Titre : Blake et Mortimer, T23 : Le bâton de Plutarque
Scénariste : Yves Sente
Dessinateur : André Juillard
Parution : Décembre 2014
« Blake et Mortimer » est une série qui a eu la capacité à s’offrir plusieurs vies. En effet, depuis le décès de son fondateur Edgar P.Jacobs, elle a été confiée à bon nombre d’auteurs qui ont eu pour mission de faire perdurer les aventures des deux célèbres britanniques. Même si toutes ses suites ne sont pas de qualité équivalente, je dois bien avouer qu’elles sont un hommage certain à cette grande saga. Je prends toujours beaucoup de plaisir à découvrir les nouvelles pérégrinations d’un des duos légendaires du neuvième art. Ma critique d’aujourd’hui porte sur le dernier épisode en date intitulé « Le bâton de Plutarque ». Il est l’œuvre conjointe d’Yves Sente et d’André Juillard dont c’est la sixième incursion dans cet univers.
La genèse d’une des aventures les plus mythiques du duo.
L’originalité et l’attrait de cet album résidaient dans l’insertion chronologique de son intrigue dans la grande histoire de Blake et Mortimer. L’action de « Le bâton de Plutarque » est antérieure à celle de mythique trilogie « Le secret de l’Espadon ». Je trouvais ce choix particulièrement audacieux et j’ai curieux de découvrir la genèse d’une des aventures les plus mythiques du duo. Ce choix scénaristique permet également à de nouveaux lecteurs de découvrir aisément la série à travers cet album. Les prérequis ne sont pas indispensables à la compréhension globale des enjeux.
« Le bâton de Plutarque » se déroule à quelques mois du débarquement allié en Normandie. Cette immersion au beau milieu de la Seconde Guerre Mondiale est intéressante car elle offre une uchronie originale. Sans être excessive ou maladroite, cette dimension historique apporte un écot positif à la trame. Le climat de guerre est une chape de plomb qui accompagne toute la lecture. Les menaces constantes sont habilement décrites par les auteurs et permettent au lecteur de les ressentir constamment. Dans ce domaine, le travail scénaristique est de grande qualité.
Au-delà de son intérêt historique, le scénario n’est pas dénué de qualité. Comme souvent dans la série, l’intrigue est dense. La toile d’araignée narrative s’étend pendant une grande partie de la lecture. Ce n’est vraiment que sur la fin que les auteurs nous offre un dénouement clair et une vision globale de l’ensemble. L’enchaînement des événements est bien dosé. Les temps morts sont inexistants et l’intensité ne fait que croître au fur et à mesure des pages. Cette plongée dans les services secrets est prenante. Je m’y suis baigné avec joie.
La trame fait coexister un grand nombre de protagonistes de tout bord et de tout genre. Leurs intégrations se font naturellement. Ils nous sont rapidement familiers et aucun n’est inutile. Yves Sente domine suffisamment son sujet pour ne jamais perdre son lecteur tout en lui amenant à un rythme soutenu un flux d’informations. Les soixante-quatre planches de l’album sont riches. Je ne doute d’ailleurs pas qu’une deuxième lecture me permettrait de saisir davantage les détails de cette mission aux nombreux arcanes. Le trait d’André Juillard facilite la compréhension. Il respecte avec talent le style Jacobs tout en veillant à ne pas égarer le lecteur dans un univers trop nébuleux. Du beau travail.
Pour conclure, « Le bâton de Plutarque » est un très bon cru. Il respecte parfaitement les codes de série tout en lui offrant un passé jusqu’alors inconnu. Le plaisir a été tel que je n’ai qu’une envie : me replonger dans « Le secret de l’Espadon » !