GisĂšle & BĂ©atrice – BenoĂźt Feroumont

GiseleEtBeatrice


Titre : GisĂšle & BĂ©atrice
Scénariste : Benoßt Feroumont
Dessinateur : BenoĂźt Feroumont
Parution : Septembre 2013


Actuellement, je suis trĂšs attirĂ© par la bande-dessinĂ©e Ă©rotique. Cela tombe bien, « GisĂšle & BĂ©atrice », autoproclamĂ© « contenu coquin pour adultes coquins » a reçu de nombreuses Ă©loges chez les critiques de BD ce mois-ci. Du coup, une fois acquis, je me plongeais dans la bĂȘte rĂ©alisĂ©e par BenoĂźt Feroumont. Le tout, publiĂ© chez Dupuis dans la collection Aire Libre (assez logiquement), pĂšse pas moins de 112 pages.

Le pitch de dĂ©part est posĂ© dĂšs les premiĂšres pages. BĂ©atrice est mal considĂ©rĂ©e dans son boulot et harcelĂ©e sexuellement par son boss. ExcĂ©dĂ©e, elle finit par cĂ©der Ă  ses avances. Mais au moment de passer Ă  l’acte, voilĂ  que son patron se transforme en femme
 La nouvelle GisĂšle, immigrĂ©e et sans papier, devient le jouet sexuel de BĂ©atrice et, accessoirement, sa femme de mĂ©nage


Un conte érotique et féministe

C’est un conte Ă©rotique et fĂ©ministe que nous propose lĂ  BenoĂźt Feroumont. En renversant les rĂŽles, il permet au personnage de GisĂšle de comprendre ce qu’endurent les femmes. PassĂ© de patron macho Ă  immigrĂ© harcelĂ© par
 un peu tout le monde, elle vit le quotidien de certaines femmes. Ainsi, elle se plaint que BĂ©atrice veuille des rapports sexuels tous les soirs


L’histoire de « GisĂšle & BĂ©atrice » est pourtant pleine de subtilitĂ© malgrĂ© un pitch qui peut paraĂźtre excessif. Car si l’auteur n’hĂ©site pas Ă  faire dans l’excĂšs, avec beaucoup d’humour, le traitement des personnages est particuliĂšrement rĂ©ussi. Son Ă©volution d’homme Ă  femme se fait difficilement, de mĂȘme que sa dĂ©couverte du plaisir fĂ©minin. Et que dire de sa relation avec son bourreau BĂ©atrice ?

BenoĂźt Feroumont trouve ici un trĂšs bel Ă©quilibre entre l’histoire et son suspense rĂ©el, l’humour et le sexe. Ce dernier est explicite, mais pas vulgaire. L’auteur prend soin de ne pas ĂȘtre exhibitionniste. Ce qui est reprĂ©sentĂ© a toujours un intĂ©rĂȘt et on nage plus en terre d’érotisme que de pornographie. Le tout Ă©moustille quand mĂȘme le lecteur, pour son plus grand plaisir !

Au niveau du dessin, l’aspect cartoon est trĂšs agrĂ©able Ă  lire, convenant parfaitement aux nombreux passages dĂ©calĂ©s et humoristiques. Ce graphisme sait aussi ĂȘtre affriolant, BenoĂźt Feroumont sachant parfaitement jouer des courbes de ses deux personnages. Le tout est expressif et parfaitement mis en valeur par une colorisation adaptĂ©e. Un vrai plaisir pour les yeux. VoilĂ  typiquement un trait qui est au service de son scĂ©nario.

Au final, j’ai Ă©tĂ© particuliĂšrement sĂ©duit par « GisĂšle & BĂ©atrice ». L’histoire ne lit avec plaisir, l’humour est rĂ©ussi et l’aspect coquin donne un sel supplĂ©mentaire Ă  l’ensemble Comme quoi, le marketing avait bien raison : si vous ĂȘtes un adulte coquin, nul doute que ce livre saura vous conquĂ©rir !

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Note : 16/20

L’atelier Mastodonte – Lewis Trondheim, Yoann, Cyril Pedrosa, Alfred, Julien Neel, TĂ©bo & Guillaume Bianco

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Titre : L’atelier Mastodonte
Scénaristes : Alfred, Guillaume Bianco, Julien Neel, Cyril Pedrosa, Tebo, Lewis Trondheim & Yoann
Dessinateurs : Alfred, Guillaume Bianco, Julien Neel, Cyril Pedrosa, Tebo, Lewis Trondheim & Yoann
Parution : Juin 2013


Lorsque je tombe sur un ouvrage de Lewis Trondheim, je suis bien incapable de rĂ©sister Ă  la pulsion de l’achat. Alors lorsqu’il s’associe Ă  d’autres auteurs que j’apprĂ©cie (Neel, Bianco, Yoann, Alfred
), il m’est impossible de ne pas passer Ă  la caisse
 « L’atelier Mastodonte » raconte le quotidien de quelques auteurs de bande-dessinĂ©e rĂ©unis en atelier. Ils dessinent tous des strips sur les anecdotes de l’atelier. Ainsi, il n’est pas rare qu’ils se rĂ©pondent
 PubliĂ©s dans le journal de Spirou, ceux-ci se voient regroupĂ©s dans un ouvrage au format paysage de belle facture. L’écrin est mĂȘme dessinĂ© par Bilal
 Mais alors que donne cet ouvrage rĂ©unissant une vĂ©ritable dream team de la BD ?

Tout dĂ©marre par la volontĂ© de Trondheim d’ouvrir un atelier. Les premiers strips font donc part de cette envie et nous prĂ©sente les auteurs. Ainsi, Guillaume Bianco est intimidĂ© par Lewis Trondheim, Julien Neel se balade avec une marionnette, Cyril Pedrosa souhaite que les auteurs se syndiquent
 Et rapidement s’instaure ce qui fera la force de l’ouvrage : la rĂ©ponse du berger Ă  la bergĂšre ! Ainsi, lorsqu’un auteur se moque d’un autre dans son strip, celui-ci lui rĂ©pond dans le strip suivant. Cela instaure une vraie dynamique. Il me semble d’ailleurs que dans le journal de Spirou, les strips Ă©taient publiĂ©s par deux sur une page. Ceux-ci font chacun une demi-page de huit cases.

Une vraie diversité dans les humours.

La diversitĂ© des humours fait la force de l’ouvrage. MĂȘme si chacun sera plus ou moins sensible Ă  tel ou tel auteur, globalement il y a une ligne directrice qui se dĂ©gage. Comme les auteurs se rĂ©pondent, on reste souvent dans les mĂȘmes humours au final. Et aprĂšs des dĂ©buts plus classiques, les dĂ©lires se dĂ©veloppent et chaque personnage prend une ampleur intĂ©ressante, car son caractĂšre est vu par diffĂ©rents auteurs. Et l’atelier parvient Ă  dĂ©gager de vrais dĂ©lires collectifs (on pense au collectionneur par exemple) qui donne l’impression d’une vraie cohĂ©sion de groupe.

L’autre intĂ©rĂȘt est Ă©videmment la diversitĂ© des graphismes. Tout est assez diffĂ©rent puisque l’on passe de dessins d’humains Ă  de l’animalier
 LĂ  encore, c’est un plaisir de dĂ©couvrir les diffĂ©rentes visions de chacun. Pour ma part, j’aime beaucoup les styles graphiques de beaucoup d’auteurs de cet ouvrage. On notera que de nombreux guests viennent enrichir l’ensemble et pas des moindres : Bouzard, Buchet, Delaf, Feroumont, Frantico, Keramidas, Libon, Nob, Plessix, Sapin, Stan & Vince et VivĂšs. Rien que ça !

Cet « Atelier Mastodonte » est une vĂ©ritable rĂ©ussite. VoilĂ  un exemple Ă  suivre en termes d’ouvrage collectif. Tout est entremĂȘlĂ© et c’est cela qui fait toute la force de ce livre. Plein d’humours diffĂ©rents, du scatologique au plus subtil, il est aussi une source de blagues sur les auteurs et leurs diffĂ©rences. A lire absolument.

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Note : 16/20

Le loup des mers – Riff Reb’s

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Titre : Le loup des mers
ScĂ©nariste : Riff Reb’s
Dessinateur : Riff Reb’s
Parution : Novembre 2012


Les rĂ©cits de piraterie ont toujours exercĂ© une forme de fascination auprĂšs du lectorat. La rudesse des hommes, la nature impitoyable et la mer, Ă  perte de vue. Ainsi, alors que le sujet avait poussĂ© Jack London Ă  Ă©crire un roman sur le sujet, Riff Reb’s s’empare de l’histoire de ce dernier pour la mettre en images. N’ayant pas lu le roman dont il est question, je me garderai de toute comparaison. Le livre, prĂ©sentĂ© sous un format comics, pĂšse pas moins de 130 pages et est publiĂ©e dans la collection Noctambule aux Ă©ditions Soleil.

L’histoire commence alors que Humphrey Van Weyden prend le bateau pour rejoindre l’un des ses amis. L’homme est un gentleman, critique littĂ©raire de mĂ©tier. Seulement, le voyage tourne court suite Ă  une mauvais grain entraĂźnant un naufrage dramatique pour l’homme. Ce dernier est recueilli alors par Loup Larsen, un pirate qui enrĂŽle l’homme de force comme mousse.

Un lien fait de haine et de fascination.

On suit alors la survie d’Humphrey Ă  bord du navire. LĂ -dessus, rien de nouveau sous les tropiques. D’abord trop fragile, il va finir par s’aguerrir, se faire des alliĂ©s et monter dans la hiĂ©rarchie. Son cĂŽtĂ© intellectuel plaĂźt Ă  Loup Larsen qui, sous ses dehors cruels, possĂšde une culture des plus impressionnantes. Un lien se crĂ©e entre les deux hommes, fait de haine et de fascination. Clairement, c’est lĂ -dessus que le livre propose toute sa force. Le sujet est traitĂ© avec subtilitĂ©. Les changements d’attitude des personnages entre eux sont finement amenĂ©s, jusqu’au bout de l’aventure.

LeLoupDesMers2Cependant, outre les relations humaines, on est pris d’empathie pour Humphrey et le vĂ©ritable suspense de l’ouvrage est ici : pourra-t-il se soustraire de Loup Larsen ? Une quĂȘte qui paraĂźt impossible tant le capitaine possĂšde un cĂŽtĂ© surnaturel exacerbĂ© par son charisme. Si bien que le lecteur tombe aussi sous le charme de ce personnage fort et atypique.

La construction de l’ouvrage est basĂ© essentiellement sur une narration omniprĂ©sente qui cite, je le suppose, des passages du livre. On lit donc l’histoire racontĂ©e par Humphrey. Le livre est constituĂ© de dix-sept chapitres agencĂ©s chronologiquement.

Graphiquement, Riff Reb’s frappe trĂšs fort. MĂ©lange de diffĂ©rentes techniques, son graphisme est simplement splendide. Outre ses personnages, aux attitudes fortes, c’est dans la reprĂ©sentation de la mer qu’il explose littĂ©ralement. Plus les scĂšnes semblent difficiles Ă  dessiner, plus elles sont rĂ©ussies. Les tempĂȘtes sont ainsi magistralement rendues. Le tout est colorisĂ© de façon monochrome, chaque chapitre possĂ©dant sa propre couleur. Un choix payant tant l’ouvrage est fort sur ce point-lĂ . Outre la duretĂ© du propos, Riff Reb’s accentue le tout avec un dessin Ă  la fois personnel et puissant. Du grand art.

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Si le sujet du « Loup des mers » n’est pas vraiment original, il faut avouer qu’il est traitĂ© ici avec beaucoup d’intensitĂ©. DotĂ© d’une narration fluide et d’un graphisme splendide, on dĂ©vore ce livre de la premiĂšre Ă  la derniĂšre page, se prenant rĂ©guliĂšrement des claques devant le talent de l’auteur. A lire absolument !

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Note : 18/20

Chaos Team 1.1 – Ronan Toulhoat & Vincent Brugeas

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Titre : Chaos Team 1.1
Scénariste : Vincent Brugeas
Dessinateur : Ronan Toulhoat
Parution : FĂ©vrier 2013


« Chaos Team 1.1. » est le premier Ă©pisode d’une saga nĂ©e de la collaboration de Vincent Brugeas et Ronan Toulhoat. J’ai dĂ©couvert ce duo en lisant « Block 109 ». Cette uchronie date d’il y a trois ans. J’ai Ă©tĂ© conquis par le travail des deux auteurs et par la qualitĂ© de l’univers qu’ils avaient crĂ©Ă©. C’est donc avec une curiositĂ© forte que je me suis plongĂ© dans leur derniĂšre production sorti en librairie le sept fĂ©vrier dernier. Son format se rapproche de celui de la sĂ©rie prĂ©cĂ©dente. EditĂ© chez Akileos, sa taille s’approche davantage de celle d’un grand roman. L’histoire se dĂ©roule sur environ cent vingt pages. La narration se conclut par un texte du scĂ©nariste et par quelques pages de recherches graphiques du dessinateur. La couverture nous prĂ©sente un personnage charismatique. Il est grand, musclĂ©, expĂ©rimentĂ©. Sa barbe compense sa calvitie. Il tient fermement une hache dans une ville qui semble dĂ©vastĂ©e. L’atmosphĂšre dĂ©gagĂ©e s’accommode parfaitement avec le terme de Chaos Ă©voquĂ©e dans le titre.

ChaosTeam1cLa quatriĂšme de couverture nous prĂ©sente le synopsis suivant : « PrĂšs de quatre ans aprĂšs une frappe extraterrestre qui a dĂ©truit la majoritĂ© des forces armĂ©es et mis Ă  genoux les gouvernements des diffĂ©rentes Nations du globe. La Terre n’est plus qu’un vaste terrain de jeux pour ses nouveaux maĂźtres, anciens mafieux, criminels ou autres fanatiques religieux. Ces derniers, devenus dĂ©sormais de vĂ©ritables seigneurs de la guerre font souvent appel Ă  une entreprise de mercenaires et d’armement, ayant survĂ©cu Ă  l’invasion et Ă  mĂȘme de fournir hommes, armes et munitions, voire produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ© : Blackfire Industries. C’est dans cet environnement de chaos et de guerre que nous dĂ©couvrons la Chaos Team, une unitĂ© de mercenaires liĂ©e Ă  Blackfire et dirigĂ©e par John Clem, en mission de protection Ă  Grenade, auprĂšs du nouveau Pape. »

Un puzzle dont les auteurs nous dispensent les piÚces de maniÚre apparemment aléatoire.

Toute la chronologie de l’histoire se construit autour d’une annĂ©e zĂ©ro correspondant Ă  la date de l’invasion extraterrestre. Les diffĂ©rents Ă©vĂ©nements qui nous sont contĂ©s sont repĂ©rĂ©s par rapport Ă  ce moment. D’ailleurs la narration n’est pas chronologique. Elle se dĂ©coupe en chapitres qui peuvent ĂȘtre antĂ©rieurs ou postĂ©rieurs au « moment repĂšre ». L’histoire ressemble donc Ă  un puzzle dont les auteurs nous dispensent les piĂšces de maniĂšre apparemment alĂ©atoires. Cela amĂšne une densitĂ© forte Ă  la lecture. Le dosage scĂ©naristique est bien maĂźtrisĂ©.

ChaosTeam1bChaque chapitre est prĂ©cĂ©dĂ© d’une prĂ©sentation de son casting. La premiĂšre page nous liste les diffĂ©rents protagonistes impliquĂ©s dans l’intrigue. Tous font quasiment partie de la Chaos Team. Les aventures de ce groupe hĂ©tĂ©roclite servent de fil conducteur Ă  notre dĂ©couverte de cet univers. Les personnages sont Ă©videmment fortement charismatiques et intrigants. Du fait de leur « emploi », on se doute qu’ils ne sont pas comme « monsieur tout le monde ». Ils possĂšdent nĂ©cessairement des capacitĂ©s largement au-dessus de la moyenne. De plus, leurs « placards » sont nĂ©cessairement plein de « cadavres ». Ce sont ces zones d’ombre qui intriguent. Leur cĂŽtĂ© mercenaire fait qu’on n’arrive pas Ă  ressentir une empathie absolue Ă  l’encontre de tout ce beau monde. Leur Ă©thique et leurs ambitions nous interrogent.

Cette nouvelle histoire est particuliĂšrement mise en valeur par le dessin de Ronan Toulhoat. J’étais dĂ©jĂ  tombĂ© sous le charme en lisant « Block 109 ». Il possĂšde un trait assez unique qui gĂ©nĂšre une atmosphĂšre forte et prenante. Les personnages sont suffisamment variĂ©s et dĂ©taillĂ©s pour qu’on n’ait aucun mal Ă  les diffĂ©rencier et Ă  se les approprier. Le travail sur les couleurs est Ă©galement de grande qualitĂ© et ravira les adeptes du genre. Que ce soit les scĂšnes intimistes ou les plans beaucoup plus larges, tout est bien construit.

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En conclusion, cet ouvrage est trĂšs rĂ©ussi. Il se lit avec appĂ©tit. D’ailleurs je m’y plongerai Ă  nouveau avec plaisir. Cela me permettrait de profiter davantage des diffĂ©rents personnages. La suite de ce bouquin ne devrait pas tarder. Je l’attends avec une certaine impatience. Mais cela est une autre histoire
 

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Note : 17/20

La ClĂŽture – Fabcaro

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Titre : La ClĂŽture
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : Fabcaro
Parution : Avril 2009


« 6 pieds sous terre » est une maison d’édition qui cherche avant tout Ă  donner de la libertĂ© aux auteurs. Dans « La clĂŽture », Fabcaro profite de cette libertĂ© pour dĂ©livrer un rĂ©cit complĂštement absurde et expĂ©rimental. Difficile Ă  dĂ©finir ce qu’est « La clĂŽture ». Avant tout, cet ouvrage dĂ©crit la difficultĂ© pour un auteur (en l’occurrence, Fabcaro) d’écrire des scĂ©narios quand on est empĂȘtrĂ© dans le quotidien (avec notamment une clĂŽture Ă  rĂ©parer).

Pourtant dans les premiĂšres pages, point de prĂ©sence autobiographique de l’auteur. On dĂ©marre le tout sur des personnages fictionnels. TrĂšs intriguĂ© par le dĂ©but de l’histoire, le lecteur est rapidement rassurĂ© lorsque la compagne de Fabcaro dĂ©clare, en lisant ces mĂȘmes pages : « Mais
 C’est totalement incohĂ©rent
 On comprend rien du tout  ». L’auteur dĂ©clare alors qu’il est au bord de la dĂ©pression et qu’il n’arrive pas Ă  scĂ©nariser avec tout ce qu’il a Ă  faire Ă  cĂŽté 

Les scĂšnes se succĂšdent sans lien apparent entre elles.

Et justement, malgrĂ© tout cela, Fabcaro va pourtant nous scĂ©nariser une histoire entre Sonia et Pierre. La premiĂšre ne rencontre que des losers et voudrait trouver quelqu’un. Le second cherche avant tout un emploi mais semble complĂštement incompĂ©tent pour cela. Ils finiront quand bien mĂȘme par se rencontrer aprĂšs de nombreuses pĂ©ripĂ©ties. Laissant libre court Ă  son imagination, les scĂšnes se succĂšdent sans lien apparent entre elles.

lacloture1Au fur et Ă  mesure des pages, Fabcaro s’intĂšgre dans sa propre fiction, se mettant alors Ă  parler avec ses « acteurs » de ses Ă©tats d’ñme. Pendant ce temps, l’histoire continue
 Cette partie autobiographique, sous une apparence classique, est toujours agrĂ©ablement mise en scĂšne par Fabcaro. Outre le comique absurde de rĂ©pĂ©tition, on retrouve l’auteur devant ses contradictions : faire un ouvrage original au risque d’en « vendre huit ». La panne d’inspiration reste Ă©videmment le principal sujet de l’ouvrage, puisqu’il est la raison du bordel incroyable qu’est « La clĂŽture » : ne sachant qu’écrire, Fabcaro fait n’importe quoi, essayant des choses diverses et variĂ©es. Evidemment, les derniĂšres pages amĂšnent un Ă©claircissement salvateur et « La clĂŽture » prend alors tout son sens.

MalgrĂ© la confusion volontaire du rĂ©cit, on rit beaucoup dans cet ouvrage. Les dialogues, les situations absurdes, le mĂ©lange des genres
 Fabcaro maĂźtrise son humour si particulier et personnel avec maestria. Qu’importe le personnage ou le lieu, l’auteur parvient Ă  nous arracher des rires avec un sens du contre-pied incroyable.

Au niveau du dessin, j’avoue ĂȘtre trĂšs fan du trait de Fabcaro. Ses personnages aux longs cous sont trĂšs expressifs. Mention spĂ©ciale aux silences, parfaitement retranscrits graphiquement, souvent par une rĂ©pĂ©tition maĂźtrisĂ©e et intelligente de la case.

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« La ClĂŽture » est une Ɠuvre exigeante. La feuilleter dans une librairie ou une bibliothĂšque risque fort de faire hĂ©siter le lecteur. DotĂ© d’un humour efficace et d’une mise en abĂźme originale, cette bande-dessinĂ©e, trĂšs expĂ©rimentale, n’en est pas moins avant tout une vĂ©ritable histoire avec ses personnages, ses retournements de situation. Un monument de l’absurde.

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Note : 18/20

-20% sur l’esprit de la forĂȘt – Fabcaro

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Titre : -20% sur l’Esprit de la ForĂȘt
Scénariste : Fabcaro
Dessinateur : Fabcaro
Parution : Septembre 2011


Auteur actuellement trĂšs prolifique, Fabcaro a dĂ©veloppĂ© ses Ɠuvres sur la base d’un humour absurde et dĂ©calĂ©. Outre sa sĂ©rie d’ouvrages autobiographiques, l’auteur a Ă©crit « La clĂŽture », une bande-dessinĂ©e expĂ©rimentale oĂč personnages se mĂȘlent dans un joyeux bordel qui ne se comprend qu’une fois les derniĂšres pages lues. Fabcaro rĂ©cidive dans le mĂȘme style avec « -20% sur l’esprit de la forĂȘt », paru chez « 6 pieds sous terre », une maison spĂ©cialisĂ©e pour les expĂ©rimentations.

« -20% sur l’esprit de la forĂȘt » est difficile Ă  dĂ©finir. Sous couvert d’un bordel sans nom difficilement comprĂ©hensible au dĂ©part, c’est avant tout une Ɠuvre pleine d’humour et de tendresse sur la fin de l’enfance. On retrouve ainsi un Fabcaro qui joue aux cowboys. Suite Ă  une mauvaise imitation de Jean-Pierre Bacri, il se retrouve poursuivi par toutes les polices de l’état. Il faut dire qu’il a battu son adversaire (un playmobil) dans un duel Ă  mort oĂč il lui avait lancĂ© une feuille…

Incompréhensible et absurde au départ.

Un minimum d’ouverture d’esprit sera nĂ©cessaire pour apprĂ©cier cette BD ! ComplĂštement incomprĂ©hensible et absurde au dĂ©part, elle prend peu Ă  peu du sens. Ainsi, Fabcaro explique que quand il jouait dans les escaliers (avec ses playmobils justement !), il entendait en mĂȘme temps ce qui passait Ă  la tĂ©lĂ©vision. RĂ©sultat, quoi de plus normal que d’intĂ©grer des scĂšnes des Ă©missions de tĂ©lĂ© en plein milieu de l’histoire ?

20-surlespritdelaforet1Heureusement, on est rapidement happĂ© par l’humour ravageur de l’auteur. Fabcaro manie l’absurde comme peu en sont capables et fait mouche sans peine. MalgrĂ© un dĂ©calage souvent Ă©norme par rapport Ă  la trame principale, il parvient quand mĂȘme Ă  faire rire. Si bien qu’on s’accroche rapidement sans trop d’efforts jusqu’à ce que tout prenne sens. Car sens il y a ! Au fur et Ă  mesure, on dĂ©couvre un Fabcaro dont le mĂ©tier est incompris, empĂȘtrĂ© dans un quotidien trĂšs loin de ses idĂ©aux. Et quand les derniĂšres pages arrivent, on se retrouve Ă©mu, touchĂ© par cette histoire qui ne peut que nous rappeler notre propre enfance perdue. AprĂšs un ouvrage foutraque plein d’humour absurde, l’auteur nous donne une dose de nostalgie incroyable. D’un coup. Du grand art !

Le dessin de Fabcaro, trĂšs relĂąchĂ© et expressif est toujours un rĂ©gal. Il renforce sans peine son humour. Son noir et blanc est trĂšs Ă©lĂ©gant et bien plus riche qu’il peut paraĂźtre au premier abord. L’auteur s’autorise mĂȘme quelques digressions bienvenues.

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« -20% sur l’esprit de la forĂȘt » est une Ɠuvre exigeante et difficile d’accĂšs. Clairement expĂ©rimentale, elle n’oublie pas pour autant son but premier. DotĂ©e d’un vrai message, bourrĂ©e d’humour et Ă  l’impact Ă©motionnel insoupçonnĂ©, elle prouve l’immense talent de Fabcaro, capable de faire de ses ouvrages les moins accessibles les plus passionnants. Difficile en tout cas de refermer cette BD sans y repenser Ă  de nombreuses reprises. Et vous, de combien avez-vous bradĂ© votre esprit de la forĂȘt ?

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Note : 19/20

Kraa, T2 : L’Ombre de l’Aigle – BenoĂźt Sokal

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Titre : Kraa, T2 : L’Ombre de l’Aigle
Scénariste : Benoßt Sokal
Dessinateur : BenoĂźt Sokal
Parution : Janvier 2012


BenoĂźt Sokal, auteur de la sĂ©rie « Canardo », avait surpris son monde avec la sortie du premier tome de « Kraa » oĂč son talent de dessinateur explosait dans une histoire totalement dĂ©nuĂ©e d’humour et froide comme la lame d’un couteau. La sortie du deuxiĂšme tome de ce triptyque, « L’ombre de l’aigle » confirme la grande qualitĂ© de cette sĂ©rie.

Dans un coin reculĂ© de la planĂšte, entre Alaska et SibĂ©rie, un territoire devient la source de convoitises. Un relatif rĂ©chauffement local et des minerais prĂ©cieux dans le sous-sol attirent tous les aventuriers avides de richesses rapidement gagnĂ©es. Mais ce n’est pas si simple. Dans la ville nouvelle, tout va trop vite. L’hiver est rude, rendant le travail impossible. Et la nature reste incontrĂŽlĂ©e. DĂ©marrent alors de grands travaux destinĂ©s Ă  Ă©riger un barrage Ă  la sortie d’une vallĂ©e encaissĂ©e. Ainsi, les inondations issues du dĂ©gel seront contrĂŽlĂ©es et de l’électricitĂ© sera produite en grosse quantitĂ©. Dans cette vallĂ©e perdue vivait une tribu indienne, massacrĂ©e depuis. Et surtout, il y a cet aigle gĂ©ant, vĂ©nĂ©rĂ© auparavant comme un dieu, que la civilisation veut faire disparaĂźtre


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Le premier tome de « Kraa » Ă©tait avant tout basĂ© sur la relation entre le garçon et l’aigle. Ici, l’hiver a continuĂ© son processus d’assimilation et le jeune autochtone est devenu complĂštement sauvage. Ainsi, le couple fondateur de la sĂ©rie est trĂšs en retrait, laissant la place Ă  la jeune infirmiĂšre Ă  peine entrevue dans le premier tome. Celle-ci va devoir se rendre dans la vallĂ©e, sur les lieux des travaux, Ă  ses risques et pĂ©rils


Plus que l’aigle, ce sont les vautours qui sont Ă  l’honneur.

Curieux choix de Sokal de mettre de cĂŽtĂ© son aigle dans cette partie. Cependant, cette dĂ©cision n’en est pas mauvaise pour autant. La galerie des personnages s’étoffe et se fait plus pertinente. Car plus que l’aigle, ce sont les vautours qui sont Ă  l’honneur. Le vĂ©ritable sujet est cette ruĂ©e vers l’or et ses consĂ©quences. Et c’est remarquablement traitĂ©. Les dĂ©sillusions, la pauvretĂ©, la misĂšre, les prises de risques
 On s’en bien que ce monde en devenir ne peut que s’écrouler. La duretĂ© de cet univers est omniprĂ©sente. La violence est partout, tout le temps. Le fait de dĂ©marrer ce tome dans la ville donne d’autant plus l’impression que la vallĂ©e est tout sauf accueillante. Et pourtant, cette ville est dĂ©jĂ  sacrĂ©ment dĂ©sagrĂ©able pour ses habitants


La narration reste efficace mais plus classique. Les parties narratives, donnĂ©es par l’aigle, sont plus rares alors qu’elles Ă©taient vraiment la pierre angulaire du premier tome. Tout passe par l’action et le dialogue dĂ©sormais.

Le dessin de Sokal, en couleur directe, est une nouvelle fois splendide. Outre les paysages magnifiques qui sont une vĂ©ritable invitation au voyage, les personnages ont de vraies trognes, donnant beaucoup de personnalitĂ© Ă  l’ensemble. L’auteur semble trĂšs Ă  l’aise pour tout et produit Ă  coup sĂ»r l’une des bande-dessinĂ©es les plus belles de l’annĂ©e.

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Avec « Kraa », Sokal a crĂ©Ă© un monde original, dur et implacable. Passionnant de bout en bout, dotĂ© d’un vrai suspense, il prend le temps de bĂątir toute une sĂ©rie de personnages et de problĂ©matiques avant le troisiĂšme tome qui clora la sĂ©rie. Difficile encore de savoir oĂč il veut vraiment en venir, mais « Kraa » s’annonce d’ors et dĂ©jĂ  comme un chef d’Ɠuvre.

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Note : 18/20

Kraa, T1 : La VallĂ©e Perdue – BenoĂźt Sokal

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Titre : Kraa, T1 : La Vallée Perdue
Dessinateur : Benoßt Sokal
Scénariste : Benoßt Sokal
Parution : Septembre 2010


 J’ai dĂ©couvert par hasard le dernier album de BenoĂźt Sokal, intitulĂ© « Kraa » et sous-titrĂ©e « La vallĂ©e perdue ». Sokal s’est fait connaĂźtre notamment par la sĂ©rie Canardo. TrĂšs typĂ©e franco-belge (tout en rondeur, en traits noirs et en couleurs vives), cette sĂ©rie vaut surtout pour son humour. Avec « Kraa », on change complĂštement d’univers.

L’histoire de « Kraa » se situe entre la SibĂ©rieet l’Alaska, dans une vallĂ©e encaissĂ©e. Suite Ă  un rĂ©chauffement climatique, cette vallĂ©e devient Ă©conomiquement exploitable. L’homme moderne vient alors s’y installer, rĂȘvant de richesses. Or, la vallĂ©e est habitĂ©e par une tribu indienne, oĂč dĂ©jĂ  l’influence du colonisateur se fait sentir. Cependant, les indiens vivent en harmonie avec la nature qui les entoure. Pour l’instant


kraa1bKraa est le nom d’un aigle. Il est l’un des deux hĂ©ros de l’album. En effet, il crĂ©era un lien particulier avec Yuma, un jeune indien. Ensemble, ils reprĂ©sentent ce que le nouveau monde ne veut plus : la nature sauvage et les autochtones, freins Ă  l’expansion Ă©conomique et industrielle.

De véritables tableaux.

Ce qui marque dĂšs les premiĂšres pages, c’est le dessin. Il est simplement magnifique d’un bout Ă  l’autre. On ne retrouve pas du tout le dessinateur de Canardo ! Les traits sont moins appuyĂ©s, les couleurs moins vives et le tout est simplement superbe. Mention spĂ©cial aux paysages vides et au personnage de l’aigle, plus vrai que nature. On retrouve un peu les ambiances et les teintes d’albums de Sokal plus anciens comme « L’Amerzone » ou « La Mort Douce ». Rien que pour son dessin, cet album vaut le coup. Certaines cases sont de vĂ©ritables tableaux.

Heureusement, l’histoire n’est pas en reste. La relation entre Kraa et Yuma est remarquablement rendu par une narration diffĂ©rente. Ainsi, Kraa est le point de vue du narrateur, la « voix-off » de l’album. Ses discours de dĂ©part sont particuliĂšrement cruels, mĂ©lange d’instinct et de cruautĂ©. En cela, il n’est pas particuliĂšrement sympathique. Bien sĂ»r, son lien avec Yuma le rendra beaucoup plus « humain ». Cette Ă©volution est loin d’ĂȘtre immĂ©diate. En cela, elle est rĂ©ussie. Yuma est l’opposĂ© de Kraa. TrĂšs attachĂ© aux valeurs traditionnelles indiennes, il est trĂšs gĂ©nĂ©reux. Une perle d’humanitĂ© dans un monde qui ne l’est pas du tout.

Sokal prend le temps de poser son sujet. Ainsi, ce tome qui introduit les protagonistes fait 94 pages. Cela permet aux personnages d’évoluer Ă  un rythme cohĂ©rent. De plus, les cases sont souvent grandes pour permettre Ă  son dessin de s’exprimer pleinement.

Au final, cet album est une excellente surprise. J’ai eu le plaisir de retrouver les ambiances malsaines de fin du monde de l’Amerzone traitĂ©es avec un dessin magnifique. Je ne peux Ă©videmment que vous le conseiller et attendre avec impatience le prochain tome !

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Note 17/20

Le singe de Hartlepool – Wilfrid Lupano & JĂ©rĂ©mie Moreau

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Titre : Le singe de Hartlepool
Scénariste : Wilfrid Lupano
Dessinateur : Jérémie Moreau
Parution : Septembre 2012


Pendant les guerres napolĂ©oniennes, un navire français navigue prĂšs des cĂŽtes anglaises. A bord, un singe habillĂ© d’un uniforme français fait office de mascotte. La haine de l’anglais est alors Ă  son comble. Ainsi, le mousse, osant chantonner une mĂ©lodie en anglais, se voit jetĂ© par-dessus bord
 Quelques instants plus tard, c’est tout le navire qui sombre suite Ă  un orage soudain. Seul rescapé : le singe. Celui-ci va se retrouver sur les cĂŽtes anglaises, prĂšs d’un village nommĂ© Hartlepool. Les habitants vont alors dĂ©cider de pendre ce Français.

lesingedehartlepool1InspirĂ© d’une histoire vraie (ou du moins d’une lĂ©gende, difficile d’ĂȘtre certain de la vĂ©racitĂ© des faits), « Le singe de Hartlepool » est une vĂ©ritable fable contre la bĂȘtise humain en gĂ©nĂ©ral et le nationalisme en particulier. N’ayant jamais vu un Français de leurs vies, les habitants vont trouver Ă  se convaincre que ce singe est un ĂȘtre humain français. Quitte Ă  faire appel Ă  un ancien combattant sĂ©nile pour trouver des arguments


Les auteurs, Wilfrid Lupano au scĂ©nario et JĂ©rĂ©mie Moreau au dessin, ont dĂ©cidĂ© de jouer le jeu Ă  fond. Ici, c’est une fable. La plupart des gens (ici, de vĂ©ritables ploucs) sont complĂštement stupides et haineux. Seuls certains personnages parviennent Ă  sortir de cet Ă©tat de fait : certains enfants et le mĂ©decin, symbole de culture et donc de tolĂ©rance. Clairement, les auteurs font le choix d’une morale claire et affirmĂ©e et c’est tant mieux.

Le ton de l’album est clairement cynique. L’humour y est fortement prĂ©sent malgrĂ© l’aspect dramatique de l’histoire. On rit souvent, voire mĂȘme de bon cƓur, devant les remarques des villageois. On rit de la bĂȘtise humaine et Ă  la fois, on s’en dĂ©sespĂšre.

“Bien qu’il ne parle pas, le singe est le personnage le plus complexe de l’histoire.”

Notre empathie est souvent requise dĂšs que le singe apparaĂźt. Victime innocente, subissant le courroux d’animaux se revendiquant intelligents, il est le personnage le plus complexe de l’histoire, bien qu’il ne parle pas. Et en cela, c’est la grande rĂ©ussite de l’album. Les auteurs ont parfaitement su retranscrire la dualitĂ© des chimpanzĂ©s. PoussĂ© dans ses retranchements, le singe est bestial, il mord jusqu’au sang, griffe, bref, lutte pour sa vie. Mais il est Ă©galement parfois terriblement humain avec son regard perdu dans le vide. Éternelle victime de l’homme (enlevĂ© Ă  sa famille, puis pendu en Angleterre), il paraĂźt pourtant bien plus humain que ses bourreaux.

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Outre une narration et un ton captivants, il faut avouer que le dessin est l’un des points forts de cet album. J’ai pleinement accrochĂ© au graphisme personnel et expressif de JĂ©rĂ©mie Moreau. Il est en parfaite adĂ©quation avec le propos, sachant se montrer expressif dans les moments les plus ridicules ou plus intimiste dans les passages les plus empathiques. Pour un premier album, c’est d’autant plus impressionnant. Un dessinateur que je suivrai avidement dĂ©sormais.

« Le singe de Hartlepool » est un one-shot de qualitĂ©. MaĂźtrisĂ© de bout en bout sur tous les points, il maĂźtrise le mĂ©lange des genres avec brio. A la fois Ă©cƓurĂ©, amusĂ© et attristĂ©, le lecteur repart avec le plein d’émotion ! 

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Note : 17/20

Pascal Brutal, T4 : Le roi des hommes – Riad Sattouf

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Titre : Pascal Brutal, T4 : Le roi des hommes
Scénariste : Riad Sattouf
Dessinateur : Riad Sattouf
Parution : Septembre 2014


Si Riad Sattouf fait beaucoup parler de lui ces derniĂšres semaines avec son livre « L’arabe du futur », c’est bien la sortie du quatriĂšme tome de « Pascal Brutal » qui me mettait dans tous mes Ă©tats. RĂ©compensĂ©e Ă  AngoulĂȘme pour son troisiĂšme tome, cette sĂ©rie est un must-have d’humour. Ce nouvel opus, intitulĂ© « Le roi des hommes », nous permet de dĂ©couvrir un peu plus la vie de Pascal, l’homme le plus viril du monde. Le tout est publiĂ© chez Fluide Glacial.

Le monde de Pascal Brutal est assez original
 AprĂšs l’accession d’Alain Madelin au pouvoir, la France dĂ©cline et sombre dans un chaos intellectuel et social. Riad Sattouf crĂ©e une vision de notre future trĂšs pessimiste et pourtant si proche de notre sociĂ©tĂ© actuelle. C’est la complĂšte dĂ©cadence : violence, sexe et QI nĂ©gatif s’y cĂŽtoient en permanence. Et au milieu de tout cela, Pascal Brutal


Ce bon vieux Pascal, c’est la virilitĂ© Ă  l’état pur : des gros muscles, une grosses motos et des femmes qui le veulent tout de suite et maintenant. Mais surtout, c’est une homosexualitĂ© refoulĂ©e qui ressort rĂ©guliĂšrement


La voix off, point fort de la série

Ainsi, tour Ă  tour, Pascal va essayer de pĂ©cho dans la ville des gays, ĂȘtre star du rap, joueur de foot, etc. Riad Sattouf s’amuse Ă  intĂ©grer l’Homme dans toutes les situations possibles, mais toujours dans sa France façon Madelin. C’est d’ailleurs la description de cet univers ultralibĂ©rale, par la voix off, qui fait tout le sel de cette bande-dessinĂ©e. Au-delĂ  des situations, Riad Sattouf s’amuse Ă  dĂ©crire un monde improbable. Cerise sur le gĂąteau : un certain Riad Sattouf a permis au monde arabe de devenir la sociĂ©tĂ© la plus avancĂ©e et la plus progressiste (dans le tome 3). Nous retrouvons ainsi un stade Riad Sattouf construit Ă  base de sacs plastiques recyclĂ©s


Si on sourit souvent devant la vie de Pascal, on rit aussi. Cette sĂ©rie possĂšde une telle identitĂ© et une telle densitĂ© que l’on a du mal Ă  rester indiffĂ©rent. Le lien avec « La vie secrĂšte des jeunes » est Ă©vident. Riad Sattouf sait observer ses contemporains et projettent le tout dans l’avenir. Et ce n’est pas rose…

 Le dessin, simple en apparence, est parfaitement adapté. Les expressions du visage de Pascal sont complexes et participent à notre hilarité. Bref, du lourd.

Avec son quatriĂšme opus, « Pascal Brutal » ne faiblit pas. L’univers et le personnage crĂ©Ă©s par Riad Sattouf possĂšdent une vĂ©ritable originalitĂ© et l’auteur sait les utiliser sans se rĂ©pĂ©ter. Une des grandes bande-dessinĂ©es d’humour de ces derniĂšres annĂ©es, dans la plus pure tradition Fluide Glacial !

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17/20