Titre : Undertaker, T2 : La danse de vautours
Scénariste : Xavier Dorison
Dessinateur : Ralph Meyer
Parution : Novembre 2015
La couverture du premier tome de « Undertaker » était agrémentée d’un autocollant le présentant comme un successeur digne de « Blueberry » dans l’univers bédéphile du western. La promesse était ambitieuse tant le héros créé par Jean-Michel Charlier et Jean Giraud est un monument culte du neuvième art. Par contre, je dois avouer que cet argument promotionnel avait pris une valeur intéressante en découvrant le duo d’auteurs à l’origine de cette nouvelle série. Xavier Dorison et Ralph Meyer ont déjà travaillé ensemble en faisant naître « Asgard », fresque viking très réussie. J’étais donc curieux de voir ce qu’allait donner leur immersion dans l’univers rude du grand ouest américain.
Le premier opus de cette saga s’intitule « Le mangeur d’or ». Le héros est un croque-mort au passé des plus obscurs. Il se voit confier une mission des plus originales et dangereuses. Un homme lui demande de transférer son futur cadavre au fond d’une mine qui a fait sa fortune. La particularité est que son client va se suicider la nuit suivante en avalant l’intégralité de sa fortune en or. Evidemment, les mineurs qu’ils employaient ne se montrent pas très conciliants en apprenant le projet de leur ancien patron. Cette balade funéraire devient rapidement une chasse à l’homme mort rempli d’or…
Un croque-mort charismatique.
Je suis tombé sous le charme de cet album. Le héros, les personnages, les décors, l’atmosphère, l’histoire… Tout est savamment dosé et mis en place avec talent. J’étais donc impatient de découvrir la suite des pérégrinations de ce croque-mort charismatique. Mon envie est d’autant plus forte que le dénouement du premier tome s’avérait assez intense sur le plus dramatique. Ma critique d’aujourd’hui porte donc sur le second opus « La danse des vautours ». Cet ouvrage est sorti en librairie à la fin de l’année dernière. La couverture ocre transpire de l’ambiance aride du désert. Le héros est en phase d’attente avec son fusil. Il est accompagné d’une horde de vautours qui semblent l’accepter comme l’un des leurs. Bref, il semblerait qu’il soit l’heure du combat final…
Le premier plaisir de la lecture est une histoire prenante. C’est ici le cas. La montée en puissance initiée dans l’épisode précédent se poursuit dans cette suite. Le croque-mort et ses acolytes ne connaissent plus aucun moment de répit. Les mineurs les chassent comme ils poursuivraient une bête sauvage. La violence les habite profondément. L’appât du gain leur fait perdre peu à peu toute humanité et toute rationalité. Cette évolution exponentielle est habilement transcrite par les auteurs et participe pour beaucoup à l’attrait ressenti pour l’intrigue. Une fin positive apparaît de plus en plus impossible au fur et à mesure que les événements s’enchaînent. J’avais le sentiment que les héros fuyaient en avant vers un cul de sac. Cette dimension irrémédiable de se diriger vers une issue fatale génère une atmosphère de lecture passionnante.
Cette sensation est amplifiée par l’empathie que j’ai ressentie à l’égard des personnages principaux. J’ai déjà évoqué le croque-mort qui donne son nom à la série. Sa personnalité, ses nombreux talents et son côté taciturne en font un héros de bandes dessinées très réussi. Je ne vous le décrirai pas davantage car découvrir ses différentes facettes fait évidemment partie des charmes de la lecture. Il est accompagné dans sa quête par deux femmes, anciennes employées du cadavre. Elles possèdent toutes les deux une personnalité forte qui inspire le respect. Elles apportent chacune un écot intéressant à l’équilibre de la caravane en mission. Les équilibres et les relations dans le trio sont savamment maîtrisés par les auteurs à la fois dans les dialogues que dans l’écriture des scènes.
Puis-je évoquer un western sans donner mon point de vue sur le travail graphique sur les décors ? Evidemment, non. Ralph Meyer confirme sa capacité à donner vie des univers captivants. Il arrive à offrir une densité réaliste à une ville perdue au milieu de nulle part où la seule vie sociale semble se réduire à boire un coup au saloon. Parallèlement, cela ne l’empêche pas de donner vie au désert avec un talent proche de celui de Jean Giraud, ce qui n’est pas rien. Enfin, il manipule aussi bien les décors arides que les scènes nocturnes ou pluvieuses. Sa palette semble sans limite et donne ainsi l’ampleur méritée à un scénario remarquable. Je me dois également de citer Caroline Delabie dont le travail sur les couleurs participe évidemment à la réussite de l’ensemble.
Pour conclure, La danse des vautours conclue avec maestria la quête originale de ce croque-mort pas comme les autres. La lecture ne connait aucun temps mort, bien au contraire ! Les rebondissements et le rythme ne nous laisse pas le temps de souffler et nous permet de vivre au plus près la lutte constante des héros. L’agréable surprise qui a accompagné le dénouement est la découverte sur la quatrième de couverture de la future parution d’un troisième opus intitulé L’ogre de Sutter Camp. Je dois vous avouer que je pensais avoir affaire à un diptyque et suis bien heureux de m’être trompé. Il ne reste plus attendre… Mais cela est une autre histoire…