Titre : La guerre des Sambre, Maxime & Constance, T1 : Automne 1775, la fiancée de ses nuits blanches
Scénariste : Yslaire
Dessinateur : Marc-Antoine Boidin
Parution : Septembre 2014
« Sambre » est une Ćuvre majeure des trente derniĂšres annĂ©es dans le neuviĂšme art. LâĆuvre dâYslaire est assez unique dans son genre. Tant sur le plan graphique que scĂ©naristique, elle possĂšde une identitĂ© forte qui a su aisĂ©ment me conquĂ©rir. La naissance de la saga date de 1986. Depuis, Yslaire a offert Ă sa trame principale des appendices qui nous Ă©clairaient sur le passĂ© de cette famille maudite. Ces dĂ©veloppements narratifs prennent la forme de trilogie centrĂ©e sur une Ă©poque et un couple dâancĂȘtres de Bernard et Julie. « Hugo & Iris » et « Werner & Charlotte » Ă©taient les premiĂšres Ă naĂźtre. « Maxime & Constance » est la derniĂšre en date.
Câest le premier tome de cette nouvelle histoire que ma critique traite aujourdâhui. Il sâintitule « Automne 1775 ». MalgrĂ© son insertion dans une toile scĂ©naristique dense, cet album peut se lire sans nĂ©cessairement possĂ©der de gros prĂ©requis de lâunivers de « Sambre ». NĂ©anmoins, en maĂźtriser les arcanes permet de saisir certains moments ou certaines informations avec un angle de vue plus riche.
Une famille vouée à ne connaßtre que le malheur.
Les Sambre sont une famille vouĂ©e Ă ne connaĂźtre que le malheur. En effet, tous les membres dont jâai eu jusqu’alors dĂ©couvert les vies nâont connu que souffrance, douleur et dĂ©chĂ©ance. Cet album ne dĂ©roge pas Ă la rĂšgle en offrant une introduction des plus intenses. Les rĂ©vĂ©lations faites Ă Charlotte ne peuvent laisser personne indemnes. Le moins quâon puisse dire est que câest une armĂ©e de cadavres qui emplissent les armoires du passĂ© familial.
Il est intĂ©ressant de se plonger dans une histoire qui a de grandes chances de mal se terminer. En effet, il est rare dâĂȘtre rĂ©signĂ© Ă une issue fatale dĂšs la dĂ©couverte des premiĂšres pages. En tant que lecteur, jâai acceptĂ© que la malĂ©diction qui domine cette famille soit telle que garder espoir est sans intĂ©rĂȘt. MalgrĂ© cela, je reste curieux de rencontrer ces nouveaux jeunes membres de la saga. Maxime-Augustin est le personnage central de cette nouvelle trilogie. Nous le dĂ©couvrons enfant puis le voyons grandir jusquâĂ devenir un jeune adulte.
Son quotidien est rude. Les moments de bonheur sont rares et sont perçus par le lecteur comme des respirations entre deux scĂšnes plus difficiles. Les auteurs arrivent Ă gĂ©nĂ©rer le malaise avec finesse et offre ainsi une lecture qui ne laisse pas indiffĂ©rent. Les Ă©preuves subies par le personnage principal devraient faire naĂźtre une empathie naturelle Ă son Ă©gard. Ce nâest pas totalement le cas tant Maxime-Augustin inquiĂšte plus quâil ne touche. Son dĂ©veloppement personnel en fait quelquâun de trouble. Sur ce point, le travail dâĂ©criture est remarquable.
Le bĂ©mol rĂ©side davantage dans la trame gĂ©nĂ©rale. Ce premier acte se contente dâĂȘtre une introduction Ă la suite des Ă©vĂ©nements. Au final, il se passe peu de choses. La narration avance Ă un rythme de sĂ©nateur. Certaines transitions auraient pu ĂȘtre traitĂ©es de maniĂšre plus courtes et densifier ainsi le propos. Une fois la lecture terminĂ©e, jâai eu le sentiment que lâintrigue allait enfin pouvoir dĂ©marrer rĂ©ellement. Je ne dis pas que cet opus est creux. Câest loin dâĂȘtre le cas. Mais je pense que le fil narratif aurait pu se dĂ©rouler un petit peu plus rapidement.
Une des richesses de cette grande saga est son immersion dans lâHistoire. Le travail de reconstitution apparait sĂ©rieux. Les auteurs nâhĂ©sitent pas Ă intĂ©grer de grands moments historiques dans le quotidien de ses personnages. Cette prĂ©sence est moins forte dans cette trilogie que dans la prĂ©cĂ©dente. Ce nâest pas dĂ» Ă une fainĂ©antise du scĂ©nario mais plutĂŽt au changement de statut social des Sambre. MalgrĂ© tout, lâatmosphĂšre de cette fin du dix-huitiĂšme siĂšcle transpire de chaque page et apporte un Ă©cot Ă la qualitĂ© de lâensemble.
Tout cela est sublimĂ© par le trait de Marc-Antoine Boidin. Il Ă©tait dĂ©jĂ Ă lâĆuvre dans la trilogie prĂ©cĂ©dente et confirme ici son talent dâillustrateur. Que ce soit les dessins ou les couleurs, tout est splendide. Il arrive Ă respecter le style original dâYslaire tout en y apportant sa touche personnelle. La couverture est rĂ©ussie et dĂšs la premiĂšre page, le charme agit. Chapeau !
Pour conclure, « Maxime & Constance â Automne 1775 » prĂ©sente une mise en bouche agrĂ©able au palais mĂȘme si la quantitĂ© apparait un petit peu lĂ©gĂšre. NĂ©anmoins, ce premier acte mâincite Ă dĂ©guster la suite avec appĂ©tit et curiositĂ©. Ce nâest pas si mal, me semble-t-ilâŠ
Note : 13/20