Titre : Pierre Tombal, T30 : Questions de vie ou de mort
Scénariste : Raoul Cauvin
Dessinateur : Marc Hardy
Parution : Avril 2014
Pierre Tombal est un héros qui est né pour moi dans la bibliothèque de mes parents. J’ai lu et relu la petite quinzaine d’album du célèbre fossoyeur qui agrémentait les étagères familiales. Les années passant, je n’ai jamais coupé le lien avec ce héros assez unique dans son genre. Je m’offre régulièrement un recueil de ses aventures comme on s’autoriserait une jolie pâtisserie au détour d’une rue. Le dernier des épisodes que je me suis offert est le trentième de la série. Il s’intitule « Questions de vie et de mort ». Sorti en avril dernier, il est l’œuvre conjointe du scénariste Raoul Cauvin et du dessinateur Marc Hardy. Les couleurs sont confiées au Studio Cerise.
Le site BD Gest’ (www.bdgest.com) présente l’album avec les mots suivants : « Qui a dit qu’avec la mort, tout s’arrête ? Certainement pas Pierre Tombal, qui gère au quotidien ses pensionnaires du cimetière avec leurs hauts, leurs bas, leurs doutes et leurs chamailleries. Perpétuellement taquinée par la Vie, Mme la Mort n’entend pas céder un pouce de terrain aux effronteries des uns et des autres. Œil pour œil, dent pour dent, telle est sa devise ! Et ce n’est pas toujours de tout repos… »
Pierre Tombal est fossoyeur. Nous partageons son quotidien tout au long des quarante-cinq planches qui se découpent en gags allant chacun de une à trois pages. Les auteurs nous font visiter un cimetière tout au long de la lecture. Les rencontres sont nécessairement originales et cocasses. Je trouve l’idée inédite et habilement exploitée depuis tant d’années. J’étais confiant quant au bonheur que m’inspirerait ce nouveau tome.
Pourquoi construire une série humoristique au milieu des tombes funéraires ? Ce sont des lieux généralement associés à la douleur, la tristesse, l’abandon ou la perte. Les blagues s’appuient rarement sur cet endroit-là et les comédies naviguent peu dans ces eaux. Cela rend l’idée intrigante et intéressante. Elle attise la curiosité. Le potentiel comique du concept était nébuleux mais le jeu méritait d’être tenté. La plume de Raoul Cauvin allait valider ce choix. La première réussite est son héros. Pierre Tombal est un fossoyeur sympathique et attachant. Il se montre accueillant envers le lecteur. Ce n’est pas la moindre des qualités tant elle semble antinomique des décors qui l’abritent. Il arrive à rendre son métier passionnant et plein d’aventures.
“La Faucheuse devient la vraie star de l’histoire. “
Les premiers tomes se contenaient au monde des vivants. Au fur et à mesure de la parution des albums, d’autres protagonistes sont intervenus. Les premiers à entrer dans la danse sont les locataires des lieux : les morts. Ils interagissent avec le fossoyeur et les visiteurs et font ainsi naître une corde scénaristique riche. Enfin, les auteurs ont personnalisé la Mort et la Vie. L’idée est prenante car la Faucheuse devient même la vraie star de l’histoire.
Cette diversité d’angles d’attaque permet de varier la structure des gags. A ce niveau-là, ce trentième opus est une réussite. Depuis toujours, Pierre Tombal conte aux visiteurs de son cimetière des causes ou des circonstances de décès abracadabrantesques. L’imagination de Cauvin dans le domaine n’est pas éculée. Il offre des anecdotes très drôles mettant en jeu un accident d’avion ou une manœuvre de Heimlich par exemple. Mais la vie dans ce lieu de repos éternel ne se résume à cela. La dimension professionnelle du fossoyeur est utilisée pour nous faire rire. Le vidage de l’ossuaire devient un moment très plaisant pour le lecteur.
Une société de l’au-delà identique à celle des vivants.
Mais les auteurs ne se contentent d’exploiter le lieu du côté des vivants. Les morts sont les vraies stars de cet album. Un des principes de base posé par le scénariste est que la société de l’au-delà est régie d’une manière identique que celle qui nous est familière. Il est désopilant de voir un mort refusé de voir sa tombe délocalisée, de subir les excès d’un mort interné psychiatrique ou de découvrir la manière utilisée par un défunt pour répondre à son courrier. Là encore, le terreau narratif s’avère très fertile.
Il reste un dernier axe comique à l’aura certaine : la Mort. Même si elle cohabite avec la Vie dans le quotidien de Pierre Tombal, c’est elle qui est la vraie star. Il faut dure que la découvrir sous sa capuche brune escortée de sa légendaire faux génère une plus forte personnalité que la jeune fille qui représente la Vie. Tout en conservant son pouvoir de nuisance certain, la grande faucheuse possède ici des faiblesses. Cet album l’expose dépressive, jalouse, heureuse, dans le doute, reconnaissante, méchante… Bref, l’échantillon émotionnel est large et présente une vision des plus originales de la Mort. Cet axe est parfaitement cultivé dans « Questions de vie et de mort » pour la plus grande joie du lecteur.
Le dessin de Marc Hardy accompagne merveilleusement les gags. Son style possède une vraie identité et il se retrouve qu’elle s’accorde avec le ton de la narration. Pierre Tombal est un héros au caractère graphique certain. Les différents visiteurs qui agrémentent les histoires sont également bien construits. Enfin, j’apprécie particulièrement les expressions des morts que je trouve hilarantes. Pour conclure, « Questions de vie et de mort » est un bon cru. Il est rare de voir un album composé de gags courts être d’une qualité constante. C’était un plaisir de la lire et ce sera une joie de s’y replonger à l’occasion…
Note : 14/20
” Les dessins sont confiés au Studio Cerise.”
Les couleurs, plutôt, non?
Ça fait bien longtemps que je n’ai plus lu Pierre Tombal, je serais curieux de voir ce que c’est devenu depuis le temps.
Bonne remarque. Tout comme toi, j’avais perdu de vue cet héros et l’ai retrouvé avec plaisir il y a quelques années…