Salade, tomate, oignon

SaladeTomateOignon


Titre : Salade, tomate, oignon
Scénariste : Joseph Safieddine
Dessinateur : Clément Fabre
Parution : Novembre 2015


Lors du festival Quai des Bulles de Saint Malo, j’en ai profitĂ© pour obtenir ma troisiĂšme dĂ©dicace de ClĂ©ment Fabre. Le dessinateur officiait avec un troisiĂšme scĂ©nariste diffĂ©rent, ici en la personne de Joseph Saffieddine. « Salade, tomate, oignon » est un recueil de saynĂštes faisant intervenir deux personnages (parfois plus) en plein dialogue. Les situations sont souvent absurdes et touchent Ă  toutes les couches de notre sociĂ©tĂ©. Le tout est publiĂ© chez Vide Cocagne.

L’humour de Safieddine touche Ă  l’absurde et peut se faire trash. Àmes sensibles s’abstenir ! Ainsi, l’une des premiĂšres scĂšnes est un modĂšle du genre. Une nana est invitĂ©e chez un mec et elle se retrouve dans un immeuble complĂštement glauque avec des gitans qui attaquent la porte
 La plupart du temps, c’est plutĂŽt rĂ©ussi, mĂȘme si l’inĂ©galitĂ© de qualitĂ© est de mise ici. Globalement, on lit avec plaisir les diffĂ©rentes histoires et on sourit devant les rĂ©parties des personnages. Mais comme tout ouvrage d’absurde, on reste parfois Ă  cĂŽtĂ© du chemin devant certains passages.

Un livre tout en dialogues.

Si les chutes ont souvent un intĂ©rĂȘt, ce sont les dialogues qui sont mis en avant. Les grandes gueules sont lĂ©gions, des collĂšgues de bureau en passant par les mecs de banlieue, sans oublier les petites vieilles bien sĂ»r ! Clairement, c’est dans les passages les plus trash que « Salade, tomate, oignon » touche Ă  la grĂące. Racisme et misĂšre humaine sont portĂ©s Ă  leur paroxysme dans certaines scĂšnes, et c’est lĂ  que le livre se dĂ©guste pleinement. HĂ©las, Ă  la lecture des histoires les unes aprĂšs les autres, une lassitude s’installe devant certaines rĂ©pĂ©titions. On est moins surpris. Typiquement, « Salade, tomate, oignon » est fait pour ĂȘtre lu aux toilettes, une scĂšne aprĂšs l’autre.

Concernant le dessin, le trait simple de ClĂ©ment Fabre est parfaitement adaptĂ© aux histoires, essentiellement dialoguĂ©es. Il sait donner suffisamment d’expression Ă  ses personnages pour que cela fonctionne. J’étais surpris de ne pas le voir aquareller le tout, mais il a densifiĂ© son encrage pour proposer un dessin en noir et blanc trĂšs rĂ©ussi.

De nombreux guests interviennent dans le livre, offrant des personnages aux strips. HonnĂȘtement, j’ai trouvĂ© ça sans intĂ©rĂȘt, voir contre-productif. À de rares exceptions prĂšs, les styles des dessinateurs ne sont pas du tout adaptĂ©s au style de ClĂ©ment Fabre et se voient comme le nez au milieu de la figure. PlutĂŽt que de transcender les strips, cela gĂȘne la lecture. Dommage.

« Salade, tomate, oignon », comme beaucoup de livres du genre, propose des scĂšnes plus ou moins rĂ©ussies. L’inĂ©gale qualitĂ© de l’ensemble n’enlĂšve rien Ă  la puissance de certaines histoires. Un livre qui se lit rapidement, sans prĂ©tention.

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note3

Le guide du mauvais pĂšre, T1

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Titre : Le guide du mauvais pĂšre, T1
Scénariste : Guy Delisle
Dessinateur : Guy Delisle
Parution : Janvier 2013


Guy Delisle est un auteur canadien qui s’est fait connaĂźtre dans le petit monde de la bande-dessinĂ©e par ses rĂ©cits de voyage dans des pays tous plus intĂ©ressants les uns que les autres. Il a atteint la consĂ©cration avec « Chroniques de JĂ©rusalem », aurĂ©olĂ© d’un Fauve d’Or au Festival International de la Bande-DessinĂ©e d’AngoulĂȘme en 2012. Fort de cette reconnaissance, il dĂ©cide alors de mettre en pause ses rĂ©cits de voyages pour proposer « Le guide du mauvais pĂšre », un ouvrage autobiographique bien plus lĂ©ger. Le tout paraĂźt chez Shampooing, dans un format manga. Cela pĂšse quand mĂȘme 190 pages pour une dizaine d’euros.

Ce qui marque d’emblĂ©e est l’aspect bloguesque de l’ensemble. On est dans la pure anecdote pĂšre/enfant dessinĂ© avec un trait simple et sans fioritures. Ainsi, les « cases » sont nombreuses, les blancs importants. Tout se passe donc essentiellement dans le dialogue (et les silences qui en font partie). Le tout en lien avec son fils (l’aĂźnĂ©) et sa fille (plus jeune).

Un auteur attendu au tournant

J’avoue que j’attendais un peu Delisle au tournant. Ses livres ayant une part d’intĂ©rĂȘt non-nĂ©gligeable liĂ©e au cĂŽtĂ© documentaire, j’étais un peu curieux de voir ce que pouvait donner un ouvrage purement humoristique. Force est de constater que c’est plutĂŽt rĂ©ussi. MĂȘme si le thĂšme du pĂšre indigne et cynique n’est pas nouveau, l’auteur possĂšde un vrai talent dans les rĂ©parties et les situations. Quant Ă  savoir oĂč est la part de vrai lĂ -dedans
 Les anecdotes font donc mouche, les chutes sont drĂŽles et, chose Ă  signaler, les dialogues aussi. Les situations sont souvent assez longues, mĂȘme si le format du livre donne des impressions de longueur un peu biaisĂ©es.

Cependant, force est de constater que le livre se lit un peu vite, et ce malgrĂ© les 190 pages. Le dessin trĂšs simple, les nombreux silences, le fait qu’il n’y ait en moyenne que deux dessins par page donnent un rythme de lecture bien trop soutenu. Et la frustration guette Ă  la fin de l’ouvrage. Pas Ă©tonnant qu’un tome deux soit sorti depuis. On atteint un peu la limite de ces livres typĂ©s blog. En recueil, ce n’est pas forcĂ©ment toujours adaptĂ©. Le mĂȘme sentiment m’avait touchĂ© lorsque j’avais dĂ©couvert les recueils de Bastien VivĂšs dans la mĂȘme collection. Certes, chaque livre n’est pas bien cher, mais l’ensemble est excessif.

Au final, ce « Guide du mauvais pĂšre » montre que Guy Delisle est tout Ă  fait capable de sĂ©duire sans le background d’un pays exotique. Son humour fait mouche et la lecture est un vrai plaisir. Cependant, Ă  10 euros le bouquin, vous risquez de rester un peu sur votre faim Ă  la fermeture de l’ouvrage. A vous de voir.

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ZaĂŻ zaĂŻ zaĂŻ zaĂŻ

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Titre : Zaï zaï zaï zaï
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : Fabcaro
Parution : Mai 2015


Je suis un grand fan de Fabcaro. Capable d’apprĂ©cier autant ses livres d’autodĂ©rision que ses strips ou encore ses ouvrages expĂ©rimentaux, je fus en joie en voyant un nouveau bouquin sortir, intitulĂ© « ZaĂŻ zaĂŻ zaĂŻ zaï ». Un road-movie paraĂźt-il
 Devant les bonnes critiques unanimes et son prix au festival Quai des Bulles, je me le suis procurĂ©, prĂȘt Ă  apprĂ©cier cet ouvrage. Le tout est paru chez 6 pieds sous terre pour une soixantaine de pages.

« ZaĂŻ zaĂŻ zaĂŻ zaï » est une auto-fiction. On retrouve Fabcaro au supermarchĂ©. Au moment de payer, il s’aperçoit qu’il n’a pas sa carte de fidĂ©litĂ©. Commence alors une cavale rocambolesque


Une cavale d’un nouveau genre.

ZaiZaiZaiZai3Si ce livre est assez diffĂ©rent formellement des autres ouvrages de Fabcaro, il en reprend pourtant toutes les caractĂ©ristiques : l’obsession du supermarchĂ©, le fonctionnement en strips, l’absurde, l’auto-dĂ©rision, le comique de rĂ©pĂ©tition
 Fabcaro fusionne le tout dans une aventure complĂštement absurde. Ainsi, chaque page propose un gag qui fait avancer l’histoire. Le cĂŽtĂ© extrĂȘmement absurde ferait presque pencher la balance vers l’idĂ©e d’un ouvrage expĂ©rimental. Mais l’humour dĂ©veloppĂ© est grand public, pour peu qu’on soit ouvert aux incohĂ©rences voulues du rĂ©cit. Si voir quelqu’un menacer un vigile avec un poireau ne vous fait pas sourire, vous pouvez passer votre chemin.

La cavale est bien Ă©videmment un prĂ©texte pour parler de tout et de rien. On retrouve  des gags sur l’auteur en lui-mĂȘme, sur les supermarchĂ©s, sur la police, sur les journalistes
 L’histoire est ainsi aussi dĂ©cousue qu’elle est absurde. Et ce, jusqu’à un Ă©pilogue rĂ©ussi. Et si, vu l’humour proposĂ©, on accroche plus ou moins aux situations, on sourit souvent et on rit mĂȘme de bon cƓur devant certains gags.

Au-delĂ  de la qualitĂ© intrinsĂšque de l’ouvrage (et de savoir s’il est drĂŽle ou non), force est de constater que Fabcaro est un auteur qui possĂšde une vĂ©ritable patte en tant que scĂ©nariste. Quand on accroche Ă  son humour, difficile de s’en dĂ©tacher. On est loin d’un humour formatĂ© et dĂ©jĂ  entendu.

Concernant le dessin, Fabcaro dĂ©laisse son dessin humoristique pour un trait Ă  la fois plus rĂ©aliste et encore plus relĂąchĂ©. Cela donne Ă  son road movie une apparence de sĂ©rieux qui tranche encore plus avec l’absurde de l’histoire. Le choix est clairement payant. Fabcaro fait la part belle aux rĂ©pĂ©titions dans ses pages, mettant l’accent sur les dialogues. Le trait est relevĂ© par une bichromie Ă  la teinte jaune/verte un peu dĂ©stabilisante (et honnĂȘtement assez moche). La teinte mise Ă  part, la colorisation donne du volume au trait et reste pertinente.

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« ZaĂŻ zaĂŻ zaĂŻ zaï » est un beau condensĂ© du savoir faire de Fabcaro. Il n’est pas rare de rire devant les pĂ©ripĂ©ties de ce hĂ©ros du quotidien. Rien que pour cela, l’ouvrage est rĂ©ussi. Mais quand il faut parler d’autodĂ©rision et tacler les angoisses du quotidien franchouillard (karaokĂ© et carte de fidĂ©litĂ© de supermarchĂ© en tĂȘte), il reste l’un des auteurs les plus performants.

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note4

Z comme Don Diego, T2 : La loi du marché

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Titre : Z comme Don Diego
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : Fabrice Erre
Parution : Octobre 2012


Zorro est le hĂ©ros de mon enfance. Je me rappelle des bons moments passĂ©s avec mes parents Ă  regarder les aventures du cĂ©lĂšbre justicier masquĂ©. J’avais donc jaugĂ© avec curiositĂ© l’apparition du premier tome d’une nouvelle sĂ©rie intitulĂ©e « Z comme don Diego ». La dĂ©couverte s’était avĂ©rĂ©e drĂŽle et sympathique. C’est donc en confiance que je me suis offert l’opus suivant paru au mois d’octobre. Il s’intitule « La loi du marchĂ© » et nous prĂ©sente un Zorro bardĂ© de sponsors tel un pilote de Formule 1. Son pĂšre, le sergent Garcia, la señorita Sexoualidad ou encore Bernardo l’accompagnent au second plan.

Au-delĂ  de la prĂ©sence du cĂ©lĂšbre Zorro, cet ouvrage possĂ©dait un autre atout Ă©vident lors de notre premiĂšre rencontre. Cet aspect Ă©tait la prĂ©sence de Fabcaro sur la couverture. J’ai dĂ©couvert ce scĂ©nariste par « Jean-Louis et son encyclopĂ©die » et « Steve Lumour ». Il faisait ici Ă©tat de son talent Ă  tourner en dĂ©rision des personnages de « loser ». Il Ă©tait donc curieux de voir exploiter le mythe de Zorro dans cet esprit-lĂ . Le premier Ă©pisode avait rĂ©pondu aux attentes, j’en espĂ©rais autant du second.

Un Don Diego opposĂ© au hĂ©ros tĂ©lĂ©visuel qu’il reprĂ©sente.

On retrouvait donc avec plaisir ce Don Diego maladroit et Ă  l’opposĂ© du charismatique hĂ©ros tĂ©lĂ©visuel qu’il reprĂ©sente. On a du mal l’imaginer sauver qui que ce soit tant il a dĂ©jĂ  du mal Ă  garder son identitĂ© secrĂšte. Nombre sont les gags Ă  se construire sur cette dimension-lĂ . Le justicier pourrait ĂȘtre dĂ©masquĂ© des dizaines de fois. Mais ce cher sergent Garcia ne vaut pas mieux que lui. On rit avec bon cƓur de la bĂȘtise de tout ce beau monde. Il va sans dire que Don Diego ne se rĂ©vĂšle dans ses tentatives de sĂ©duction. Son amour et sa bonne volontĂ© ne sont pas reconnus par la señorita Sexoualidad qui pourtant ne brille ni par ses charmes ni par sa classe. Les auteurs arrivent Ă  offrir de nombreux gags sur ce thĂšme sans pour autant se rĂ©pĂ©ter.

Afin d’éviter le cĂŽtĂ© routinier de ce type de sĂ©rie, Fabcaro dĂ©cide d’intĂ©grer un nouveau personnage qui apparaĂźt anachronique avec l’univers de Zorro. Il s’agit de Wolverino. La parentĂ© de ce dernier avec le hĂ©ros des X-Men est Ă©vidente. Apparait donc un combat digne des geeks : Zorro contre Wolverino. Rapidement, le choc apparait dĂ©sĂ©quilibrĂ© tant la maladresse de Don Diego est battue Ă  plate couture par l’efficacitĂ© de son concurrent aux lames acĂ©rĂ©es. On dĂ©couvre donc le hĂ©ros chercher un emploi plus classique tant sa dimension de justicier a pris du plomb dans l’aile. Cet aspect gĂ©nĂšre une nouvelle corde l’arc du scĂ©nariste et gĂ©nĂšre ainsi d’autres gags qui pour la plupart nous ravissent. L’album nous prĂ©sente environ quatre-vingts strips dont la grande majoritĂ© fait mouche. On sourit souvent, on rigole de temps Ă  autre. Bref, cet album est un condensĂ© de bonne humeur qui chatouille sans effort nos zygomatiques.

Les dessins de Fabrice Erre collent parfaitement Ă  l’esprit dĂ©lurĂ© du propos. Les traits tout en rondeur se prĂȘtent au cĂŽtĂ© « cartoon » des situations. Les expressions graphiques des personnages sont caricaturales et excessives et participent ainsi au plaisir de la lecture. Les pages dĂ©gagent une bonne humeur Ă©vidente. On apprĂ©cie de suivre les courses effrĂ©nĂ©es du justicier dans ce village du Nouveau Mexique. Les dĂ©cors sont suffisamment travaillĂ©s pour que le dĂ©paysement soit rĂ©ussi.

En conclusion, « La loi du marchĂ© » est un ouvrage des plus honnĂȘtes. Rares sont les albums humoristiques Ă  s’approprier de maniĂšre aussi rĂ©ussie un univers existant. Rien n’est bĂąclĂ©. Les auteurs montrent une affection certaine pour Zorro et lui rendent un bel hommage en le parodiant ainsi. Les rumeurs laissent entendre que cette sĂ©rie ne connaitra pas de troisiĂšme opus par la faute de nombre de ventes dĂ©cevant. J’en suis triste. Mais cela ne m’empĂȘche d’espĂ©rer que ce cher don Diego aura d’autres occasions de nous faire rire. Mais cela est une autre histoire
 

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note3

Astérix, T35 : Astérix chez les Pictes

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Titre : Astérix, T35 : Astérix chez les Pictes
Scénariste : Jean-Yves Ferri
Dessinateur : Didier Conrad
Parution : Octobre 2013


Cette annĂ©e marquera une date importante de la bande dessinĂ©e française. C’est en effet la premiĂšre fois que les aventures des deux plus cĂ©lĂšbres gaulois ne sont nĂ©s ni de la plume de RenĂ© Goscinny ni de celle d’Albert Uderzo. C’est Ă  Jean-Yves Ferri et Didier Conrad qu’a Ă©tĂ© confiĂ©e la mission d’offrir un second souffle Ă  des mythes du neuviĂšme art. Tout le monde Ă©tait quasiment d’accord sur le fait que la magie de la sĂ©rie avait disparu avec son scĂ©nariste original. Son acolyte n’a jamais eu le talent d’écriture suffisant pour faire perdurer la qualitĂ© des premiers opus. La parution de AstĂ©rix chez les Pictes le vingt-quatre octobre dernier gĂ©nĂ©rait donc une curiositĂ© certaine. D’ailleurs, cela a fait que je me suis offert mon premier album de la saga depuis des annĂ©es.

Le site Bd Gest’ propose le rĂ©sumĂ© suivant : « Les Pictes ? Oui, les Pictes ! Ces peuples de l’ancienne Ecosse, redoutables guerriers aux multiples clans, dont le nom, donnĂ© par les Romains, signifie littĂ©ralement « les hommes peints ». AstĂ©rix chez les Pictes promet donc un voyage Ă©pique vers une contrĂ©e riche de traditions, Ă  la dĂ©couverte d’un peuple dont les diffĂ©rences culturelles se traduiront en gags et jeux de mots mĂ©morables. » 

J’associe le nom de Jean-Yves Ferri Ă  la sĂ©rie Le retour Ă  la terre dont les diffĂ©rents Ă©pisodes m’ont procurĂ© moult fous rires. Je trouvais donc ce choix judicieux de lui confier le scĂ©nario de ce nouvel album. La qualitĂ© de son Ă©criture, son sens de la rĂ©partie et la drĂŽlerie de ses dialogues me laisser croire en sa capacitĂ© Ă  s’inscrire dans la lignĂ©e de son illustre prĂ©dĂ©cesseur, RenĂ© Goscinny. Par contre, je ne connaissais le travail de Conrad que de rĂ©putation. Je n’avais jusqu’alors jamais eu l’occasion de le dĂ©couvrir. NĂ©anmoins, le fait qu’Uderzo soit encore Ă  ses cĂŽtĂ©s garantissait une continuitĂ© dans le dessin.

Jouer sur les coutumes locales

Les auteurs ont choisi un squelette narratif classique pour leur grande premiĂšre. En effet, offrir un voyage Ă  AstĂ©rix et ObĂ©lix dans une contrĂ©e Ă©trangĂšre n’est pas original. NĂ©anmoins, ce n’est pas une mauvaise idĂ©e. Les pĂ©rĂ©grinations de nos deux gaulois en Hispanie, Corse, Belgique, HelvĂ©tie ou en Grande-Bretagne font partie de mes prĂ©fĂ©rĂ©es. Cette option permet de jouer sur les coutumes locales. Les Pictes Ă©tant les Ă©cossais actuels, on pouvait supposer que le kilt ou encore le monstre du Loch Ness seraient de sortie. La lecture offre de bonnes surprises dans le domaine. Certains clichĂ©s des autochtones sont exploitĂ©s. Je me suis laissĂ© porter malgrĂ© le cĂŽtĂ© rĂ©pĂ©titif de certains d’entre eux. Certaines blagues font sourire mĂȘme si on ne retrouve pas la densitĂ© des meilleurs Ă©pisodes de la sĂ©rie. Par contre, je trouve plutĂŽt bien construite la relation toujours dĂ©calĂ©e entre ObĂ©lix et les us et coutumes Ă©trangĂšres.

L’histoire ne dĂ©note pas non plus par son originalitĂ©. Un Picte exilĂ© se doit d’aller reconquĂ©rir sa belle pour Ă©viter la prise de pouvoir d’un chef manipulateur et vil. Les Ă©vĂ©nements s’enchainent Ă  un rythme rĂ©gulier et toutes les Ă©tapes prĂ©visibles sont respectĂ©es. A aucun moment, je n’ai Ă©tĂ© pris par surprise. Les auteurs naviguent sur des rails bien tracĂ©s. Ils ne cherchent pas Ă  rĂ©volutionner le genre. Au contraire, ils se montrent trĂšs respectueux de l’institution. Bon nombre de scĂšnes rappellent certains moments vĂ©cus en lisant les albums prĂ©cĂ©dents. Je ne leur reproche pas du tout cette dĂ©marche dans le sens oĂč il me paraissait impossible de rĂ©volutionner le genre.

Le nouveau duo Ă©tait Ă©galement attendu sur ses textes. Goscinny est cĂ©lĂšbre pour ses jeux de mots et ses calembours. Ferri fait de gros efforts sur ce plan-lĂ . Rares sont les pages sans second degrĂ©. Certains sont plus rĂ©ussis que d’autres mais le bilan reste trĂšs positif par rapport aux rĂ©centes parutions de la sĂ©rie. Ma deuxiĂšme lecture m’a d’ailleurs permis de profiter davantage de cet aspect. NĂ©anmoins, les blagues de cet opus font davantage sourire que rire. C’est toujours mieux que les derniers albums rĂ©digĂ©s par Uderzo qui en devenaient pathĂ©tiques dans le domaine.

Au final, AstĂ©rix chez les Pictes rĂ©ussit correctement sa mission. Il avait pour objectif d’arrĂȘter la terrible chute opĂ©rĂ©e depuis une petite dizaine d’album. Il est atteint. NĂ©anmoins, il faudra attendre le prochain opus pour savoir si Ferri et Conrad peuvent redonner entiĂšrement ses lettres de noblesse Ă  ce mastodonte du neuviĂšme art. C’est tout le mal que je leur souhaite


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Astérix, T36 : Le papyrus de César

Asterix36


Titre : Astérix, T36 : Le papyrus de César
Scénariste : Jean-Yves Ferri
Dessinateur : Didier Conrad
Parution : Octobre 2015


MĂȘme si aucun de ses deux crĂ©ateurs n’est Ă  l’origine de son Ă©criture, le nouveau tome des aventures d’AstĂ©rix reste un Ă©vĂ©nement majeur du neuviĂšme art. Le dernier date du mois dernier et s’intitule Le Papyrus de CĂ©sar. Le binĂŽme formĂ© de Jean-Yves Ferri et Didier Conrad a Ă©tĂ© une nouvelle fois missionnĂ© pour faire naĂźtre de leur imagination les nouvelles aventures des gaulois les plus cĂ©lĂšbres du monde. Les deux auteurs avaient su offrir une suite correcte et respectueuse Ă  l’Ɠuvre de RenĂ© Goscinny et Albert Uderzo avec l’épisode prĂ©cĂ©dent AstĂ©rix chez les Pictes. Je fais partie des lecteurs ayant trouvĂ© plutĂŽt apprĂ©ciĂ© cet album historique. Sans atteindre la qualitĂ© des premiers opus, il marquait un progrĂšs Ă©norme par rapport aux derniers ouvrages nĂ©s de la seule plume d’Uderzo. J’espĂ©rais donc que ce trente-sixiĂšme acte prolonge cette Ă©volution positive.

Le papyrus qui donne son titre au livre n’est pas le moindre des Ă©crits : il s’agit d’un chapitre de la cĂ©lĂšbre Guerre des Gaules contĂ©e par CĂ©sar. Ce chapitre n’est pas n’importe lequel : il s’agit de celui qui Ă©voque les irrĂ©ductibles gaulois et la partie de la Gaule qui n’est pas dominĂ©e par Rome. Le conseiller de l’empereur lui propose de faire disparaĂźtre ces pages permettant ainsi Ă  l’Histoire de retenir que CĂ©sar a conquis toute la Gaule. Le souci apparait lorsqu’un colporteur gaulois met la main sur une mouture complĂšte du papyrus et dĂ©cide de rendre publique cette manipulation de la rĂ©alité 

Le journalisme version Jules CĂ©sar

Asterix36aJ’ai trouvĂ© l’idĂ©e de dĂ©part originale et intĂ©ressante. Les enjeux apparaissent rĂ©els et crĂ©ent un lien Ă©vident avec notre Ă©poque contemporaine. Ne dit-on pas que l’Histoire est toujours Ă©crite par les vainqueurs ? De plus, cela permet aux auteurs d’intĂ©grer le concept de libertĂ© de la presse dans leur histoire. Tous ces thĂšmes sont plutĂŽt bien exploitĂ©s tout au long de la narration. Sans jamais tomber dans un excĂšs regrettable, Jean-Yves Ferri arrive Ă  faire rire avec ses vannes Ă©voquant l’univers du journalisme.

Concernant le mĂ©chant, il prend ici les traits de Bonus Promoplus, conseiller et Ă©diteur de l’empereur. L’éthique n’est pas sa qualitĂ© premiĂšre et il se trouve bien embĂȘtĂ© lorsqu’il apprend la disparition du papyrus. Il doit mettre la main dessus tout en empĂȘchant CĂ©sar d’ĂȘtre informĂ© de la situation. Il reprend beaucoup de caractĂ©ristiques des traditionnels adversaires des hĂ©ros irrĂ©ductibles. Sa personnalitĂ© s’inscrit dans la tradition de la sĂ©rie et ce n’est pas dĂ©sagrĂ©able pour le lecteur. J’ai pris beaucoup de plaisir Ă  rire de ses mĂ©saventures et sa nervositĂ© permanente. Son travail avec les lĂ©gionnaires de Babaorum. DĂ©couvrir les soldats blasĂ©s par les irrĂ©ductibles gaulois devant ce petit excitĂ© fait aisĂ©ment sourire.

Evidemment, l’attrait rĂ©side aussi de retrouver nos gaulois adorĂ©s. Les auteurs s’en approprient les codes avec talent. CĂ©tautomatix, Ordralphabetix, Agecanonix, Abraracourcix, Bonemine ou Assurancetourix jouent leur rĂŽle Ă  merveille. Ils ont chacun leur petit fil conducteur personnel qui densifie la trame gĂ©nĂ©ral. Concernant ObĂ©lix, il est nouvelle fois la grande star de l’album avec sa volontĂ© ponctuelle d’éviter les conflits et les sangliers. Bref, les auteurs offrent un album qui respecte les codes de la sĂ©rie avec talent. Les dessins de Didier Conrad sont dans une lignĂ©e parfait d’Albert Uderzo.

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Pour conclure, je trouve que Le Papyrus de CĂ©sar est un cru honnĂȘte. Il n’a aucun mal Ă  accompagner les prĂ©cĂ©dents Ă©pisodes de la saga. Je le trouve plus rĂ©ussi qu’AstĂ©rix chez les Pictes. Cela me rend optimiste. Les auteurs semblent plus Ă  l’aise dans ce costume prestigieux. Surtout, j’ai bon espoir que AstĂ©rix retrouve les lettres de noblesse que certains Ă©pisodes rĂ©cents avaient tendance Ă  effriter sĂ©rieusement


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note3

Guide sublime

GuideSublime


Titre : Guide sublime
Scénariste : Fabrice Erre
Dessinateur : Fabrice Erre
Parution : Mai 2015


Fabrice Erre est un des auteurs de bandes dessinĂ©es qui me fait le plus rire. Qu’il conte le quotidien d’un enseignant dans « Une annĂ©e au lycĂ©e », celui de Zorro dans « Z comme Diego », ou narre la conquĂȘte spatiale dans « Mars », il sollicite intensĂ©ment mes zygomatiques. J’ai donc accueilli avec un grand enthousiasme l’apparition dans les rayons de librairie « Guide sublime » en mai dernier. Il s’agit d’un ouvrage dont le format s’apparente davantage Ă  celui d’un roman que d’un album classique. EditĂ© chez Dargaud, le bouquin se compose de cent soixante-huit pages. DĂšs les premiĂšres pages, on y apprend que les strips de ce livre ont initialement Ă©tĂ© publiĂ©s dans la revue numĂ©rique « Mauvais esprit ».

Le Guide sublime est un dictateur. C’est son quotidien politique que nous sommes amenĂ©s Ă  dĂ©couvrir. Chaque planche prĂ©sente un moment de la vie de ce chef d’état despote. Chacune peut ĂȘtre lue de maniĂšre indĂ©pendante. Cette structure narrative permet une lecture intense et rythmĂ©e.  Il s’agit donc d’un opus qui peut se picorer. Il n’est pas nĂ©cessaire de le terminer d’une traite. Je pense qu’il est plus pertinent de s’y plonger par petite dose. Cela permettra de savourer chaque bouchĂ©e plutĂŽt que de risquer l’indigestion.

Le quotidien d’un dictateur.

GuideSublime1En effet, le caractĂšre trĂšs excessif du personnage principal fait que j’ai eu le sentiment constant d’ĂȘtre immergĂ© au beau milieu d’une crise d’hystĂ©rie. Le Guide hurle en permanence des dĂ©cisions aussi incohĂ©rentes que dĂ©nuĂ©es de sens. Ne le voir jamais s’arrĂȘter ou s’apaiser fait que cette lecture fatigue par moment. Cette frĂ©nĂ©sie transpire des pages. Par contre, le lire par petite touche permet de profiter davantage de l’humour caractĂ©ristique gĂ©nĂ©rĂ© par la plume de Fabrice Erre.

Le casting de l’entourage du guide sublime nous est quasiment intĂ©gralement prĂ©sentĂ© sur la couverture. On y dĂ©couvre ses ministres, sa garde rapprochĂ©e et une curieuse infirmiĂšre aux formes chaloupĂ©es. Il ne manque qu’un collĂšgue dictateur, l’empereur Bogolo, qui jouera un rĂŽle central dans la dĂ©marche de propagande de son acolyte. L’auteur ne s’embarrasse pas de personnages secondaires sans contact direct avec le chef. Fabrice Erre nous fait entrer dans les arcanes du pouvoir gĂ©rĂ© par ce fada mĂ©galomane.

La thĂ©matique est un terreau attrayant pour faire pousser une Ɠuvre drĂŽle et dĂ©lurĂ©e. Les premiĂšres pages dĂ©marrent sur les chapeaux de roue. Les caractĂ©ristiques de ce cher Guide sont sans Ă©quivoque : il est complĂštement fou ! Il fait honneur Ă  toutes les caricatures du genre. La premiĂšre planche nous le fait dĂ©couvrir complĂštement hystĂ©rique en train de hurler que sa premiĂšre dĂ©cision sera de rendre obligatoire le port de la moustache. Le trait de Fabrice Erre traduit complĂštement le cĂŽtĂ© possĂ©dĂ© du souverain. La mise en bouche est sans Ă©quivoque : le programme est annoncĂ©.

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Pour conclure, je conseille de lire cet album par petite touche. Cela permettra de savourer l’imagination de Fabrice Erre sans pour autant subir le cĂŽtĂ© effrĂ©nĂ© de ce Guide sublime. L’auteur construit beaucoup de ces gags dans le mĂȘme canevas. Cela peut faire ronronner la lecture si on la fait d’une seule traite. Je place cet album en-dessous des prĂ©cĂ©dents opus de cet auteur. NĂ©anmoins, il est reste habitĂ© par son univers caractĂ©ristique. Et ce n’est dĂ©jĂ  pas si mal


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note2

Leo Loden, T23 : Brouillades aux embrouilles

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Titre : Leo Loden, T23 : Brouillades aux embrouilles
Scénaristes : Christophe Arleston & Loïc Nicoloff
Dessinateur : Serge CarrĂšre
Parution : Janvier 2015


Leo Loden est un dĂ©tective dont je suis les enquĂȘtes depuis ses dĂ©buts. Cela fait donc plus de quinze ans que je prends plaisir Ă  suivre les pas de de cet ancien policier aux quatre coins de la France. Ce hĂ©ros est le fruit de la rencontre entre le scĂ©nariste Christophe Arleston le dessinateur Serge CarrĂšre. Depuis quelques temps maintenant, le duo est devenu trio avec l’arrivĂ©e Ă  l’écriture de LoĂŻc Nicoloff. Le dernier Ă©pisode date du mois de janvier dernier et s’intitule « Brouillades aux embrouilles ». La couverture laisse penser que le trafic d’armes ne sera pas Ă©tranger Ă  l’histoire.

Amadeus est un faussaire sympathique qui accompagne bon nombre d’aventures de LĂ©o. Au cours des premiĂšres pages, il se fait enlever sur le port de Marseille et n’arrive Ă  prĂ©venir que notre cher dĂ©tective. Ce dernier mĂšne l’enquĂȘte qui va le mettre sur le chemin de l’assassinat d’un trafiquant d’arme, d’un imam gĂ©rant de citĂ© et de prĂ©fet angoissĂ© des consĂ©quences de tout cela


Marseille : son port et ses quartiers nord.

LĂ©o Loden est marseillais. MĂȘme s’il a Ă©tĂ© souvent amenĂ© Ă  suivre des affaires dans tout l’Hexagone, la majoritĂ© de son quotidien se dĂ©roule autour de la citĂ© phocĂ©enne. « Brouillades aux embrouilles » centre son intrigue autour du port et d’une citĂ© des quartiers nord. Cet opus fait naĂźtre une histoire indĂ©pendante qui trouve son dĂ©nouement au bout de quarante-six planches. Il n’est pas ici question d’attendre le prochain tome pour connaĂźtre la fin. Comme toute sĂ©rie, celle-ci nous fait retrouver un casting constant d’épisode en Ă©pisode. On retrouve donc l’oncle de LĂ©o. Il est marin et le personnage le plus drĂŽle. MarlĂšne, commissaire et conjointe de LĂ©o, est Ă©galement toujours lĂ . Son caractĂšre volcanique est un atout certain de la lecture. Le trio est en pleine forme dans ce vingt-troisiĂšme acte. Ils participent Ă  la bonne ambiance que se dĂ©gage des pages.

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La mise en place de la trame est efficace. Les auteurs ne perdent pas de temps pour nous faire dĂ©couvrir les premiers enjeux. L’enchainement des Ă©vĂ©nements est relativement dense et les rebondissements sont plutĂŽt bons. La lecture est dynamique. Le suspense est suffisamment fort pour la curiositĂ© accompagne la dĂ©couverte de l’album du dĂ©but Ă  la fin. L’immersion de tout ce petit monde dans l’univers des docks d’un cĂŽtĂ© et des citĂ© de l’autre est plutĂŽt rĂ©ussie. Evidemment, elle ne servira pas de support Ă  une thĂšse universitaire sur le sujet. Par contre, elle chatouille rĂ©guliĂšrement les zygomatiques. Dans ce tome, le scĂ©nario n’est pas diluĂ© par une succession de scĂšnes d’action sans grand intĂ©rĂȘt. La prime est portĂ©e Ă  l’histoire et cela est bien apprĂ©ciable.

En plus de dĂ©rouler une intrigue intĂ©ressante et prenante, Arleston arrive Ă  intĂ©grer sans problĂšme les atouts de ses hĂ©ros. La relation LĂ©o – MarlĂšne est toujours hilarante. Quant Ă  l’oncle, il est comme une sardine dans le vieux port avec ses amis les dockers. Les scĂšnes avec le prĂ©fet et le commissaire divisionnaire quant Ă  la politique Ă  adopter pour gĂ©rer la crise prĂȘte aisĂ©ment Ă  sourire. Tout ce petit monde est bien accompagnĂ© par les dessins de CarrĂšre. Son style correspond parfaitement Ă  l’ambiance divertissante de l’album. Les couleurs vivent de Cerise vont Ă©galement dans ce sens.

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Au final, « Brouillades aux embrouilles » est un cru honnĂȘte. Je trouve qu’il offre ce que lecteur en attend. J’ai eu l’occasion de le lire dĂ©jĂ  deux fois. Le plaisir Ă©tait toujours prĂ©sent la seconde fois. C’est plutĂŽt bon signe. Je le conseille donc Ă  quelqu’un qui chercherait une bande dessinĂ©e drĂŽle, lĂ©gĂšre et pourvue d’une histoire pas inintĂ©ressante.

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note3

Leo Loden, T20 : Lagoustines Breizhées

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Titre : Léo Loden, T20 : Langoustines Breizhées
Scénaristes : Christophe Arleston & Loïc Nicoloff
Dessinateur : Serge CarrĂšre
Parution : Août 2011


« Leo Loden » est une sĂ©rie qui fait son petit bonhomme de chemin. En effet, cet Ă©tĂ© a vu la parution de son vingtiĂšme tome. Depuis le dĂ©but, le scĂ©nario est l’Ɠuvre du cĂ©lĂšbre Christophe Arleston. Les dessins sont nĂ©s de la plume de Carrere. En cours de route, ils se sont associĂ©s Ă  Nicoloff. Le dernier opus s’intitule « Langoustines breizhĂ©es ». Toujours Ă©ditĂ© chez Soleil, il est d’un format classique. Son prix est d’environ dix euros.

Cette sĂ©rie est construite autour du personnage de Leo Loden. Ancien inspecteur de la police Ă  Marseille, il a montĂ© son cabinet de dĂ©tective privĂ©. Il mĂšne ses enquĂȘtes accompagnĂ© de son oncle Loco, ancien marin haut en couleur. Leo file le parfait amour avec une splendide femme pleine de caractĂšre qui s’avĂšre ĂȘtre commissaire. La particularitĂ© de cette sĂ©rie est que chaque enquĂȘte nous emmĂšne dans une rĂ©gion de France diffĂ©rente et nous permet de dĂ©couvrir les spĂ©cificitĂ©s locales.

Un mĂ©lange de polar et d’humour en Bretagne

Le titre de cet album est sans Ă©quivoque. Nos hĂ©ros vont dĂ©couvrir les charmes de la Bretagne. Nos deux dĂ©tectives partent dans le FinistĂšre rendre service Ă  un ami qui est sur une affaire. Une journaliste a disparu. Elle enquĂȘtait depuis des mois sur des passeurs d’hommes entre l’Afrique et l’Europe. Il apparait donc Ă©vident que tout cela est liĂ©. VoilĂ  donc la mission confiĂ©e Ă  nos hĂ©ros : retrouver la disparues et mettre en mal ce rĂ©seau


Cet album, Ă  l’image de la sĂ©rie, a deux objectifs. Le premier est de nous offrir une enquĂȘte rythmĂ©e et pleine de rebondissements. Le second est de nous divertir et de nous faire rire grĂące Ă  ses personnages et leurs caractĂšres. Cela fait de cet opus une lecture lĂ©gĂšre qui s’adresse Ă  toute la famille. Tout le monde peut thĂ©oriquement y trouver quelque chose. NĂ©anmoins, la question qu’il restait Ă  se poser Ă©tait de savoir si ses deux finalitĂ©s Ă©taient atteintes.

Concernant l’enquĂȘte, on ne trouve rien de rĂ©volutionnaire. D’ailleurs, c’est l’évolution de la sĂ©rie qui va dans un sens moins travaillĂ© dans ce domaine. En effet, concernant l’histoire, les auteurs privilĂ©gient les scĂšnes d’action au dĂ©triment d’une intrigue plus dense et originale. Les poursuites et les bagarres sont frĂ©quentes et laissent donc peu de place Ă  des retournements de situation. Je trouve cela un petit peu dommage car la richesse des premiers tomes de la sĂ©rie rĂ©side en grande partie dans l’attrait de l’histoire en elle-mĂȘme. Dans « Langoustines breizhĂ©es », elle n’est pas trĂšs Ă©paisse et sans rĂ©elle surprise.

CĂŽtĂ© humour, Loco nous offre encore beaucoup de bons moments de rigolade. Ce marin aux maniĂšres un petit peu rustres et Ă  l’appĂ©tit sans limite est la vraie star de la sĂ©rie. Dans cet opus, il ne déçoit pas. Chacune de ses apparitions ou de ses remarques est rĂ©ussie et gĂ©nĂšre une atmosphĂšre divertissante Ă  notre lecture. Le bĂ©mol vient des autres personnages qui apparaissent bien fades par rapport au vieux loup de mer. En effet, Leo est en retrait. Le fait de ne pas intĂ©grer sa conjointe dans l’histoire met de cĂŽtĂ© tous les gags dĂ©coulant de leurs disputes. C’est dommage. De plus, leur copain breton n’est pas assez travaillĂ©. C’est donc parce qu’il possĂ©dait un vrai potentiel comique.

Les dessins sont de leur cĂŽtĂ© dans la lignĂ©e des tomes prĂ©cĂ©dents. Ils se prĂȘtent parfaitement Ă  l’ambiance de l’album et Ă  sa nature. Il est relativement arrondi et s’assimile facilement. Les couleurs sont vives. Bref, un feuilletage rapide des pages nous laissent une impression colorĂ©e et dynamique. A dĂ©faut de nous prĂ©senter des planches mĂ©morables, Carrere nous offre un dessin agrĂ©able dans lequel on se plonge avec plaisir et aisance. L’auteur nous offre des personnages qui peuvent avoir certaines rĂ©actions et comportements assez  « cartonnesque ». Les colĂšres peuvent ĂȘtre hautes en couleur !

En conclusion, « Langoustines breizhĂ©es » est un album moyen. Il est loin de faire partie des meilleurs de la sĂ©rie. Il nous offre quelques bons moments et manque de densitĂ© pour qu’on soit rĂ©ellement captivĂ© du dĂ©but Ă  la fin. Disons que si il s’agissait du premier opus de « Leo Loden », je ne suis pas sĂ»r qu’aprĂšs sa lecture, je me plonge rapidement dans les autres tomes. Par contre, je n’ai pas regrettĂ© de l’acheter pour complĂ©ter ma collection. J’ai pris plaisir Ă  retrouver les personnages et me suis montrĂ© complaisant avec leurs aventures du fait de la sympathie qu’il m’inspire. Pour ceux qui ne connaissent pas cette sĂ©rie, je vous conseille davantage les premiers bouquins parus. Vous ne regretterez pas le voyage. Vos zygomatiques seront sollicitĂ©es.

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note2

Leo Loden, T21 : Barigoule au Frioul

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Titre : Leo Loden, T21 : Barigoule au Frioul
Scénaristes : Christophe Arleston & Loïc Nicoloff
Dessinateur : Serge CarrĂšre
Parution : Août 2012


« Barigoule au Frioul » est le titre du dernier Ă©pisode des aventures de Leo Loden, hĂ©ros nĂ© il y a plus de dix ans de la collaboration de Christophe Arleston et de Serge CarrĂšre. C’est le nom du premier citĂ© qui m’avait incitĂ© Ă  dĂ©couvrir cette saga. En effet, « Lanfeust de Troy » Ă©tait une de mes sĂ©ries de chevet Ă  cette Ă©poque-lĂ . J’étais donc curieux de partir Ă  la rencontre des diffĂ©rents univers de ce cĂ©lĂšbre scĂ©nariste. Comme pour les prĂ©cĂ©dents opus de la sĂ©rie, il s’associe Ă  Nicoloff pour l’écriture de ce vingt et uniĂšme tome mettant en scĂšne le cĂ©lĂšbre dĂ©tective privĂ© marseillais. Ce nouvel ouvrage est paru au mois d’aoĂ»t dernier chez Soleil. La couverture nous prĂ©sente Leo et son oncle sous une pluie torrentielle. Au grĂ© d’un Ă©clair, la nuit s’illumine et voit apparaitre un corps pendu. Qui ? Comment ? Pourquoi ? Il ne restait donc plus qu’à se plonger dans la lecture


Pour vous prĂ©senter rapidement la trame, je vais citer le rĂ©sumĂ© proposĂ© par le site BD Gest’ : « Le ChĂąteau d’If, une forteresse imprenable qui protĂšge l’entrĂ©e du Vieux-Port
 et un refuge bienvenu quand on est pris dans un lĂ©ger grain selon Tonton (une grosse tempĂȘte selon tout le monde). C’est ainsi que LĂ©o et Loco se retrouvent au milieu d’un sĂ©minaire de motivation rĂ©unissant les cadres d’une entreprise pharmaceutique oĂč l’ambiance semble idĂ©ale
 jusqu’au moment oĂč le grand patron meurt empoisonnĂ© lors du cocktail de fin de journĂ©e. VoilĂ  une enquĂȘte parfaite pour LĂ©o : le coupable est forcĂ©ment sur l’üle et ce n’est pas le fantĂŽme du Comte de Monte-Cristo ! Mais les apparences sont peut-ĂȘtre trompeuses
 »

Cet album s’adresse, Ă  l’image de la sĂ©rie, Ă  un public trĂšs large. Le ton est lĂ©ger. Bien que construit sur la narration d’une enquĂȘte, l’humour tient une part prĂ©pondĂ©rante dans l’écriture du scĂ©nario. C’est d’ailleurs davantage au nombre de moments drĂŽles qu’à la densitĂ© de l’intrigue qu’on juge le plaisir de la lecture d’un Ă©pisode. J’ai une rĂ©elle affection pour les personnages de cette saga malgrĂ© la qualitĂ© parfois inĂ©gale des diffĂ©rents tomes. Certains crus sont excellents, d’autres apparaissent moins aboutis. Je suis donc plein d’espoir Ă  chaque nouvelle parution.

MalgrĂ© son statut de marseillais, Loden a souvent eu l’occasion de voyager Ă  l’image d’un AstĂ©rix. On prend donc souvent plaisir Ă  voir les clichĂ©s locaux ĂȘtre exploitĂ©s au service de l’intrigue. Je suis donc curieux de savoir oĂč nous mĂšne ce « Barigoule au Frioul ». Le titre est une indication. Il possĂšde un ton provençal qui nous Ă©loigne peu de la citĂ© phocĂ©enne. Mais il n’est pas nĂ©cessaire de partir bien loin pour se sentir dĂ©paysĂ©. Se trouver immerger dans un huis clos nocturne, pluvieux et ilien est intĂ©ressant. Cela l’est d’autant plus que Loden a souvent l’occasion de beaucoup se dĂ©placer lors de ses enquĂȘtes, ce qui s’avĂšre impossible ici. De plus, ce type de trame possĂšde un ton « Cluedo » qui peut s’avĂ©rer original.

Les auteurs cherchent vraiment Ă  exploiter le fait de se trouver au ChĂąteau d’If. Les allusions au lieu sont nombreuses et s’intĂšgrent parfaitement dans l’histoire. C’est une des caractĂ©ristiques mĂ©ritantes de cette sĂ©rie. A ce niveau-lĂ , le lien avec AstĂ©rix est Ă©vident. Ce dernier ne rencontre pas les mĂȘmes personnes en HelvĂ©tie, en Hispanie ou en Corse. De la mĂȘme maniĂšre, Arleston n’utilise pas les mĂȘmes ficelles quand il nous immerge Ă  Lyon, Lille, Marseille ou Toulouse. La dimension « touristique » m’a plu et j’ai pris plaisir Ă  graviter dans cette forteresse. Mais l’album n’est pas un appendice du Guide Vert. On dĂ©couvre un assassinat. Il y a une dizaine de suspects. Heureusement, Loden et son oncle sont dans la place et se charge donc de rĂ©soudre cette Ă©nigme.

Le grand nombre de personnages me laissait espĂ©rer une intrigue dense et pleine de rebondissements. Faire intervenir chacun des protagonistes devait offrir une Ă©paisseur au contenu. Au final, ils se rĂ©vĂšlent que certains restent vraiment secondaires et anecdotiques. Cela ne veut pas dire que l’histoire est creuse mais elle s’avĂšre moins « rebondissant » qu’espĂ©rĂ©e. L’histoire se laisse lire avec plaisir et ne souffre pas de rĂ©el temps mort. NĂ©anmoins, Ă  aucun moment, on est emportĂ© rĂ©ellement par les pĂ©rĂ©grinations de nos amis. Il manque un petit quelque chose qu’on est conquis par la lecture. On ne se plonge jamais de maniĂšre aussi intense que je pouvais l’espĂ©rer. On reste lĂ©gĂšrement en retrait.

Les dessins de Serge CarrĂšre correspondent parfaitement Ă  l’ambiance de la sĂ©rie. Sur ce point, l’association entre Arleston et ce dessinateur est loin d’ĂȘtre une faute de goĂ»t. Le dessin est rond et facile d’accĂšs. Il conviendra aux grands comme aux petits. Les visages sont trĂšs expressifs et complĂštement parfaitement l’aspect humoristique du propos. De plus CarrĂšre n’a aucun mal Ă  dessiner les scĂšnes de poursuite ou d’action et Ă  faire naitre ce sentiment de rythme. Les couleurs, Ɠuvre de Cerise, sont simples et vives et participent Ă  l’accueil agrĂ©able qu’on ressent en dĂ©couvrant chaque page.

En conclusion, « Barigoule au Frioul » est un tome honnĂȘte. Il est dans la moyenne de la sĂ©rie. Il est loin des meilleurs mais reste plus construit que d’autres. La lecture Ă©tait agrĂ©able Ă  dĂ©faut d’ĂȘtre envoutante. Cet opus complĂšte honnĂȘtement la collection. NĂ©anmoins, pour ceux qui souhaitent dĂ©couvrir ce dĂ©tective fort sympathique, je vous conseille de lire les albums dans l’ordre. En effet, je garde une tendresse particuliĂšre pour les premiĂšres enquĂȘtes


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