Secrets, L’AngĂ©lus, T2 – Frank Giroud & JosĂ© Homs

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Titre : Secrets, L’AngĂ©lus, T2
Scénariste : Frank Giroud
Dessinateur : José Homs
Parution : Septembre 2011


Les diptyques se dĂ©veloppent en bande-dessinĂ©e. Et si parfois on ne comprend pas trop l’intĂ©rĂȘt de deux tomes, Ă  d’autres moments, ils prennent tout leur sens. Dans « L’angĂ©lus » (de la collection « Secrets » chez Dupuis), le premier tome se terminait sur une bascule. AprĂšs un livre avant tout destinĂ© Ă  percer le secret du tableau de l’AngĂ©lus, la suite se concentre sur le secret de famille de Clovis Ă  proprement parler. Ce deuxiĂšme opus de 56 pages clĂŽt donc l’enquĂȘte de ce quadra en pleine mutation.

À l’image de la couverture, Clovis change et s’épanouit en mĂȘme tant que son obsession grandit. Une fois l’histoire de l’AngĂ©lus et de Dali dĂ©voilĂ©e, reste Ă  savoir pourquoi Clovis y trouve une rĂ©sonance. Mais l’homme a dĂ©jĂ  beaucoup changĂ©. Physiquement d’abord : il a les cheveux hirsutes et la barbe qui foisonne. Il est bien loin de l’homme que l’on avait dĂ©couvert au dĂ©part
 D’ailleurs, il vit dans un camping car qu’il a repeint de couleurs vives. Clovis est en pleine crise identitaire, conjugale et existentielle !

Une crise identitaire, conjugale et existentielle.

LAngelus2bCette mutation de Clovis est particuliĂšrement rĂ©ussie, car elle se fait au fur et Ă  mesure des pages. Elle est remarquable de cohĂ©rence. Les rĂ©vĂ©lations familiales sont moins originales, mais leur parallĂšle avec le tableau de Millet leur donne un intĂ©rĂȘt certain. Mais au-delĂ  du secret, c’est bien de la renaissance d’un homme dont ce diptyque traite.

Le scĂ©nario de Giroud reste remarquablement maĂźtrisĂ©. Dans ce polar aux enjeux finalement assez limitĂ©s, il instille un suspense en tenant bien son rythme en main. Les rĂ©vĂ©lations s’égrĂšnent au fur et Ă  mesure, sans excĂšs de dĂ©ballage final.

Le dessin deHoms est toujours aussi impressionnant : personnel et puissant. Ses personnages sont redoutables d’expressivitĂ© sans tomber dans l’excĂšs. Les couleurs sont toujours autant au diapason, imposant les ambiances Ă  la force de palettes restreintes. Le dĂ©coupage est au mĂȘme niveau, parvenant Ă  diversifier les plans mĂȘme quand les personnages passent deux pages Ă  discuter. Du beau travail !

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Ce diptyque se lit avec plaisir, d’une traite, et le lecteur a du mal Ă  en sortir. DotĂ© d’un scĂ©nario bien menĂ© et bien rythmĂ©, l’histoire est sublimĂ©e par le trait de Homs. Ce deuxiĂšme tome confirme ainsi tout le bien que l’on pouvait penser du premier. Une belle dĂ©couverte !

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Note : 17/20

Secrets, L’AngĂ©lus, T1 : Frank Giroud & JosĂ© Homs

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Titre : Secrets, L’AngĂ©lus, T1
Scénariste : Frank Giroud
Dessinateur : José Homs
Parution : Novembre 2011


La collection (sĂ©rie ?) « Secrets » publiĂ©e chez Dupuis propose neuf histoire comportant « des secrets honteux ou redoutables, enfouis de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration au sein de chaque famille. ». C’est au diptyque rĂ©alisĂ© par Homs (au dessin) et Giroud (au scĂ©nario) que l’on s’intĂ©resse aujourd’hui. IntitulĂ© « L’AngĂ©lus », il prend comme point de dĂ©part le cĂ©lĂšbre tableau de Millet. Clovis, le dĂ©couvrant au MusĂ©e d’Orsay, est bouleversĂ©. Mais pourquoi ? Commence alors une obsession qui va le sortir de son quotidien morne et triste. Chaque tome comporte 56 pages, ce qui fait un diptyque bien fourni.

LAngelus1cCe premier tome sert avant tout Ă  poser les jalons de l’histoire. Nous avons d’abord la vie de Clovis. Vivant dans le village qui l’a vu naĂźtre, il exerce un mĂ©tier qui ne le passionne guĂšre et supporte la vie de famille en se faisant marcher dessus par son aĂźnĂ© en pleine crise d’adolescence. PerturbĂ© par le tableau de Millet, il commence des recherches sur l’histoire de ce tableau. Le fait qu’il ne sache pas utiliser internet (une honte pour son fils), fait qu’il y perd beaucoup de temps. Au fur et Ă  mesure que l’obsession grandit, sa vie se dĂ©lite et Clovis tout autant.

Une obsession qui grandit, un homme qui change.

À cĂŽtĂ© de l’humain, l’histoire du tableau se dĂ©voile. Ce premier tome lui donne beaucoup d’importance, puisque c’est ce secret que l’on cherche avant tout Ă  dĂ©terrer. Le tout est distillĂ© avec parcimonie et si vous ne connaissiez pas l’histoire, le tout est plein de surprise. Le diptyque prend alors tout son sens : le premier tome s’attarde sur le tableau, le deuxiĂšme tome permettra d’expliquer la rĂ©sonance entre cette histoire et celle, plus personnelle, de Clovis. MĂȘme si le mystĂšre en soit n’est pas une grande rĂ©vĂ©lation, elle fait son effet. Clovis n’y connait rien Ă  l’art et on sourit parfois Ă  sa naĂŻvetĂ©.

LAngelus1bLes auteurs utilisent parfaitement les 56 pages pour poser l’intrigue. MĂȘme si les personnages sont un peu caricaturaux (la prof d’arts plastiques et le cĂŽtĂ© « village de province » en gĂ©nĂ©ral), le tout fonctionne trĂšs bien. Tout semble cohĂ©rent et naturel et les relations entre eux sont crĂ©dibles. Ainsi la professeur et Clovis semblent assez proches d’entamer une relation et l’ambiguĂŻtĂ© persiste sans que rien ne vienne vraiment.

Le suspense du livre est rĂ©el : on ne sait pas vraiment oĂč nous mĂšnent les auteurs. En cela, le scĂ©nario est remarquablement construit, tout en finesse et avec un rythme parfaitement maĂźtrisĂ©. Le dĂ©coupage n’est pas en reste avec une vraie densitĂ©. Ce premier tome ne se contente pas de poser l’intrigue, il la fait avancer.

Concernant le dessin, Homs dĂ©veloppe un trait entre rĂ©alisme et semi-rĂ©alisme de toute beautĂ©. Ses personnages sont remarquablement croquĂ©s (d’ailleurs, on croquerait bien la jolie prof d’arts plastiques), bien identifiĂ©s. On n’est pas loin de la caricature, mais les expressions sont pleine de justesse. La mise en couleur sublime d’autant plus l’ouvrage en posant des atmosphĂšres aux palettes rĂ©duites. Difficile de rester indiffĂ©rent ! Cela m’a donnĂ© plus qu’envie de dĂ©couvrir les autres ouvrages d’Homs tant son trait m’a sĂ©duit.

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Cet « AngĂ©lus » est une vĂ©ritable surprise pour moi. MĂȘme si les amateurs d’art tiqueront devant le « mystĂšre Millet » (dĂ©jĂ  bien Ă©ventĂ© quand mĂȘme), on ne peut qu’ĂȘtre admiratif devant une telle maĂźtrise de la bande-dessinĂ©e. Entre la gestion du rythme, des personnages, du dĂ©coupage, du dessin et de la couleur, c’est un sans faute. À lire sans plus tarder !

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Note : 17/20

Dans l’atelier de Fournier – Nicoby & Joub

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Titre : Dans l’atelier de Fournier
Scénario : Joub & Nicoby
Dessin : Nicoby
Parution : Mars 2013


A l’occasion des 75 ans de Spirou, de nombreux livres sortent cette annĂ©e pour tĂ©moigner de cet anniversaire. Ainsi est paru aux Ă©ditions Dupuis (Ă©videmment !) « Dans l’atelier de Fournier » qui raconte la rencontre entre Nicoby, Joub et Fournier. Les deux premiers, fans du troisiĂšme, vont le voir chez lui afin qu’il leur narre son histoire, de ses dĂ©buts laborieux jusqu’aux derniers projets, en passant bien sĂ»r par les annĂ©es Spirou.

Mieux vaut connaĂźtre un minimum l’Ɠuvre de Fournier pour apprĂ©cier pleinement cet ouvrage. Celui qui est connu pour avoir pris « Spirou » Ă  la suite de Franquin a Ă©videmment eu d’autres vies. Cependant, il ne faut pas se limiter qu’à l’auteur breton. Car Ă  travers son histoire, c’est aussi une histoire de la bande-dessinĂ©e qui se dessine. Le rapport entre la publication en magazine et en albums, les festivals, les Ă©diteurs, les collĂšgues
 Fournier a Ă©tĂ© assez rejetĂ© par le milieu pour pouvoir en parler sans concession.

Un témoignage sur le métier de dessinateur.

Le tout passe par l’Ɠil admiratif de Nicoby et Joub. Leur cĂŽtĂ© fan est parfaitement adaptĂ© Ă  l’ouvrage. Connaissant sur le bout des doigts l’Ɠuvre de l’auteur, ils le questionnent sur ses ouvrages les moins connus. Du coup, inutile de chercher une quelconque critique de Fournier, le livre n’est pas lĂ  pour ça.

Quelques documents sont insĂ©rĂ©s au milieu de la conversation (comme des calques de Franquin oĂč il distille des conseils Ă  son protĂ©gĂ©) et Ă  la fin (planches, illustrations, synopsis
). Sous la forme de ce livre, c’est un vrai tĂ©moignage sur le mĂ©tier de dessinateur. L’approche par la discussion entre les personnages est trĂšs dynamique et fluide, si bien que l’on dĂ©vore l’ouvrage sans peine. 

J’aime beaucoup le trait de Nicoby et le fait qu’il dessine cet ouvrage m’a convaincu de l’acquĂ©rir. Ici, il fait mouche une nouvelle fois en dessinant des personnages trĂšs expressifs. Cela donne une vraie convivialitĂ© Ă  l’ensemble. Si bien que nous aussi on a l’impression d’ĂȘtre dans l’atelier de Fournier !

Ce livre est Ă  prendre pour ce qu’il est : un tĂ©moignage sur la carriĂšre de Fournier. Evidemment, ce dernier en sort grandi et dĂ©gage une indĂ©niable sympathie. Mais les critiques sous-jacentes de certaines pratiques dans la bande-dessinĂ©e (d’une Ă©poque du moins, mĂȘme si ça n’a pas du changer tant que ça) donne Ă  l’ouvrage un sujet plus large. Si vous aimez lire sur l’histoire de la bande-dessinĂ©e et sur ses auteurs, « Dans l’atelier de Fournier » est pour vous !

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Note : 14/20

Manuel de la jungle – Nicoby & Joub

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Titre : Manuel de la jungle
Scénaristes : Nicoby & Joub
Dessinateurs : Nicoby & Joub
Parution : Mai 2015


Joub et Nicoby avait plutĂŽt bien rĂ©ussi leur biographie « Dans l’atelier de Fournier ». Ils s’y prĂ©sentaient, interviewant l’auteur sur son passĂ©. Cela est en train de devenir une de leur spĂ©cialitĂ©. Au point qu’ils partent rĂ©aliser un livre sur la jungle, en Guyane. Joub vivant Ă  Cayenne, ils ont l’idĂ©e de retrouver deux instituteurs baroudeurs et de partir quelques jours dans l’Enfer vert afin de voir combien ce terme est galvaudĂ©. Le tout est donc scĂ©narisĂ© par Nicoby et Joub. Le premier dessine, le second colorise le tout. C’est paru chez Dupuis pour 140 pages de bande-dessinĂ©es au prix de 19 euros.

ManuelDeLaJungle1Le rĂ©cit prĂ©sente donc deux citadins emportĂ©s par deux baroudeurs. Évidemment, les premiers ont trĂšs peur des bestioles : serpent, araignĂ©es, crocodiles, etc. MĂȘme si cette menace n’est pas la plus importante
 Le livre dĂ©marre donc par un vĂ©ritable manuel, les expĂ©rimentĂ©s expliquant aux nouveaux le fonctionnement de la survie dans ce milieu, entre chasse et binouze.

Un titre trompeur.

Mais l’histoire finit par tourner vers autre chose : la dĂ©nonciation des orpailleurs clandestins. Du coup, le livre est un peu scindĂ© en deux et manque de cohĂ©rence. De mĂȘme, les anecdotes nombreuses abondent dans le livre et coupent le rythme. On sent une forme de fourre-tout, intĂ©ressant certes, mais qui manque de travail de fond pour en faire un bouquin en tant que tel. Ainsi, le titre « Manuel de la jungle » est trompeur, mais c’est ce que devait ĂȘtre le livre au dĂ©part.

MalgrĂ© tout, la vie dans la jungle a un intĂ©rĂȘt rĂ©el et on apprend beaucoup de choses. La deuxiĂšme partie, plus militante, donne aussi Ă  rĂ©flĂ©chir. Le tout se dĂ©vore d’une traite, l’humour est prĂ©sent et on apprend Ă©normĂ©ment sur la jungle. Dommage que les auteurs se reprĂ©sentent toujours comme apeurĂ©s, voulant mettre fin Ă  l’expĂ©rience au plus vite. Finalement, on se dit que ce voyage de quelques jours ne les aura pas changĂ©s. Surtout, ils paraissent encore plus terrorisĂ©s Ă  la fin. Peut-ĂȘtre est-ce la rĂ©alitĂ©, mais le tout ne va pas trĂšs loin dans l’analyse. Joub et Nicoby ont choisi un rĂ©cit de voyage sans trop chercher Ă  approfondir le propos en aval.

Concernant le dessin, j’aime beaucoup le trait de Nicoby, sublimĂ© par les aquarelles de Joub. Les ambiances sont posĂ©es, aussi bien dans la jungle, sur la pirogue, la nuit
 Une vraie rĂ©ussite. En revanche, on ressent relativement peu le cĂŽtĂ© « paradis des sens » vantĂ© par la quatriĂšme de couverture. Ce n’est pas Ă©vident avec du dessin de faire ressentir cela, mais dans les faits, la jungle est jolie mais on ne la ressent pas.

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« Manuel de la jungle » est un ouvrage qui dĂ©vie de son intention premiĂšre. HĂ©sitant entre un apprentissage par des citadins de la jungle et une dĂ©nonciation des clandestins du lac, il manque un peu de cohĂ©rence. De mĂȘme, il cĂšde Ă  la mode actuel en prĂ©sentant une pagination excessive. Ainsi, la scĂšne du restaurant, au dĂ©part, n’a aucun intĂ©rĂȘt et rallonge artificiellement l’ouvrage. Mais si vous ĂȘtes un amateur des livres de Joub et Nicoby, ne boudez pas votre plaisir, on retrouve l’humour des deux compĂšres et ce trait rond qui va si bien avec.

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Note : 13/20

Roi ours – Mobidic

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Titre : Roi ours
Scénario : Mobidic
Dessinateur : Mobidic
Parution : Mai 2015


Une premiĂšre bande-dessinĂ©e est toujours une Ă©preuve pour un auteur en devenir. Mobidic (au pseudo Ă©vocateur !) se lance dans le bain chez Delcourt avec un one-shot qu’il scĂ©narise et dessine, « Roi ours ». AncrĂ© dans les croyances amĂ©rindiennes, il prĂ©sente l’histoire d’une jeune fille, Xipil, destinĂ©e Ă  ĂȘtre sacrifiĂ©e Ă  la dĂ©esse caĂŻman. Elle est alors sauvĂ©e par le Roi Ours et se voit contrainte de se marier avec lui. Le tout pĂšse 110 pages pour un format A4.

Le scĂ©nario se base sur la dĂ©couverte du monde des dieux par une mortelle (mĂȘme si les dieux y sont mortels Ă©galement). Les entourloupes, les nĂ©gociations, les humiliations
 Xipil a bien du mal Ă  s’intĂ©grer, alors que son espĂšce est considĂ©rĂ©e comme en bas de la chaĂźne alimentaire. Heureusement, elle y trouve le soutien de son mari et de la mĂšre des singes, qui fait un peu partie de la famille.

Une fable un peu écologique.

RoiOurs2Si le dĂ©but de l’histoire est plutĂŽt bien menĂ©, on reste un peu sur notre faim. Les dĂ©veloppements amenĂ©s trouvent une fin un peu brutale. MĂȘme si le sens de l’ouvrage prend son sens Ă  sa fermeture, il y a, dans la narration, une impression que l’on partait vers ailleurs. Qu’importe, « Roi ours » possĂšde un univers, une ambiance, une personnalitĂ© qui transparaĂźt dĂšs les premiĂšres pages. Le sujet abordĂ© est original et, finalement, bien dĂ©veloppĂ©. Mais alors qu’on imaginait en dĂ©but de livre une histoire complexe, on est plutĂŽt du cĂŽtĂ© de la fable. Pris ainsi, « Roi ours » remplit son contrat.

Pour mener son histoire, Mobidic maĂźtrise pleinement son dĂ©coupage. Aussi Ă  l’aise dans les scĂšnes d’action ou les scĂšnes intimistes, il alterne Ă©galement les pages de dialogue avec les pages muettes. Le tout avec autant de pertinence.

Le dessin est un gros point fort de l’album. Mobidic possĂšde un trait qui rappelle immanquablement le dessin animĂ©, tant par ses animaux que par sa façon de dessiner les humains. Et si quelques rares cases sont maladroites, l’ensemble est assez remarquable. La beautĂ© des images saute aux yeux, les personnages sont expressifs et les cadrages sont parfaitement maĂźtrisĂ©s. Et que dire des couleurs, au diapason du trait ? Elles embellissent le dessin et renforcent les ambiances avec talent. On pourra cependant regretter un encrage et un lettrage un peu trop gros pour le format. Un livre au format comics aurait Ă©tĂ© certainement un meilleur choix pour l’Ă©dition. Un mauvais choix de l’Ă©diteur pour le coup.

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Mobidic, pour son premier album, s’est occupĂ© de tout. Et si ce « Roi ours » possĂšde quelques imperfections, il reste un livre d’une vraie beautĂ©, dotĂ© d’un scĂ©nario original, sorte de fable fantastique et (un peu) Ă©cologique. Un auteur Ă  suivre, tant sa maĂźtrise du sujet est Ă©vidente.

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Note : 15/20

Les Sentinelles, T1 : Juillet-AoĂ»t 1914, Les Moissons de l’Acier – Xavier Dorison & Enrique Breccia

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Titre : Les Sentinelles, T1 : Juillet-AoĂ»t 1914, Les Moissons de l’Acier
Scénariste : Xavier Dorison
Dessinateur : Enrique Breccia
Parution : Mai 2009


C’est en regardant la trĂšs sympathique Ă©mission « Un monde de bulles » que j’ai dĂ©couvert avec plaisir Xavier Dorison Ă©voquer la sĂ©rie « Les sentinelles ». Etant un grand fan de ce scĂ©nariste depuis que j’ai dĂ©couvert « Le troisiĂšme testament » ou « Sanctuaires », j’ai Ă©coutĂ© avec curiositĂ© ce dernier nous conter la construction de cette saga dont je n’avais jamais entendu parler. Une fois son interview terminĂ©e, je me suis engagĂ© Ă  m’immerger dans cette sĂ©rie au plus vite. Ma dĂ©couverte a dĂ©butĂ© hier soir avec la lecture du premier chapitre intitulĂ© « Juillet-AoĂ»t 1914 – Les moissons d’acier ». EditĂ© chez Delcourt, cet album de bonne qualitĂ© est composĂ© d’une soixantaine de pages. Il est vendu Ă  un prix tout juste infĂ©rieur Ă  quinze euros. La couverture nous prĂ©sente un soldat dĂ©ployant un drapeau français. Son visage est couvert par un casque. Je la trouve trĂšs rĂ©ussie. Elle est l’Ɠuvre de Enrique Breccia, que je dĂ©couvre Ă  l’occasion de cette lecture.

MalgrĂ© le titre, l’histoire dĂ©bute en 1911 au Maroc sur un champ de bataille. On dĂ©couvre un soldat, le visage masquĂ© qui avance d’un pas rĂ©gulier sans sembler tenir compte des balles qui fusent et des cadavres qui tombent autour de lui. Mais tout Ă  coup, il s’effondre. On le croit mort, ce n’est pas le cas. Il explique Ă  un de ses acolytes qu’il n’a plus de batterie, qu’il ne peut donc plus Ă©chapper Ă  son destin. Alors que les ennemis s’apprĂȘtent Ă  arriver sur les lieux, il demande Ă  ĂȘtre exĂ©cutĂ© par son ami qui s’exĂ©cute. On croit comprendre que ce soldat est le fruit d’une expĂ©rimentation scientifique mis au point par un colonel de l’ArmĂ©e française. Ce projet connaitra un second souffle trois ans plus tard quand le fondateur des Sentinelles dĂ©couvre la dĂ©couverte rĂ©volutionnaire d’un petit lieutenant de rĂ©serve


Des super héros « made in France ».

« Les Sentinelles » est une sĂ©rie intĂ©ressante car elle nous offre un des premiers super hĂ©ros « made in France ». Suite Ă  des expĂ©riences menĂ©es dans des laboratoires secrets, un colonel et un savant Ă  sa botte ont pour objectif de crĂ©er une espĂšce de super soldat. Le fait de l’intĂ©grer dans la grande Histoire Ă  travers la pĂ©riode de la premiĂšre guerre mondiale dĂ©veloppe un attrait certain. L’histoire s’adresse Ă  un public sensible Ă  ce genre de grande trame historique et dense dans laquelle s’insĂšre parfaitement une dimension fictionnelle travaillĂ©e. Il est Ă©vident que l’humour et la lĂ©gĂšretĂ© ne sont pas de sortie. On est en temps de guerre et le dessinateur fait en sorte qu’on ne l’oublie jamais.

Le scĂ©nario est de grande qualitĂ©. Les premiĂšres pages qui jouent le rĂŽle de prologue sont intenses. A travers les dessins et l’atmosphĂšre qui transpire de la lecture, on est tout de suite dans le vif du sujet. Notre intĂ©rĂȘt est happĂ©. Notre curiositĂ© ne cessera jamais d’ĂȘtre sĂ©duite tout au long du dĂ©filement des pages. La grande toile se met en place. Les personnages apparaissent, les enjeux se dĂ©couvrent. La densitĂ© est grande. La narration ne souffre d’aucun temps mort bien au contraire. On est immergĂ© dans une histoire passionnante. La finalitĂ© de cet opus est de nous prĂ©senter Taillefer, le nouveau super soldat. Le rythme de la dĂ©couverte est bien dosĂ© et la derniĂšre page nous laisse sur un sentiment de frustration de ne pas pouvoir en profiter davantage.

Comme je l’ai sous-entendu prĂ©cĂ©demment, les dessins sont remarquables. DĂšs la premiĂšre case, on est bouleversĂ©. Il se dĂ©gage rĂ©ellement quelque chose des pages. La crasse et la violence qui s’en dĂ©gage sont intenses et ne laissent pas indemnes. La dimension « boucherie » est vraiment trĂšs rĂ©ussie. Rien n’apparaĂźt surrĂ©aliste ou excessif. Bien au contraire, c’est une gifle de rĂ©alisme qu’on prend de plein fouet. Je trouve Ă©galement les personnages trĂšs rĂ©ussis. On n’a aucun mal Ă  se les approprier. Les dessins leur donnent une vraie Ă©paisseur. Je pense que je vais me pencher de plus prĂšs sur les parutions nĂ©es de la plume d’Enrique Breccia.

En conclusion, j’ai trouvĂ© ce premier opus remarquable. Il s’agit Ă  mes yeux d’un petit chef d’Ɠuvre. Le scĂ©nario, les dessins, le thĂšme, les personnages
 Tout est bien construit, intense et travaillĂ©. A l’heure actuelle, trois tomes sont parus. Je ne pense pas que je vais tarder Ă  dĂ©vorer les deux qu’il me reste Ă  lire. Pour ceux qui dĂ©couvrent l’univers de Xavier Dorison Ă  travers cet album, je ne peux que conseiller de dĂ©couvrir « Le troisiĂšme testament » qui vous immergera dans le Moyen-Ăąge pour une tĂ©tralogie qui est un chef d’Ɠuvre du neuviĂšme art


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Note : 18/20

Les chroniques d’un maladroit sentimental, T2 : L’enfant Ă  l’Ă©charpe – Vincent Zabus & Daniel Casanave

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Titre : Les chroniques d’un maladroit sentimental, T2 : L’enfant Ă  l’Ă©charpe
Scénariste : Vincent Zabus
Dessinateur : Daniel Casanave
Parution : Août 2014


Le premier tome des « Chroniques d’un maladroit sentimental » Ă©tait une bonne surprise. DotĂ© d’une narration originale et d’un personnage attachant, on adhĂ©rait pleinement Ă  l’ouvrage. Ce dernier aurait mĂȘme pu exister en tant que one-shot. Mais voilĂ  la suite qui arrive, intitulĂ© « L’enfant Ă  l’écharpe ». AprĂšs avoir passĂ© un tome Ă  essayer de juguler ses crises d’angoisse pour arriver Ă  inviter une femme Ă  aller boire un verre, voilĂ  que notre hĂ©ros se lance dans la paternité ! Le tout est publiĂ© sous forme d’album de 48 pages tout ce qu’il y a de plus classique chez Vents d’ouest.

GĂ©rard est donc parvenu Ă  sĂ©duire la belle Florence, mais celle-ci est dĂ©jĂ  mĂšre de trois enfants. Demain, GĂ©rard emmĂ©nage dans la maison familiale de sa chĂ©rie, celle qu’elle avait achetĂ© avec son ex
 Mais notre hĂ©ros ne se dĂ©monte pas et propose Ă  Florence de faire un enfant ensemble
 C’est le dĂ©but des problĂšmes !

Paternité, belle-filles et roi des Belges.

ChroniquesDUnMaladroitSentimental2aÉtrange choix des auteurs de plonger GĂ©rard dans la paternitĂ©. Surtout que lui qui avait tant de mal Ă  faire quoi que ce soit devient initiateur du projet. Mais soit, pourquoi pas. Le dĂ©but de l’ouvrage, consacrĂ© Ă  son emmĂ©nagement est parfaitement rĂ©ussi. On y voit le rapport entre GĂ©rard et ses belle-filles. On retrouve l’ambiance du premier tome et les apparitions du roi de Belgique rappellent celles, prĂ©cĂ©dentes, de la mĂšre. Mais une fois la grossesse lancĂ©e, on perd un peu le film, les hallucinations du personnage rendant le tout trĂšs confus. Clairement, la magie n’opĂšre pas aussi bien.

MalgrĂ© tout, ces « Chroniques d’un maladroit sentimental » gardent un charme particulier avec le personnage de GĂ©rard. Petite pique Ă  leurs lecteurs, les auteurs en font un collectionneur de BD (un peu nĂ©vrosé ).

ChroniquesDUnMaladroitSentimental2bC’est surtout le dessin de Daniel Casanave qui m’avait poussĂ© Ă  feuilleter le premier album. Son style semi-rĂ©aliste, trĂšs relĂąchĂ©, fait merveille. C’est dynamique et parfaitement adaptĂ© au propos. Les deux auteurs se sont bien trouvĂ©s et fonctionnent en pleine osmose. Les planches sont riches en cases, permettant d’instaurer de nombreux silences. Du beau travail de dĂ©coupage !

J’ai Ă©tĂ© un peu déçu par ce deuxiĂšme tome. Alors que GĂ©rard Ă©tait un personnage des plus angoissĂ©s dans le premier tome, il est beaucoup plus « normal » ici. C’est finalement un homme qui, comme n’importe quel homme, stresse avant l’arrivĂ©e de son premier enfant. La multiplication des hallucinations (le roi des belges, les souvenirs, les ex, etc.) brouillent un peu le propos lĂ  oĂč elles l’enrichissaient prĂ©cĂ©demment. Mais si vous avez apprĂ©ciĂ© le premier tome, ce second opus reste une lecture agrĂ©able en compagnie de GĂ©rard.

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Note : 12/20

 

Blankets – Craig Thomson

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Titre : Blankets
Scénariste : Craig Thomson
Dessinateur : Craig Thomson
Parution : Mars 2004


Une fois lu « Habibi », j’avais bien envie de continuer de dĂ©couvrir Craig Thomson. AprĂšs une incursion (dispensable) en carnet de voyage, je rĂ©cupĂ©rais enfin « Blankets », proclamĂ© chef d’Ɠuvre par de nombreuses critiques. « Blankets » est un ouvrage autobiographique sur la jeunesse de l’auteur. On y trouve un peu de son enfance et beaucoup de son adolescence. Au centre de cet Ă©pais bouquin (pas loin de 600 pages quand mĂȘme
), sa premiĂšre relation amoureuse. Le tout est publiĂ© chez Casterman dans la collection Ă©critures.

Blankets1Craig Thomson nous met tout de suite dans un certain misĂ©rabilisme. Enfant, il dort avec son petit frĂšre et ils ont froid quand bien mĂȘme. Quelques anecdotes se succĂšdent, montrant une Ă©ducation Ă  la dure oĂč mieux valait filer droit. HĂ©las, la plupart des pages traitant de l’enfance n’ont pas vraiment d’intĂ©rĂȘt pour la suite. On pourrait bien sĂ»r penser que cela forge le caractĂšre de Craig, mais tout cela est quand mĂȘme bien dĂ©cousu. On rentre rĂ©ellement dans le vif du sujet quand il rencontre son premier amour.

Peu d’empathie pour le personnage.

Les amourettes, quand on est a vĂ©cues, c’est trĂšs touchant. Mais ici, l’histoire entre Craig et Raina n’a pas beaucoup d’intĂ©rĂȘt. Tout cela est trĂšs plat et manque cruellement de recul. Et pourtant il y aurait de quoi dire : Raina a pour frĂšre et sƓur deux enfants handicapĂ©s et adoptĂ©s. Il ne reste plus qu’à ajouter des parents en plein divorce pour parfaire le tout. Du coup, les pistes de dĂ©veloppement se multiplient (on peut ajouter la religion qui saupoudre le tout en permanence) sans vraiment nous intĂ©resser. Et au fur et Ă  mesure de la lecture, on se fatigue un peu de tout ça. Le personnage de Craig est trĂšs passif, peureux et on n’a finalement que peu d’empathie pour lui.

Au niveau du dessin, j’aime le trait de Craig Thomson. DessinĂ© au pinceau, il a beaucoup de force. C’est vraiment le point fort du livre. Le noir et blanc permet de bien traiter la neige (le livre n’est-il pas sous-titrĂ© « manteau de neige » aprĂšs tout ?) et convient au propos. MalgrĂ© tout, il n’y a pas l’incroyable force des planches de « Habibi ». Le sujet s’y prĂȘte moins, certes.

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Quelle dĂ©ception que ce « Blankets ». C’est long, lent, peu passionnant et pas touchant pour un sou. On sent l’intention derriĂšre de traiter de nombreux sujets « graves », mais c’est finalement une amourette banale Ă  laquelle on a droit. Les thĂšmes annexes, survolĂ©s, auraient peut-ĂȘtre mĂ©ritĂ© plus d’attention et non pas quelques pages rapides entre deux coups de tĂ©lĂ©phone Ă  sa chĂ©rie.

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Note : 10/20

Les Aventures de Philip et Francis, T2 : Le PiĂšge MachiavĂ©lique – Pierre Veys & Nicolas Barral

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Titre : Les Aventures de Philip et Francis, T2 : Le PiÚge Machiavélique
Scénariste : Pierre Veys
Dessinateur : Nicolas Barral
Parution : Février 2011


Contrairement Ă  Tintin, Blake et Mortimer est une sĂ©rie qui a survĂ©cu Ă  son auteur originel, Edgar P. Jacob. Mais si certains ont repris les aventures des deux hommes Ă  la façon du maĂźtre, d’autres prennent un malin plaisir Ă  le parodier. Pierre Veys et Nicolas Barral, dĂ©jĂ  auteurs de « Baker Street », une parodie de Sherlock Holmes, reprennent les personnages de Philip et Francis pour un deuxiĂšme tome de pastiche de nos deux hĂ©ros. Continuer la lecture de « Les Aventures de Philip et Francis, T2 : Le PiĂšge MachiavĂ©lique – Pierre Veys & Nicolas Barral »

Les aventures de la fin du monde – Vincent Caut

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Titre : Les aventures de la fin du monde
Scénariste : Vincent Caut
Dessinateur : Vincent Caut
Parution : Avril 2012


Vincent Caut est un auteur de bande-dessinĂ©e prĂ©coce. AprĂšs avoir gagnĂ© des prix de la BD scolaire Ă  AngoulĂȘme, il parvient Ă  faire Ă©diter son blog sur sa vie d’étudiant. « Les aventures de la fin du monde » (qui eut l’honneur d’un blog, aujourd’hui fermĂ©) narre l’histoire de Monsieur Toupin et Madame Billot, sa secrĂ©taire. Dieu les a choisis pour reconstruire le monde. En effet, ils n’avaient alors vĂ©cu sur le brouillon de la Terre, il faut tout refaire (en mieux). Le tout est publiĂ© chez 12 bis pour 110 pages au prix de 13,90 €.

La bande-dessinĂ©e est construite sous forme de strips de 6 cases carrĂ©es. Chaque strip amĂšne une chute et une histoire en dĂ©coule. Ce procĂ©dĂ© a Ă©tĂ© abondamment utilisĂ© par Lewis Trondheim que ce soit dans le passĂ© (« Le pays des trois sourires », « Politique Ă©trangĂšre », « Fennec ») ou mĂȘme aujourd’hui avec « L’atelier mastodonte ». On retrouve chez Vincent Caut cette influence de façon trĂšs marquĂ©e. L’humour, l’absurde, le minimalisme graphique, tout rappelle Lewis Trondheim.

La GenĂšse version 2.0

LesAventuresDeLaFinDuMonde2Vincent Caut essaye donc de crĂ©er sa propre identitĂ© sur un sujet Ă©culé : Adam, Ève et Dieu. Au dĂ©part, l’idĂ©e de faire une sorte de GenĂšse 2.0 est plutĂŽt bien pensĂ©e. Malheureusement, le sujet est finalement peu utilisĂ©. En revanche, la reprĂ©sentation de Dieu sous forme de pomme est lĂ  parfaitement exploitĂ©e du dĂ©but Ă  la fin.

Les gags fonctionnent plutĂŽt bien, sans que l’on ne rie vraiment. On sourit parfois, mais cela manque de folie ou de chutes vraiment percutantes. Il faut dire que le dessin est minimaliste et participe peu Ă  l’humour. Les gags visuels sont trĂšs rares et les expressions des personnages sont particuliĂšrement limitĂ©es (Adam n’a pas d’yeux par exemple). C’est aussi lĂ  qu’on touche un peu aux limites de l’ouvrage. Avec un dessin trĂšs simple, Vincent Caut doit s’appuyer uniquement sur son scĂ©nario pour convaincre. Surtout qu’il a dĂ©jĂ  produit des ouvrages aux personnages bien plus expressifs. Or, avec un sujet maintes fois abordĂ©, il manque ici un peu d’originalitĂ©, de folie ou de constance dans l’humour.

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Ces « aventures de la fin du monde » laissent un goĂ»t d’inachevĂ©. On lit l’ouvrage avec plaisir, mais sans vraiment rire. Et Ă  la fermeture du livre, on l’oublie rapidement. C’est dommage car on sent le potentiel devant certaines idĂ©es pas toujours suffisamment exploitĂ©es.

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Note : 11/20