Titre : Le TroisiÚme Testament, Julius, T2 : La révélation, 1/2
Scénariste : Alex Alice
Dessinateur : Thimothée Montaigne
Parution : Octobre 2013
Suivre l’appel qui rĂ©sonne en lui.
Critiques de bande-dessinées
Titre : Le TroisiÚme Testament, Julius, T2 : La révélation, 1/2
Scénariste : Alex Alice
Dessinateur : Thimothée Montaigne
Parution : Octobre 2013
Suivre l’appel qui rĂ©sonne en lui.
Titre : Le TroisiÚme Testament, Julius, T2 : La révélation, 1/2
Scénariste : Alex Alice
Dessinateur : Thimothée Montaigne
Parution : Novembre 2012
Le dĂ©marrage du spin-off du « TroisiĂšme Testament », nommĂ© « Julius », mâavait Ă la fois plu et déçu. La comparaison avec la sĂ©rie initiale Ă©tait Ă son dĂ©savantage, mais la qualitĂ© Ă©tait quand bien mĂȘme au rendez-vous. Pour ce deuxiĂšme tome, intitulĂ© « La rĂ©vĂ©lation â 1/2 » (un diptyque dans une sĂ©rie ?), le dessinateur a dĂ©jĂ changĂ©, Robin Recht laissant la place Ă ThimothĂ©e Montaigne. Ce dernier avait officiĂ© dans une sĂ©rie clone du « TroisiĂšme Testament »  intitulĂ© « Le cinquiĂšme Ă©vangile » (qui au passage, change aussi de dessinateur). De plus, Xavier Dorison ne persiste dans cette sĂ©rie que comme initiateur du « concept original ». Bref, jâavoue que je nâĂ©tais pas trĂšs rassurĂ© quand jâai ouvert cette bande-dessinĂ©e.
La nouvelle sĂ©rie, censĂ©e pouvoir ĂȘtre lue sans connaĂźtre la sĂ©rie originale (ce que je dĂ©conseille fortement), prĂ©sente lâhistoire du Sar Ha Sarim, un nouveau messie pour les chrĂ©tiens, quelques dĂ©cennies seulement aprĂšs la venue du Christ. A cĂŽtĂ© de lui, Julius, un gĂ©nĂ©ral romain dĂ©chu qui le pousse Ă sâarmer et Ă repousser les Romains de JudĂ©e. HĂ©las pour lui, le Sar Ha Sarim est adepte de la non-violence et dĂ©cide de partir seul vers lâorient oĂč il sent un appel. MalgrĂ© tout, un petit groupe disparate de soldats et thĂ©ologiens lâaccompagnent. Quand Ă Julius, parfaitement athĂ©e, il nâest lĂ que pour pousser le nouveau messie Ă abandonner sa quĂȘte.
« Julius » reprend un peu le principe de la sĂ©rie. On voyage dans des lieux incroyables, soit par leur beautĂ© (Rome, Babylone), soit par leur terrifiante nature (dĂ©sert de seul, mine de soufre). Ainsi, les ambiances changent beaucoup. AprĂšs deux tomes, lâhistoire nâa pas encore rĂ©ellement avancĂ© et semble dĂ©marrer rĂ©ellement Ă la fin de ce deuxiĂšme opus oĂč le cĂŽtĂ© Ă©pique de la saga reprend ses droits.
Du mal Ă accrocher aux personnages.
Force est de constater que le suspense commence Ă se faire sentir. La Mort rĂŽde et lâApocalypse semble se prĂ©parer au bout du chemin. Je trouve assez fort que lâon soit pris autant par une forme de suspense alors que la fin est connue (pour ceux qui ont lu la sĂ©rie originelle bien sĂ»r). En cela, les auteurs font bien monter la pression.
MalgrĂ© toutes les qualitĂ©s du scĂ©nario, je garde un part de dĂ©ception que jâai du mal Ă Ă©carter. Je pense avoir du mal Ă accrocher aux personnages. Le messie reste un peu trop messie et Julius ne mâest absolument pas sympathique. Je pense que câest lĂ -dessus que jâachoppe vraiment dans cette sĂ©rie. On est trĂšs loin de Marbourg et Elisabeth, mĂȘme la relation entre les deux sâĂ©toffe dans ce tome.
Au niveau du dessin, le changement se ressent dĂšs les premiĂšres pages. ThimothĂ©e Montaigne a un trait plus Ă©pais que son prĂ©dĂ©cesseur. Le dessin est remarquablement rendu. Les personnages sont trĂšs expressifs et leur caractĂšre se lit sur leur visage. Et que dire des paysages ? Montaigne nous gratifie rĂ©guliĂšrement de grandes cases panoramiques splendides. Pour cela, le changement de dessinateur nâest pas du tout synonyme de baisse de qualitĂ©, mĂȘme si jâavoue regretter toujours ce genre dâĂ©vĂšnement. En tout cas, Montaigne avait dĂ©jĂ prouvĂ© dans « Le cinquiĂšme Ă©vangile » son talent, il le confirme ici.
Au final, cette « RĂ©vĂ©lation 1/2 » continue sur la lancĂ©e du premier tome. La fin relance le suspense et lâintĂ©rĂȘt. Si bien que lâon nâattend quâune chose : que cette rĂ©vĂ©lation nous arrive enfin dans les mains !
Titre : Le TroisiĂšme Testament, Julius, T1 : Livre I
Scénaristes : Xavier Dorison & Alex Alice
Dessinateur : Robin Recht
Parution : Septembre 2010
Une sĂ©rie Ă succĂšs est-t-elle condamnĂ©e Ă accoucher dâun spin-off ? AprĂšs un succĂšs amplement mĂ©ritĂ©, « Le TroisiĂšme Testament » revient pour un nouveau cycle. Cette sĂ©rie racontait la quĂȘte de ce fameux troisiĂšme testament qui aurait Ă©tĂ© cachĂ© par un certain Julius de Samarie. Ce nouveau cycle doit donc nous raconter comment Julius sâest retrouvĂ© avec ce prĂ©sent divin et quelle a Ă©tĂ© son histoire. Quelques changements sont Ă prĂ©voir cependant dans lâĂ©quipe : Xavier Dorison prend de la distance sur la sĂ©rie et Robin Recht prend les rĂȘnes au dessin Ă la place dâAlex Alice qui reste au scĂ©nario, au storyboard et⊠à la couverture.
Une quĂȘte de rĂ©demption.
Grosse apprĂ©hension pour le lecteur fan de la sĂ©rie originelle que je suis. Mais « Julius » doit ĂȘtre pris avant tout comme une histoire Ă part. En effet, la pĂ©riode historique nâest pas du tout la mĂȘme (lâAntiquitĂ© contre le Moyen-Ăge), ainsi que le lieu (le Proche-Orient contre lâEurope). Julius est gĂ©nĂ©ral romain, portĂ© en triomphe au dĂ©but de lâouvrage dont on va assister Ă la chute brutale et immĂ©diate (tel Conrad). Comme dans la premiĂšre sĂ©rie, câest donc une quĂȘte de rĂ©demption Ă laquelle on va avoir affaire. Ainsi, Julius est cruel, ambitieux, cupide et athĂ©e. Son contact avec un rabbin juif/chrĂ©tien va bouleverser sa vision des choses et l’amener Ă s’humaniser. Ceux qui connaissent le contenu des fameux rouleaux du voyage de Julius de Samarie savent dĂ©jĂ comment l’histoire se terminera…
Il faut bien avouer que les 80 pages de lâouvrage se lisent dâune traite. 60 ans aprĂšs la venue du Christ, les ChrĂ©tiens font peur Ă Julius. Leur secte prĂŽne la non-violence et ils sont prĂȘts Ă mourir pour leur foi. LĂ oĂč « Le TroisiĂšme Testament » montrait un monde obscurantiste, « Julius » montre un monde avant tout spirituel. La mort et la souffrance sont partout. Les Romains font office de bourreaux dont la cruautĂ© est sans limite. Lâempire qui traite les autres de barbare semble avoir inversĂ© les rĂŽles.
« Julius » est donc trĂšs mystique. Les citations de textes sacrĂ©s et de prophĂštes sont lĂ©gions. Cela donne un souffle Ă©pique Ă lâhistoire. Le tout est renforcĂ© par le dessin de Robin Recht, qui prend la suite dâAlex Alice. Le dessin est fort, dĂ©taillĂ©, expressif. Son trait parvient Ă transcender lâhistoire et en cela, câest une vraie rĂ©ussite. Les couleurs sont Ă©galement trĂšs rĂ©ussies. Sur le plan graphique, il n’y a rien Ă redire, c’est du trĂšs beau travail.
Une prĂ©cision cependant : le service marketing assure que cette sĂ©rie peut ĂȘtre lue indĂ©pendamment de la sĂ©rie originelle. Pour moi, ce serait une grave erreur que de le faire.
Le vrai problĂšme de « Julius » est sa comparaison avec le cycle original. Pris indĂ©pendamment, câest une excellente bande-dessinĂ©e au scĂ©nario fouillĂ©, au souffle Ă©pique indĂ©niable et au dessin formidable. Une belle osmose entre tous ces auteurs. A lire Ă tous les fans dâĂ©sotĂ©risme et de religions naissantes.
Titre : Templiers, T2 : Le Graal
Scénariste : Jordan Mechner
Dessinateurs : LuUyen Pham & Alex Puvilland
Parution :Â Avril 2014
« Templiers » est un diptyque nĂ© des plumes conjointes de Jordan Mechner, LeUyen Pham et Alex Puvilland. La parution du second tome date dâil y a presque un an. EditĂ© chez Akileos, il sâintitule « Le Graal ». Lâhistoire se dĂ©roule plus prĂšs de deux cent cinquante pages. Le format de lâouvrage est plus proche de celui des comics que des albums franco-belges classiques. La couverture est la mĂȘme que celle du premier opus. En second plan, se trouvent les ombres de maisons Ă colombages devant lesquelles combattent des soldats. Le premier plan est occupĂ© par une croix rouge brisĂ©e symbolisant la chute du cĂ©lĂšbre ordre religieux Ă©ponyme.
La quatriĂšme de couverture pose les enjeux de la trame : « Les Chevaliers du Temple. VĂ©nĂ©rĂ©s pour leur noblesse, leur fĂ©rocitĂ© dans la bataille, et leur dĂ©votion religieuse, les Templiers Ă©taient des chevaliers de Dieu, exempts de tout pĂ©chĂ© et Ă lâĂąme pure. Du moins la plupart dâentre eux. Martin nâest pas exactement le plus opiniĂątre ou le plus pieux des chevaliers, mais il parvient Ă sâĂ©chapper quand le roi de France dĂ©cide dâabattre lâOrdre des Templiers afin de mettre la main sur leur lĂ©gendaire trĂ©sor. AprĂšs un temps de souffrance et dâerrance, il retrouve dâanciens compagnons et met au point un plan des plus audacieux⊠voler le plus grand trĂ©sor du monde au nez du roi. »
Une chasse au trésor captivante.
Jâavais Ă©tĂ© conquis par le dĂ©but de lâintrigue. « La Chute » offrait une introduction captivante. On y dĂ©couvrait des personnages attachants. Leurs faiblesses et leurs mĂ©saventures nous lient tout de suite Ă leurs destins. La trame se construit essentiellement autour de Martin. Il est passĂ© du statut de chevalier Ă celui de hors la loi vagabond. Cette chute Ă©tait habilement contĂ©e dans le premier tome. Cette descente aux enfers trouvait son dĂ©nouement avec le projet improbable quâil partage avec deux compagnons dâinfortune : mettre la main sur le lĂ©gendaire trĂ©sor des Templiers. Ce second album devait nous raconter cette quĂȘte.
Les premiĂšres pages nous plongent tout de suite dans les arcanes de leur stratĂ©gie. Tout au long de la lecture, jâai senti montĂ© un suspense fort. Au fur et Ă mesure quâils se rapprochent de leur but, la tension augmente. Ma curiositĂ© est attisĂ©e en permanence. Lâenvie de faire dĂ©filer les pages est puissante. Je suis obligĂ© de me retenir de dĂ©vorer les planches pour savourer la richesse de chacune dâentre elles. La construction scĂ©naristique est un modĂšle du genre. Lâaventure est au rendez-vous !
« Templiers » ne se contente pas de nous offrir une chasse au trĂ©sor. La qualitĂ© dâĂ©criture des diffĂ©rents protagonistes participe au bonheur de la dĂ©couverte. Les Ă©vĂ©nements ne sont pas prĂ©visibles. La sympathie des hĂ©ros ne fait quâaccentuer lâinquiĂ©tude quâon ressent Ă leur Ă©gard Ă chaque Ă©tape de leurs pĂ©rĂ©grinations. Les auteurs arrivent Ă greffer toute une sĂ©rie dâintrigues secondaires au fil conducteur, densifiant ainsi le propos. Le travail sur le script est remarquable. En refermant le bouquin, je ressentais encore le parfum de lâaventure. Je pense que je prendrais beaucoup de plaisir Ă relire cette histoire et Ă retrouver les pas de Martin et ses acolytes.
Le travail graphique alimente la qualitĂ© de lâensemble. Le trait possĂšde une belle personnalitĂ©. LeUyen Pham offre des dĂ©cors trĂšs rĂ©ussis. Lâimmersion dans cette sociĂ©tĂ© mĂ©diĂ©vale est splendide. Je ne peux donc que vous conseiller la dĂ©couverte de cette sĂ©rie. Elle ravira les adeptes dâaventure et dâĂ©poque chevaleresque. La lĂ©gende des Templiers est un support classique de narration Ă©pique, elle est ici habilement exploitĂ©e. Il ne vous reste plus quâĂ rejoindre cette quĂȘte mythiqueâŠ
Titre : Mort au tsar, T1 : Le gouverneur
Scénariste : Fabien Nury
Dessinateur : Thierry Robin
Parution : Août 2014
Fabien Nury est un de mes scĂ©naristes prĂ©fĂ©rĂ©s. Jâai Ă©tĂ© conquis par chacun de ses travaux que jâai eu le plaisir de dĂ©vorer. Une de ses spĂ©cialitĂ©s est de jouer avec les grands Ă©vĂ©nements de lâHistoire. Il a offert une vision passionnante de la pĂ©riode de lâOccupation avec « Il Ă©tait une fois en France ». Il sâest immergĂ© dans la France de la PremiĂšre Guerre Mondiale dans « Silas Corey ». Enfin, sa premiĂšre plongĂ©e dans lâunivers russe a eu lieu lors du diptyque « La mort de Staline ». Son aventure slave connaĂźt un nouveau chapitre avec la sortie lâĂ©tĂ© dernier du premier tome de « Mort au Tsar » intitulĂ© « Le Gouverneur ».
Je dois vous avouer que je me suis offert cet album sur la seule prĂ©sence de Nury sur la couverture. En dĂ©couvrant la quatriĂšme de couverture, jâai appris quâil sâagissait dâune histoire en deux tomes. Cette structure de parution est dĂ©cidĂ©ment trĂšs Ă la mode actuellement. Les dessins sont lâĆuvre de Thierry Robin dont jâavais apprĂ©ciĂ© le style dans « La mort de Staline ». Il possĂšde une rĂ©elle identitĂ© graphique et participe fortement Ă lâatmosphĂšre que dĂ©gage la lecture.
Une marche inévitable vers un destin tragique.
La trame nous fait partager les derniers jours du Grand-Duc SergueĂŻ Alexandrovitch avant lâattentat dont il a Ă©tĂ© victime. Lâissue fatale est annoncĂ©e dans un prologue. Cela influence Ă©videmment la lecture puisque chaque parole du personnage principal ou chaque Ă©vĂ©nement quâil vit sont perçus par un prisme particulier. La montĂ©e en tension est savamment dosĂ©e. La marche inĂ©vitable vers son destin tragique ne laisse pas le lecteur indiffĂ©rent. Le Grand-Duc accepte son sort irrĂ©mĂ©diable avec un fatalisme marquant.
LâintensitĂ© ne fait quâaugmenter au fur et Ă mesure que les pages dĂ©filent. Le fait de voir cet homme allait vers la mort avec nonchalance met presque mal Ă lâaise. Une chose est sĂ»re, notre intĂ©rĂȘt ne cesse de croĂźtre. Le scĂ©nario monte en puissance sans changement de vitesse brutal. Cette finesse dans lâaccĂ©lĂ©ration dramatique est la preuve dâun talent narratif certain. Le suspense atteint un paroxysme lors de la derniĂšre planche qui offre une perspective passionnante pour le prochain tome.
Lâhistoire se bĂątit intĂ©gralement autour de son protagoniste principal. Les personnages secondaires nâexistent pas rĂ©ellement. Leurs prĂ©sences se justifient uniquement par leurs interactions avec le gouverneur moscovite. Cela nâest pas une faiblesse. Câest un choix scĂ©naristique pleinement assumĂ© et qui se dĂ©fend parfaitement. Lâintrigue veut nous plonger dans le quotidien et dans lâintimitĂ© de cet homme blessĂ© en route vers lâĂ©chafaud. Nury a dĂ©veloppĂ© une humanitĂ© touchante chez le Grand-Duc alors quâon peut objectivement affirmer que les dirigeants russes ne sont pas rĂ©putĂ©s pour leur grandeur dâĂąme et leur altruisme. La dimension politique est mise de cĂŽtĂ© et cela donne un ton particulier Ă la narration.
Pour conclure, « Le gouverneur » est un album rĂ©ussi. Je lâai lu avec beaucoup de plaisir. Je me suis trĂšs vite passionnĂ© pour le Grand-Duc. Mon intĂ©rĂȘt nâa cessĂ© de grandir au cours de ma lecture. Chaque planche mâa captivĂ©. Je trouve que câest une performance dâentretenir un suspense alors que le dĂ©nouement est annoncĂ© avant que ne dĂ©bute les Ă©vĂ©nements. Tout cela est bien enrobĂ© par le style de Thierry Robin. Je vous conseille donc cette dĂ©couverte. De mon cĂŽtĂ©, jâattends la suiteâŠ
Titre : Les Sentinelles, T1 : Juillet-AoĂ»t 1914, Les Moissons de l’Acier
Scénariste : Xavier Dorison
Dessinateur : Enrique Breccia
Parution : Mai 2009
Câest en regardant la trĂšs sympathique Ă©mission « Un monde de bulles » que jâai dĂ©couvert avec plaisir Xavier Dorison Ă©voquer la sĂ©rie « Les sentinelles ». Etant un grand fan de ce scĂ©nariste depuis que jâai dĂ©couvert « Le troisiĂšme testament » ou « Sanctuaires », jâai Ă©coutĂ© avec curiositĂ© ce dernier nous conter la construction de cette saga dont je nâavais jamais entendu parler. Une fois son interview terminĂ©e, je me suis engagĂ© Ă mâimmerger dans cette sĂ©rie au plus vite. Ma dĂ©couverte a dĂ©butĂ© hier soir avec la lecture du premier chapitre intitulĂ© « Juillet-AoĂ»t 1914 â Les moissons dâacier ». EditĂ© chez Delcourt, cet album de bonne qualitĂ© est composĂ© dâune soixantaine de pages. Il est vendu Ă un prix tout juste infĂ©rieur Ă quinze euros. La couverture nous prĂ©sente un soldat dĂ©ployant un drapeau français. Son visage est couvert par un casque. Je la trouve trĂšs rĂ©ussie. Elle est lâĆuvre de Enrique Breccia, que je dĂ©couvre Ă lâoccasion de cette lecture.
MalgrĂ© le titre, lâhistoire dĂ©bute en 1911 au Maroc sur un champ de bataille. On dĂ©couvre un soldat, le visage masquĂ© qui avance dâun pas rĂ©gulier sans sembler tenir compte des balles qui fusent et des cadavres qui tombent autour de lui. Mais tout Ă coup, il sâeffondre. On le croit mort, ce nâest pas le cas. Il explique Ă un de ses acolytes quâil nâa plus de batterie, quâil ne peut donc plus Ă©chapper Ă son destin. Alors que les ennemis sâapprĂȘtent Ă arriver sur les lieux, il demande Ă ĂȘtre exĂ©cutĂ© par son ami qui sâexĂ©cute. On croit comprendre que ce soldat est le fruit dâune expĂ©rimentation scientifique mis au point par un colonel de lâArmĂ©e française. Ce projet connaitra un second souffle trois ans plus tard quand le fondateur des Sentinelles dĂ©couvre la dĂ©couverte rĂ©volutionnaire dâun petit lieutenant de rĂ©serveâŠ
Des super héros « made in France ».
« Les Sentinelles » est une sĂ©rie intĂ©ressante car elle nous offre un des premiers super hĂ©ros « made in France ». Suite Ă des expĂ©riences menĂ©es dans des laboratoires secrets, un colonel et un savant Ă sa botte ont pour objectif de crĂ©er une espĂšce de super soldat. Le fait de lâintĂ©grer dans la grande Histoire Ă travers la pĂ©riode de la premiĂšre guerre mondiale dĂ©veloppe un attrait certain. Lâhistoire sâadresse Ă un public sensible Ă ce genre de grande trame historique et dense dans laquelle sâinsĂšre parfaitement une dimension fictionnelle travaillĂ©e. Il est Ă©vident que lâhumour et la lĂ©gĂšretĂ© ne sont pas de sortie. On est en temps de guerre et le dessinateur fait en sorte quâon ne lâoublie jamais.
Le scĂ©nario est de grande qualitĂ©. Les premiĂšres pages qui jouent le rĂŽle de prologue sont intenses. A travers les dessins et lâatmosphĂšre qui transpire de la lecture, on est tout de suite dans le vif du sujet. Notre intĂ©rĂȘt est happĂ©. Notre curiositĂ© ne cessera jamais dâĂȘtre sĂ©duite tout au long du dĂ©filement des pages. La grande toile se met en place. Les personnages apparaissent, les enjeux se dĂ©couvrent. La densitĂ© est grande. La narration ne souffre dâaucun temps mort bien au contraire. On est immergĂ© dans une histoire passionnante. La finalitĂ© de cet opus est de nous prĂ©senter Taillefer, le nouveau super soldat. Le rythme de la dĂ©couverte est bien dosĂ© et la derniĂšre page nous laisse sur un sentiment de frustration de ne pas pouvoir en profiter davantage.
Comme je lâai sous-entendu prĂ©cĂ©demment, les dessins sont remarquables. DĂšs la premiĂšre case, on est bouleversĂ©. Il se dĂ©gage rĂ©ellement quelque chose des pages. La crasse et la violence qui sâen dĂ©gage sont intenses et ne laissent pas indemnes. La dimension « boucherie » est vraiment trĂšs rĂ©ussie. Rien nâapparaĂźt surrĂ©aliste ou excessif. Bien au contraire, câest une gifle de rĂ©alisme quâon prend de plein fouet. Je trouve Ă©galement les personnages trĂšs rĂ©ussis. On nâa aucun mal Ă se les approprier. Les dessins leur donnent une vraie Ă©paisseur. Je pense que je vais me pencher de plus prĂšs sur les parutions nĂ©es de la plume dâEnrique Breccia.
En conclusion, jâai trouvĂ© ce premier opus remarquable. Il sâagit Ă mes yeux dâun petit chef dâĆuvre. Le scĂ©nario, les dessins, le thĂšme, les personnages⊠Tout est bien construit, intense et travaillĂ©. A lâheure actuelle, trois tomes sont parus. Je ne pense pas que je vais tarder Ă dĂ©vorer les deux quâil me reste Ă lire. Pour ceux qui dĂ©couvrent lâunivers de Xavier Dorison Ă travers cet album, je ne peux que conseiller de dĂ©couvrir « Le troisiĂšme testament » qui vous immergera dans le Moyen-Ăąge pour une tĂ©tralogie qui est un chef dâĆuvre du neuviĂšme artâŠ
Note : 18/20
Titre :Â Les sentinelles, T4 : Avril 1915 : Les Dardanelles
Scénariste : Xavier Dorison
Dessinateur : Enrique Breccia
Parution : Octobre 2014
« Les Sentinelles » marque lâentrĂ©e des superhĂ©ros Ă la française dans la Grande Guerre. Xavier Dorison confirme lâampleur de son imagination. Dâune part, il nâhĂ©site pas Ă sâapproprier les codes de ses surhommes dâhabitude associĂ©s Ă la culture amĂ©ricaine. Dâautre part, ils les insĂšrent au beau milieu de la PremiĂšre Guerre Mondiale, concept jusquâalors improbable. Les trois premiers Ă©pisodes de cette sĂ©rie ont transformĂ© lâessai et fait naĂźtre une saga de grande qualitĂ©. Chaque opus est un petit bijou et se lit avec appĂ©tit. Chacun dĂ©livre une grande variĂ©tĂ© de saveurs pour la plus grande joie de ses lecteurs.
Cela faisait trois ans et demi que la parution dâune nouvelle mission des Sentinelles Ă©taient attendue. Lâespoir Ă©tait assouvi en octobre dernier avec la sortie du quatriĂšme chapitre intitulĂ© « Avril 1915 Les Dardanelles ». Wikipedia mâa appris que les Dardanelles fut un « affrontement [âŠ] qui opposa lâEmpire Ottoman aux troupes britanniques et françaises dans la pĂ©ninsule de Gallipoli dans lâactuelle Turquie du 25 avril 1915 au 9 janvier 1916 ». Cela confirme la volontĂ© de Dorison dâintĂ©grer ses hĂ©ros dans la rĂ©alitĂ© du conflit.
Intégrer les héros dans la réalité du conflit.
« Cette bataille-lĂ devait ĂȘtre gagnĂ©e dâavance⊠Le dĂ©barquement du Commonwealth sur les plages truques des Dardanelles devait assurer une victoire aussi rapide quâindiscutable. Face aux Ottomans, la France nâavait-elle pas dĂ©ployĂ© ses plus glorieux soldats ? Les Sentinelles ! CâĂ©tait sans compter lâaide des allemands Ă leur alliĂ© turc, sans compter la chaleur, les fiĂšvres, les maladies et les falaises imprenables⊠Sans compter la nouvelle arme du gĂ©nie germanique : Cimeterre. Cette fois-ci, les plus grands hĂ©ros français vont devoir renoncer Ă la victoire pour apprendre la dure leçon de la dĂ©faite⊠» VoilĂ le synopsis prĂ©sentĂ© par la quatriĂšme de couverture de lâalbum. Je dois vous dire que jây ai perçu un menu appĂ©tissant.
La premiĂšre force du bouquin est la profondeur de ses personnages. Que ce soit Taillefer, le Merle ou Djibouti, chacune des trois Sentinelles possĂšde une personnalitĂ© passionnante. Le rĂ©alisme de chacun dâentre eux est remarquable. Ils sont attachants. Leurs faiblesses sont centrales malgrĂ© leurs superpouvoirs. Leur sens des valeurs ne laisse pas indiffĂ©rent. Une bonne histoire est avant un bon hĂ©ros. « Les Sentinelles » ont la chance dâen avoir trois.
Les Dardanelles imposent une unitĂ© de lieu. Nous ne quittons pas cette plage turque qui ressemble au fur et Ă mesure des pages Ă un cimetiĂšre en plein dĂ©veloppement. Cette sensation dâattente, cette disparition de tout espoir, ce fatalisme grandissant⊠Tout est sublimĂ© par la narration de Dorison. Il arrive Ă faire Ă©voluer ses personnages au grĂ© des Ă©vĂ©nements sans marquer de rupture trop forte. La rĂ©alitĂ© de la guerre transpire des planches. Elle ne nous laisse pas indemne. Le travail graphique dâEnrique Breccia sublime le dĂ©sespoir de cette bataille qui ne peut pas ĂȘtre gagnĂ©e mais que les autoritĂ©s refusent de perdreâŠ
Lâintrigue en elle-mĂȘme est habilement construite. Les enjeux sont rapidement posĂ©s. Tout ce petit monde est rĂ©uni pour gagner plus quâune bataille : une guerre. Dorison ne fait pas uniquement exister ses Sentinelles. Il laisse une place intĂ©ressante aux soldats britanniques ou australiens. Lâimmersion dans lâĂ©poque apparaĂźt crĂ©dible. Nous sommes touchĂ©s par bon nombre de protagonistes. Lâauteur ne choisit pas son camp. Il nous fait dĂ©couvrir des horreurs. Certains passages sont quasiment muets pour laisse totalement la place au trait de Breccia. Il peut ainsi faire passer des sentiments forts par ses seules illustrations. Cet album marque un Ă©quilibre entre le texte et le dessin dâune rare finesse.
Vous lâaurez compris, cet ouvrage mâa conquis. Je le trouve dâune grande qualitĂ©. Avant de mây plonger, jâai relu ses trois prĂ©dĂ©cesseurs. Jâai Ă©tĂ© impressionnĂ© par la force et lâintensitĂ© qui sâen dĂ©gage. « Avril 1915 Les Dardanelles » ne dĂ©roge pas Ă cette rĂšgle. Il confirme que « Les Sentinelles » est une sĂ©rie unique dans son genre qui arrive Ă sublimer un concept de dĂ©part original et novateur. Il ne reste plus maintenant quâĂ attendre la suite. Mais cela est une autre histoireâŠ
Note : 18/20
Titre : La guerre des Sambre, Maxime & Constance, T1 : Automne 1775, la fiancée de ses nuits blanches
Scénariste : Yslaire
Dessinateur : Marc-Antoine Boidin
Parution : Septembre 2014
« Sambre » est une Ćuvre majeure des trente derniĂšres annĂ©es dans le neuviĂšme art. LâĆuvre dâYslaire est assez unique dans son genre. Tant sur le plan graphique que scĂ©naristique, elle possĂšde une identitĂ© forte qui a su aisĂ©ment me conquĂ©rir. La naissance de la saga date de 1986. Depuis, Yslaire a offert Ă sa trame principale des appendices qui nous Ă©clairaient sur le passĂ© de cette famille maudite. Ces dĂ©veloppements narratifs prennent la forme de trilogie centrĂ©e sur une Ă©poque et un couple dâancĂȘtres de Bernard et Julie. « Hugo & Iris » et « Werner & Charlotte » Ă©taient les premiĂšres Ă naĂźtre. « Maxime & Constance » est la derniĂšre en date.
Câest le premier tome de cette nouvelle histoire que ma critique traite aujourdâhui. Il sâintitule « Automne 1775 ». MalgrĂ© son insertion dans une toile scĂ©naristique dense, cet album peut se lire sans nĂ©cessairement possĂ©der de gros prĂ©requis de lâunivers de « Sambre ». NĂ©anmoins, en maĂźtriser les arcanes permet de saisir certains moments ou certaines informations avec un angle de vue plus riche.
Une famille vouée à ne connaßtre que le malheur.
Les Sambre sont une famille vouĂ©e Ă ne connaĂźtre que le malheur. En effet, tous les membres dont jâai eu jusqu’alors dĂ©couvert les vies nâont connu que souffrance, douleur et dĂ©chĂ©ance. Cet album ne dĂ©roge pas Ă la rĂšgle en offrant une introduction des plus intenses. Les rĂ©vĂ©lations faites Ă Charlotte ne peuvent laisser personne indemnes. Le moins quâon puisse dire est que câest une armĂ©e de cadavres qui emplissent les armoires du passĂ© familial.
Il est intĂ©ressant de se plonger dans une histoire qui a de grandes chances de mal se terminer. En effet, il est rare dâĂȘtre rĂ©signĂ© Ă une issue fatale dĂšs la dĂ©couverte des premiĂšres pages. En tant que lecteur, jâai acceptĂ© que la malĂ©diction qui domine cette famille soit telle que garder espoir est sans intĂ©rĂȘt. MalgrĂ© cela, je reste curieux de rencontrer ces nouveaux jeunes membres de la saga. Maxime-Augustin est le personnage central de cette nouvelle trilogie. Nous le dĂ©couvrons enfant puis le voyons grandir jusquâĂ devenir un jeune adulte.
Son quotidien est rude. Les moments de bonheur sont rares et sont perçus par le lecteur comme des respirations entre deux scĂšnes plus difficiles. Les auteurs arrivent Ă gĂ©nĂ©rer le malaise avec finesse et offre ainsi une lecture qui ne laisse pas indiffĂ©rent. Les Ă©preuves subies par le personnage principal devraient faire naĂźtre une empathie naturelle Ă son Ă©gard. Ce nâest pas totalement le cas tant Maxime-Augustin inquiĂšte plus quâil ne touche. Son dĂ©veloppement personnel en fait quelquâun de trouble. Sur ce point, le travail dâĂ©criture est remarquable.
Le bĂ©mol rĂ©side davantage dans la trame gĂ©nĂ©rale. Ce premier acte se contente dâĂȘtre une introduction Ă la suite des Ă©vĂ©nements. Au final, il se passe peu de choses. La narration avance Ă un rythme de sĂ©nateur. Certaines transitions auraient pu ĂȘtre traitĂ©es de maniĂšre plus courtes et densifier ainsi le propos. Une fois la lecture terminĂ©e, jâai eu le sentiment que lâintrigue allait enfin pouvoir dĂ©marrer rĂ©ellement. Je ne dis pas que cet opus est creux. Câest loin dâĂȘtre le cas. Mais je pense que le fil narratif aurait pu se dĂ©rouler un petit peu plus rapidement.
Une des richesses de cette grande saga est son immersion dans lâHistoire. Le travail de reconstitution apparait sĂ©rieux. Les auteurs nâhĂ©sitent pas Ă intĂ©grer de grands moments historiques dans le quotidien de ses personnages. Cette prĂ©sence est moins forte dans cette trilogie que dans la prĂ©cĂ©dente. Ce nâest pas dĂ» Ă une fainĂ©antise du scĂ©nario mais plutĂŽt au changement de statut social des Sambre. MalgrĂ© tout, lâatmosphĂšre de cette fin du dix-huitiĂšme siĂšcle transpire de chaque page et apporte un Ă©cot Ă la qualitĂ© de lâensemble.
Tout cela est sublimĂ© par le trait de Marc-Antoine Boidin. Il Ă©tait dĂ©jĂ Ă lâĆuvre dans la trilogie prĂ©cĂ©dente et confirme ici son talent dâillustrateur. Que ce soit les dessins ou les couleurs, tout est splendide. Il arrive Ă respecter le style original dâYslaire tout en y apportant sa touche personnelle. La couverture est rĂ©ussie et dĂšs la premiĂšre page, le charme agit. Chapeau !
Pour conclure, « Maxime & Constance â Automne 1775 » prĂ©sente une mise en bouche agrĂ©able au palais mĂȘme si la quantitĂ© apparait un petit peu lĂ©gĂšre. NĂ©anmoins, ce premier acte mâincite Ă dĂ©guster la suite avec appĂ©tit et curiositĂ©. Ce nâest pas si mal, me semble-t-ilâŠ
Note : 13/20
Titre : Charly 9
Scénariste : Richard Guérineau
Dessinateur : Richard Guérineau
Parution : Novembre 2013
 Avec « Charly 9 », Jean TeulĂ© a Ă©crit lâun de ses best-sellers. Relatant la culpabilitĂ© de Charles IX aprĂšs avoir ordonnĂ© le massacre de la Saint BarthĂ©lĂ©my, il permettait de dĂ©couvrir un roi soumis Ă sa mĂšre Catherine de MĂ©dicis qui se ne remettra jamais de sa dĂ©cision. Lourde tĂąche donc pour Richard GuĂ©rineau de reprendre le flambeau en adaptant ce livre en bande-dessinĂ©e. Le tout est publiĂ© chez Delcourt dans la collection Mirages pour 128 pages de lecture.
Le tout dĂ©marre par une scĂšne qui pose le personnage. AcculĂ© par sa mĂšre, son frĂšre et tous leurs conseillers, Charles IX ordonne le massacre de la Saint BarthĂ©lĂ©my. Mais câest avant tout pour quâon le laisse tranquille. Car tout est fait pour le manipuler. Dâabord choquĂ© par lâidĂ©e que lâon assassine une personne, la discussion grandit et le nombre de victimes pressenties Ă©galement⊠Lui ne veut pas, toute la cour le veut. Mais il est le Roi et il faut sa signature. Il lâappose et le voilĂ condamnĂ© Ă la culpabilitĂ©.
Des anecdotes à la pelle pour une seule année.
Le livre est construit selon des chapitres qui montrent le Roi peu Ă peu sombrer dans la folie. MĂȘme si lâensemble manque un peu de fluiditĂ©, la pertinence est Ă©vidente. Car ce sont les anecdotes qui montrent Charles IX devenir fou et malade. Richard GuĂ©rineau va Ă lâessentiel et malgrĂ© les 128 pages, on ne sâennuie Ă aucun moment. Chaque planche est nĂ©cessaire. On retrouve aussi le sel de lâouvrage de TeulĂ© avec beaucoup dâanecdotes historiques Ă ressortir en soirĂ©e : lâorigine du 1er avril et du 1er mai par exemple sont un dĂ©lice.
Au-delĂ de lâanecdote, le livre propose une galerie de personnages des plus connus. Outre la cour royale (Catherine de MĂ©dicis, la future reine Margot, Charles IXâŠ), on retrouve des artistes (Ronsard) ou des personnalitĂ©s autres (Ambroise ParĂ©). Il nâen est pas trop fait lĂ -dessus. Cela permet surtout de voir quels liens avaient ces personnes avec le Roi. Plus Ă©tonnant, le langage parlĂ© par les personnages est Ă la fois modernisĂ© et conservĂ© comme Ă lâĂ©poque. Le tout est pourtant trĂšs fluide et agrĂ©able.
Concernant le dessin, câest peu de dire que le trait de Richard GuĂ©rineau mâa sĂ©duit dans cet ouvrage. Je lâavais connu dans un registre plus rĂ©aliste et son passage Ă un dessin plus caricatural est une vraie rĂ©ussite. Les gueules sont expressives, les dĂ©cors nous replongent dans la France dâantan et les choix graphiques sont pertinents. On a mĂȘme droit Ă un hommage à « Johan et Pirlouit » de Peyo ou à « Lucky Luke » de Morris⊠MalgrĂ© tout, les changements de style (notamment dans la colorisation) sont un peu perturbants. Sâils sont parfois parfaitement cohĂ©rents (comme pour la scĂšne finale), dâautres sont moins clairs dans leur intention. Visiblement, Richard GuĂ©rineau avait dĂ©cidĂ© de se faire plaisir ! Mais quâil nous propose de nouveau des bande-dessinĂ©es rĂ©alisĂ©es dans ce style plus relĂąchĂ©, cela lui va trĂšs bien ! On retrouve cependant un vrai talent dans la mise en scĂšne et le dĂ©coupage. On sent quâil y a du mĂ©tier derriĂšre !
« Charly 9 » est une belle adaptation. Reprenant trĂšs bien le principe des Ćuvres de Jean TeulĂ©, le lecteur restera difficilement indiffĂ©rent au cynisme et Ă la violence de lâensemble. Et bien que Charles IX nous paraisse torturĂ© et plus de culpabilitĂ©, il est aussi complĂštement inconscient et devient fou. Richard GuĂ©rineau parvient Ă nous dresser le portrait complet dâun homme qui mourra de culpabilitĂ©. Et pourtant, on ne ressent pas forcĂ©ment dâempathie pour le personnage.
Note : 15/20
Titre : Templiers, T1 : La chute
Scénariste : Jordan Mechner
Dessinateur : LuUyen Pham
Parution : Janvier 2014
Les Templiers mâont toujours intriguĂ©. Toute histoire les mettant en jeu mâattire. Ils cumulent un bon nombre dâarguments Ă mes yeux : le Moyen-Ăge est une Ă©poque qui me plaĂźt, la dimension religieuse est toujours intĂ©ressante, le mystĂšre qui les entoure attise la curiosité⊠Enfin, il est aisĂ© de greffer une petite dose dâĂ©sotĂ©risme pour finaliser la recette.
Câest pourquoi, au hasard de mes pĂ©rĂ©grinations dans les rayons de librairie, jâai Ă©tĂ© appĂątĂ© par un ouvrage Ă la couverture sobre. Dâun format davantage proche de celui dâun roman que dâun album de bandes dessinĂ©es, il sâintitule « Templiers ». Ce seul titre a Ă©veillĂ© mon attrait. En le feuilletant, je suis tombĂ© sous le charme des dessins. En quelques pages, jâavais commencĂ© Ă voyager dans le temps et avait plaisir Ă me retrouver dans les pas de ces cĂ©lĂšbres chevaliers.
La quatriĂšme de couverture prĂ©sente les mots suivants : « Les Chevaliers du Temple. VĂ©nĂ©rĂ©s pour leur noblesse, leur fĂ©rocitĂ© dans la bataille, et leur dĂ©votion religieuse, les Templiers Ă©taient des chevaliers de Dieu, exempts de tout pĂ©chĂ© et Ă lâĂąme pure. Du moins la plupart dâentre eux. Martin nâest pas exactement la plus opiniĂątre ou le plus pieux des chevaliers, mais il parvient Ă sâĂ©chapper quand le roi de France dĂ©cide dâabattre lâOrdre des Templiers afin de mettre la main sur leur lĂ©gendaire trĂ©sor. AprĂšs un temps de souffrance et dâerrance, il retrouve dâanciens compagnons et met au point un plan des plus audacieux⊠voler le plus grand trĂ©sor du monde au nez du roi. »
Le bouquin est le premier tome de lâhistoire. Il sâintitule « La chute ». EditĂ© chez Akileos, il se compose de deux cents quarante pages. Jâai souvent du mal avec une telle structure. Il est en effet rare quâun album arrive Ă conserver une qualitĂ© constante sur une telle longueur. En tout cas, sorti de « Blast », je ne vois pas parmi mes lectures rĂ©centes un autre exemple dâopus aussi long Ă mâavoir conquis. Ce livre se dĂ©coupe en chapitres qui offrent des repĂšres intĂ©ressants dans la lecture.
Lâavantage dâallonger lâintrigue sur plus de deux cents pages est de permettre la construction de beaucoup de personnages quâils soient centraux ou secondaires. La trame est relativement dense et fait exister un grand nombre de protagonistes. Le travail graphique de LeUyem Pham que je dĂ©couvre ici fait exister chaque membre de lâaventure et implique ainsi fortement le lecteur. La sympathie dĂ©gagĂ©e par Martin et ses amis apporte un Ă©cot certain au plaisir de la dĂ©couverte de leurs pĂ©rĂ©grinations.
On entre vite dans le vif du sujet.
Lâintrigue ne se rĂ©sume pas Ă suivre les pas de personnages auxquels on sâest attachĂ©. La trame ne perd pas de temps Ă se mettre en place. Le scĂ©nariste Jordan Mechner ne sâautorise pas Ă un long round dâobservation. MalgrĂ© le grand nombre de pages, il ne perd pas de temps Ă plonger ses hĂ©ros dans le vif du sujet. La consĂ©quence est que lâimmersion du lecteur est rapidement profonde. Les Ă©vĂ©nements sâenchaĂźnent Ă un rythme soutenu. Martin est un fugitif. Il est donc en permanence sur le qui-vive. Lâhistoire ne sâautorise donc aucun temps mort pour notre plus grand plaisir. Le suspense, sans ĂȘtre insoutenable, est toujours prĂ©sent. La narration est agrĂ©able et les pages dĂ©filent sans quâon sâen rende compte.
Le travail graphique qui mâavait conquis lors de ma premiĂšre rencontre avec lâouvrage a enchantĂ© ma dĂ©couverte du tome. Je trouve que le trait de Pham accompagne parfaitement le cĂŽtĂ© rythmĂ© des scĂšnes et lâaventure qui transpire de chaque page. LâidentitĂ© des personnages sâaccordent aussi parfaitement avec lâatmosphĂšre gĂ©nĂ©rale. Les dĂ©cors suggĂšrent aisĂ©ment le dĂ©paysement autour temporel que gĂ©ographique.
Au final, « Templiers » est un premier opus intĂ©ressant. Je me suis laissĂ© prendre par lâintrigue et suis curieux de lire la suite. La bonne nouvelle est que le deuxiĂšme Ă©pisode est sorti en avril dernier. Il ne me reste donc plus quâĂ me le procurer. Mais cela est une autre histoireâŠ
Note : 15/20