Titre : Marche ou Rêve
Dessinateur : Elric & Laurel
Scénariste : Laurel
Parution : Mars 2011
Ce mois-ci est sorti l’album « Marche ou rêve ». J’ai été attiré par le titre, très poétique, mais aussi par l’auteure : Laurel. Celle-ci se charge du scénario, de l’encrage et des couleurs, pendant qu’Elric (inconnu au bataillon pour ma part) se charge du dessin et du lettrage. Le fait de dissocier le dessin et l’encrage est une originalité qui a retenu mon attention. Laurel m’avait séduit sur son blog grâce à la sincérité de ses propos. Alors qu’il ne s’agit plus d’autobiographie ici, je l’attendais un peu au tournant…
Une histoire sensible pleine de charme.
Harold est un jeune homme de dix-neuf ans un peu dans la lune. Au début de l’histoire, il part en vacances chez sa grand-mère en Bretagne. Évidemment, son retour va être riche en remises en question et révélations de secrets de famille. Le canevas est sans grande surprise, de même que l’histoire en elle-même. On retrouve tous les ingrédients du passage à l’âge adulte d’un adolescent. La rencontre avec une fille (qui ressemble à s’y méprendre à Laurel…), les retrouvailles décevantes avec les anciens amis, les souvenirs liés au lieu… Et pourtant, il y a un quelque chose dans cette histoire qui lui permet de sortir des sentiers battus, voire rebattus.
L’histoire développe une certaine finesse dans le propos. En effet, rien ne se passe réellement comme on le penserait. Si l’histoire en elle-même évolue dans le sens prévu, il y a toujours une partie qui vient nous surprendre. Difficile d’en parler plus sans révéler quoi que ce soit. Le tout se termine bien sûr sur le retour d’Harold chez lui après les vacances.
La force de cet ouvrage est sa grande sensibilité. On est vraiment captivé et séduit par l’univers et ses personnages, du Harold naïf à Mathilde, plus entreprenante, en passant par ce chat noir aux grands yeux. L’atmosphère de rêverie, voire de mélancolie nous prend lors de la lecture. Si bien qu’on a l’impression de ressentir vraiment les sentiments d’Harold. En cela, c’est une prouesse. On ressent une empathie très forte pour lui et on ressent la même impression de nostalgie au moment de fermer le livre.
L’ouvrage n’hésite pas à ouvrir des sujets sans les refermer pour autant. On peut voir cela comme des fausses pistes lancées par les auteurs. Cela donne plus d’épaisseur aux personnages avec pas grand-chose. A l’image de ses chatons voués à la noyade pour lesquels Harold se bat. Sa grand-mère lui dit alors : « on voit bien que tu vis à la ville, toi ! » Harold apparaît bien naïf alors.
Le dessin est très réussi, tout en couleurs chatoyantes. Relativement simple en apparence, il développe parfaitement les expressions des personnages (qui ont une sacrée tendance à rougir !). Mais il y a une véritable richesse dans ce dessin, pas forcément discernable au premier abord. Beaucoup de petits détails sont ajoutés en marge du propos (notamment par le petit chat noir). Ainsi, dans une planche, on voit au fil des cases le chat sauter de l’épaule d’Harold, puis revenir vers la table, regarder le poulet puis sauter dessus, un grand sourire aux lèvres. Il y a quantité de petits détails disséminés dans les pages, si bien qu’on se lance rapidement dans une deuxième lecture afin de les déceler.
Au fil de ces 80 pages, on est totalement séduit par l’atmosphère qui se dégage de cet ouvrage. Sensible, nostalgique et plein de charme, Harold nous parle avec son regard sans cesse dans le vague. Sous une apparence classique, tant dans le dessin que dans le propos, Laurel et Elric nous livre une BD bien plus riche qu’elle n’y paraît et dont la mélancolie ambiante ne nous quitte pas vraiment une fois la dernière page lue.