Titre : Astérix, T35 : Astérix chez les Pictes
Scénariste : Jean-Yves Ferri
Dessinateur : Didier Conrad
Parution : Octobre 2013
Cette année marquera une date importante de la bande dessinée française. C’est en effet la première fois que les aventures des deux plus célèbres gaulois ne sont nés ni de la plume de René Goscinny ni de celle d’Albert Uderzo. C’est à Jean-Yves Ferri et Didier Conrad qu’a été confiée la mission d’offrir un second souffle à des mythes du neuvième art. Tout le monde était quasiment d’accord sur le fait que la magie de la série avait disparu avec son scénariste original. Son acolyte n’a jamais eu le talent d’écriture suffisant pour faire perdurer la qualité des premiers opus. La parution de Astérix chez les Pictes le vingt-quatre octobre dernier générait donc une curiosité certaine. D’ailleurs, cela a fait que je me suis offert mon premier album de la saga depuis des années.
Le site Bd Gest’ propose le résumé suivant : « Les Pictes ? Oui, les Pictes ! Ces peuples de l’ancienne Ecosse, redoutables guerriers aux multiples clans, dont le nom, donné par les Romains, signifie littéralement « les hommes peints ». Astérix chez les Pictes promet donc un voyage épique vers une contrée riche de traditions, à la découverte d’un peuple dont les différences culturelles se traduiront en gags et jeux de mots mémorables. »
J’associe le nom de Jean-Yves Ferri à la série Le retour à la terre dont les différents épisodes m’ont procuré moult fous rires. Je trouvais donc ce choix judicieux de lui confier le scénario de ce nouvel album. La qualité de son écriture, son sens de la répartie et la drôlerie de ses dialogues me laisser croire en sa capacité à s’inscrire dans la lignée de son illustre prédécesseur, René Goscinny. Par contre, je ne connaissais le travail de Conrad que de réputation. Je n’avais jusqu’alors jamais eu l’occasion de le découvrir. Néanmoins, le fait qu’Uderzo soit encore à ses côtés garantissait une continuité dans le dessin.
Jouer sur les coutumes locales
Les auteurs ont choisi un squelette narratif classique pour leur grande première. En effet, offrir un voyage à Astérix et Obélix dans une contrée étrangère n’est pas original. Néanmoins, ce n’est pas une mauvaise idée. Les pérégrinations de nos deux gaulois en Hispanie, Corse, Belgique, Helvétie ou en Grande-Bretagne font partie de mes préférées. Cette option permet de jouer sur les coutumes locales. Les Pictes étant les écossais actuels, on pouvait supposer que le kilt ou encore le monstre du Loch Ness seraient de sortie. La lecture offre de bonnes surprises dans le domaine. Certains clichés des autochtones sont exploités. Je me suis laissé porter malgré le côté répétitif de certains d’entre eux. Certaines blagues font sourire même si on ne retrouve pas la densité des meilleurs épisodes de la série. Par contre, je trouve plutôt bien construite la relation toujours décalée entre Obélix et les us et coutumes étrangères.
L’histoire ne dénote pas non plus par son originalité. Un Picte exilé se doit d’aller reconquérir sa belle pour éviter la prise de pouvoir d’un chef manipulateur et vil. Les événements s’enchainent à un rythme régulier et toutes les étapes prévisibles sont respectées. A aucun moment, je n’ai été pris par surprise. Les auteurs naviguent sur des rails bien tracés. Ils ne cherchent pas à révolutionner le genre. Au contraire, ils se montrent très respectueux de l’institution. Bon nombre de scènes rappellent certains moments vécus en lisant les albums précédents. Je ne leur reproche pas du tout cette démarche dans le sens où il me paraissait impossible de révolutionner le genre.
Le nouveau duo était également attendu sur ses textes. Goscinny est célèbre pour ses jeux de mots et ses calembours. Ferri fait de gros efforts sur ce plan-là. Rares sont les pages sans second degré. Certains sont plus réussis que d’autres mais le bilan reste très positif par rapport aux récentes parutions de la série. Ma deuxième lecture m’a d’ailleurs permis de profiter davantage de cet aspect. Néanmoins, les blagues de cet opus font davantage sourire que rire. C’est toujours mieux que les derniers albums rédigés par Uderzo qui en devenaient pathétiques dans le domaine.
Au final, Astérix chez les Pictes réussit correctement sa mission. Il avait pour objectif d’arrêter la terrible chute opérée depuis une petite dizaine d’album. Il est atteint. Néanmoins, il faudra attendre le prochain opus pour savoir si Ferri et Conrad peuvent redonner entièrement ses lettres de noblesse à ce mastodonte du neuvième art. C’est tout le mal que je leur souhaite…