Titre : Quai d’Orsay, T2
Scénariste : Abel Lanzac
Dessinateur : Christophe Blain
Parution : Décembre 2011
Le premier tome de « Quoi d’Orsay » avait fait sensation dans le monde de la BD. Servi par un dessin nerveux de Christophe Blain, Abel Lanzac racontait son expérience dans les cabinets ministériels et plus précisément celui des affaires étrangères. Si le ministre s’appelle Alexandre Taillard de Worms, c’est bien de Dominique de Villepin qu’il s’agissait. Les ressemblances, d’abord troublantes, se faisaient évidentes. On y découvrait le quotidien de ces gens qui assistent un ministre sous les yeux d’Arthur Vlaminck, avatar d’Abel Lanzac.
Bien plus qu’un simple documentaire.
Évidemment, ce deuxième tome ne peut pas autant surprendre que le premier. Abel Lanzac opère donc avec intelligence dans son scénario. Ainsi, il y est question de la guerre au Lousdem et d’armes de destruction massive (bref, de l’Irak). Alors que le premier épisode parlait d’événements moins connus, ici c’est beaucoup plus direct. C’est une véritable relecture des dessous de la politique étrangère française lors de cette crise internationale. Si tous les protagonistes sont renommés, on les reconnaît sans peine. Ça en devient d’ailleurs presque un jeu !
Le personnage d’Abel Lanzac change lui aussi. D’abord complètement perdu dans les premières chroniques, le voilà désormais parfaitement intégré à l’équipe. Un habitué en somme. Dès les premières pages, il essaie de se ménager un moment pour tirer son coup entre les réunions, c’est dire… D’autres problématiques vont alors se dégager : comment avoir une vie « normale » quand on est si proche du ministre (et la réponse est simple : c’est impossible) et pire encore : comment rester dans ses bonnes grâces ? C’est un beau rebond dans ce deuxième opus qui est exécuté par Lanzac.
Le tout est construit de façon plus précise que l’ouvrage précédent selon des épisodes chronologiques. Mais chaque épisode a aussi un thème qui lui est rattaché. Si bien que malgré la densité du tout, on a vraiment du mal à arrêter sa lecture en cours. Le travail de Lanzac est bien loin d’un simple documentaire. Il anime ses personnages, les dialogues sont ciselés et marquants. Et dans ce groupe de courtisans, on arrive même à être ému… Du beau boulot !
Le trait de Christophe Blain, dont je suis un fan absolu, est vraiment très adapté à cet univers en animation constante. L’effervescence est parfaitement rendue avec un naturel incroyable. Il est vraiment plaisant de voir une telle osmose entre le dessin et le texte. Les décors sont dépayseront à de multiples reprises, rappelant qu’être proche du ministre des affaires étrangères, c’est avant tout voyager !
Si l’aspect documentaire des « Quai d’Orsay » est l’un de ses plus grands atouts, il serait dommage de reléguer cet ouvrage à une description de Dominique de Villepin. C’est une grande bande-dessinée avec un vrai rythme, des dialogues souvent très drôles malgré des situations de tension et une histoire bien orchestrée. Car on a beau savoir comment tout ça va se finir, il y a un vrai suspense… De plus, les deux niveaux de l’histoire (au niveau national avec Taillard de Worms et au niveau personnel avec Vlamink) donnent une grande densité à l’ouvrage. Une œuvre à part. Une œuvre originale. Une œuvre majeure.