Hello fucktopia – Souillon

HelloFucktopia


Titre : Hello fucktopia
Scénariste : Souillon
Dessinateur : Souillon
Parution : Novembre 2014


 Si je n’ai jamais accroché à « Maliki », j’ai toujours été fan du trait de Souillon. Un peu frustré, j’ai été très réceptif à l’annonce de la sortie d’un one-shot plus sombre intitulé « Hello Fucktopia » (et sous-titré « un vrai conte de fée »). J’ai pu suivre alors le blog du projet, montrant des extraits plus beaux les uns que les autres. Le livre pèse 80 pages et est publié chez Ankama.

HelloFucktopia2Souillon commence par préfacer son livre avec un mot à son lecteur. Une habitude de blogueur certainement. Il y présente « Hello Fucktopia » comme un projet qui lui tient particulièrement à cœur et qu’il a mis des années à arriver à mettre en place. Il implique le lecteur également et pose l’idée d’une forme d’autobiographie cachée. Cela m’a profondément dérangé. C’est comme si Souillon souhaitait mettre, avant la lecture, une part d’affectif dans notre lecture. Clairement, cela fonctionne pour beaucoup. Mais si l’on n’est pas fan de l’auteur, on est un peu dérouté par cette entrée en matière.

« Hello Fucktopia » présente l’histoire de Mali venue à Paris (la dite « Fucktopia ») pour étudier les arts plastiques. Ayant raté les concours d’entrée dans les écoles prestigieuses, elle se retrouve à la faculté avec des cours qui ne l’intéressent guère. A cela s’ajoutent ses amis, Thémis et Stéphane, qui sont bien plus parisiens visiblement.

Un passage à l’âge adulte.

Comme son nom l’indique, « Fucktopia » est une dystopie. Mali n’y trouve pas ce qu’elle cherche et prend des risques. Elle doit passer à l’âge adulte. Hélas, le livre manque un peu d’enjeux. Les intrigues se multiplient sans forcément d’intérêt ou sans être refermées réellement (notamment toutes les histoires avec Thémis et Stéphane n’ont que peu d’intérêt). La lecture avance et à la fermeture de l’ouvrage, on se demande finalement quel est le sens de cette histoire. Beaucoup de discussions des personnages entre eux, quelques situations avec un peu de suspense, mais on se demande où veut en venir l’auteur.

HelloFucktopia3« Hello Fucktopia » narre la jeunesse de Souillon puisque cela se passe pendant les années 90. On regrettera quand même que ce soit si peu ancré dans l’époque. Passés deux/trois détails, on a l’impression d’être en 2014. Mali est clairement encore très adolescente et a du mal à passer à l’âge adulte. Mais certaines révélations manquent clairement de puissance émotionnelle pour un adulte. Du coup, je me suis demandé si je faisais partie du public visé. Malgré tout, la lecture avance bien et certaines scènes sont réussies. J’ai accroché à l’humour de l’ensemble qui pointe son nez par moment, mais la partie réflexion sur la vie m’a paru un peu légère et simpliste. Dommage.

Concernant le dessin, je n’ai pas été déçu. L’ensemble est influencé par le manga, mais présente une bonne synthèse avec des influences plus franco-belge. Les décors sont riches, les personnages bien identifiés et fort graphiquement. Et il y a de vraies qualités dans le découpage des planches, dynamique et varié. Les couleurs enrichissent les ambiances et le trait sans problème. C’est une belle bande-dessinée que l’on a dans les mains, avec un dessinateur des plus doués.

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J’ai pris du plaisir à lire cette bande-dessinée, mais les défauts de l’ensemble me sont apparus ensuite. En insistant sur l’importance qu’avait ce projet pour lui, Souillon a aussi perturbé ma lecture. Car « Hello Fucktopia » ne propose pas un scénario très original. Basé avant tout sur des personnages, il nous manque un peu d’empathie pour eux pour pleinement adhérer.

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Note : 11/20

Buzz-moi – Aurélia Aurita

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Titre : Buzz-moi
Scénariste : Aurélia Aurita
Dessinatrice : Aurélia Aurita
Parution : Septembre 2009


En 2006, Aurélia Aurita publie « Fraise et chocolat ». L’ouvrage présente sa vie sentimentale et sexuelle. Très explicite, l’album finit par faire un buzz plusieurs mois après, bien au-delà de la sphère BD. C’est donc la presse généraliste qui s’intéresse à elle. Absolument pas préparée à ce déferlement médiatique et à toutes ces sollicitations, l’auteure nous explique ici comment elle a vécu les choses.

Je précise dès lors que je n’avais pas aimé du tout « Fraise et chocolat ». Malgré tout, la lecture préalable de l’ouvrage est nécessaire pour pleinement saisir ce « Buzz-moi ». Dans le cas inverse, on ne comprend pas forcément tous les tenants et les aboutissants.

BuzzMoi1L’ouvrage développe plusieurs aspects. D’un côté, la relation aux journaux, aux magazines et à la télévision. La jeune femme découvre ce monde décrit de façon péjorative. Pour simplifier, on l’interviewe sans avoir lu son livre. De l’autre côté, il y a les séances de dédicaces et les rencontres avec les lecteurs. Clairement, cet aspect est peu intéressant car déjà traité mille fois par d’autres auteurs et Aurélia Aurita, malgré le côté sulfureux de son livre, n’a finalement pas grand-chose de nouveau à apporter (à la limite, c’est rassurant).

On découvre donc une auteure qui a droit à un portrait dans Libération et qui est invitée au Grand Journal. L’interrogation demeure : comment ne pas être ridicule face à ça ? De même, Aurélia Aurita semble d’autant plus sensible aux critiques. C’est plutôt bien expliqué. Cela commence par un article de blog, puis dans un journal, puis une pleine page, etc. Et viennent alors les adorateurs et les haineux.

Un manque de profondeur dans l’analyse

Ce qui me gêne dans son livre, c’est que l’on est avant tout devant une succession d’anecdotes. Il manque une analyse, une profondeur qui donnerait du sens à l’ensemble. C’est plaisant de découvrir les coulisses, mais un peu plus de fond n’aurait pas fait de mal. L’auteure joue beaucoup de sa sensibilité pour nous émouvoir. On sent quelqu’un d’honnête et de sincère. Et c’est souvent le but d’une autobiographie que de se dévoiler et de créer de l’empathie. Mais vu le sujet du livre, on n’est pas loin du documentaire. Surtout que l’auteure sait bien préserver sa vie privée justement.

Le dessin d’Aurélia Aurita est relâché et nerveux, soutenu par des aplats de gris. Le trait est vif et cela correspond bien au propos. Bien que la plupart des scènes soient assez statiques, l’auteure sait rendre l’ensemble vivant et finalement varié dans la mise en scène.

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« Buzz-moi » n’est pas dénué d’intérêt. Il présente les conséquences d’un buzz sur un artiste qui ne l’a pas vu venir. Cependant, l’auteure se confine beaucoup dans les faits et laisse une part à l’analyse qui me paraît un peu trop ténu. On retrouvera le même choix dans « LAP ! ». Mais si vous vous intéressez aux coulisses de la BD et des médias, jetez un coup d’œil à ce « Buzz-moi » sans hésiter !

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Note : 12/20

Les femmes en blanc, T36 : Neuf fois de gros stress – Raoul Cauvin & Philippe Bercovici

LesFemmesEnBlanc36


Titre : Les femmes en blanc, T36 : Neuf mois de gros stress
Scénariste : Raoul Cauvin
Dessinateur : Philippe Bercovici
Parution : Mars 2014


Depuis plus de dix ans, les rayons de librairie sont envahis par bon nombre de séries centrées sur un corps de métier. Les enseignants, les CRS, les pompiers, les psys… Tout le monde possède ses albums décrivant son quotidien de manière humoristique. Le moins que je puisse dire est qu’il y a à boire et à manger. Bien souvent, il s’agit d’albums relativement médiocres dont les ficelles sont trop grosses pour chatouiller efficacement les zygomatiques. Néanmoins, parmi les plus anciennes, certaines m’ont conquis depuis que je suis enfant. « Pierre Tombal » ou « Les femmes en blanc » font partie de celles-là. Ma critique d’aujourd’hui porte sur le dernier de tome de la dernière citée. Il s’intitule « Neuf mois de gros stress » et est sorti dans les bacs en avril dernier. Cet album est scénarisé par Raoul Cauvin et dessiné par Philippe Bercovici.

Le site BDGest’ propose le résumé suivant : « Le miracle de la vie… dans les coulisses de l’hôpital. Gérer le stress, c’est la spécialité des femmes en blanc, et à l’hôpital, elles ont de quoi faire ! Entre les futurs pères en panique, les inquiets chroniques et les éclopés en tout genre, pas moyen de lever le pied. C’est ça, le miracle de la vie… dans les coulisses de l’hôpital ! »

Divertir sans trop réfléchir.

Pour les personnes qui n’ont jamais eu l’occasion de lire un des tomes de la série, je vais rapidement vous présenter la structure narrative. L’ouvrage est de format classique et se compose de quarante-six planches. Il se décompose en une suite de gags qui peuvent s’étaler sur une à trois pages. Chacun est indépendant du précédent et du suivant. Cela fait qu’un tel album peut se feuilleter au gré des envies et du temps libre. Il peut être ouvert à n’importe quel page sans gâcher la lecture. Son seul but est de divertir sans trop réfléchir. C’est un objectif louable et apprécié quand il est atteint.

Comme son titre l’indique, les blagues s’insèrent pleinement dans la vie des infirmières. L’auteur arrive à utiliser une certaine variété de cordes à son arc humoristique pour nous faire rire. Il y a évidemment la gestion des patients, les relations avec les médecins, les interactions entre elles mais également leur quotidien de femme en dehors de leur lieu de travail. Chacune de ses thématiques est exploitée de manière équitable tant en quantité qu’en qualité. Raoul Cauvin a une imagination fertile car cela des dizaines d’histoires qu’il a construites dans l’univers hospitalier et il arrive encore à me surprendre.

En effet, une des forces de l’album est d’offrir des chutes imprévisibles. Sans forcément nous faire pleurer de rire, l’auteur arrive par la dernière case à nous surprendre ou à nous faire sourire. J’ai souvent essayé de connaître le dénouement de son gag au fur et à mesure de son déroulement et bien souvent je n’y suis pas arrivé. Il utilise souvent une espèce d’anaphores scénaristiques. Une infirmière nous contente une succession d’anecdotes liées en très peu de temps dans le but d’aboutir à une conclusion marrante. Malgré le nombre parfois important d’événements contés, déjà drôles en soi, je n’arrive pas à découvrir la conclusion de la narratrice. Parallèlement, Cauvin nous présente également des gags en une planche. Ils sont efficaces et légers. La mise en situation est rapide et la fin joue davantage avec les mots que les situations.

Mon seul bémol pourrait concerner les dessins de Bercovici. Je ne leur trouve pas de défauts particuliers. Par contre, je regrette qu’ils se contentent – tout est relatif – d’accompagner le propos sans chercher à le sublimer ou à intensifier son côté humoristique ou parfois caricatural. J’ai toujours le plaisir de retrouver ce trait qui a accompagné mes lectures d’enfance quand je farfouillais dans la bibliothèque parentale. Néanmoins, j’ai toujours l’espoir que la série exploite un de ses axes de progression.

Pour conclure, « Neuf mois de gros stress » fait honneur à la série en se montrant très fidèle aux ingrédients de son succès. Cet album ne possède rien d’exceptionnel mais demeure assez efficace. J’ai pris du plaisir à m’y plonger et l’ai trouvé divertissant. Je pourrais regretter qu’il se lise rapidement mais ce léger défaut est compenser par le fait qu’il se relira toujours avec amusement quand on recherchera un passe-temps plaisant.

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Note : 12/20

Ralph Azham, T1 : Est-ce qu’on ment aux gens qu’on aime ? – Lewis Trondheim

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Titre : Ralph Azham, T1 : Est-ce qu’on ment aux gens qu’on aime ?
Scénariste : Lewis Trondheim
Dessinateur : Lewis Trondheim
Parution : Mars 2011


« Ralph Azham » est une nouvelle série née de l’imagination du célèbre et talentueux Lewis Trondheim. Le premier tome intitulé « Est-ce qu’on ment aux gens qu’on aime ? » est sorti le mois dernier. Edité chez Dupuis, cet opus de format classique est composé d’une grosse quarantaine de pages. Sur un fond blanc, la couverture nous présente une galerie de personnages originaux tournant autour d’un jeune homme aux cheveux bleus et dont les mains sont attachées à un poteau. Le prix de l’ouvrage est un petit peu inférieur à douze euros.

Ralph Azham vit dans un village dans lequel il possède le statut de souffre-douleur. Toutes les occasions sont bonnes pour le punir, le torturer ou le frapper. Il faut dire que ce cher Ralph possède un pouvoir bien particulier. Il peut voir les morts et les naissances. Bref, pour lui, le quotidien est rarement rose et bien trop souvent noir et dur. Mais déjà que la vie n’est pas facile, voilà que le village va être attaqué par la Horde, une troupe sanguinaire qui pris l’habitude de terroriser les habitants…

Il faut savoir que je suis un grand fan de Lewis Trondheim. Je possède une grande partie de ses productions. Et rares sont les lectures de l’une d’entre elles qui ne m’ont pas enthousiasmé. Cela fait que la seule présence de son nom sur une couverture de bandes dessinées fait que je m’offre l’album en question. La couverture laissait sous-entendre une nouvelle immersion de l’auteur dans l’univers de « l’Héroïc Fantasy ». C’était plutôt une bonne nouvelle car son premier voyage dans le domaine a donné naissance à la grande saga « Donjon » qui est une des œuvres majeures de la dernière décennie dans le neuvième art français. J’avais donc hâte de découvrir ce cher Ralph. Pour ceux qui n’auraient pas encore la chance de connaître la magie de Trondheim, sachez qu’elle s’adresse à tous les publics. Cet album répond également à cette règle.

On frôle parfois l’indigestion.

Cet album marque le début d’une nouvelle série. Les personnages nous sont donc inconnus tout autant d’ailleurs que l’univers dans lequel ils vivent ou que les règles qui régulent leur monde. C’est un attrait toujours certain des premiers opus de séries de « Fantasy ». On est toujours à la recherche de la petite originalité qui va nous rendre ce monde si sympathique. On ne peut pas dire que cet album se démarque vraiment des habitudes du genre. L’attrait réside davantage dans le fait que Trondheim veuille jouer avec les codes du genre. Le bémol est que j’ai trouvé la trame très brouillonne. On a parfois l’impression que cela part dans tous les sens. Les informations sont nombreuses, les chemins variés. Mais au final, on frôle parfois l’indigestion. J’ai en effet eu du mal à me plonger dans le quotidien de Ralph Azham. Je suis resté spectateur parce que la porte d’entrée était peut-être un petit peu trop obstruée.

Côté personnages, Trondheim nous en offre une galerie assez fournie. Le premier d’entre eux donne le nom à la série. Il s’agit de Ralph Azham. On ressent un petit peu d’empathie pour lui. En effet, le fait que le village lui fasse porter tous les malheurs du monde avec un certain sadisme fait qu’on ne peut être que de son côté. Le fait que l’histoire se déroule dans une petite communauté fait qu’on voit rapidement graviter un nombre certain de personnages identifiables. C’est une réussite de l’ouvrage car cela nous permet quand même de visualiser assez rapidement le fonctionnement local. Je ne vous les présente pas tous parce qu’une partie du plaisir de la lecture réside dans la surprise et la découverte.

Côté atmosphère, je ne l’ai pas trouvé très prenante. Au risque de me répéter, je trouve que la narration est trop brouillonne pour rendre notre immersion totale. Je pense que structurer davantage les informations en les allégeant éventuellement aurait permis de donner davantage d’épaisseur aux personnages et ainsi de développer nos sentiments à leurs égards. Ce n’est que mon point de vue mais c’est en tout cas ce que j’ai ressenti. C’est dommage car certaines scènes sont vraiment très réussies. Trondheim démontre une nouvelle fois son talent pour faire rire en tout occasion. Certaines répliques sont remarquables de drôlerie. Néanmoins, on ne retrouve pas la densité humoristique que contiennent certains épisodes de « Donjon ».

Concernant les dessins, je les trouve remarquables. Il faut dire que je trouve le style de Trondheim très agréables. D’apparence très simple et quasiment enfantin, ils collent parfaitement au ton de l’histoire. Ils rendent la lecture aisée pour tout type de public. Pour des raisons équivalentes, les couleurs sont bien dosées. J’en profite pour signaler la qualité du travail dans ce domaine de Brigitte Findakly qui s’en est chargée dans cet opus. Le découpage des cases est classique. Chaque page est composée de quatre lignes découpées chacune en une à quatre cases. Sur ce plan-là, la lecture ne nécessite pas de gymnastique particulière.

Au final, cet opus m’a laissé un sentiment mitigé une fois terminé. Je ne peux pas dire qu’il ne m’a pas fait passer un moment agréable. J’ai souvent ri, j’ai également trouvé certains dialogues ou certaines scènes savamment tournés. Par contre, je n’ai pas eu l’envie, comme souvent avec Trondheim, de me plonger au plus vite dans l’album tout juste terminé. Peut-être en attendais-je trop ? Malgré tout, je n’ai pas passé un moment désagréable en le découvrant. Mais il n’est pas à la hauteur des séries comme « Lapinot » ou « Donjon ». Cela ne m’empêchera pas de m’offrir le prochain opus de cette série pour découvrir les nouvelles aventures de ce pauvre Ralph Azham…

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Note : 12/20

Donjon Crépuscule, T111 : La fin du donjon – Lewis Trondheim, Joann Sfar & Mazan

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Titre : Donjon crépuscule, T111 : La fin du donjon
Scénaristes : Lewis Trondheim & Joann Sfar
Dessinateur : Mazan
Parution : Mars 2014


 « La Fin du Donjon »… Le titre du tome 111 de « Donjon Crépuscule » est sans équivoque : c’est la fin ! La grande aventure née de l’imagination de Lewis Trondheim et Joann Sfar allait vivre à son dénouement. La lecture du tome précédent « Haut Septentrion » nous présentait un premier angle de vue sur le combat final qui concluait la saga. Mais « La Fin du Donjon » conte les événements perçus à travers Marvin et Herbert, les deux héros légendaires. Les deux auteurs ont confié les dessins à Mazan, déjà vu sur le premier épisode de « Donjon Monsters ». Sorti chez Delcourt, en mars dernier, l’album était présenté par une très jolie couverture. On y découvrait les ruines du Donjon dans lesquelles la nature reprenait le dessus. J’ai trouvé cette illustration très réussie. J’espérais que le reste de la lecture serait à la hauteur et offrirait à « Donjon » une conclusion brillante.

« Plus les îlots de Terra Amata montent, moins il y a d’oxygène. Tandis que Marvin Rouge et Zakutu tentent de protéger les objets du Destin, Herbert et le Roi Poussière sont obligés de faire allégeance à l’Entité noire afin d’obtenir le précieux oxygène. La fin du Donjon n’a jamais été aussi proche ! Mais la résistance est en marche. » Voilà le résumé offert par le site BD Gest’. A mes yeux, il présente clairement les enjeux pour tout lecteur régulier de la série.

Il est évident qu’essayer de lire cet album sans connaître les épisodes précédents est une mission impossible. Il n’y a pas de piqûre de rappel. Les auteurs plongent immédiatement dans le dur. L’histoire peut être perçue comme un spin off de « Haut Septentrion ». Il faut au moins avoir entièrement lu le cycle « Donjon Crépuscule » qui relate la fin du Donjon. Il se compose actuellement d’une dizaine d’ouvrages.

Un rythme effréné

Un des défauts que ne possède pas cet album est le fait de ne pas être habité par des temps morts. Le rythme est effréné. Les événements s’enchainent. L’action est de sortie. Mazan a un gros travail d’illustration à faire pour faire ressentir le mouvement perpétuel qui accompagne les pérégrinations d’Herbert et Marvin. Ils n’arrêtent pas de courir aux quatre coins de Terra Amata. Le trait de l’auteur traduit assez bien cette sensation de course permanente contre la montre. Le lecteur n’a jamais le temps de souffler. Néanmoins, j’apporterais un bémol. L’ensemble m’apparait brouillon. J’ai parfois eu la sensation que scénario était un cousin du diable de Tasmanie. Ce n’est pas désagréable dans l’ensemble mais cela m’a essoufflé par moment.

Le dénouement est connu dans les grandes lignes avant même la découverte de la première page. Le fait d’avoir lu le tome 110 de « Donjon Crépuscule » donne beaucoup d’informations à ce propos. Cela fait que j’ai eu du mal à me passionner pour les rebondissements qui jalonnent le trajet d’Herbert tout au long de l’histoire. Par contre, j’étais attentif à tous les moments partagés entre le palmipède et son ami dragon. Ils forment le duo central de la saga. Il était donc important de savourer les derniers temps passés à leurs côtés. J’ai regretté que cet aspect nostalgique et émotionnel soit en retrait par rapport à l’action pure. Je ne le reproche pas aux auteurs. C’est leur choix et leur œuvre. Néanmoins, je regrette que le « au revoir » soit finalement aussi brutal. Seules les trois dernières pages sont apaisées et closent l’aventure avec poésie. Parsemer le reste de l’album de ce type de pensées ou de phrases ne m’aurait pas déplu. Dans un genre très différent, je trouvais la fin de « Lapinot » bien plus intense et mieux amenée.

Pour conclure, j’ai passé un bon moment à assister à la fin du Donjon. Le plaisir que j’ai eu à retrouver Herbert et Marvin ensemble m’a fait oublier les quelques défauts que dégageait par moment la lecture. Il est indispensable pour tout adepte de la saga de s’y plonger pour boucler la boucle. Il ne me reste plus qu’à espérer qu’un jour les auteurs trouveront le temps de combler quelques trous que possède la grande Histoire du Donjon. L’espoir n’a jamais tué personne…

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Note : 12/20

Feuille de chou, T3 : journal d’un journal – Mathieu Sapin

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Titre : Feuille de chou, T3 : Journal d’un journal
Scénariste : Mathieu Sapin
Dessinateur : Mathieu Sapin
Parution : Septembre 2011


Après avoir écrit deux premiers « Feuille de chou » consacrés à des tournages, c’est cette fois-ci au journal Libération que Mathieu Sapin a décidé de s’attaquer. Immergé pendant des mois au sein de la direction, il va pouvoir croquer et nous montrer comment fonctionne ce quotidien qui alimente bien des fantasmes. Le tout pèse une centaine de pages et est publié chez Shampooing.

Mathieu Sapin a décidé de traiter le sujet de façon très libre, tant dans le fond que dans la forme. Le tout s’articule donc autour de saynètes, qui commencent par l’arrivée du dessinateur dans les locaux et ses différentes rencontres. Autour de ces anecdotes plus ou moins longues (et intéressantes), on retrouve aussi des « hors contexte », à savoir un dessin avec une citation (hors contexte, donc !). Le tout donne un véritable aspect bordélique à l’ensemble. Mathieu Sapin fait le choix de rester en surface et d’éviter de trop analyser ce qu’il voit et entend. Bien évidemment, son travail consiste notamment à choisir ce qu’il montre (et comment il le fait), mais il n’y a pas vraiment de travail de construction et de synthèse. Dommage.

Un quotidien au quotidien

Malgré tout, la particularité de Libération se retrouve bien dans l’ouvrage, que ce soit dans l’idéologie (« La passion de raconter l’actualité et la volonté de lui donner un sens » nous dit son ancien directeur) ou même dans ses locaux. On peut y lire également des réflexions sur l’évolution de la presse écrite (notamment quotidienne). Je dois avouer que tout n’est pas passionnant et ce que l’on retient, c’est avant tout les anecdotes (comme ce photographe qui reste des heures devant en bâtiment pour prendre une photo d’un homme qui en sort… Et la photo n’est pas retenue ! Tout ça pour ça ?).

Mathieu Sapin s’efforce le plus possible de retranscrire avec fidélité ce qu’il voit/entend. Ainsi, les scènes sont parfois confuses, mais cela donne une idée du bouillonnement qu’il doit régner au journal. On sent une forme de fidélité et d’authenticité dans le travail du dessinateur.

Défaut ou qualité, l’ouvrage est ancré dans son époque. Ainsi, de vieilles histoires ressortent. Certains trouveront cela amusant de retrouver l’actu de l’époque, d’autres trouveront que cela fait vieillir le livre… Mais comment parler d’un quotidien sans parler du quotidien ?

La façon dont illustre son livre Mathieu Sapin est des plus plaisantes. Avec un trait relâché et de belles couleurs à l’aquarelle, l’auteur tient un style parfaitement adapté. Il est cependant dommage que certaines pages soient aussi chargées. Son personnage, petit avec une tête toute ronde, le rend encore plus candide face à son sujet.

« Journal d’un journal » ne m’a pas transcendé. J’y ai trouvé de l’intérêt, mais sans avoir l’impression de découvrir autre chose qu’une sorte « d’esprit Libé ». Mais l’ensemble se lit bien, malgré un contenu un peu fouillis. A lire si vous aimez les documentaires dessinés.

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Note : 12/20