Titre : Un putain de salopard, T2 : O Maneta
Scénariste : Régis Loisel
Dessinateur : Olivier Pont
Parution : Novembre 2020
Un putain de salopard est un titre qui attire l’œil. La présence de Loisel sur la couverture avait éveillé ma curiosité. Le premier tome, Isabel, m’avait plongé dans la quête d’un jeu homme sur son passé au beau milieu de la forêt amazonienne. La mise en place de l’intrigue prenait son temps. Mais l’histoire changeait de braquet dramatique au fur et à mesure que Max s’enfonçait dans la nature sauvage locale. J’avais conclu ma lecture sur une impression positive. J’avais été emporté par l’atmosphère qui se dégageait de l’album. J’étais donc logiquement impatient de découvrir O Maneta, deuxième acte de cette aventure dont les protagonistes ne sont pas sûrs de rester indemnes…
Une ambiance oppressante
L’enjeu principal de la série se construit autour de Max. Ce jeune homme a perdu récemment sa mère qui ne lui a jamais donné l’identité de son père. Il est tombé sur une photo sur laquelle sa maman est entourée de deux hommes. Il suppose que l’un d’entre eux pour être son paternel. C’est avec l’objectif d’en apprendre davantage que le héros se retrouvait dans cette région du monde sauvage à tout point de vue. Cette enquête sert donc de fil conducteur à la narration mais il s’avère rapidement que ce n’est pas le seul problème à résoudre…
Le mystère entourant les origines de Max est accompagnée d’une série de sous-intrigues qui alimente le scénario. Le héros est accompagné dans son aventure de Baïa, une autochtone muette qui semble avoir une relation particulière avec des esprits. Cette dimension fantastique reste jusqu’alors très brumeuse. On s’inquiète aussi pour le devenir de Charlotte et Cristelle, infirmières venues de France métropolitaine travailler dans la forêt. Agression et meurtre avaient occupé leurs premiers jours de présence et depuis elles sont en fuite et se cachent de personnages a priori peu recommandables. Enfin, une carcasse d’avion croisée au milieu de nulle part semble abriter elle aussi son lot de cadavres au sens propre et au sens figuré…
Comme je l’évoquais en introduction, j’ai été immédiatement séduit par l’atmosphère qui envoûte la lecture. La moiteur de la forêt amazonienne transpire des planches. L’aspect sauvage et mystérieux des lieux est aussi inquiétant que fascinant. A cela s’ajoute la loi du Far West qui semble régir la région. On a peur pour les personnages. La violence et la loi du plus fort enrichisse l’ambiance oppressante qui accompagne bon nombre de moments de l’histoire.
Par les nombreux enjeux qui la composent, la narration ne manque pas d’intérêt. Néanmoins, je l’ai parfois trouvé confuse. Le scénario doit faire évoluer parallèlement plusieurs intrigues : la quête de Max, le danger guettant les deux infirmières, l’aura mystérieuse et parfois inquiétante qui enrobe bon nombre d’autochtones… Les auteurs ont parfois du mal à faire cohabiter tout ce petit monde. On est parfois frustré de quitter un personnage pour en retrouver un autre. Le passage de l’un à l’autre manque de fluidité et de lien. J’ai le sentiment que chaque histoire, pour l’instant relativement indépendante, possède de réels attraits mais que la trame générale n’arrive pas nécessairement à les sublimer pleinement. Malgré ces quelques remarques, l’album offre une lecture prenante qui témoigne d’un joli travail d’écriture.
Les illustrations nées de la plume d’Olivier Point sont très réussies. Je suis tombé sous le charme de ses décors magistraux. L’immersion est très sensorielle, à la fois moite et oppressante. Le travail sur couleurs est remarquable. Les tons verts de la forêt et les tons marron et gris du village participent activement au climat de la lecture. Je suis par contre moins enthousiaste à propos des traits des personnages. Je les trouve moins précis et travaillés. Néanmoins, ils ne gâchent en rien la lecture mais se contentent, de mon point de vue, de l’accompagner sans la transcender.
Pour conclure, O Maneta m’a offert une plongée agréable dans un univers vraiment captivant. Même si l’intrigue manque parfois de structure ou de hiérarchie entre ses différents enjeux, elle nous offre une lecture agréable et alimente suffisamment la curiosité pour j’ai une envie certaine de découvrir la suite…