Titre : Ralph Azham, T1 : Est-ce qu’on ment aux gens qu’on aime ?
Scénariste : Lewis Trondheim
Dessinateur : Lewis Trondheim
Parution : Mars 2011
« Ralph Azham » est une nouvelle sĂ©rie nĂ©e de lâimagination du cĂ©lĂšbre et talentueux Lewis Trondheim. Le premier tome intitulĂ© « Est-ce quâon ment aux gens quâon aime ? » est sorti le mois dernier. EditĂ© chez Dupuis, cet opus de format classique est composĂ© dâune grosse quarantaine de pages. Sur un fond blanc, la couverture nous prĂ©sente une galerie de personnages originaux tournant autour dâun jeune homme aux cheveux bleus et dont les mains sont attachĂ©es Ă un poteau. Le prix de lâouvrage est un petit peu infĂ©rieur Ă douze euros.
Ralph Azham vit dans un village dans lequel il possĂšde le statut de souffre-douleur. Toutes les occasions sont bonnes pour le punir, le torturer ou le frapper. Il faut dire que ce cher Ralph possĂšde un pouvoir bien particulier. Il peut voir les morts et les naissances. Bref, pour lui, le quotidien est rarement rose et bien trop souvent noir et dur. Mais dĂ©jĂ que la vie nâest pas facile, voilĂ que le village va ĂȘtre attaquĂ© par la Horde, une troupe sanguinaire qui pris lâhabitude de terroriser les habitantsâŠ
Il faut savoir que je suis un grand fan de Lewis Trondheim. Je possĂšde une grande partie de ses productions. Et rares sont les lectures de lâune dâentre elles qui ne mâont pas enthousiasmĂ©. Cela fait que la seule prĂ©sence de son nom sur une couverture de bandes dessinĂ©es fait que je mâoffre lâalbum en question. La couverture laissait sous-entendre une nouvelle immersion de lâauteur dans lâunivers de « lâHĂ©roĂŻc Fantasy ». CâĂ©tait plutĂŽt une bonne nouvelle car son premier voyage dans le domaine a donnĂ© naissance Ă la grande saga « Donjon » qui est une des Ćuvres majeures de la derniĂšre dĂ©cennie dans le neuviĂšme art français. Jâavais donc hĂąte de dĂ©couvrir ce cher Ralph. Pour ceux qui nâauraient pas encore la chance de connaĂźtre la magie de Trondheim, sachez quâelle sâadresse Ă tous les publics. Cet album rĂ©pond Ă©galement Ă cette rĂšgle.
On frĂŽle parfois l’indigestion.
Cet album marque le dĂ©but dâune nouvelle sĂ©rie. Les personnages nous sont donc inconnus tout autant dâailleurs que lâunivers dans lequel ils vivent ou que les rĂšgles qui rĂ©gulent leur monde. Câest un attrait toujours certain des premiers opus de sĂ©ries de « Fantasy ». On est toujours Ă la recherche de la petite originalitĂ© qui va nous rendre ce monde si sympathique. On ne peut pas dire que cet album se dĂ©marque vraiment des habitudes du genre. Lâattrait rĂ©side davantage dans le fait que Trondheim veuille jouer avec les codes du genre. Le bĂ©mol est que jâai trouvĂ© la trame trĂšs brouillonne. On a parfois lâimpression que cela part dans tous les sens. Les informations sont nombreuses, les chemins variĂ©s. Mais au final, on frĂŽle parfois lâindigestion. Jâai en effet eu du mal Ă me plonger dans le quotidien de Ralph Azham. Je suis restĂ© spectateur parce que la porte dâentrĂ©e Ă©tait peut-ĂȘtre un petit peu trop obstruĂ©e.
CĂŽtĂ© personnages, Trondheim nous en offre une galerie assez fournie. Le premier dâentre eux donne le nom Ă la sĂ©rie. Il sâagit de Ralph Azham. On ressent un petit peu dâempathie pour lui. En effet, le fait que le village lui fasse porter tous les malheurs du monde avec un certain sadisme fait quâon ne peut ĂȘtre que de son cĂŽtĂ©. Le fait que lâhistoire se dĂ©roule dans une petite communautĂ© fait quâon voit rapidement graviter un nombre certain de personnages identifiables. Câest une rĂ©ussite de lâouvrage car cela nous permet quand mĂȘme de visualiser assez rapidement le fonctionnement local. Je ne vous les prĂ©sente pas tous parce quâune partie du plaisir de la lecture rĂ©side dans la surprise et la dĂ©couverte.
CĂŽtĂ© atmosphĂšre, je ne lâai pas trouvĂ© trĂšs prenante. Au risque de me rĂ©pĂ©ter, je trouve que la narration est trop brouillonne pour rendre notre immersion totale. Je pense que structurer davantage les informations en les allĂ©geant Ă©ventuellement aurait permis de donner davantage dâĂ©paisseur aux personnages et ainsi de dĂ©velopper nos sentiments Ă leurs Ă©gards. Ce nâest que mon point de vue mais câest en tout cas ce que jâai ressenti. Câest dommage car certaines scĂšnes sont vraiment trĂšs rĂ©ussies. Trondheim dĂ©montre une nouvelle fois son talent pour faire rire en tout occasion. Certaines rĂ©pliques sont remarquables de drĂŽlerie. NĂ©anmoins, on ne retrouve pas la densitĂ© humoristique que contiennent certains Ă©pisodes de « Donjon ».
Concernant les dessins, je les trouve remarquables. Il faut dire que je trouve le style de Trondheim trĂšs agrĂ©ables. Dâapparence trĂšs simple et quasiment enfantin, ils collent parfaitement au ton de lâhistoire. Ils rendent la lecture aisĂ©e pour tout type de public. Pour des raisons Ă©quivalentes, les couleurs sont bien dosĂ©es. Jâen profite pour signaler la qualitĂ© du travail dans ce domaine de Brigitte Findakly qui sâen est chargĂ©e dans cet opus. Le dĂ©coupage des cases est classique. Chaque page est composĂ©e de quatre lignes dĂ©coupĂ©es chacune en une Ă quatre cases. Sur ce plan-lĂ , la lecture ne nĂ©cessite pas de gymnastique particuliĂšre.
Au final, cet opus mâa laissĂ© un sentiment mitigĂ© une fois terminĂ©. Je ne peux pas dire quâil ne mâa pas fait passer un moment agrĂ©able. Jâai souvent ri, jâai Ă©galement trouvĂ© certains dialogues ou certaines scĂšnes savamment tournĂ©s. Par contre, je nâai pas eu lâenvie, comme souvent avec Trondheim, de me plonger au plus vite dans lâalbum tout juste terminĂ©. Peut-ĂȘtre en attendais-je trop ? MalgrĂ© tout, je nâai pas passĂ© un moment dĂ©sagrĂ©able en le dĂ©couvrant. Mais il nâest pas Ă la hauteur des sĂ©ries comme « Lapinot » ou « Donjon ». Cela ne mâempĂȘchera pas de mâoffrir le prochain opus de cette sĂ©rie pour dĂ©couvrir les nouvelles aventures de ce pauvre Ralph AzhamâŠ
Note : 12/20