Barracuda, T1 : Esclaves – Jean Dufaux & JĂ©rĂ©my

barracuda1


Titre : Barracuda, T1 : Esclaves
Scénariste : Jean Dufaux
Dessinateur : Jérémy
Parution : Octobre 2010


« Esclaves » est le titre du premier tome d’une des dernières séries scénarisées par Jean Dufaux. Cette dernière s’intitule « Barracuda ». Avant même de lire le nom de son auteur, cet album avait attiré mon regard par sa couverture. On y découvrait un pirate particulièrement réaliste qui ne peut pas laisser indifférent celui qui le regarde dans les yeux. Cet album est édité chez Dargaud, il coûte environ quatorze euros. Jean Dufaux est un auteur célèbre du neuvième grâce à des séries comme « Murena », « Djinn », « Croisade », « Jessica Blandy » ou encore « Complaintes des Landes perdues ».Cela offrait le gage d’une certaine qualité pour cette nouvelle saga née l’année dernière. Par contre, les dessins sont l’œuvre d’un inconnu à mes yeux nommé Jérémy.

L’histoire débute par l’attaque d’un navire par des pirates. Leur chef est Blackdog et sa devise est la suivante : « Pas de pitié, pour personne, jamais ». Il est secondé par son fils Raffy. Les seuls à être épargnés sont une noble espagnole et deux adolescents et un prêtre. Elle prétend posséder la carte pour mener au diamant du Kashar. La jeune fille est amenée à être vendue comme esclave. Le jeune garçon déguisé en fille suivra le même trajet. C’est ainsi qu’ils accostent à Puerto Blanco où leurs destins vont se séparer et se décider au cours d’enchères sur un marché…

Une aventure de pirates

Le principal attrait de cette série est d’être une aventure de pirate. La couverture laisse présager que le personnage principal à du charisme. On n’est pas déçu sur ce plan-là. On prend plaisir à naviguer sur son navire et on est curieux d’accoster sur ses îles régulées par les lois de la piraterie. L’immersion dans cet univers est incontestablement une grande réussite. La grande galerie de personnages est crédible. De plus, les décors apparaissent réalistes. On n’a aucun mal à se croire au milieu de ses flibustiers sur une terre aux lois peu orthodoxes et aux codes sociaux plutôt inquiétants. 

Au-delà de ce dépaysement, « Esclaves » nous offre une intrigue intéressante. La trame se construit autour du trio d’adolescents que sont Raffy, Emilia et Maria. Le premier est le fils de Blackdog. Il semble dépourvu de sentiments sorti de la haine et de la colère. Le second, Emilia, est en fait Emilio. Déguisé en femme pour sa survie, il mène donc une double vie qui ne le laisse pas indifférent. Enfin, Maria, fille de noble est la plus charismatique à mes yeux. Elle a le regard dur et malgré son jeune âge et sa condition génère le malaise auprès de ceux qui s’approchent d’elle. La richesse de ses trois personnages apparait remarquable. Voir leurs destins s’entremêler rend la lecture passionnante. On suit trois personnages aux personnalités complexes évoluer dans un milieu dur et compliqué. Tous les ingrédients sont présents pour nous ravir.

Le décor est bon, les protagonistes sont envoûtants, il ne restait plus qu’à se voir offrir une trame réussie. C’est le cas. Le fait que l’histoire commence par un abordage nous met tout de suite dans le bain. Le rythme ne diminue jamais. On se trouve au beau milieu d’un marché aux esclaves. Puis la première nuit passée sur l’île est d’une grande intensité dramatique. La lecture est assez intense. Au cours des pages qui défilent, on voit apparaître des informations mais également les jalons de la trame qui construira le tome suivant. Cela fait qu’une fois l’ouvrage terminé, on a une vraie envie de se plonger dans le second opus.

Comme je l’ai précisé précédemment, la couverture m’a ébloui. J’avais donc une impatience certaine de partir à la rencontre de cet univers né de la plume de Jérémy. Les premières pages m’ont apparu froides par rapport à l’impression que m’avait laissée le visage de Blackdog lors de notre première « rencontre ». Mais ce sentiment s’est atténué au fur et à mesure des pages et au fur et à mesure de mes relectures de l’album. Le dessinateur possède un vrai talent pour traduire la dureté. Que ce soit par les visages, les couleurs ou les attitudes, on comprend à tout moment qu’on ne se trouve pas au pays des Bisounours. Je trouve que Jérémy fait en sorte qu’on n’oublie jamais l’endroit où on se trouve et la communauté qui y habite.

Au final, « Esclaves » est un ouvrage passionnant qui nous offre une histoire assez envoûtante. La lecture est très prenante et on prend énormément de plaisir à découvrir les événements se déroulant à Puerto Blanco. Cette série a un vrai potentiel comparable à celui de « Murena » dans un univers différent. Je suis donc curieux de me plonger dans le deuxième album paru récemment intitulé « Cicatrices ». Mais cela est une autre histoire…

gravatar_eric

Note : 17/20

Les sentinelles, T4 : Avril 1915 : Les Dardanelles – Xavier Dorison & Enrique Breccia

LesSentinelles4


Titre : Les sentinelles, T4 : Avril 1915 : Les Dardanelles
Scénariste : Xavier Dorison
Dessinateur : Enrique Breccia
Parution : Octobre 2014


« Les Sentinelles » marque l’entrée des superhéros à la française dans la Grande Guerre. Xavier Dorison confirme l’ampleur de son imagination. D’une part, il n’hésite pas à s’approprier les codes de ses surhommes d’habitude associés à la culture américaine. D’autre part, ils les insèrent au beau milieu de la Première Guerre Mondiale, concept jusqu’alors improbable. Les trois premiers épisodes de cette série ont transformé l’essai et fait naître une saga de grande qualité. Chaque opus est un petit bijou et se lit avec appétit. Chacun délivre une grande variété de saveurs pour la plus grande joie de ses lecteurs.

LesSentinelles4bCela faisait trois ans et demi que la parution d’une nouvelle mission des Sentinelles étaient attendue. L’espoir était assouvi en octobre dernier avec la sortie du quatrième chapitre intitulé « Avril 1915 Les Dardanelles ». Wikipedia m’a appris que les Dardanelles fut un « affrontement […] qui opposa l’Empire Ottoman aux troupes britanniques et françaises dans la péninsule de Gallipoli dans l’actuelle Turquie du 25 avril 1915 au 9 janvier 1916 ». Cela confirme la volonté de Dorison d’intégrer ses héros dans la réalité du conflit.

Intégrer les héros dans la réalité du conflit.

« Cette bataille-là devait être gagnée d’avance… Le débarquement du Commonwealth sur les plages truques des Dardanelles devait assurer une victoire aussi rapide qu’indiscutable. Face aux Ottomans, la France n’avait-elle pas déployé ses plus glorieux soldats ? Les Sentinelles ! C’était sans compter l’aide des allemands à leur allié turc, sans compter la chaleur, les fièvres, les maladies et les falaises imprenables… Sans compter la nouvelle arme du génie germanique : Cimeterre. Cette fois-ci, les plus grands héros français vont devoir renoncer à la victoire pour apprendre la dure leçon de la défaite… » Voilà le synopsis présenté par la quatrième de couverture de l’album. Je dois vous dire que j’y ai perçu un menu appétissant.

LesSentinelles4a

La première force du bouquin est la profondeur de ses personnages. Que ce soit Taillefer, le Merle ou Djibouti, chacune des trois Sentinelles possède une personnalité passionnante. Le réalisme de chacun d’entre eux est remarquable. Ils sont attachants. Leurs faiblesses sont centrales malgré leurs superpouvoirs. Leur sens des valeurs ne laisse pas indifférent. Une bonne histoire est avant un bon héros. « Les Sentinelles » ont la chance d’en avoir trois.

Les Dardanelles imposent une unité de lieu. Nous ne quittons pas cette plage turque qui ressemble au fur et à mesure des pages à un cimetière en plein développement. Cette sensation d’attente, cette disparition de tout espoir, ce fatalisme grandissant… Tout est sublimé par la narration de Dorison. Il arrive à faire évoluer ses personnages au gré des événements sans marquer de rupture trop forte. La réalité de la guerre transpire des planches. Elle ne nous laisse pas indemne. Le travail graphique d’Enrique Breccia sublime le désespoir de cette bataille qui ne peut pas être gagnée mais que les autorités refusent de perdre…

L’intrigue en elle-même est habilement construite. Les enjeux sont rapidement posés. Tout ce petit monde est réuni pour gagner plus qu’une bataille : une guerre. Dorison ne fait pas uniquement exister ses Sentinelles. Il laisse une place intéressante aux soldats britanniques ou australiens. L’immersion dans l’époque apparaît crédible. Nous sommes touchés par bon nombre de protagonistes. L’auteur ne choisit pas son camp. Il nous fait découvrir des horreurs. Certains passages sont quasiment muets pour laisse totalement la place au trait de Breccia. Il peut ainsi faire passer des sentiments forts par ses seules illustrations. Cet album marque un équilibre entre le texte et le dessin d’une rare finesse.

LesSentinelles4c

Vous l’aurez compris, cet ouvrage m’a conquis. Je le trouve d’une grande qualité. Avant de m’y plonger, j’ai relu ses trois prédécesseurs. J’ai été impressionné par la force et l’intensité qui s’en dégage. « Avril 1915 Les Dardanelles » ne déroge pas à cette règle. Il confirme que « Les Sentinelles » est une série unique dans son genre qui arrive à sublimer un concept de départ original et novateur. Il ne reste plus maintenant qu’à attendre la suite. Mais cela est une autre histoire…

coupdecoeur_new

gravatar_eric

Note : 18/20

Uchronie(s) – New Beijing, T2 – Eric Corbeyran & AurĂ©lien Morinière

NewBeijing2


Titre : Uchronie(s) – New Beijing, T2
Scénariste : Eric Corbeyran
Dessinateur : Aurélien Morinière
Parution : Octobre 2013


Uchronie(s) est un projet ambitieux né il y a quelques années. Eric Corbeyran avait scénarisé trois trilogies parallèles : New York, New Byzance et New Harlem. Elles nous présentaient trois réalités uchroniques. La première nous plongeait dans le New York que nous connaissons. La seconde nous immergeait dans un New York qui serait la conséquence de la prise de pouvoir de l’Islam à l’échelle mondiale. Enfin, la dernière nous faisait découvrir  une Amérique dominée par les descendants des Black Panthers. Un dixième album mettait en lien ses trois univers dans un dénouement remarquable. J’avais donc été surpris lorsque j’avais vu apparaître dans les rayons trois nouvelles suites : New Beijing, New Moscow et New Delhi. Les premiers tomes étaient de qualité inégale. Néanmoins, ma curiosité n’a eu aucun mal à me décider à m’offrir le deuxième épisode de New Beijing, sujet de ma critique du jour. Edité chez Glénat, cet opus est sorti le cinq octobre dernier. Aurélien Morinière se voit confier les dessins.

Le site www.fnac.com propose le résumé suivant de cet album : « En cavale, Zack et Ludmilla tentent vaille que vaille de survivre dans l’oppressante New Beijing. De leur côté, Charles et Veronika Kosinski sont en liberté surveillée. Les autorités chinoises, qui les emploient de force, sont intriguées par les visites récurrentes d’intrus qui se volatilisent comme par magie. Dans leur obsession du contrôle, elles espèrent bien que le couple saura apporter des réponses. Corbeyran réédite la recette du succès d’Uchronie[s] avec ces nouvelles réalités parallèles aux destins qui s’entrecroisent »

Le premier acte de cette nouvelle aventure ne m’avait pas complètement conquis. Je n’y avais pas retrouvé la magie qu’avaient générée les trilogies originales. Peut-être était-ce dû à l’absence d’effet surprise ? En effet, le fait que des personnes puissent passer d’une réalité à une autre est maintenant considéré comme acquis. Ce n’était évidemment pas aussi clair dans la première décalogie. J’avais donc ressenti une difficulté pour le scénario à relancer la machine. L’intrigue prenait du temps à trouver son souffle et mon intérêt de lecteur n’avait pas été attisé de manière très intense. J’espérais que tout cela s’emballe un petit peu avec ce deuxième tome.

Faire cohabiter trois réalités

L’intrigue fait ici cohabiter des personnages issus des trois réalités. En effet, deux personnes ici de New Delhi apparaissent dans l’histoire et Ludimilla est incontestablement originaire de New Moscow. Ces interactions font incontestablement partie du charme de la saga. Elles sont ici assez décevantes. Si on met de côté les toutes dernières pages, cet aspect est sous-exploité. J’avais aisément accepté que le premier tome serve à donner vie à l’univers de New Beijing. Je pensais que ce second tome verrait naître un changement de braquet. Ce n’est pas le cas. Je trouve dommage que l’intérêt soit vraiment lancé à une dizaine de pages du dénouement de l’épisode. Les trois premiers quarts sont bien moins intéressants.

Cet album manque d’enjeu d’ampleur. La narration consacre énormément de place à l’évasion de Zack et Ludmilla. On suit leurs pérégrinations pour échapper aux forces de l’ordre. Il n’y a rien de novateur et je regrette que cette chasse à l’homme ne s’avère pas aussi original que le concept scénaristique de la série. A l’opposé l’incarcération de Charles et Veronika est plus intéressante. Leurs recherches forcées recentrent notre attention autour de la matière noire et des différentes réalités. J’ai regretté que ce pan de l’histoire n’occupe pas une place plus importante. La fuite de Zack, trop diluée à mon goût, empêche la densité narrative d’augmenter et de générer ainsi un véritable attrait pour le lecteur.

Les dessins d’Aurélien Morinière ne m’avaient pas conquis lors de ma lecture du premier tome. Je ne peux pas dire que ce second contact ait fondamentalement changé mes sentiments à l’égard de son style. Le trait est appliqué mais manque, à mes yeux, de personnalité. Les illustrations se contentent d’accompagner le texte sans jamais le sublimer. Ils ne génèrent pas d’atmosphère oppressante, envoutante ou au minimum dépaysante. Les couleurs de Johann Corgié sont assez ternes. Néanmoins, je trouve que cette optique colle assez bien au quotidien de la vie à New Beijing.

Au final, ce second acte s’inscrit dans la continuité du précédent. L’histoire n’est pas désagréable mais manque d’ampleur. La narration manque de densité. En refermant l’album, j’ai enfin le sentiment que l’histoire démarre. Je pense que les deux premiers tomes auraient pu être condensés en un sens. Cela aurait rendu la lecture plus intense et prenante. Il ne me reste donc plus qu’à espérer que le dénouement de la trilogie marque un réel changement de braquet qui saura satisfaire pleinement mes attentes. Mais cela est une autre histoire…

gravatar_eric

Note : 11/20

Uchronie(s) – New Beijing, T1 – Eric Corbeyran & AurĂ©lien Morinière

uchronieNewBeijing1


Titre : New Beijing, T1
Scénariste : Eric Corbeyran
Dessinateur : Aurélien Morinière
Parution : Septembre 2012


« Uchronie(s)» est une série de science-fiction particulièrement bien construite. Il s’agit de trois trilogies intitulés « New Byzance », « New York » et « New Harlem » qui contaient chacune une réalité différente qui se voyaient toutes réunies dans un dixième album. La construction narrative était remarquable et originale. Il s’agissait d’un vrai travail de scénariste qui possédait un dénouement à la hauteur de l’idée initiale. Ce n’était pas rien. C’est pourquoi j’ai été surpris lorsque j’ai vu une nouvelle trilogie construite sur le même principe. Il s’agira de « New Beijing », « New Moscow » et « New Delhi ». Ma critique d’aujourd’hui porte sur le premier acte de la première citée. Cet opus est apparu dans les librairies le vingt-six septembre dernier. Toujours édité chez Glénat, cet ouvrage se compose d’une grosse quarantaine de pages. Le format est classique et le prix avoisine quatorze euros. La couverture est dans la lignée des précédents tomes. On y découvre le personnage principal entouré de deux inconnues chinoises. Le second plan nous présente une mégalopole à l’architecture asiatique. Le ton orange de l’illustration participe au dépaysement. Le point commun avec la saga précédente est évidemment le nom de son auteur, Eric Corbeyran. Le célèbre auteur de « Le chant des stryges » s’associe ici avec un nouveau dessinateur nommé Aurélien Morinière que je découvre ici.

L’histoire se place dans la continuité de la première décalogie. Néanmoins, il doit être possible d’entamer la découverte avec cet opus. On y découvre Zack et ses deux parents apparaitre dans une nouvelle réalité : New Beijing. Ici, le monde souffre d’un oppresseur différent de celui subi dans « New Harlem ». Mais la dictature reste source de souffrance quel que soit son interprète. Suite à une utilisation de monnaie non légale, les trois personnages se voient séparés dans des camps de travail qui les verra découvrir ainsi ce nouvel univers dans lequel ils sont amenés à jouer un rôle…

Science-fiction & réalités parallèles.

Cet album s’adresse à un public adepte de science-fiction et de réalités parallèles. Les afficionados du genre seront ravis de se plonger dans cet univers. La richesse de la série réside dans le fait que chaque réalité correspond à une uchronie relativement crédible sur le plan politique. « New Harlem » marquait la domination du peuple noir sur le monde, « New Byzance » l’hégémonie du monde musulman. « New Beijing » indique d’après son nom que la Chine a pris le pouvoir. Il est donc intéressant de découvrir un fonctionnement mondial suffisamment différent pour nous intriguer et suffisamment proche pour apparaitre réaliste.

On découvre donc avec plaisir ce nouvel ordre sociétal en suivant les pas des trois personnages principaux. Ils sont familiers aux lecteurs de la première série. Cela fait que l’auteur s’épargne une nouvelle présentation et offre ainsi une mise en situation rapide. Néanmoins, ils perlent tout au long de la narration des informations qui permettent à tous de maîtriser les grandes lignes du passé du trio. Il est évident que la surprise du fait que les héros peuvent passer d’une réalité à l’autre a disparue depuis les épisodes précédents. Il s’agit d’un prérequis qui ne fait pas naitre la même curiosité que dans la découverte initiale des aventures de Zach. Malgré tout, cette absence de révolution scénaristique est compensée par le plaisir de retrouver un monde qu’on avait quitté avec regret il y a quelques temps.

La difficulté réside à faire renaitre l’enthousiasme à partir d’une recette qui a déjà été optimisée a priori. Le goût n’a pas toujours la même intensité quand il ne nous est plus inconnu. Je n’ai pas eu le sentiment de dévorer avec appétit ce « New Beijing ». Mais cela ne m’a pas empêché de ressentir un vrai attrait pour l’intrigue une fois que je m’y suis plongé. La frustration de voir l’album se clore était réelle et gage d’une certaine réussite. L’intrigue n’est pas trop diluée même on espère toujours qu’elle soit davantage dense. Les jalons posés dans cet acte sont intéressants dans le sens où ils se démarquent des tenants et aboutissants de la trame connue jusqu’alors. Il est évident que la matière noire possède un rôle central dans l’histoire mais son exploitation potentielle diffère de ce qu’on connaissait jusqu’à maintenant.

« New Beijing » marque l’arrivée d’un nouveau dessinateur dans l’univers « Uchronie(s) ». Il fait d’ailleurs une entrée remarquée puisqu’il se voit également confié l’illustration de « New Delhi ». Son trait ne révolutionne pas le genre. Néanmoins, cela n’empêche pas les planches de s’avérer dynamique. Le découpage des cases associé à une capacité à intégrer du mouvement dans ses dessins font que la narration ne s’appuie pas sur des illustrations passives et statiques. Je trouve que les scènes faisant intervenir les personnages sont très épurées. Je regrette parfois que les décors n’y trouvent pas une place plus grande. La conséquence que certaines planches de dialogues semblent fades du fait de l’absence de densité et de diversité dans les seconds plans. Concernant les couleurs, elles sont l’œuvre de Svart. Elles sont relativement simples mais génèrent malgré tout une atmosphère à la lecture.

En conclusion, j’ai pris un vrai plaisir à découvrir « New Beijing » et l’univers auquel cet opus appartient. Les risques de déception étaient nombreux mais se sont avérés sans lendemain. Il est évident que cet album n’est que la première marche d’une trame longue et complexe. Il faudra donc attendre pour se faire une idée plus précise de l’intrigue. Les premiers indices résideront dans ma lecture de « New Moscow » paru le mois dernier. Mais cela est une autre histoire…

gravatar_eric

Note : 13/20

Uchronie(s), New Beijing, T3 – Eric Corbeyran & AurĂ©lien Morinière

UchroniesNewBeijingT3


Titre : Uchronie(s), New Beijing, T3
Scénariste : Eric Corbeyran
Dessinateur : Aurélien Morinière
Parution : Octobre 2014


« Uchronie(s) » est un des projets les plus ambitieux de la dernière décennie dans le l’univers fantastique du neuvième art. Eric Corbeyran a fait naître trois trilogies se rejoignant dans un dixième opus. La particularité de ces histoires est qu’elles faisaient intervenir les mêmes personnages dans trois réalités parallèles. L’idée était originale et la réalisation s’est montrée à la hauteur de la force scénaristique supposée.

Alors que l’aventure apparaissait conclue avec la sortie en librairie de « Epilogue » il y a presque quatre ans. C’était donc une surprise quand j’ai vu naître une suite il y a un petit peu plus de deux ans. Le célèbre auteur créait trois nouvelles réalités intitulées « New Beijing », « New Moscow » et « New Delhi ». La critique d’aujourd’hui porte sur la conclusion de la première citée.

UchroniesNewBeijingT3aLe troisième épisode de « New Beijing » est apparu en octobre dernier. Sa couverture était originale car elle présentait deux versions du même protagoniste, chacun étant extrait de son propre monde. Il s’agit de Zack Kosinski, personnage central, de chaque trame quelle que soit leur origine. Comme son nom l’indique, le monde est ici sous domination chinoise. Les dirigeants politiques ont emprisonné Charles et Veronika Kosinski, parents du héros. Ils sont de brillants scientifiques dont la plus belle découverte est la fusion noire. Leur création permet de transition d’une réalité à l’autre. Ce pouvoir donne libre cours à toutes les imaginations.

Pas aussi enthousiasmant que la série originelle.

Comme l’indique son titre, la série exploite pleinement le concept de l’uchronie. Très à la mode actuellement, cette mécanique narrative offre des résultats assez inégaux en termes de résultat. Autant « Block 109 » est une belle réussite à mes yeux, autant « Jour J » est moins enthousiasmant. « New Beijing » est un cru à la qualité correcte. Sans dégager le même enthousiasme que la décalogie originelle, elle présente une intrigue sérieuse et plutôt prenante.

La première réussite de l’album est de créer de manière crédible une Chine régnant sur le monde. Le fait de voir les parents Kosinski prisonniers permet de s’immerger dans les arcanes des dirigeants du Parti. L’ensemble apparaît crédible. Le réalisme facilite notre entrée dans ce monde cousin du notre. Le côté « documentaire » de la lecture est intéressant et fait partie des atouts de la trilogie.

UchroniesNewBeijingT3bLes enjeux de l’histoire sont clairement établis depuis l’épisode précédent. Nous ne pouvons pas dire qu’ils évoluent énormément dans ce nouvel album. Le déroulement du film conducteur se fait davantage à un train de sénateur car qu’au rythme d’une course effrénée. Je ne renie pas le fait que les événements avancent et que les rapports de force évoluent un petit peu. Malgré tout, je ne peux pas affirmer non plus que nous assistons à un grand chamboulement et à un feu d’artifice de révélation. La trilogie terminée, bon nombre de questions restent en suspens. Les réponses arriveront peut-être dans les réalités parallèles ou dans l’épilogue…

Sur le plan graphique, le travail de d’Aurélien Morinière est correct. Il permet une lecture aisée sans pour autant sublimer les textes. Les personnages sont aisément reconnaissables malgré une densité de casting assez importante. Par contre, que ce soit le découpage ou la mise en scène des cases, rien de révolutionnaire n’est à signaler. Les couleurs de Johann Gorgié est dans cette lignée-là. Le choix semble avoir été fait de privilégier le scénario aux illustrations. Pourquoi pas…

UchroniesNewBeijingT3c

Au bilan, cet album conclut honorablement « New Beijing ». Les trois tomes sont d’une qualité assez constante. J’ai retrouvé avec plaisir des personnages que j’avais appris à apprécier durant les dix tomes précédents. Je pense que cette première nouvelle trilogie à trouver son dénouement offre une suite honorable à la décalogie initiale sans néanmoins en retrouver la magie et l’originalité. Il ne me reste plus qu’à découvrir l’achèvement de « New Moscow » et « New Delhi ». Mais cela est une autre histoire…

gravatar_ericNote : 12/20

WollodrĂŻn, T5 : Celui qui dort, 1/2 – David Chauvel & JĂ©rĂ´me Lereculey

Wollodrin5


Titre : WollodrĂŻn, T5 : Celui qui dort, 1/2
Scénariste : David Chauvel
Dessinateur : Jérôme Lereculey
Parution : Octobre 2014


« Wollodrïn » ravira les adeptes d’heroïc fantasy et d’univers à la Tolkien. Cette série immerge le lecteur dans un monde peuplé de nains, chevaliers, trolls, orques… Les légendes et la magie sont également de sortie. Chacune de ses histoires se déroule sur deux tomes. Le premier s’intitulait « Le matin des cendres » et le second « Le convoi ». Ma critique porte sur le cinquième épisode intitulé « Celui qui dort » qui marque l’entrée dans un nouveau diptyque.

La couverture présente un jeune personnage jusqu’alors inconnu au bataillon. Il apparaît sur la défensive. Il accueille le lecteur avec une hache et une masse. Sa main gauche intrigue, elle est munie d’un gant qui illumine la planche. A l’arrière-plan, nous découvrons ce qui semble être un tombeau. Est-ce la quête du héros ? Le protège-t-il ?

Wollodrin5a

Pour en savoir davantage, je me suis orienté vers la quatrième de couverture : « Tridïk est un jeune nain romantique. Follement amoureux de la belle Mëlinhh, il rêve de lui offrir un four une fleur de pierre qu’on ne trouve qu’au plus profond des montagnes. Le jour où l’occasion se présente, le jeune prétendant n’hésite pas une seconde. Son paquetage sur le dos, son fidèle petit ami Zzürk sur l’épaule, il part à l’aventure, ignorant qu’en descendant dans les profondeurs du royaume interdit, il va réveiller celui qui dort et qu’on ne devrait jamais tirer de son sommeil… »

Un enfant a priori ordinaire qui est parti pour vivre une aventure extraordinaire.

L’histoire choisit un héros classique. Tridïk est un enfant a priori ordinaire qui est parti pour vivre une aventure extraordinaire. Il s’agit d’une recette souvent usitée et qui possède bon nombre d’attraits. Le principal est que la nature du personnage principal génère immédiatement de l’empathie à son encontre. Nous l’assimilons à un copain, un frère ou un fils. Il en résulte une inquiétude née des dangers qu’il risque d’affronter. Ce sentiment alimente positivement notre curiosité.

Wollodrin5bL’autre apport résultant des caractéristiques de Tridïk est qu’il avance vers l’inconnu. Il n’est pas un guerrier légendaire qui auraient survécu à moult batailles, découverts des contrées lointaines et surmontées une quantité incommensurable d’épreuves. Par conséquent, il réagit aux événements au fur et à mesure qu’ils se déroulent. Il ne prévoit rien car il ne sait réellement vers où il se dirige. Cet état de fait facilite notre projection dans la quête de l’enfant. Nous partageons ses interrogations et ses appréhensions. L’implication dans la lecture n’en est que plus forte.

Concernant l’intrigue en elle-même, elle se déroule à un rythme de croisière. Elle ne présente aucun temps mort et chaque planche apporte son lot d’informations. David Chauvel écrit une trame dense mettant en place un grand nombre de personnages et d’enjeux. Il fait naître une bonne dose de mystère et pose des jalons intéressant pour la suite. Nous pouvons légitimement nous demander où tout cela nous mène et comment cela va terminer. Par contre, je regrette une absence d’intensité dramatique. Alors que le fil conducteur laissait croire une avancée irrémédiable vers de gros soucis, je trouve qu’au final, Tridïk rencontre peu d’embûches. Sans vous dire que son voyage est comparable à une promenade bucolique, il est moins périlleux qu’espéré. Mais peut-être suis-je trop exigeant…

Sur le plan graphique, j’ai retrouvé avec joie les dessins nés de la plume de Jérôme Lereculey. Ses décors sont une petite merveille et font exister un monde fantastique et fascinant. Le dépaysement est total. Les couleurs de Lou doivent également recueillir leur lot de louanges. En effet, comment ressentir l’atmosphère oppressante de ces grottes ou le côté merveilleux de ces belles forêts sans la touche chromatique adéquate. Je regrette jusque que l’intrigue ait empêché de découvrir de nouvelles trognes de trolls. Je dois avouer qu’il s’agissait d’un de mes petits plaisirs dans les opus précédents.

Wollodrin5c

Pour conclure, cet album fait honneur à la fantasy. Il offre une intrigue travaillée, des personnages plutôt réussis et un univers identifiable. Je regrette un petit peu une dimension épique un petit peu légère. Peut-être prendra-t-elle son ampleur lors du tome suivant ? Il ne reste plus qu’à attendre pour le savoir…

gravatar_eric

Note : 15/20

Largo Winch, T19 : ChassĂ©-croisĂ© – Jean Van Hamme & Philippe Francq

LargoWinch19


Titre : Largo Winch, T19 : Chassé-croisé
Scénariste : Jean Van Hamme
Dessinateur : Philippe Francq
Parution : Novembre 2014


« Largo Winch » est une des plus célèbres séries de bandes dessinées. En effet, bon nombre de lecteurs guettent la sortie annuelle de la nouvelle aventure du milliardaire en blue jeans. Je fais partie de ces adeptes qui prennent chaque fois plaisir à découvrir les pérégrinations souvent dangereuses dans les arcanes du monde cruel du grand capital. Le dernier opus en date, le dix-neuvième, s’intitule « Chassé-croisé ». Sa sortie en librairie date du mois de novembre dernier.

La particularité de cette saga est de se composer de diptyques successifs. Cet album marque donc le début d’une nouvelle intrigue qui se conclura l’an prochain avec la parution de « 20 secondes ». Celle-ci débute à Londres où Largo se rend pour présider le Big Board du groupe W. Comme souvent, réunion de travail et moments plus détendus se succèdent. Evidemment, la situation se complique avec l’apparition dans le jeu de terroristes djihadistes, d’agents troubles et d’espions véreux…

LargoWinch19c

Le personnage de Largo Winch est assez unique dans son genre dans le monde du neuvième art. Il est décrit avec les mots suivants sur la quatrième de couverture : « Sans famille ni attaches, contestataire, coureur, vagabond, iconoclaste et bagarreur, il se retrouve, à vingt-six ans à la tête d’un empire de dix milliards de dollars… » Par les temps qui courent, il peut paraître de curieux de choisir comme héros un patron milliardaire. Evidemment, le scénariste Jean Van Hamme, en a fait quelqu’un qui possède une fibre sociale et humaniste plutôt développée. Cela évite de tomber dans la caricature du grand chef d’entreprise.

Le côté « superhéros » de Winch fait accepter le côté manichéen.

Largo est quelqu’un de sympathique. Le lecteur s’y attache rapidement et ne renie jamais l’affection ressentie à l’égard de ce patron pas comme les autres. A aucun moment, on ne lui envie sa richesse ou son pouvoir. Au contraire, on se laisse fasciner par sa capacité à déjouer les manipulations des méchants capitalistes qui l’entourent. L’ensemble est assez manichéen mais le côté « superhéros » de Winch fait accepter cela sans mal. Comme Indiana Jones a du mal à rester un professeur d’université, le milliardaire a du mal à rester dans sa tour et ses bureaux pour mener à bien ses affaires.

LargoWinch19bBien souvent, la première partie d’un diptyque a pour objectif de poser la situation, de présenter les enjeux et de mettre le héros dans une situation complexe générant ainsi un suspense à la fin de la lecture. « Chassé-croisé » n’échappe pas à cette règle. Les personnages principaux arrivent à Londres, s’installent. Pendant ce temps, des inconnus font leur apparition. On les devine animés de mauvaises intentions mais les zones d’ombre restent nombreuses. Tout ce petit monde se rencontre et de ces interactions naissent des questions pour l’instant sans réponse. La recette est efficace mais exécutée ici avec une sensation de paresse. Je n’ai pas retrouvé dans cet album l’intensité dramatique habituelle. J’avais le souvenir que la lecture d’un tome de cette série était toujours accompagnée du sentiment d’être au beau milieu d’un tourbillon d’événements qui ne faisaient qu’aggraver la situation de Largo. Ici, le ton est plus léger. Les amourettes des différents personnages tendent presque cette histoire d’espionnage vers le vaudeville.

Sur le plan graphique, j’ai retrouvé avec plaisir le trait de Philippe Francq. Je trouve qu’il possède un talent intéressant pour faire exister ces atmosphères urbaines. Ses décors participent au réalisme de l’ensemble. Cette sensation est indispensable au plaisir de la lecture. Son travail sur les personnages est de qualité mais plus classique. Néanmoins, nous n’avons aucun mal à s’approprier les personnages qu’ils nous soient familiers ou de nouvelles rencontres.

LargoWinch19a

Au final, « Chassé-croisé » est un épisode honnête des aventures de Largo. J’ai retrouvé cet univers et ce héros avec plaisir et j’ai passé un moment agréable à découvrir ses nouveaux soucis. Malgré tout, ce tome ne fait pas partie des meilleurs de la série. Le scénario est quelque peu fainéant en comparaison des meilleurs opus de la saga. Ces bémols ne m’empêcheront pas de me jeter sur le vingtième acte pour connaître le dénouement de ce séjour londonien…

gravatar_eric

Note : 12/20

Les Aventures de Philip et Francis, T1 : Menace sur l’Empire – Nicolas Barral & Pierre Veys

PhilipEtFrancis1


Titre : Les Aventures de Philip et Francis, T1 : Menace sur l’Empire
Scénariste : Pierre Veys
Dessinateur : Nicolas Barral
Parution : Mars 2005


Si je vous parle de Philip et Francis, les plus bédéphiles d’entre vous penserons tout de suite à Blake et Mortimer, les célèbres héros nés de l’imagination d’Edgard P. Jacobs. Mon avis d’aujourd’hui va parler de leurs « cousins » nés sous les plumes de Pierre Veys et Nicolas Barral. Ces derniers ont écrit chez Dargaud un tome intitulé « Menaces sur l’Empire » dans la série nommée « Les aventures de Philippe et Francis ». D’un format classique et vendu au prix de presque quatorze euros, cette saga se présente comme très librement inspirée des personnages créés par Jacobs. « Menaces sur l’empire » est le premier tome de cette série parodique qui en comporte pour l’instant deux.

La quatrième de couverture de l’ouvrage nous offre un résumé de l’intrigue particulièrement clair : « Depuis quelques semaines, d’étranges phénomènes secouent le cœur de l’empire britannique. Londres vit des heures tragiques : les femmes se rebellent et entreprennent des actions spectaculaires et délirantes pour se libérer du joug de la domination masculine… On s’aperçoit ainsi que la stabilité de la société anglaise dépend entièrement de la discipline stricte qu’elles respectaient jusqu’alors. Ce changement de comportement annonce-t-il une catastrophe sans précédent ? D’où vient cette terrible menace ? Qui a intérêt à saper les fondements de cette brillante civilisation ? » 

Il est évident que cet album prend toute son ampleur quand il est lu par des adeptes de la série dont ils s’inspirent. Une méconnaissance des deux héros et de l’esprit de leurs histoires empêche de profiter pleinement de l’humour qui accompagne notre lecture. Du fait de son aspect parodique, il est évident que le ton de la narration est léger. Néanmoins, cela n’empêche pas l’histoire d’être composée d’une trame structurée. Cet album se veut indépendant et décrit du début à la fin une aventure de nos deux héros.

Une trame construite fidèlement sur les jalons posés par Jacob.

La lecture des premières pages nous fait découvrir des personnages familiers et pourtant plein de surprises. Ce cher Mortimer est un scientifique qui ne pense qu’à manger et qui semble avoir bien du mal à se concentrer sur les problèmes du royaume. De son côté, Blake est loin d’être le membre des services secrets que nous avons l’habitude de croiser. Il est ici un homme qui habite encore chez sa mère et qui ne semble pas posséder un charisme remarquable. Néanmoins, malgré ces différences, les auteurs respectent les codes de la série. La trame est construite plutôt fidèlement aux jalons posés par Jacob. Les différents personnages y possèdent leur place habituelle. La surprise réside davantage à la manière avec laquelle ils occupent leur place. Les auteurs arrivent à manipuler avec une certaine réussite les clichés de la série. Je n’ai eu aucun mal à me plonger dans cette aventure et ai pris énormément de plaisir à voir tous ces personnages de bandes dessinées raillés et tournés en bourrique.

Côté dessins, le trait est bien moins classique que celui si célèbre de Jacob. Les traits des personnages sont plus arrondis. Leurs visages sont plus expressifs. Sur cet aspect-là, la série est moins froide. Néanmoins les couleurs, les décors sont globalement fidèles à la série de départ. En feuilletant rapidement l’ouvrage, on pourrait s’y méprendre. Cela rend d’ailleurs le pastiche d’autant plus réussi. En effet, en respectant beaucoup de codes, en laissant bon nombres de repères aux lecteurs, les auteurs lui permettent de rire d’autant plus facilement de cet ouvrage.

En conclusion, j’ai passé un moment très agréable en lisant cet opus. Je ne regrette vraiment pas de me l’être fait offrir. Il est évident que les personnes non familières de l’univers de Blake et Mortimer n’ont que peu d’intérêt à s’y plonger. Pour les autres, je vous garantis une lecture très sympathique. Je trouve que cet album répond parfaitement aux attentes qu’on place en lui. De plus, il ne baisse pas en qualité tout au long de l’avancée de l’histoire. C’est à signaler parce que trop souvent dans les ouvrages caricaturaux, le soufflet humoristique disparaît trop tôt. Ce n’est pas ici le cas. Il ne me reste donc plus qu’à vous souhaiter une agréable rencontre avec ces « cousins » de nos célèbres serviteurs de la couronne britannique…

gravatar_eric

Note : 13/20

Les aventures de Philip et Francis, T3 : S.O.S. mĂ©tĂ©o – Pierre Veys & Nicolas Barral

PhilipEtFrancis3


Titre : Les aventures de Philip et Francis, T3 : S.O.S. météo
Scénariste : Pierre Veys
Dessinateur : Nicolas Barral
Parution : Septembre 2014


Un des indicateurs d’une série appartenant à l’Histoire du neuvième art est le fait que ses codes ont transpiré de ses albums au point de servir de support à la dérision et au pastiche. « Blake & Mortimer » possède cette caractéristique depuis la naissance il y a quelques années de sa jumelle caricaturale intitulée « Les aventures de Philip et Francis ». Elle est le fruit de la collaboration du scénariste Pierre Veys et du dessinateur Nicolas Barral. Ma critique d’aujourd’hui porte sur son troisième épisode « S.O.S. Météo » paru en septembre dernier chez Dargaud.

La quatrième de couverture nous offre la mise en bouche suivante : « Tout le monde la sait : le professeur Mortimer est gentil. Très gentil. Un peu trop, même. Ce qui fait que beaucoup de ses proches en abusent largement. Le capitaine Blake s’impose chez Mortimer avec un sans-gêne assumé. Nasir, le fidèle serviteur, tient tête à son maître, et ose même évoquer le hideux concept d’augmentation de ses gages. Les commerçants indélicats le traitent avec mépris. Les voyous du quartier le martyrisent et l’humilient depuis des années… Mais cela a assez duré ! Grâce à une terrible invention scientifique, notre charmant professeur va se transformer en une créature monstrueuse ! Prisonnier de ses instincts criminels incontrôlables, Mortimer va-t-il l’ennemi public numéro un ? »

Des références qui raviront les habitués de leurs aventures.

PhilipEtFrancis3b« S.O.S. Météo » est clairement un hommage à « S.O.S. Météore » un des plus opus les réussis de la saga. Il est d’ailleurs clairement évoqué au cours de l’histoire. La célèbre machine créée par le scientifique Miloch est présente. Les références à l’univers des célèbres héros britanniques sont fréquentes et raviront les habitués de leurs aventures. Une connaissance de la série de Jacobs me paraît indispensable pour saisir l’ensemble du spectre humoristique de l’album. Il s’agit d’un pastiche de qualité dans le sens où les codes originaux sont détournés à de nombreux moments et de nombreuses manières. L’idée de départ est originale et elle s’avère bien exploitée.

PhilipEtFrancis3cNéanmoins, l’ouvrage peut se lire comme une histoire indépendante dénuée de toute filiation prestigieuse. L’intrigue peut se découvrir comme une parodie d’enquête policière. Tous les aspects du genre sont tournés en dérision. Le travail d’écriture de Pierre Veys est suffisamment important pour offrir une quantité de gags appréciable. L’avancée est rythmée et la trame ne possède aucun temps mort. Le sourire guide la lecture du début à la fin. C’est un album qui se lit avec bonne humeur.

« S.O.S. Météo » est un vrai moment de divertissement. Le scénario n’est pas lutionnaire, les personnages ne possèdent pas une profondeur abyssale, l’atmosphère n’est pas envoutante. Malgré cela le déroulement des pages se fait avec plaisir et la curiosité est constante au fur et à mesure que les événements se révèlent. Sur le plan graphique, le trait de Nicolas Barral accompagne parfaitement la narration. Son dessin participe à l’ambiance délurée et sympathique qui transpire de chaque planche. Son style ne bouleverse pas le neuvième art mais valorise correctement le travail scénaristique.

PhilipEtFrancis3a

Pour conclure, « S.O.S. Météo » est un album de qualité. En découvrant le menu, les papilles sont éveillées. Après dégustation, je me suis dit que le plat était à la hauteur des attentes. Je pense que tout adepte de « Blake & Mortimer » gagnerait à se plonger dans cet hommage haut en couleur. Ce nouvel album confirme la qualité du travail collaboratif de Pierre Veys et Nicolas Barral et j’attends avec impatience la suite des pérégrinations de ces deux héros délurés…

gravatar_eric

Note : 13/20

Kickass 3, T1 : Civil War – Mark Millar & John Romita Jr

Kickass3


Titre : Kickass 3, T1 : Civil War
Scénariste : Mark Millar
Dessinateur : John Romita Jr
Parution : Mai 2014


J’ai découvert l’univers de « Kick Ass » lors de la sortie de son adaptation dans les salles obscures il y a quatre ans. Ce film se démarquait dans l’univers dense des super héros pour plusieurs raisons. La première, dénoncée par bon nombre de critiques lors de sa sortie, était la violence qui transpirait de l’écran tout au long de la séance. L’idée de voir une gamine de treize ans trucider des mafieux à tout bout de champ et sans aucun état d’âme avait créé quelques malaises. La seconde concernait la nature même du héros. Il était un ado geek et transparent. Il n’avait ni pouvoirs, ni fortunes, ni revanches à assouvir. Il était juste fan de comics et rêver d’être un super héros. L’opus de Matthew Vaughn m’a enthousiasmé et m’a incité logiquement à partir à la découverte du bouquin qui l’a inspiré. Cette aventure est coécrite par Mark Millar et John Romita Jr. Les parutions américaines des méandres de Dave Lizewski sont éditées chez Panini Comics dans la collection 100% Fusion Comics. Depuis, je m’offre les différentes suites pour connaître le devenir de ce super-héros pas comme les autres et de son acolyte Hit Girl.

Dernièrement je me suis plongé dans « Kick Ass 3 ». Découpé en deux parties, ma critique d’aujourd’hui porte sur la première d’entre elles intitulée « Civil War ». Elle est apparue dans les librairies au mois de mai dernier. A l’image des opus précédents, elle se compose de cent vingt planches et regroupe les cinq épisodes américains initiaux de « Kick Ass 3 ». Le tome précédent s’était conclu par une bataille rangée entre les gentils et les méchants costumés. Cette guerre sanglante avait évidemment des conséquences pour nos deux héros. Dave avait poussé son ennemi historique et l’avait laissé dans la rue les os brisés. De son côté, Hit Girl avait été arrêté et s’apprêtait à passer une grande partie des années à venir derrière les barreaux. L’éditeur offre un résumé précis et concis des événements passés et permet ainsi de commencer la lecture avec des prérequis solides.

Kickass3c

Une introspection s’impose.

J’étais curieux de savoir quelle voie allait prendre l’intrigue. En effet, Hit Girl est emprisonné. Le grand méchant est hospitalisé pour quelques temps. La quête de Kick Ass semblait être terminée. La logique voulait qu’il entre dans une routine de ronde dans les rues de la ville avec ses collègues super héros pour aider la veuve et l’orphelin. Evidemment, la confrérie se fixe rapidement pour mission de délivrer leur mythique alliée en organisant son évasion. Mais le projet est de bien trop grande ampleur pour chacun d’entre eux et leur quête reste à l’état de mission. Finalement, l’essentiel de la trame se construit autour du personnage de Dave et l’introspection qu’il s’impose. Ses rêves de justicier existent toujours mais la dure réalité qu’il a vécue a tendance à lui rappeler l’attrait d’une vie plus classique. Dave rencontre l’amour et sa nouvelle relation cohabite difficilement avec ses nuits en costume. Même si ce dilemme n’est pas novateur, il est intéressant ici tant l’identification avec le héros est plus évident qu’avec un riche héritier ou un étudiant piqué par une araignée radioactive. Il s’agit, à mes yeux, de l’aspect le plus prenant de la lecture. On erre dans les pas d’un adolescent qui a été dépassé par les événements et qui essaie tant bien que mal de remettre sa vie à l’endroit sur des rails moins fragiles.

Kickass3bParallèlement, les auteurs font exister Hit Girl et Mother Fucker. La première gère de manière dictatoriale la prison et chacune de ses apparitions sont drôles tant elles sont démesurées et insensées. Une des forces de la saga est de rendre cohérent et crédible dans son univers ce personnage. On est plus choqué de voir une petite fille fumer une clope ou torturer un mafieux de passage. Sa part de l’histoire est incontestablement, par ses excès, la plus légère et celle qui utilise le plus l’humour. De son côté, les moments passés auprès de Mother Fucker semblent avoir pour objectif de reconstruire un monstre aux abois jusqu’alors. On sent la montée en puissance vers un affrontement final. Sans tout vous dévoiler, il faut savoir que le camp des méchants s’agrandit et se complexifie légèrement.

Concernant les dessins, ils sont dans la lignée du reste de la série. Je ne suis pas un grand fan du trait qui m’apparaît moins travaillé que dans certaines sagas plus classiques et européennes. Néanmoins, les personnages sont aisément assimilables et l’univers urbain dans lequel ils gravitent est crédible. La force du style de John Romita Jr est de faire gicler le sang et de montrer la violence avec éclats et sans aucun tabou. De ce fait, cet ouvrage n’est pas à mettre en toutes les mains. L’animalité des affrontements est montrée sans aucun filtre. Cela fait partie de l’identité de l’œuvre mais pourra légitimement en détourner certains lecteurs.

Kickass3a

Pour conclure, ce nouveau tome offre une suite honnête aux pérégrinations de Dave. La qualité est comparable à celle qui accompagnait la lecture des précédents albums. Nous pourrons toujours regretter que l’intrigue ne soit pas sublimée et ne prenne pas un nouvel envol plus enthousiasmant. La flamme est entretenue sans pour autant être ardemment alimentée. Il faudra s’en contenter…

gravatar_eric

Note : 12/20