Titre : Quai d’Orsay, T1 : Chroniques Diplomatiques
Scénariste : Abel Lanzac
Dessinateur : Christophe Blain
Parution : Mai 2010
Le premier tome de « Quai d’Orsay » est sorti il y a un petit peu plus d’un an maintenant. Cela fait des mois que je me disais qu’il fallait que je le lise. Ce n’est que récemment que je me suis décidé à l’acheter et à pouvoir ainsi découvrir cet album dont j’avais entendu beaucoup de bien. Intitulé « Quai d’Orsay – Chroniques diplomatiques », ce bouquin est édité chez Dargaud dans un format imposant. En effet, la couverture apparaît plus rigide et les feuilles plus épaisses. L’histoire s’étale sur une centaine de pages. Le scénario est l’œuvre conjointe de Lanzac et de Blain. Ce dernier a également en charge les dessins. La couverture nous immerge au beau milieu d’une immense pièce aux tons dorés. Au centre de l’image se trouve un homme attablé à un bureau et plongé dans un livre. On suppose qu’il s’agit du ministre des affaires étrangères du fait du titre. La ressemblance physique avec Dominique de Villepin apparaît évidente.
Un ministre hyperactif.
L’histoire nous fait suivre le quotidien d’un jeune homme prénommé Arthur. Il a l’honneur d’être recruté par le ministre des affaires étrangères nommé Alexandre Taillard de Vorms. Il se voit confier la charge la plus importante dixit son nouveau supérieur : le langage. Il va donc devoir rédiger bon nombre de discours au gré des besoins et des humeurs du ministre. Mais tout ne sera pas simple. Car les envies du ministre sont bien plus dures à suivre et à assimiler que la complexité de la politique extérieure…
Comme je l’ai sous-entendu en introduction, il est évident que le personnage du ministre est inspiré très largement de De Villepin. D’ailleurs au cours d’une émission de télévision, l’auteur a même confirmé que rien n’a été inventé ni amplifié. Une fois le livre refermé, cet aveu est loin d’être rassurant ! En effet, ne pensez pas être plongé dans « La politique en BD ». Bien au contraire, cet ouvrage est un vrai spectacle. On ne s’ennuie pas une seconde. Aucun pré-requis politique ou économique n’est nécessaire. De toute façon le ministre n’en parle jamais !
En effet, bien que la narration se construit autour du quotidien d’Arthur, la vraie star est le ministre. Il change d’avis comme de chemise. Chacune de ses apparitions est digne d’un diable de Tasmanie. De plus, ses amis philosophes ou artistes ont bien d’influence sur sa politique que ses nombreux conseillers. Il se contredit en permanence. Il apparaît en quête permanente. Son rêve est d’entrer dans l’histoire grâce à un discours homérique qui marquera son époque. Ses grandes tirades sont chacune des grands moments de bonheur. Bien souvent, je me suis pris à rire tout seul dans mon lit d’une envolée lyrique de ce cher Alexandre. D’ailleurs son hyperactivité à brasser du vent est en décalage total avec l’apathie de son entourage. En effet, ses conseillers connaissent le personnage et ne lèvent plus vraiment un sourcil lors de chaque nouveau moment de grâce de leur patron. En ce sens, l’apport d’Arthur est intéressant. Il découvre cet univers en même temps que nous. Il n’est pas encore blasé et finalement il partage nos surprises et nos interrogations. Bien que composé d’une centaine de pages, cet album est d’une densité remarquable. Chaque page, chaque case, chaque dialogue est travaillé. C’est un travail vraiment remarquable.
En plus, il faut avouer que le style de dessin de Blain colle parfaitement avec le rythme de la narration. Il a une grande capacité à faire ressentir le mouvement. Cela fait que les grands discours du ministre devant ses conseillers prennent une ampleur incommensurable. La « folie » du personnage passe un cap supplémentaire quand au texte s’ajouter l’image. Cet aspect-là participe évidemment au plaisir de la lecture et à l’humour qui en découle. Quand on le voit partir dans son tourbillon, on se demande quand va-t-il s’arrêter. Il faut d’ailleurs dire que la politique apparaît comme un monde bien peu sérieux qui dépend finalement davantage des conseillers que des ministres.
Je trouve également les personnages très réussis. On n’a aucun mal à les accueillir. Aucun ne nous laisse indifférent et chacun amène quelque chose à la trame. Les couleurs sont plutôt chaleureuses même si les auteurs alternent les cases sans décors et les cases avec. Celles dessinées avec un fond blanc donne souvent une place ainsi plus importante au texte et éventuellement au mouvement. C’est savamment dosé.
Pour conclure, j’ai pris un plaisir énorme à me plonger dans ses « Chroniques diplomatiques ». Je pense même que je ne vais pas tarder à le relire pour profiter pleinement de chaque moment d’humour qu’elles m’offrent. Il s’agit d’un ouvrage assez unique dans son genre qui vaut assurément le détour. Il est vendu pour un petit peu moins de seize euros. A ce prix, cela ne se rate pas, je vous l’assure. Courrez-y !
Je crois que j’ai freiné des quatre fers pendant longtemps avant de passer à la lecture. Justement parce que comme toi, la politique en BD… ça ne me tentait pas plus que ça. Mais c’est vrai que la série a eu de bons retours (dans les lecteurs qui m’entourent notamment). Je me retrouve bien dans ta chronique. J’ai bien accroché avec ce diptyque d’autant qu’il m’a surprise : cette manière de faire de la politique est aux antipodes de la façon dont je me représentais les choses
Merci pour ton passage. Au plaisir de te relire…