
Titre : Le singe de Hartlepool
Scénariste : Wilfrid Lupano
Dessinateur : Jérémie Moreau
Parution : Septembre 2012
Pendant les guerres napoléoniennes, un navire français navigue près des côtes anglaises. A bord, un singe habillé d’un uniforme français fait office de mascotte. La haine de l’anglais est alors à son comble. Ainsi, le mousse, osant chantonner une mélodie en anglais, se voit jeté par-dessus bord… Quelques instants plus tard, c’est tout le navire qui sombre suite à un orage soudain. Seul rescapé : le singe. Celui-ci va se retrouver sur les côtes anglaises, près d’un village nommé Hartlepool. Les habitants vont alors décider de pendre ce Français.
Inspiré d’une histoire vraie (ou du moins d’une légende, difficile d’être certain de la véracité des faits), « Le singe de Hartlepool » est une véritable fable contre la bêtise humain en général et le nationalisme en particulier. N’ayant jamais vu un Français de leurs vies, les habitants vont trouver à se convaincre que ce singe est un être humain français. Quitte à faire appel à un ancien combattant sénile pour trouver des arguments…
Les auteurs, Wilfrid Lupano au scénario et Jérémie Moreau au dessin, ont décidé de jouer le jeu à fond. Ici, c’est une fable. La plupart des gens (ici, de véritables ploucs) sont complètement stupides et haineux. Seuls certains personnages parviennent à sortir de cet état de fait : certains enfants et le médecin, symbole de culture et donc de tolérance. Clairement, les auteurs font le choix d’une morale claire et affirmée et c’est tant mieux.
Le ton de l’album est clairement cynique. L’humour y est fortement présent malgré l’aspect dramatique de l’histoire. On rit souvent, voire même de bon cœur, devant les remarques des villageois. On rit de la bêtise humaine et à la fois, on s’en désespère.
« Bien qu’il ne parle pas, le singe est le personnage le plus complexe de l’histoire. »
Notre empathie est souvent requise dès que le singe apparaît. Victime innocente, subissant le courroux d’animaux se revendiquant intelligents, il est le personnage le plus complexe de l’histoire, bien qu’il ne parle pas. Et en cela, c’est la grande réussite de l’album. Les auteurs ont parfaitement su retranscrire la dualité des chimpanzés. Poussé dans ses retranchements, le singe est bestial, il mord jusqu’au sang, griffe, bref, lutte pour sa vie. Mais il est également parfois terriblement humain avec son regard perdu dans le vide. Éternelle victime de l’homme (enlevé à sa famille, puis pendu en Angleterre), il paraît pourtant bien plus humain que ses bourreaux.

Outre une narration et un ton captivants, il faut avouer que le dessin est l’un des points forts de cet album. J’ai pleinement accroché au graphisme personnel et expressif de Jérémie Moreau. Il est en parfaite adéquation avec le propos, sachant se montrer expressif dans les moments les plus ridicules ou plus intimiste dans les passages les plus empathiques. Pour un premier album, c’est d’autant plus impressionnant. Un dessinateur que je suivrai avidement désormais.
« Le singe de Hartlepool » est un one-shot de qualité. Maîtrisé de bout en bout sur tous les points, il maîtrise le mélange des genres avec brio. A la fois écœuré, amusé et attristé, le lecteur repart avec le plein d’émotion !

![]()
Note : 17/20

Le titre de l’album est assez explicite : on s’intéresse ici à une bande de personnes âgées qui viennent rendre hommage à l’une de leur amie, décédée. Le thème de « vieux fourneaux » prend d’autant plus de sens lorsque l’on apprend qu’ils ont tous travaillé dans la même usine et ont montré un activisme syndical particulièrement important. Mais quand l’un d’eux pète les plombs lorsque le notaire dévoile certains secrets, ses copains se serrent les coudes pour lui éviter de faire une connerie.
Dans cet album, chaque personnage est présenté de façon satisfaisante pour assouvir notre plaisir de lecture. Cependant, on sent que les auteurs en ont sous le pied. Ils savent éviter de produire trop de flashbacks inutiles et se concentre sur le présent. Sans être absolument le plus intéressant dans l’ouvrage, le fil rouge possède suffisamment de suspense pour nous donner envie de lire la suite. Mais ce sont bien les situations cocasses dues à l’âge des protagonistes qui font tout le sel du bouquin.

Comme dit précédemment, cet ouvrage s’inscrit dans une œuvre assez importante tournant autour de personnage ailés mystérieux : les Stryges. Pour ceux qui voudraient découvrir cet univers, je vous conseille de commencer vos lectures par « Le chant des stryges » qui est la série au centre de tout l’ensemble. Cela vous permettra de profiter pleinement de « Le siècle des ombres ». Ce prérequis n’est pas indispensable mais néanmoins recommandé pour maitriser tous les tenants et les aboutissants de certains personnages. Cylinia et Abeau naissent dans « Le clan des chimères » et réapparaissent dans « Le chant des stryges ». D’Holbach est un personnage central bien que longtemps mystérieux de « Le chant des stryges ».
immenses et angoissantes. On ressent sincèrement l’impression de ne pas être où on devrait être. La peur générée par ses lieux obscurs dont chaque recoin semble cacher un gros problème est bien transmise et participe à notre plaisir de lecture.
L’intérêt d’un premier tome est de chercher à nous faire pénétrer un nouvel univers. C’est un sentiment agréable de découvrir de nouveaux personnages, de nouveaux mondes, de nouvelles questions… On est toujours plein d’espoirs en découvrant de nouvelles pages. Est-on tombé sur une nouvelle pépite ? Attendra-t-on avec impatience la suite ? Comme je vous l’ai expliqué précédemment, cette série possédait à mes yeux un a priori très favorable. Néanmoins, cet état de fait était à double tranchant. La déception pouvait n’en être que plus grande. Ce n’est pas le cas. J’ai pris énormément de plaisir à découvrir cette nouvelle histoire. Le fait qu’il se trouve à l’intersection chronologique de tout ce qui était paru avant fait qu’on essaie inconsciemment de faire le lien avec ce qu’on sait déjà. On a même un sentiment assez original. On a l’impression d’en connaître bien plus que les personnages dans le sens où un pan de leur avenir lointain nous a déjà été conté. C’est assez anachronique comme aspect mais pas inintéressant.
De manière volontaire, je ne cherche pas à vous dévoiler de manière trop précise la trame. En effet, la grande partie du plaisir de la lecture réside dans l’excitation de découvrir la page suivante. Néanmoins, sachez que les jalons d’une histoire passionnante sont posés. De nombreuses questions sont posées, peu de réponses sont données. Bref, l’attente du deuxième opus est intense quand vous refermez l’album. Le problème que vous pourriez appréhender et le lien de cette série avec les autres précédemment citées. Il est évident que le fait de maitriser l’univers des Stryges vous offre une double lecture sur certaines scènes ou certaines révélations. Malgré cela, je pense que « La pierre » peut être lu de manière indépendante sans vous empêcher pour autant de maitriser sa trame.

Le site BD Gest’ présente l’album avec les mots suivants : « Une adaptation fougueuse d’un monument de la littérature américaine, rythmée au gré des vents et des passions humaines ! Herman Melville, qui fut marin, s’inspira de faits réels pour donner naissance à Moby Dick – un chef d’œuvre de la littérature américaine, un livre culte qui inscrivit un nouveau mythe dans la mémoire des hommes : celui de la baleine blanche. Il y raconte – sous la forme d’une parabole chargée de thèmes universels – la quête furieuse, mystique, désespérée du capitaine Achab et son dernier affrontement avec Moby Dick. »
L’intrigue fait exister une jolie galerie de personnages intéressants. Il y a évidemment Ishmaël. Le capitaine Achab fait peur tant il est possédé par sa haine pour la bête. Sa folie est bien rendue par les auteurs. Plus en retrait, l’indien Queequeg est charismatique et le second du bateau, Starbuck, apporte un écot intéressant. Le bémol de cette quantité de protagonistes est qu’il faut trouver de la place pour tout le monde. En passant de l’un à l’autre, les auteurs génèrent de la frustration. Chacun aurait mérité d’être central et finalement aucun ne l’est totalement. Peut-être qu’en répartissant le temps consacré à chacun de manière moins égalitaire, cela aurait intensifié certaines scènes et aurait clarifié le statut dans l’histoire des uns et des autres. Néanmoins, le travail graphique de Pierre Alary offre à chacun une identité graphique forte. Sur ce plan, chaque apparition d’Achab ne laisse pas indifférent.




