds qui donne son nom à l’album. Il éveille la curiosité. Son charisme et le mystère qui l’entoure sont autant d’arguments qui donne envie de partir à sa découverte.
La première cause de mon attrait pour cet album est le nom de ses auteurs. Le scénariste Vincent Brugeas et le dessinateur Ronan Toulhoat forment un duo qui fait parler dans le milieu du neuvième art. Leur « Block 109 » est en passe d’être reconnu comme une œuvre majeure de l’uchronie. La voie parallèle qu’ils proposent au monde dans les années quarante est intéressante, originale et passionnante. Les spin-off gravitant dans cet univers m’ont tout autant captivé. J’ai également trouvé attrayant « Chaos Team », saga futuriste à la construction scénaristique assez unique. J’étais donc forcément attiré par leur Roy des Ribauds.
Le serviteur obscur des premiers Capétiens.
Je dois avouer que le titre de Roy des Ribauds m’était jusqu’alors inconnu. J’avais même envisagé qu’il s’agisse de création de toute pièce des auteurs. C’est en découvrant un appendice à la conclusion de cet album que j’ai découvert l’existence historique de ce personnage. En effet, Vincent Brugeas et Ronan Toulhoat nous propose un texte intitulé « Genèse et intentions » dans lequel j’apprends que le Roi des Ribauds était le surnom d’un serviteur obscur des premiers Capétiens, un roturier au service des rois. Sa charge était simple, mais primordiale, il se devait d’assurer la sécurité du roi. Il s’agit donc d’un homme de l’ombre au service des plus grands. Il est évident qu’il a toutes les qualités pour faire un héros réussi.
Le Roy des Ribauds possède des principes. L’un d’entre eux est que personne ne touche à sa fille. C’est la mauvaise idée qu’a eu Guilhem Poudevignes. Depuis, il est dans la ligne de mire du serviteur du roi. Il se met en quête du mécréant et a prévu de lui faire payer son crime. Le héros n’est pas un tendre : sa proie est assassinée pour ses actes. Ce qui aurait pu être en meurtre comme l’époque en connaît tant prend une toute autre ampleur quand son auteur apprend que Poudevignes était un espion du Roi possédant une information capitale. Il devient alors l’être le plus recherché par le monarque dont il a la mission de protéger la vie. La quatrième de couverture résume les enjeux : « Le roi réclame les têtes des assassins de Guilhem… nos têtes. »
Le personnage éponyme est une belle réussite. Dès la première scène, il inspire le respect et la peur. A aucun moment, le lecteur ne peut pas douter de la détermination de cet homme à mener à bien sa mission. L’aura qu’il semble dégager sur ses alliés et sur ses ennemis alimentent ce charisme. Les protagonistes secondaires sont finalement peu nombreux dans un ouvrage d’une telle longueur. Même si le héros occupe l’essentiel de la place, ils arrivent néanmoins à trouver leur place et participent à la construction de l’univers dans lequel se construit l’intrigue.
Le fil conducteur de ce premier tome est simple. Le héros doit enquêter sur un meurtre dont il est le coupable. Le concept est original et s’avère bien exploité par les auteurs. L’inextricabilité apparente de la situation attise naturellement l’intérêt. Le fait de devoir gérer cette situation des eaux troubles et les zones d’ombre de la cité est également attrayant. Parallèlement, dans les hautes sphères, les enjeux politiques sont forts et les « arrangements » nombreux. Cet ouvrage montre que l’Histoire ne peut s’écrire dans la lumière sans que certains actes soient commis par des anonymes dans l’ombre. Sans entretenir un suspense très intense, la lecture captive suffisamment pour que je sois curieux de découvrir la suite de cette histoire dans le prochain tome.
J’ai eu beaucoup de plaisir à retrouver les illustrations de Ronan Toulhoat. Je trouve que son coup de crayon est très personnel. J’ai apprécié son talent pour dégager des expressions diverses et variées de la part de ses personnages. De plus, il arrive à dégager l’atmosphère oppressante des rues. On a le sentiment de se noyer dans des labyrinthes sombres et angoissants. L’ambiance prenante de la lecture est en grande partie sublimée par son trait. Le travail sur les couleurs participe évidemment à la réussite de ces poursuites et batailles nocturnes. Enfin la variation de points de vue dans ses dessins permet aux scènes d’action d’être de petits bijoux.
Pour conclure, « Le Roy des Ribauds » est une agréable découverte. Cet ouvrage confirme le talent de son duo d’auteurs. Même si je garde une préférence pour « Block 109 », je dois avouer que leur immersion narrative dans le Moyen-Âge est plutôt réussie. Je suis d’ailleurs curieux de découvrir la suite de l’histoire dans le Livre II déjà paru en librairie. Il ne reste plus qu’à m’y plonger…