Titre : Abélard, T1 : La Danse des Petits Papiers
Scénariste : Régis HautiÚre
Dessinateur : Renaud Dillies
Parution : Juin 2011
Renaud Dillies mâavait beaucoup marquĂ© de son trait avec « Betty Blues » et « Bulles et Nacelles » oĂč il dĂ©veloppait un univers plein de poĂ©sie. A la suite dâune rencontre lors dâun festival, jâai pu dĂ©couvrir son nouvel ouvrage, « AbĂ©lard » (premier tome dâun diptyque) en avant-premiĂšre, oĂč il assure le dessin pendant que RĂ©gis HautiĂšre sâoccupe du scĂ©nario. Ce nâest pas la premiĂšre collaboration des deux hommes, qui ont dĂ©jĂ signĂ©s « Mister Plumb » ensemble.
Lâhistoire fait intervenir AbĂ©lard, un poussin qui vit dans les marais, entre jeu de cartes et parties de pĂȘche. Ayant toujours vĂ©cu Ă cet endroit, il ne peut sâempĂȘcher de sâinterroger sur lâailleurs, si inconnu Ă ses yeux. Une rencontre avec une femme, Epilie, va changer sa vie. Pour elle, il va dĂ©cider de voyager, jusquâĂ vouloir partir en AmĂ©rique.
Un road trip sous forme d’initiation.
« AbĂ©lard », aprĂšs une introduction dans les marais, ressemble fort Ă un road trip sous forme dâinitiation. Nâayant vĂ©cu que dans les marais, AbĂ©lard a Ă©tĂ© protĂ©gĂ© du vaste monde et est particuliĂšrement naĂŻf. Cette naĂŻvetĂ© est Ă la fois trĂšs touchante et drĂŽle. Sa mĂ©connaissance du monde et des gens est vraiment amusante. Ainsi, il se retrouve Ă voyager avec des gitans sans mĂȘme savoir quâils sont trĂšs mal acceptĂ©s par la population. Lui prend les gens comme ils sont, sans trop se poser de questions.
Au-delĂ de lâapparence parfois simple de lâhistoire se dessine une trame qui paraĂźt plus complexe. Ainsi, tout le monde semble connaĂźtre Epilie, lui donnant une image de dangerositĂ© que lâon ne comprend pas. Nul doute que le deuxiĂšme tome explicitera tout ça, mais tout cela participe Ă une ambiance des plus Ă©tranges. Autre particularitĂ© dâAbĂ©lard : son chapeau lui donne chaque jour un message sous forme de proverbe ou citation. Ces messages, venus dont ne sait oĂč vont avoir une vraie influence sur lâhistoire. Une petite curiositĂ© qui donne de la poĂ©sie Ă lâensemble.
Car « AbĂ©lard » a une poĂ©sie certaine, Ă lâimage du hĂ©ros qui monte dans un arbre pour « dĂ©crocher la Lune » Ă sa dulcinĂ©e. Le graphisme surannĂ© fait mouche. Le choix de la palette de couleur met parfaitement en valeur le trait de Dillies. Celui-ci est toujours aussi indistinct et naĂŻf Ă la fois. Les diffĂ©rents personnages, tous des animaux, sont tous trĂšs rĂ©ussis graphiquement. AbĂ©lard, en poussin naĂźf, est simplement adorable.
Dillies abandonne ici le gaufrier de six cases quâil affectionne pour un dĂ©coupage plus variĂ©. Câest une rĂ©ussite et le tout tĂ©moigne dâune grande maĂźtrise. Le dessinateur nâhĂ©site pas Ă prendre une page pour une case (voire mĂȘme deux avec cette incroyable carte de voyage pleine dâhumour).
Jâai Ă©tĂ© particuliĂšrement sĂ©duit par « AbĂ©lard » tout au long des 64 pages de ce premier tome. Il me tarde dĂ©jĂ dâen lire la suite. Son personnage, si naĂŻf, est particuliĂšrement attachant. Le scĂ©nario dâHautiĂšre est taillĂ© pour le style de Dillies. Une petite perle, simplement, rĂ©servĂ©e aux grands enfants.Â