Titre : Canardo, T23 : Le vieux canard et la mer
Scénariste : Hugo Sokal
Dessinateurs : BenoĂźt Sokal & Pascal Regnauld
Parution : Octobre 2013
Canardo et moi, câest une grande et vieille histoire dâamour. Jâai dâabord dĂ©couvert les premiers ouvrages, noirs, sales et dĂ©sabusĂ©s⊠Une vraie rĂ©vĂ©lation ! Le tout a dĂ©sormais bien changĂ©, sans pour autant me dĂ©ranger. LassĂ© du dessin, Sokal a acquis lâaide de Pascal Regnauld afin de se concentrer sur le scĂ©nario. Car câest avant tout les dialogues qui intĂ©ressent lâauteur. On a donc dĂ©sormais un Canardo trĂšs ancrĂ© dans la Belgique et une bande-dessinĂ©e qui est avant tout une satire sociale Ă lâhumour bien trempĂ©. Ici, câest Hugo Sokal qui sâoccupe du scĂ©nario. Il avait dĂ©jĂ co-scĂ©narisĂ© les prĂ©cĂ©dents opus. Les rĂŽles sont un peu flou dans « Canardo », mĂȘme sâil semble acquis que Pascal Regnauld assure la majoritĂ© du dessin, bien que son nom ne soit crĂ©ditĂ© quâen terme de « collaboration » dans lâouvrage⊠PassĂ©s ces considĂ©rations sur qui fait quoi, voyons si ce millĂ©sime, intitulĂ© « Le vieux canard et la mer », vaut la lecture. Le tout est toujours publiĂ© chez Casterman sous la forme dâun album tout ce quâil y a de plus classique.
Dans cet ouvrage, lâinspecteur Canardo fait la nounou⊠Sa sĆur est Ă la clinique et il doit sâoccuper de son petit neveu. Ce dernier, comme tous les petits de son Ăąge, est fan de Momo le MĂ©rou (dont le parallĂšle avec NĂ©mo est Ă©vident) dont le merchandising fonctionne Ă plein tubes. Si bien que la pĂȘche au mĂ©rou Ă pois rouges est dĂ©clarĂ©e interdite⊠HĂ©las, le Koudouland a une Ă©conomie qui dĂ©pend entiĂšrement de cette pĂȘche. Et le Belgambourg, ancienne puissance coloniale, ne lâentend pas de cette oreille⊠Elle missionne Canardo sur place.
Une grande densitĂ© de rĂ©flexions sociĂ©tales et d’humour.
Cette histoire fait la part belle au neveu de Canardo qui devient un personnage central de cette bande-dessinĂ©e. A travers lui, il critique vertement les nouvelles gĂ©nĂ©rations et les conflits inhĂ©rents Ă la culture et consommation de masse. Dâautres termes se mĂȘlent comme la cĂ©lĂ©britĂ© facile et factice dans notre univers mondialisé⊠La densitĂ© des rĂ©flexions et lâhumour avec lequel tout cela est traitĂ© est la vraie force de lâouvrage. Jâai trouvĂ© cette partie particuliĂšrement rĂ©ussie. On sourit beaucoup, il y a des idĂ©es Ă foison⊠Car Ă cĂŽtĂ© de cela, on suit Ă©galement la grande duchesse, un des personnages les plus rĂ©ussis de la sĂ©rie, qui vient rendre visite Ă son « ami » prĂ©sident. Bonjour le nĂ©ocolonialisme et tout ce qui va avec⊠« Canardo » sait vraiment ici capter lâair du temps et mettre le doigt sur les dĂ©rives de nos sociĂ©tĂ©s.
Au niveau du dessin, Pascal Regnault fait le travail. On est en terrain connu. Je trouve cependant la gestion des phylactĂšres un peu hasardeuse. Ce nâest pas nouveau, mais lâaspect « photoshop » des bulles en est parfois gĂȘnant. Je trouve aussi les couleurs un peu trop criardes. Clairement, le passage Ă lâinformatique de certains aspects de la sĂ©rie nâa pas Ă©tĂ© une franche rĂ©ussite. Cependant, cela ne gĂȘne pas la lecture pour autant, loin de lĂ . Lâunivers animalier de Canardo est un modĂšle du genre.
Jâai Ă©tĂ© trĂšs enthousiaste Ă la lecture de ce « Canardo ». Le cru 2013 est un bon cru, avec beaucoup dâhumour et dâallusion Ă notre monde. Câest toujours Ă©tonnant de voir quâaprĂšs tant dâannĂ©es et dâĂ©volutions, je puisse ĂȘtre autant heureux de lire cette sĂ©rie qui, clairement, ne se repose par sur ses lauriers. Un exemple Ă suivre !