Les carnets de Cerise, T3 : Le dernier des cinq trésors

LesCarnetsDeCerise3


Titre : Les carnets de Cerise, T3 : Le dernier des cinq trésors
Scénariste : Joris Chamblain
Dessinatrice : Aurélie Neyret
Parution : Novembre 2014


Depuis le temps que la sĂ©rie « Les carnets de Cerise » me fait de l’Ɠil, j’ai enfin pu mettre la main sur un exemplaire. Merci donc au CDI de mon collĂšge, qui me donne accĂšs facilement aux sĂ©ries jeunesse ! « Les carnets de Cerise » jouit d’excellents retours de lecteur et ses couvertures magnifiques sur les Ă©tals des librairies ne me laissaient pas indiffĂ©rents. Je commence donc cette sĂ©rie par le tome 3. Si des allusions aux deux prĂ©cĂ©dentes histoires (et personnages) sont faites, le tout peut se lire avec plaisir indĂ©pendamment du reste. Le tout est publiĂ© chez Soleil dans l’excellente collection MĂ©tamorphoses.

Cerise est une petite fille curieuse qui aime enquĂȘter. Tout dĂ©marre avant tout par son arrivĂ©e au collĂšge. Les auteurs ont dĂ©cidĂ© de faire grandir leur personnage. En cela, on sent que la sĂ©rie est destinĂ©e avant tout aux petites filles. C’est donc un album jeunesse trĂšs fĂ©minin auquel on a droit : les hommes sont presque absents de l’histoire et tout se passe entre filles (et femmes !). MalgrĂ© ce public visĂ©, l’album parvient Ă  toucher un public bien plus large. Une belle rĂ©ussite !

Un public de jeunes filles visés, un public bien plus large atteint.

LesCarnetsDeCerise3aCerise assiste Ă  un atelier lecture avec la relieuse de la ville. Et lors d’une visite chez elle, elles trouvent un coffre correspondant Ă  un trĂ©sor. Cinq trĂ©sors seront Ă  trouver, ravivant les blessures de jeunesse de la jeune femme


Lorsque l’on lit « Les carnets de Cerise », on sent bien l’aspect jeunesse créé par la narration : c’est fluide, simple et le suspense monte lentement. Mais on est surpris, lors du dĂ©nouement, d’ĂȘtre particuliĂšrement touchĂ© par l’histoire. Le scĂ©nario, bien ficelĂ©, nous amĂšne tranquillement jusqu’à un point d’émotion bien maĂźtrisĂ©. J’ai Ă©tĂ© particuliĂšrement Ă©mu par cette histoire, toute en dĂ©licatesse et en bons sentiments.

La particularitĂ© de cette sĂ©rie est de proposer, justement, les carnets de Cerise. Ainsi, quand elle fait des gĂąteaux, elle nous livre la recette avec son Ă©criture manuscrite, ses dessins et des photos. Cet aspect-lĂ  est vraiment rĂ©ussi et permet d’intensifier le lien entre le lecteur et la bande de filles.

Concernant le dessin d’AurĂ©lie Neyret, c’est assez formidable. À la fois un peu dĂ©suet (l’histoire se passant Ă  NoĂ«l) et moderne, il possĂšde la douceur nĂ©cessaire Ă  l’histoire. La symbiose dessin/scĂ©nario est parfaite et la lecture des planches de ces « Carnets de Cerise » est un vĂ©ritable plaisir visuel. Sans compter que la construction des planches est bien pensĂ©e et ne fait jamais dans la facilitĂ©.

LesCarnetsDeCerise3b

« Les carnets de Cerise », pour ce tome 3 dĂ©diĂ© Ă  NoĂ«l, est particuliĂšrement touchant. C’est une preuve de plus qu’un ouvrage jeunesse peut dĂ©passer son lectorat et toucher les petits et les grands. Un grand bravo aux deux auteurs !

coupdecoeur_new

avatar_belz_jol

note5

Une petite tentation

UnePetiteTentation


Titre : Une petite tentation
Scénariste : Jim
Dessinateur : Grelin
Parution : Mars 2013


Paru initialement sous le nom du « Sourire de la babysitter », cette sĂ©rie a connu une renaissance en paraissant sous la forme d’un copieux one-shot (plus de 150 pages quand mĂȘme). En effet, la premiĂšre mouture avait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©e au premier tome. On ne peut donc qu’ĂȘtre un peu mĂ©fiant, mais pourquoi pas. RebaptisĂ© « Une petite tentation », cette histoire parle donc d’une babysitter et de sa copine qui se lancent le dĂ©fi de piquer le mec quadra et avec une bonne situation dont la premiĂšre garde la fille. S’engage donc un jeu de sĂ©duction avec d’un cĂŽtĂ© la timide et de l’autre la dĂ©lurĂ©. Le tout est paru chez Vents d’Ouest.

Nous avons donc affaire ici Ă  une classique histoire sentimentale. La tentation, le dĂ©sir, les sentiments
 On n’est mĂȘme plus dans un triangle amoureux, mais plutĂŽt dans un hexagone ! Cependant, trĂšs vite on s’aperçoit que les personnages sont stĂ©rĂ©otypĂ©s. Plus choquant, les femmes sont toutes des garces et les hommes des ĂȘtres humains beaucoup plus sentimentaux et fidĂšles
 Étrange parti pris !

Pour un jeune public ?

UnePetiteTentation2Des personnages caricaturaux ne sont pas forcĂ©ment un problĂšme. On pourrait se voir dans un vaudeville sympathique. HĂ©las, les situations sont tout aussi fausses. A aucun moment, on ne croit vraiment Ă  tout ça. Entre une babysitter qui s’exhibe en soutif devant trois quadras ou un ex qui se taille les veines au cutter dans le couloir d’un immeuble, tout cela laisse un peu dubitatif. De mĂȘme, les deux jeunes filles sont Ă©tudiantes ET mineures. Je n’ai pu m’empĂȘcher de tiquer sur ce genre de dĂ©tails. Plusieurs fois, j’ai eu l’impression que ce livre Ă©tait plutĂŽt destinĂ© Ă  un jeune public. Mais pourtant, vu oĂč il est Ă©ditĂ©, ça ne semble pas ĂȘtre le cas. Quant Ă  la conclusion de l’ouvrage, elle va vraiment dans le sens d’une publication pour ado et/ou jeunes adultes. 

MalgrĂ© tout, la lecture mĂ©nage son suspense et ses surprises. La fin est trop moralisatrice et casse un peu finalement la dynamique de l’ouvrage. Le trait de Grelin est dynamique et plaisant. Ses filles sont sexy et illustrent trĂšs bien la notion de tentation
 Cependant, les expressions de visage un peu manga m’ont gĂȘnĂ© par moments. Clairement, ça ne fait pas partie de mes codes graphiques ! Les couleurs Ă©galement, trĂšs modernes, ne me parlent pas. C’est clairement une question de goĂ»t. Grelin a un style moderne oĂč il mĂ©lange de nombreuses influences (franco-belge, manga, voire Disney). De mĂȘme, la colorisation fait partie de canons du genre. Je regrette cependant un choix de faire des grandes cases finalement assez avares de dĂ©cors. Cela augmente la pagination pour pas grand-chose. Mais encore une fois, ça semble ĂȘtre une tendance du moment.

UnePetiteTentation1

« Une petite tentation » est un rĂ©cit sexy oĂč les jolies filles peu vĂȘtues sont bien prĂ©sentes. Inscrit dans une mouvance qui se veut moderne, je ne suis pas sĂ»r que cet ouvrage puisse toucher rĂ©ellement autre chose qu’un lectorat bien jeune qui fermera les yeux sur les incohĂ©rences du rĂ©cit et sur les caricatures de l’ensemble. Pour ma part, j’ai pris plaisir Ă  dĂ©vorer les filles des yeux. Peut-ĂȘtre que l’idĂ©e de faire un « roman graphique » n’était pas bien pertinente. Il semblerait qu’en 60 pages, tout aurait pu ĂȘtre dit.

avatar_belz_jol

note2

De profundis

deprofundis


Titre : De Profundis
Scénariste : Chanouga
Dessinateur : Chanouga
Parution : Avril 2011


« Quelque part entre Ceylan et BornĂ©o, des pĂȘcheurs racontent avoir autrefois ramenĂ© dans leurs filets un drĂŽle de naufragĂ©, une Ă©trange crĂ©ature chassĂ© du pays des sirĂšnes ». VoilĂ  ce que l’on peut lire en quatriĂšme de couverture de « De profundis », premiĂšre bande-dessinĂ©e scĂ©narisĂ©e et dessinĂ©e par Chanouga. Sous-titrĂ© « l’étrange voyage de Jonathan Melville », elle raconte l’histoire incroyable de ce marin.

Jonathan Melville est marin. Alors qu’il navigue sur une mer paisible, un typhon gigantesque et imprĂ©visible fait son apparition. Pris en pleine tempĂȘte, il va passer par-dessus bord et se retrouver sur une Ăźle non-rĂ©pertoriĂ©, sauvĂ© par deux jeunes filles Ă  l’air faussement innocent.

deprofundis2Ce roman graphique d’une centaine de pages est construit selon un procĂ©dĂ© de narration bien connu : Jonathan Ă©crit une lettre Ă  sa belle dans laquelle il raconte ses pĂ©ripĂ©ties. Le tout est donc articulĂ© autour de flashbacks, bien que la chronologie reste respectĂ©e dans l’ensemble. On n’a aucun problĂšme Ă  suivre les Ă©vĂšnements.

Une fable noire, Ă  l’onirisme perpĂ©tuel.

« De profundis » est avant tout une fable bien noire. Son onirisme perpĂ©tuel nous plonge dans une ambiance sombre et malsaine. A force de douter du rĂ©el en permanence, on finit par se demander si, finalement, le rĂȘve n’est pas complĂštement absent de ce rĂ©cit fantastique. Ainsi, cet ouvrage tient avant tout par son ambiance particuliĂšre, qui la renvoie aux contes les plus glauques de notre enfance. Une forme de retour aux sources en quelque sorte.

deprofundis4L’omniprĂ©sence de la narration donne un aspect trĂšs littĂ©raire Ă  cette bande-dessinĂ©e. Chanouga possĂšde une belle plume, ce qui renforce l’impression que le personnage nous Ă©crit sa lettre. Un peu comme si nous avions trouvĂ© une bouteille lancĂ©e Ă  la mer et que nous dĂ©couvrions son contenu. Nous nous retrouvons dans la peau de sa femme, rĂ©alisant ce qui est arrivĂ© Ă  son mari.

En marge des textes, la contemplation est trĂšs prĂ©sente. Les dialogues restent limitĂ©s et l’observation des paysages et des personnages se taille une part importante du gĂąteau. L’équilibre entre action, dialogues, narration et contemplation est vraiment bien dosĂ©, et ce sur les 100 pages. Le rythme de l’ouvrage s’en retrouve trĂšs bien Ă©quilibrĂ©.

Difficile de passer Ă  cĂŽtĂ© du travail graphique de « De Profundis ». C’est simplement magnifique. L’auteur garde son crayonnĂ©, sans l’encrer. Cela donne un aspect « dessin » Ă  l’ensemble, d’une grande richesse. Les couleurs sont splendides et s’accordent parfaitement Ă  cette technique. D’ailleurs,deprofundis3 la couleur participe grandement aux ambiances du livre, changeant souvent de tonalitĂ© selon les scĂšnes. Les paysages sont parfois de vĂ©ritables tableaux.

Les personnages ne sont pas en reste. Outre les deux « sirĂšnes », aux airs faussement innocents (et terriblement sensuel !), la petite sirĂšne est parfaitement rĂ©ussie Ă©galement. Sans en rĂ©vĂ©ler trop sur l’histoire, le travail sur les personnages par Chanouga se rĂ©vĂšle trĂšs subtil. Une seule particularitĂ©, dessinĂ©e sans excĂšs, entraĂźne un malaise immĂ©diat. Un peu comme si le lecteur s’apercevait d’une anomalie comme le personnage, se demandant s’il a bien vu ce qu’il a cru voir.

deprofundis1

Pour une premiĂšre bande-dessinĂ©e, « De Profundis » est un coup de maĂźtre ! Ambiance glauque, suspense haletant, narration de haute volĂ©e, dessin splendide et personnel
 Ce roman graphique est un bijou plein de poĂ©sie. Certes, cela ne plaira pas Ă  tout le monde tant l’ambiance est particuliĂšre, mais cette fable marine mĂ©rite le coup d’Ɠil. Et plutĂŽt deux fois qu’une !

coupdecoeur_new

avatar_belz_jol

note5

Doomboy

doomboy


Titre : Doomboy
Scénariste : Tony Sandoval
Dessinateur : Tony Sandoval
Parution : Septembre 2011


Tony Sandoval est un auteur mexicain de bande-dessinĂ©e. Ayant vu l’une de ses expos, j’avais Ă©tĂ© marquĂ© par son graphisme particulier et par son univers trĂšs personnel. Je me suis donc procurĂ© « Doomboy », dont les critiques Ă©taient particuliĂšrement Ă©logieuses. « Doomboy » se prĂ©sente sous la forme d’un livre A4 au format paysage. Il compte pas moins de 128 pages et est Ă©ditĂ© aux Editions Paquet. Continuer la lecture de « Doomboy »

Mille tempĂȘtes

MilleTempetes


Titre : Mille tempĂȘtes
Scénariste : Tony Sandoval
Dessinateur : Tony Sandoval
Parution : Juin 2015


Avec « Doomboy », Tony Sandoval avait su toucher son public et les critiques de tout bord. Un graphisme reconnaissable immĂ©diatement et une histoire des plus touchantes lui avait permis d’obtenir un succĂšs bien mĂ©ritĂ©. De retour aujourd’hui avec « Mille tempĂȘtes », l’auteur reste sur ses sujets de prĂ©dilection : l’adolescence et le fantastique. Le tout est Ă©ditĂ© chez Paquet pour un total de 130 pages.

Lisa est une jeune fille à l’aube de l’adolescence. Orpheline de mùre, elle va accidentellement passer dans un monde parallùle et en ramener un objet, ouvrant une brùche à des bestioles et monstres de tout genre


Des adolescents et des monstres.

MilleTempetes2Outre la dose de fantastique qui habite ses ouvrages, Tony Sandoval semble obsĂ©dĂ© par la pĂ©riode de l’adolescente et de ses exclus. La marginalitĂ© et la violence du rejet sont au centre de ses Ɠuvres. En dĂ©calage avec les jeunes de son Ăąge, Lisa est persĂ©cutĂ©e. Cela donne des scĂšnes d’une rare violence typique de cet Ăąge ingrat. Mais au-delĂ  de cet aspect sociĂ©tal, c’est le fantastique qui englobe le tout. Lisa est accusĂ©e d’ĂȘtre une sorciĂšre et elle devra en effet mener un combat contre des forces d’un autre monde.

Le rĂ©cit de « Mille tempĂȘtes » manque clairement de lisibilitĂ©. Si dans d’autres ouvrages le lien entre les rĂ©cits fantastiques et adolescents sont Ă©vidents, c’est moins le cas dans cet ouvrage. On a plutĂŽt l’impression de lire deux histoires en parallĂšle. C’est une vraie dĂ©ception en lecture. Si on retrouve la patte de l’auteur, un peu de clartĂ© dans la narration n’aurait pas fait de mal. On pense notamment Ă  l’arrivĂ©e du pĂšre, un peu tardive façon deus ex machina.

MilleTempetes3

Graphiquement, en revanche, le plaisir est total. Le style personnel de Tony Sandoval se reconnaĂźt au premier coup d’Ɠil. Pourtant, l’auteur multiplie les techniques pour notre plus grand plaisir. DĂ©marrant avec un style Ă©purĂ© sans encrage Ă  l’aquarelle,  le rĂ©cit adopte alors un style plus conventionnel (case rectangulaire, colorisation en aplats numĂ©riques, encrage
). Des allers-retours sont alors frĂ©quents entre les techniques, la plupart du temps dictĂ©s par l’histoire (comme pour les changements de mondes par exemple). Il est dommage que certains changements graphiques laissent un peu dubitatif par leur intĂ©rĂȘt. Quoi qu’il en soit, le trait est toujours trĂšs beau et personnel. Tony Sandoval est l’un des dessinateurs qui me marque le plus actuellement par son univers original et reconnaissable entre mille.

MilleTempetes1

Une petite dĂ©ception pour ce « Mille tempĂȘtes ». Si le graphisme est puissant et certaines planches admirablement pensĂ©es, le fil rouge de l’histoire reste un peu confus, mĂȘme si les relectures apportent un peu de sens Ă  ce combat fantastique d’un autre monde.

avatar_belz_jol

note3

Une vie sans Barjot

UneVieSansBarjot


Titre : Une vie sans Barjot
Scénariste : Appollo
Dessinateur : Stéphane Oiry
Parution : Mars 2011


La fin de l’adolescence et le passage Ă  l’ñge adulte est un grand classique de la bande-dessinĂ©e. À croire que les auteurs sont de grands ados qui ont toujours eu beaucoup de mal Ă  faire leur deuil de cette Ă©poque. « Une vie sans Barjot » raconte la derniĂšre nuit de Mathieu dans sa ville natale avant son dĂ©part pour les Ă©tudes Ă  la capitale. Le tout pĂšse une soixantaine de pages et est paru chez Futuropolis.

La soirĂ©e commence par un concert dans un bar. Tout le monde semble plus ou moins se connaĂźtre. Bienvenue en province, symbole de la banlieue dans le livre. En effet, Mathieu vient d’avoir son bac et son passage Ă  l’ñge adulte sera la montĂ©e Ă  la capitale. Il va donc perdre ses amis et
 NoĂ©mie, la fille dont il est secrĂštement amoureux depuis des annĂ©es.

La fin de l’adolescence en une soirĂ©e.

UneVieSansBarjot1C’est un rĂ©cit sur l’adolescence qui nous est proposĂ©. Mathieu et ses copains sont suffisamment attachants pour nous tenir en haleine, eux qui Ă©cument les fins de soirĂ©e pour retrouver NoĂ©mie. Au final, « Une vie sans Barjot » ne raconte pas grand-chose et fait fonctionner pas mal de clichĂ©s. Mais cette ambiance de dĂ©ambulation nocturne ne laisse pas indiffĂ©rent. La fin casse d’ailleurs un peu cette sensation de fin d’époque. Dommage.

La narration est ainsi purement chronologique et son rythme adopte celui des hĂ©ros. Peu d’ellipses, tout se suit et forme un tout. Le dĂ©coupage en quatre bandes des planches renforce cette impression de temporalitĂ©. On marche avec les personnages, on attend avec eux
 En cela, « Une vie sans Barjot » forme un tout parfaitement cohĂ©rent avec son sujet !

Le dessin de StĂ©phane Oiry est vraiment adaptĂ© au rĂ©cit. Je ne connaissais pas ce dessinateur, mais son trait m’a conquis. Son dessin tout en noirs est parfaitement mis en valeur par une colorisation en bichromie qui permet un dĂ©coupage des scĂšnes. Beaucoup sont bleues (pour l’extĂ©rieur) et les changements vers le jaune ou le rouge apportent un contraste intĂ©ressant.

UneVieSansBarjot2

« Une vie sans Barjot » est une bande-dessinĂ©e sympa. Loin d’ĂȘtre rĂ©volutionnaire dans son propos ou dans son ambition, elle fait le travail. Elle rappellera certains souvenirs aux nostalgiques qui regrettent encore cette fille Ă  qui ils n’ont pas su dĂ©clarer leur flamme


avatar_belz_jol

note3

Little Tulip

LittleTulip


Titre : Little Tulip
Scénariste : JérÎme Charyn
Dessinateur : François Boucq
Parution : Novembre 2014


 « Little Tulip », Ă  sa sortie, a fait couler beaucoup d’encre. Le one-shot, rĂ©alisĂ© par Charyn (au scĂ©nario) et Boucq (au dessin), Ă©tait dĂ©crit comme puissant, noir et formidablement dessinĂ©. Paru dans la collection « Signé » au Lombard, le livre pĂšse pas moins de 84 pages. C’est la troisiĂšme collaboration des deux auteurs.

Paul est amĂ©ricain. Alors qu’il n’est qu’un enfant, sa famille Ă©migre Ă  Moscou oĂč ils vont subir de plein fouet la rĂ©volution soviĂ©tique. CondamnĂ©s pour espionnage, ils sont envoyĂ©s au goulag en SibĂ©rie. SĂ©parĂ© de ses parents, Paul va tenter de survivre, s’aidant de son seul atout : son talent de dessinateur. Il va obtenir des protections des gangs locaux en tant que tatoueur attitrĂ©.

Viscéral et puissant.

LittleTulip2C’est une histoire implacable qui se dĂ©veloppe ici. L’humanitĂ© dans ce quelle a de plus animale. Viols, meurtres, domination
 Tout y passe. On dĂ©couvre le quotidien du camp, lĂ  oĂč les prisonniers s’organisent en clans pour survivre et se dominer les uns les autres.

ParallĂšlement Ă  l’histoire du goulag, on suit Paul Ă  une Ă©poque plus contemporaine. Ainsi, on sait qu’il a survĂ©cu dĂšs le dĂ©part et qu’il est revenu aux Etats-Unis. Cette partie constitue une sorte de polar, Paul aidant les policiers pour dessiner des portraits robots. Moins prenante que celle du goulag, elle reprend les thĂšmes du tatouage et de la vengeance.

Cet univers ultra-violent est soutenu par le dessin puissant de Boucq. HabituĂ© Ă  ces genres de thĂšmes (on pense à « Bouncer » par exemple), il a un vĂ©ritable talent pour montrer l’ĂȘtre humain dans sa dĂ©chĂ©ance. Les corps sont particuliĂšrement Ă  l’honneur ici et son trait dynamique et rugueux marche Ă  merveille. Il est heureux que Boucq sache si bien choisir ses scĂ©naristes !

LittleTulip1

« Little Tulip » est un ouvrage puissant et viscĂ©ral qui ne fait jamais dans la demi-mesure. Dans ce livre, tout acte se fait dans le sang et l’épilogue ne peut ĂȘtre que vengeance. Un bel ouvrage de bande-dessinĂ©e, avec un dessin au diapason de son scĂ©nario.

avatar_belz_jol

note4

AĂąma, T4 : Tu seras merveilleuse, ma fille

Aama4


Titre : AĂąma, T4 : Tu seras merveilleuse, ma fille
Scénariste : Frederik Peeters
Dessinateur : Frederik Peeters
Parution : Octobre 2014


AĂąma est l’une des sĂ©ries de science-fiction les plus excitantes de ces derniĂšres annĂ©es. ScĂ©narisĂ©e et dessinĂ©e par Frederik Peeters, elles mettent en scĂšne un paumĂ©, Verloc  Nim, qui part sur une planĂšte dĂ©serte avec son frĂšre. Sur cette planĂšte, une expĂ©rience ultra-secrĂšte a lieu. « Tu seras merveilleuse, ma fille » est le quatriĂšme et dernier tome qui vient clore la sĂ©rie. Il est Ă©ditĂ© chez Gallimard et pĂšse une centaine de pages.

Si les deux premiers tomes se concentraient sur une SF classique, oĂč les personnages dĂ©couvraient le rĂ©sultat d’une expĂ©rience qui dĂ©gĂ©nĂ©rait, le troisiĂšme opus prenait un virage onirique. AprĂšs avoir placĂ© des fondements travaillĂ©s et cohĂ©rents, Frederik Peeters avait fait des choix scĂ©naristiques discutables, abandonnant le rĂ©alisme au profit des questionnements mĂ©taphysiques. Ce quatriĂšme tome continue dans cette voie.

Aama4b

Verloc Nim fusionne avec l’AĂąma. Curieusement, il la contient suffisamment. Il devient une sorte de super ĂȘtre omniscient dont le seul but est de fusionner avec sa fille. Sans trop d’explication, Verloc Nim devient donc un ĂȘtre capable d’à peu prĂšs tout. Il bondit de partout, voit tout, entend tout
 J’ai bien du mal Ă  accrocher Ă  ce genre de postulats un peu faciles. Quant aux rĂ©flexions psychologiques, elles sont dĂ©jĂ -vus depuis longtemps.

Un virage radical pour la fin de la série.

Ce terreau permet en revanche Ă  Frederik Peeters de faire exploser sa maestria graphique. Quelques doubles pages viennent sublimer le livre et son trait reste toujours aussi puissant. Les scĂšnes de combat et de vol, trĂšs (trop ?) nombreuses, montrent combien l’auteur maĂźtrise son dessin, le mouvement et le dĂ©coupage.

L’ouvrage se concentrant uniquement sur Verloc Nim, il perd ainsi toute la puissance psychologique que la sĂ©rie avait, faisant vivre des personnages originaux et trĂšs bien travaillĂ©s. L’aspect psychologique se cantonne donc Ă  des gĂ©nĂ©ralitĂ©s, bien loin de ce Ă  quoi on avait l’habitude dans la sĂ©rie.

Aama4a

Ce quatriĂšme tome de « AĂąma » est une vraie dĂ©ception. L’auteur a pris un virage radical au troisiĂšme tome qu’il confirme ici. Si certains seront certainement conquis par ce livre, d’autres resteront clairement sur le bord du chemin, profitant des planches magnifiques de l’auteur sans vraiment y trouver un sens. Quel dommage ! 

avatar_belz_jol

note2

Le goût du chlore

LeGoutDuChlore


Titre : Le goût du chlore
Scénariste : Bastien VivÚs
Dessinateur : Bastien VivĂšs
Parution : Mai 2008


« Le goĂ»t du chlore » est l’une des premiĂšres bande-dessinĂ©es de Bastien VivĂšs. Parue en 2008, elle a permis Ă  l’auteur de prendre son envol depuis avec de nombreux projets couronnĂ©s de succĂšs. Dans cet ouvrage paru chez KSTR, on retrouve deux jeunes gens qui se rencontrent Ă  la piscine. Le tout pĂšse pas moins de 135 planches.

Dans la BD, on suit un jeune homme qui a un problĂšme de dos. Son kinĂ© le pousse alors Ă  aller nager, ce qu’il n’a pas vraiment envie. Il faut dire qu’il ne nage pas bien et qu’il a bien du mal Ă  motiver des amis pour l’accompagner. Il dĂ©couvre alors le « milieu » de la piscine municipale, avec des hommes en reprĂ©sentation, des vieilles femmes et
 Une fille.

LeGoutDuChlore1« Le goĂ»t du chlore » est une romance. Si pudique qu’elle en perd un peu d’intĂ©rĂȘt. Il y a trĂšs peu de dialogues dans l’ouvrage et une grande partie concerne la natation. En effet, la jeune fille enseigne au garçon comment mieux nager. L’intĂ©rĂȘt de l’un pour l’une est Ă©vident, l’inverse semble plus long Ă  se dĂ©terminer.

Si on enlĂšve les scĂšnes chez le kinĂ©, plutĂŽt anecdotiques, tout se passe dans la piscine municipale. Les personnages sont presque tout le temps en train de nager ou de barboter. Cela permet Ă  Bastien VivĂšs de laisser parler son obsession des corps (que l’on retrouvera plus tard dans « Polina »). Un corps sportif et attirant d’un cĂŽtĂ©, plus ingrat et chĂ©tif de l’autre. L’auteur dĂ©cide d’adopter le rythme rĂ©el du lieu. Ainsi, on nage plus qu’on parle dans l’ouvrage. Et au bout d’un moment, la lassitude nous atteint Ă  force de voir chaque mouvement dĂ©composĂ©, que ce soit pour la nage ou toute autre chose. Mais on n’est pas loin de l’exercice de style. Bastien VivĂšs fournit donc un travail intĂ©ressant qui ne plaira pas Ă  tout le monde.

Au niveau dessin, on retrouve le trait dynamique de Bastien VivĂšs. J’ai trouvĂ© l’ensemble assez inĂ©gal. Certaines cases sont trĂšs rĂ©ussies et puissantes. D’autres sont vraiment limites, mĂȘme si elles sont liĂ©es au parti pris de l’auteur. Ce dernier Ă©crit en fin d’ouvrage avoir rĂ©alisĂ© l’album Ă  l’étĂ© 2007, ce qui expliquerait ce cĂŽtĂ© inĂ©gal. La colorisation en vert/bleu de les dĂ©cors mais en valeur les corps couleur chair des protagonistes. Mais l’ensemble reste assez froid.

LeGoutDuChlore2

On peut souvent lire que « Le goĂ»t du chlore » retranscrit parfaitement l’ambiance d’une piscine municipale oĂč des gens trĂšs diffĂ©rents vont nager et oĂč le temps est rythmĂ© par les longueurs. Mais c’est bien lĂ  le problĂšme. Quand on va nager, le temps est souvent long et on s’ennuie un peu. VoilĂ  l’effet que m’a fait cet ouvrage.

avatar_belz_jol

note2

L’Ă©chappĂ©e – GrĂ©gory Mardon

LEchappee


Titre : L’Ă©chappĂ©e
Scénariste : Grégory Mardon
Dessinateur : Grégory Mardon
Parution : Avril 2015


« L’échappĂ©e » est un pavĂ© de plus de 200 pages scĂ©narisĂ© et dessinĂ© par GrĂ©gory Mardon. Le livre narre l’histoire d’un homme qui s’échappe de sa vie pour aller voir la mer. C’est le point de dĂ©part d’une aventure surprenante
 Le tout est publiĂ© chez Futuropolis pour un prix de 27 €.

« L’échappĂ©e » a la particularitĂ© d’ĂȘtre entiĂšrement muet. On pourrait prendre cela pour un exercice de style, mais cette absence de parole Ă  un vĂ©ritable sens. Cela explique le nombre important de pages, le dessin devant exprimer beaucoup d’actions et de sentiments.

Le dessin remplace les mots.

LEchappee2L’histoire est dĂ©coupĂ©e en plusieurs chapitres, chacun Ă©tant reprĂ©sentĂ© par une couleur. Le dessin est bichromique, ce qui permet de bien dĂ©finir les diffĂ©rentes ambiances. L’histoire commence en ville, alors que l’homme mĂšne une vie des plus modernes : mĂ©tro, boulot, dodo. Mais l’appel de la mer va briser cet enchaĂźnement (la cassure est parfaitement reprĂ©sentĂ© par la couverture). Difficile d’en dire plus sans spoiler la suite, mieux vaut laisser la surprise.

Le dessin est bien dans l’air du temps. Le trait au pinceau, Ă©pais, est Ă©lĂ©gant et dynamique. Le travail de GrĂ©gory Mardon est avant tout dans le mouvement et l’expression que dans le dĂ©tail. Ainsi, la BD se lit vite une premiĂšre fois. On s’attarde un peu plus en deuxiĂšme lecture, mais on s’aperçoit qu’on n’est pas passĂ© Ă  cĂŽtĂ© de dĂ©tails particuliers. La lecture est donc trĂšs premier degrĂ©.

LEchappee1

« L’échappĂ©e » est une belle rĂ©ussite. À la fois remarquable de par sa contrainte initiale, l’histoire est finalement plus originale que ce que le pitch initial laissait penser. Dommage que son prix, excessif, puisse bloquer l’achat chez de nombreux lecteurs et empĂȘcher un plus ample succĂšs.

avatar_belz_jol

note4