Djinn, T12 : Un honneur retrouvĂ© – Jean Dufaux & Ana Mirallès

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Titre : Djinn, T12 : Un honneur retrouvé
Scénariste : Jean Dufaux
Dessinateur : Mirallès
Parution : Décembre 2014


« Djinn » est une série à l’atmosphère particulière. Elle mêle intrigue politique et érotisme. Le scénario est l’œuvre du célèbre et efficace Jean Dufaux. Les dessins sont le fruit du travail d’Ana Mirallès. Le douzième tome, « Un honneur retrouvé » clôt le cycle indien des aventures de Jade. J’ai cru comprendre qu’il s’agirait également du dernier épisode de la série. Ce dernier opus, édité chez Dargaud, date de l’année dernière. Sa couverture nous fait découvrir l’héroïne nue. Son corps est maquillé et des bijoux ornent son visage. Elle regarde fixement le lecteur. Pour l’attirer dans ses filets ?

Une fin de cycle décevante.

Djinn12aLa révolte gronde en Inde. L’occupation anglaise n’est plus acceptée par le peuple. Radjah Sing est le meneur des révolutionnaires. Sa fille est promise au maharadjah. Chacun essaie d’avancer ses pions pour mener à bien leurs projets. Mais l’Histoire est peut-être en train de s’écrire dans le Pavillon des Plaisirs. C’est dans ce harem que Jade éduque la promise au souverain aux arts de son corps. Cela lui permettra de dominer son futur mari et de le rallier à son cause et à celle de son père…

Les deux actes précédents avaient fait naître bon nombre d’intrigues entremêlées. Les enjeux sont multiples. J’étais curieux de savoir comment les auteurs allaient démêler tout cela en une cinquantaine de pages. Je trouvais la dimension politique intéressante. Elle démarquait ce cycle des deux autres. « Le pavillon des plaisirs » avait posé des jalons intéressants. Par la suite, j’avais trouvé « Une jeunesse éternelle » plus décevant. La place occupée par Jade était également originale. Le fait d’assumer que les charmes d’une femme peuvent influencer fortement un homme puissant était pertinent. Cela offrait une corde narrative attrayante.

La dimension érotique de l’intrigue perd tout son intérêt au fur et à mesure du déroulement de la trame. Les scènes l’évoquant n’ont plus aucun autre intérêt que permettre à Ana Mirallès de dessiner ces corps en plein ébat. Leur apport à l’histoire est quasiment inexistant. Il est au plus anecdotique. Alors que cet aspect était présenté comme central au début du cycle, il est repoussé à un statut de folklore local. Je trouve cela dommage parce que cela fait disparaître le ton original de la série.

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Les arcanes politiques sont finalement bien moins mystérieux et complexes que je l’espérais. Finalement, le dénouement de l’histoire est bien complexe et alambiqué que souhaité. Il s’avère assez linéaire. Il se découvre sans réelle émotion ni attrait. La curiosité est réduite et n’excède pas la volonté de terminer quelque chose de commencer. La dimension mystique que vit Jade n’a pas d’autre intérêt que de justifier un lien avec le cycle africain de la saga. Rien de plus. Bref, l’ensemble est moyen et plutôt décevant.

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Blake et Mortimer, T23 : Le bâton de Plutarque – Yves Sente & AndrĂ© Juillard

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Titre : Blake et Mortimer, T23 : Le bâton de Plutarque
Scénariste : Yves Sente
Dessinateur : André Juillard
Parution : Décembre 2014


« Blake et Mortimer » est une série qui a eu la capacité à s’offrir plusieurs vies. En effet, depuis le décès de son fondateur Edgar P.Jacobs, elle a été confiée à bon nombre d’auteurs qui ont eu pour mission de faire perdurer les aventures des deux célèbres britanniques. Même si toutes ses suites ne sont pas de qualité équivalente, je dois bien avouer qu’elles sont un hommage certain à cette grande saga. Je prends toujours beaucoup de plaisir à découvrir les nouvelles pérégrinations d’un des duos légendaires du neuvième art. Ma critique d’aujourd’hui porte sur le dernier épisode en date intitulé « Le bâton de Plutarque ». Il est l’œuvre conjointe d’Yves Sente et d’André Juillard dont c’est la sixième incursion dans cet univers.

La genèse d’une des aventures les plus mythiques du duo.

BlakeEtMortimer23aL’originalité et l’attrait de cet album résidaient dans l’insertion chronologique de son intrigue dans la grande histoire de Blake et Mortimer. L’action de « Le bâton de Plutarque » est antérieure à celle de mythique trilogie « Le secret de l’Espadon ». Je trouvais ce choix particulièrement audacieux et j’ai curieux de découvrir la genèse d’une des aventures les plus mythiques du duo. Ce choix scénaristique permet également à de nouveaux lecteurs de découvrir aisément la série à travers cet album. Les prérequis ne sont pas indispensables à la compréhension globale des enjeux.

« Le bâton de Plutarque » se déroule à quelques mois du débarquement allié en Normandie. Cette immersion au beau milieu de la Seconde Guerre Mondiale est intéressante car elle offre une uchronie originale. Sans être excessive ou maladroite, cette dimension historique apporte un écot positif à la trame. Le climat de guerre est une chape de plomb qui accompagne toute la lecture. Les menaces constantes sont habilement décrites par les auteurs et permettent au lecteur de les ressentir constamment. Dans ce domaine, le travail scénaristique est de grande qualité.

Au-delà de son intérêt historique, le scénario n’est pas dénué de qualité. Comme souvent dans la série, l’intrigue est dense. La toile d’araignée narrative s’étend pendant une grande partie de la lecture. Ce n’est vraiment que sur la fin que les auteurs nous offre un dénouement clair et une vision globale de l’ensemble. L’enchaînement des événements est bien dosé. Les temps morts sont inexistants et l’intensité ne fait que croître au fur et à mesure des pages. Cette plongée dans les services secrets est prenante. Je m’y suis baigné avec joie.

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La trame fait coexister un grand nombre de protagonistes de tout bord et de tout genre. Leurs intégrations se font naturellement. Ils nous sont rapidement familiers et aucun n’est inutile. Yves Sente domine suffisamment son sujet pour ne jamais perdre son lecteur tout en lui amenant à un rythme soutenu un flux d’informations. Les soixante-quatre planches de l’album sont riches. Je ne doute d’ailleurs pas qu’une deuxième lecture me permettrait de saisir davantage les détails de cette mission aux nombreux arcanes. Le trait d’André Juillard facilite la compréhension. Il respecte avec talent le style Jacobs tout en veillant à ne pas égarer le lecteur dans un univers trop nébuleux. Du beau travail.

Pour conclure, « Le bâton de Plutarque » est un très bon cru. Il respecte parfaitement les codes de série tout en lui offrant un passé jusqu’alors inconnu. Le plaisir a été tel que je n’ai qu’une envie : me replonger dans « Le secret de l’Espadon » !

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note4

La famille Passiflore, T3 : La chasse au trésor

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Titre : La famille Passiflore, T3 : La chasse au trésor
Scénariste : Michel Plessix
Dessinateur : LoĂŻc Jouannigot
Parution : Juin 2014


Ma critique d’aujourd’hui porte sur un album de jeunesse intitulĂ© « La chasse au trĂ©sor ». C’est le nom de son dessinateur qui m’a orientĂ© vers lui. Il s’agit de Michel Plessix dont le trait m’a charmĂ© dans « Le vent dans les saules ». De plus, j’avais eu l’occasion de lire une critique Ă©logieuse Ă  l’égard de cette troisième aventure de la famille Passiflore. Cette sympathique bande de lapins m’était inconnue jusqu’alors. La couverture est attirante. Elle nous prĂ©sente une bande de jeunes lapereaux bien dĂ©cidĂ©s au milieu d’une prairie verdoyante. Un danger rode dans l’ombre : ils sont observĂ©s par quelqu’un qui ne semble pas leur vouloir que du bien… Continuer la lecture de « La famille Passiflore, T3 : La chasse au trĂ©sor »

Garçon manquĂ© – Liz Prince

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Titre : Garçon manqué
Scénariste : Liz Prince
Dessinatrice : Liz Prince
Parution : Octobre 2014


Après avoir été déçu par « Seule pour toujours » de Liz Prince, je voulais lui demander une nouvelle chance. En effet, les critiques que j’avais pu lire encensait plutôt « Garçon manqué », qui est un vrai one-shot et non pas un recueil de blog. Dans ce livre, Liz Prince raconte sa jeunesse et son adolescente où son côté pas assez féminin (selon elle) l’a beaucoup fait souffrir. C’est donc une autobiographie qui nous est proposée chez Ça et Là, pour un total de… 250 pages !

L’autobiographie de jeunesse centré sur un problème particulier (ici le côté « garçon manqué ») a le vent en poupe. Hélas, il faut bien avouer que certains ont des jeunesses bien plus intéressantes que d’autres. Et surtout, la difficulté est de savoir sublimer son existence par un traitement narratif ou graphique adéquat. Liz Prince hésite un peu sur le mode à suivre, tantôt humoristique, tantôt franchement plombante. Le livre se révèle bien trop premier degré. Alors qu’en est-il du propos ?

Un livre au premier degré trop exhaustif.

GarçonManqué2Liz n’aime pas les robes. Voilà le point de départ de l’intrigue. Elle n’aime donc pas les poupées, le rose et tout ce qui va avec. Elle aime les jeux de garçons et jouer avec eux. Hélas, il n’existe visiblement pas d’espace intermédiaire. Elle se retrouve ainsi mise à l’écart des deux communautés. Au-delà du côté garçon manqué, c’est avant tout l’histoire des marginaux qui est narrée. Hélas, le tout reste très terre-à-terre et ce n’est que dans les ultimes pages que la notion de marginalité (au sens large du terme) prend vraiment sa place.

Liz Prince aurait pu généraliser son propos mais ce n’est pas le cas. On retrouve finalement dans le livre tout ce que l’on pourrait dire à l’avance avant de le lire : on la prend pour un garçon, pour une lesbienne et elle accepte mal son corps. Du coup, si le livre se lit facilement, il ne propose aucune véritable surprise. Et les moments plus intimes, plus personnels, sont noyés devant la pagination trop importante du livre. En effet, de nombreux passages sont redondants et n’apportent rien. En voulant tout dire, l’auteure affaiblit son propos.

Au niveau du dessin, c’est vraiment le minimum syndical. Le tout est en noir et blanc, avec un traitement sans matière ni niveau de gris. Le dessin est très simple et, finalement, n’apporte rien Ă  la narration. On peut avoir un dessin underground puissant ou minimaliste, mais cela n’empĂŞche pas la crĂ©ativitĂ©.

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Ce « Garçon manqué » a tout du projet trop personnel. Il n’y a pas de travail d’écriture sur l’ouvrage, l’auteure étant trop exhaustive et se contenant d’un traitement purement chronologique. L’expérience personnelle de Liz Prince n’est pas assez puissante ou originale (en tout cas, vue du livre) pour réellement créer un intérêt chez le lecteur. L’ouvrage aurait été plus court, il aurait été certainement beaucoup plus intéressant.

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note2

Le chant des stryges, T16 : Exécutions

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Titre : Le chant des stryges, T16 : Exécutions
Scénariste : Éric Corbeyran
Dessinateur : Richard Guérineau
Parution : Décembre 2014


Le chant des stryges est une des plus anciennes séries que je lis. Le dernier épisode en date, le seizième, est apparu en librairie à la fin de l’année dernière. Il s’intitule Executions. La couverture dégage une atmosphère guerrière en parfaite adéquation avec le titre. On découvre l’héroïne se diriger vers nous une arme à la main. Au second plan une maison brûle et le ciel est habité par le visage d’un monstre hurlant. Les tons chauds accentuent cette sensation de fin du monde. Cette saga est l’œuvre conjointe du scénariste Eric Corbeyran et du dessinateur Richard Guérineau. Les couleurs sont le fruit du travail de Dimitri Fogolin.

Le site BDGest’ online (online.bdgest.com) propose le résumé suivant : « Après avoir découvert le remède imaginé par Sandor G. Weltman pour remédier à la stérilité des Stryges, Debrah a décidé de tenter sa chance. Alors que le fœtus, sous haute surveillance, grandit dans le corps de sa mère, les tensions au sein de l’équipe se multiplient. Il semblerait qu’un traître se cache parmi eux… Mais qui est-il et quelles sont ses véritables intentions ? »

Un mélange entre un monde réel et dimension fantastique.

LeChantDesStryges16aVous l’aurez compris aisément, il est difficile de s’immerger dans cette lecture sans avoir quelques prérequis solides. Je vais vous offrir les grandes lignes de l’intrigue. Les Stryges sont des créatures ailées qui accompagnent dans l’ombre l’humanité depuis toujours. Leurs destins sont intimement liés sans qu’on arrive réellement à maîtriser la nature exacte de leur « association ». Weltman est un homme qui avait passé une alliance avec ses monstres. En échange d’une quasi-immortalité, il devait chercher à soigner leur stérilité. Tout ne s’est pas passé comme prévu. Cette lutte qui a duré des siècles s’est conclu lorsque Debrah, une mystérieuse femme aux talents nombreux a hérité de l’empire de Weltman après l’avoir tué. Depuis, elle cherche à mettre la main sur tous les hybrides dont elle fait partie pour choisir définitivement son camps : avec ou contre les stryges ?

L’intrigue s’inscrit dans notre monde quotidien. La seule nuance de taille est la présence dans l’ombre de ces créatures fantastiques. Le mélange entre un monde réel et cette dimension fantastique est habilement construit et ravira les adeptes du genre. La qualité de la série est constante et ne diminue pas avec les années qui passent. L’univers global est dense et solide. Je suis tombé rapidement sous les charmes nombreux de cette aventure et prend toujours beaucoup de plaisir à m’y plonger.

LeChantDesStryges16bCe seizième tome nous présente une bataille rangée entre Debrah et Carlson. La première veut sauver les hybrides, le second veut les exterminer. Par les temps qui courent, le second est en train de prendre le dessus. La conclusion de cet album sur ce plan est une belle réussite. Parallèlement, l’héroïne et ses acolytes sont arrivés à reproduire deux Stryges. Ils sont donc en passe de résoudre le problème de stérilité. La question se pose donc de savoir que faire de ce nouveau pouvoir. Cette interrogation ne trouve pas vraiment de réponse dans cet opus. D’ailleurs le fond de l’intrigue avance relativement peu dans cet acte. Les événements s’enchainement mais aucun ne révolutionne vraiment l’ensemble. La lecture est donc agréable mais n’est pas aussi prenante qu’à l’habitude. En effet, elle est plus linéaire que dans les albums précédents. Il n’y a de réels rebondissements. Peut-être s’agit-il d’une transition avec la suite ? Néanmoins, rien n’est bâclé mais disons que l’ensemble manque légèrement d’ampleur.

Concernant les dessins, ils arrivent toujours autant à accompagner avec talent la trame. Le grand nombre de personnages et l’alternance entre scènes extérieures et intérieures nécessitent des bases solides et aucune faiblesse. C’est le cas de Richard Guérineau. Il arrive sans difficulté à faire exister graphiquement chaque protagoniste qu’il soit central ou secondaire. De plus, les différents décors sont également bâtis et permettent de s’y fondre aisément.

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Pour conclure, « Exécutions » est une suite honnête aux pérégrinations de Debrah et ses amis. Le suspense est maintenu à défaut d’être intensifié. J’attends donc avec impatience la suite. Quant aux néophytes de cet univers, je vous incite à vous plonger dans la lecture du premier tome. Vous risquez d’apprécier le voyage…

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note3

Le chant du cygne, T1 – Xavier Dorison, Emmanuel Herzet & CĂ©dric Babouche

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Titre : Le chant du cygne, T1
Scénaristes : Xavier Dorisaon & Emmanuel Herzet
Dessinateur : Cédric Babouche
Parution : Août 2014


J’ai toujours eu beaucoup de plaisir à m’immerger dans un univers né de la plume de Xavier Dorison. L’ésotérisme de Le Troisième Testament, l’angoisse de Sanctuaire ou le western fantastique de W.E.S.T m’ont permis de vivre des moments de lecture envoûtants. Depuis, je suis donc toujours aux aguets de toute nouvelle parution portant le nom du célèbre scénariste. J’ai donc accueilli avec curiosité l’apparition dans les librairies il y a presque un an du premier tome de Le Chant du Cygne. Cet ouvrage est édité chez Le Lombard dans la collection Signé. Le premier contact visuel est un bonheur. La couverture est splendide. On y découvre un groupe de soldats. Ils apparaissent en quête d’un moment de calme. Les traces de sang sur leurs vêtements témoignent que la guerre n’est pas loin. Les couleurs dans les tons verts font de ce décor forestier un havre de paix improbable. Mis en perspective avec le titre de l’album, cette atmosphère incite fortement à se plonger dans la lecture.

La quatrième de couverture pose les jalons de la trame avec les mots suivants : « Avril 1917. Alors qu’ils reviennent d’une offensive aussi vaine que meurtrière sur le Chemin des Dames, les survivants de la section du lieutenant Katzinski rencontrent un soldat qui leur confie une pétition signée par des milliers de poilus. Il y a là de quoi renverser le gouvernement pour en finir, enfin, avec les boucheries inutiles. Seulement, pour ça, il faut aller à l’Assemblée nationale… Et jusqu’à Paris, le chemin promet d’être long. »

Des poilus en mission.

LeChantDuCygne1bL’histoire se déroulera sur deux tomes. Ma critique d’aujourd’hui porte donc sur la première partie du diptyque. La seconde est prévue pour la rentrée. Le début nous fait découvrir le quotidien des tranchées. Nous sommes ici en première ligne au côté du sergent Sabiane. Le personnage est imposant : grand comme un homme et demi, le crâne rasé et des moustaches rousses et massives. Il s’agit d’un personnage charismatique qui ne laisse pas indifférent. Un petit peu bourru, il est un chef juste et respecté à la fois par ses hommes set sa hiérarchie. Il est un atout important pour l’intrigue. Le lecteur s’attache immédiatement à ce bonhomme qui occupe l’espace.

Au bout d’une petite quinzaine de pages, un événement va changer la vie de cette bande de soldats comme tant d’autres. Larzac, un des poilus, se voit remettre une pétition qui circule sous le manteau. Elle dénonce certains agissements des gradés. Il s’agit d’une bonne à retardement politique auxquels les dirigeants français ne pourraient survivre. Néanmoins, elle n’a de valeur qu’une fois à Paris. Apparaît donc un dilemme pour la petite communauté. Mener le document à bon port est un acte de solidarité et de bravoure pour leurs pairs mais cet acte sera perçu comme de la traîtrise par les pontes de l’armée française. Que faire ? Etre résistant et héros n’est pas si évident quand la situation se présente. C’est de tout cela que traite cet album.

LeChantDuCygne1cLes deux derniers tiers de l’ouvrage nous content les pérégrinations dangereuses vécues par le petit groupe. Il va sans dire que leur trajet vers la capitale n’est pas une sinécure. Ils sont en permanence sur le qui-vive. Des décisions compliquées sont à prendre. Aucun ne peut sortir indemne de telles épreuves. La bande se compose de sept membres. Chacun apporte son écot à l’intrigue. Evidemment, tous n’ont pas la même importance. Chacun n’influe pas de la même manière sur les événements. Par contre, aucun n’est négligé ou inutile. Je suis facilement attaché à ce petit monde qui se trouve à gérer une situation qui les dépasse. Pour construire ce scénario dense et captivant, Xavier Dorison s’est associé à son collègue Emmanuel Herzet dont je découvre ici la qualité du travail.

Concernant les illustrations, elles sont le fruit de la plume de Cédric Babouche. De manière évidente, son trait offre une identité graphique forte à l’album. De la couverture à la dernière planche, le talent du dessinateur transpire de chaque planche. Je trouve le travail sur les couleurs splendide. La particularité est de ne marquer quasiment aucune rupture chromatique entre les personnages et les décors. Cette porosité rend parfois certains pages difficiles à lire. Elle nécessite une plus grande attention pour en saisir toute la finesse et tous les aspects. Néanmoins, cela reste un tout petit bémol en comparaison des nombreux atouts générés par le coup de crayon de Babouche.

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Pour conclure, cet opus est de grande qualité. Je me suis passionné pour les aventures de ses poilus en mission. L’intrigue est remarquable. Elle enchaîne les événements à rythme effréné et attise en permanence notre attention. L’ensemble reste suffisamment imprévisible pour que nous soyons toujours pressés de connaître la suite. J’attends donc avec impatience que le second tome apparaisse dans les rayons pour découvrir l’issue de ce dangereux périple…

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note4

Uchronie(s), New Moscow, T3 – Éric Corbeyran & Nicolas OtĂ©ro

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Titre : Uchronie(s), New Moscow, T3
Scénariste : Éric Corbeyran
Dessinateur : Nicolas Otéro
Parution : Octobre 2014


« Uchronie(s) » est un projet très ambitieux. Il fait exister trois mondes parallèles développées sur trois tomes chacune. Elles se rejoignent dans un épilogue commun concluant ainsi une décalogie à la trame dense et travaillée. La première saga basée sur cette construction s’est terminée il y a quatre ans. Cela a été une agréable surprise de voir que moins de deux ans plus tard, Éric Corbeyran décidait d’offrir une suite à son histoire en accouchant de « New Beijing », « New Moscow » et « New Delhi ».

Ma critique d’aujourd’hui porte sur le dernier chapitre de la réalité moscovite. Nicolas Otéro est en charge des dessins de cette partie de l’univers scénaristique édifier par le célèbre auteur bordelais. J’avais été séduit par son trait. Sa personnalité offre une atmosphère unique à la lecture et la dissocie sans mal de ses voisines chinoise et indienne. La parution de cet opus date du mois d’octobre.

Il est évident que découvrir cette aventure par cet album est une cause perdue d’avance. La complexité des liens entre les mondes couplée aux intrigues propres à chacun rend impossible de prendre le triant en route. Chaque nouveau tome nécessite une plongée dans les chapitres précédents.

Des mondes parallèles qui interagissent.

NewMoscow3bLa trame de cette trilogie se construit autour du professeur Paskevitch. Ce scientifique a connu beaucoup de bas auparavant. Il a connu les dures prisons moscovites. L’amélioration de sa situation est due à un marché amoral passé avec l’Impératrice. Il doit travailler sur la matière noire permettant de changer de réalité. Cette recherche a pour objectif d’expédier « ailleurs » les plus grands criminels locaux. Nous suivons donc ici la première expérimentation de condamnation. Elle génère un moment fort de l’histoire.

La série s’inscrit dans une thématique classique de la science-fiction : les mondes parallèles. La recette est classique mais rarement bien exécutée. Le traitement est souvent superficiel et privilégie la forme au fond. Corbeyran est ici ambitieux. Il fait interagir ses différents univers avec finesse. Il ne tombe jamais dans la caricature et n’oublie pas ses concepts narratifs de départ. Cela permet donc aux adeptes du genre de savourer avec délectation cet ouvrage. La tension monte tout au long du défilement des pages.

Le contenu est fourni. Chaque planche a son importance et participe à l’avancée de l’intrigue. Elle éveille notre intérêt jusqu’au dénouement. Ce dernier ouvre une porte intéressante vers l’épilogue à venir. L’un des petits plaisirs de cette saga vient des rencontres entre protagonistes de mondes différents. Elles sont toujours pertinentes et apportent systématiquement leur écot aux événements.

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Pour conclure, ce bouquin confirme la qualité de « New Moscow ». Elle occupe à mes yeux la planche royale dans cette décalogie qui se construit. Néanmoins, je ne peux que vous conseiller de découvrir le cycle original avant de plonger dans celui-ci. Cela vous permettra de ne pas vous perdre dans les nombreux arcanes de cette belle aventure…

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Templiers, T2 : Le Graal – Jordan Mechner, LuUyen Pham & Alex Puvilland

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Titre : Templiers, T2 : Le Graal
Scénariste : Jordan Mechner
Dessinateurs : LuUyen Pham & Alex Puvilland
Parution : Avril 2014


« Templiers » est un diptyque né des plumes conjointes de Jordan Mechner, LeUyen Pham et Alex Puvilland. La parution du second tome date d’il y a presque un an. Edité chez Akileos, il s’intitule « Le Graal ». L’histoire se déroule plus près de deux cent cinquante pages. Le format de l’ouvrage est plus proche de celui des comics que des albums franco-belges classiques. La couverture est la même que celle du premier opus. En second plan, se trouvent les ombres de maisons à colombages devant lesquelles combattent des soldats. Le premier plan est occupé par une croix rouge brisée symbolisant la chute du célèbre ordre religieux éponyme.

La quatrième de couverture pose les enjeux de la trame : « Les Chevaliers du Temple. Vénérés pour leur noblesse, leur férocité dans la bataille, et leur dévotion religieuse, les Templiers étaient des chevaliers de Dieu, exempts de tout péché et à l’âme pure. Du moins la plupart d’entre eux. Martin n’est pas exactement le plus opiniâtre ou le plus pieux des chevaliers, mais il parvient à s’échapper quand le roi de France décide d’abattre l’Ordre des Templiers afin de mettre la main sur leur légendaire trésor. Après un temps de souffrance et d’errance, il retrouve d’anciens compagnons et met au point un plan des plus audacieux… voler le plus grand trésor du monde au nez du roi. »

Une chasse au trésor captivante.

J’avais été conquis par le début de l’intrigue. « La Chute » offrait une introduction captivante. On y découvrait des personnages attachants. Leurs faiblesses et leurs mésaventures nous lient tout de suite à leurs destins. La trame se construit essentiellement autour de Martin. Il est passé du statut de chevalier à celui de hors la loi vagabond. Cette chute était habilement contée dans le premier tome. Cette descente aux enfers trouvait son dénouement avec le projet improbable qu’il partage avec deux compagnons d’infortune : mettre la main sur le légendaire trésor des Templiers. Ce second album devait nous raconter cette quête.

Les premières pages nous plongent tout de suite dans les arcanes de leur stratégie. Tout au long de la lecture, j’ai senti monté un suspense fort. Au fur et à mesure qu’ils se rapprochent de leur but, la tension augmente. Ma curiosité est attisée en permanence. L’envie de faire défiler les pages est puissante. Je suis obligé de me retenir de dévorer les planches pour savourer la richesse de chacune d’entre elles. La construction scénaristique est un modèle du genre. L’aventure est au rendez-vous !

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« Templiers » ne se contente pas de nous offrir une chasse au trésor. La qualité d’écriture des différents protagonistes participe au bonheur de la découverte. Les événements ne sont pas prévisibles. La sympathie des héros ne fait qu’accentuer l’inquiétude qu’on ressent à leur égard à chaque étape de leurs pérégrinations. Les auteurs arrivent à greffer toute une série d’intrigues secondaires au fil conducteur, densifiant ainsi le propos. Le travail sur le script est remarquable. En refermant le bouquin, je ressentais encore le parfum de l’aventure. Je pense que je prendrais beaucoup de plaisir à relire cette histoire et à retrouver les pas de Martin et ses acolytes.

Le travail graphique alimente la qualité de l’ensemble. Le trait possède une belle personnalité. LeUyen Pham offre des décors très réussis. L’immersion dans cette société médiévale est splendide. Je ne peux donc que vous conseiller la découverte de cette série. Elle ravira les adeptes d’aventure et d’époque chevaleresque. La légende des Templiers est un support classique de narration épique, elle est ici habilement exploitée. Il ne vous reste plus qu’à rejoindre cette quête mythique…

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note5

Happy parents – Zep

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Titre : Happy parents
Scénariste : Zep
Dessinateur : Zep
Parution : Octobre 2014


Parallèlement à « Titeuf », Zep développe une série « Happy » destinée à un public plus adulte. Après les filles, les concerts et le sexe, voilà « Happy parents ». Une planche, un gag, sur l’enfer que ferait vivre les enfants sur leurs géniteurs. On commence par des bébés et on finit sur les adolescents. Le tout est publié chez Delcourt pour une soixantaine de pages. On pourra remarquer qu’après avoir unifié cette série (puisque « Happy Girls » s’appelait « Les filles électriques » et « Happy rock » « L’enfer des concerts »), l’éditeur s’en éloigne avec une couverture bien différente. Dommage.

Des gags convenus et gentillets

Imaginez-vous écrire une bande-dessinée sur des parents. Vous voyez tout de suite le genre de gags qui va en découdre. « Happy parents » ne fait guère dans l’originalité. Tout est assez convenu et bon enfant. Ne cherchez rien de subversif, ce n’est pas le cas ici. En cela, « Happy parents » est certainement l’album le plus consensuel de la série.

Malgré tout, Zep possède un métier qui permet de faire passer la pilule. Sa gestion de la page pour aller jusqu’à sa chute est vraiment maîtrisée. Si bien que la lecture se fait agréable et on lit l’ensemble avec plaisir. On est quand même loin des BDs de type « Guide du jeune parent ». Zep possède un vrai sens du gag et de la façon de l’amener. Dommage que ses gags en lui-même soient si convenus.

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Le dessin de Zep fonctionne parfaitement ici, avec son trait expressif et dynamique. Les décors sont rares, mais l’auteur ne fait pas dans l’économie. On remarquera notamment les planches quasi-muettes où il semble prendre beaucoup de plaisir à dessiner diverses situations.

« Happy parents » est de la bonne bande-dessinée grand public. C’est bien dessiné, avec un vrai sens du gag et de la chute. Mais cela reste consensuel et gentillet et les blagues et situations ne brillent pas par leur originalité. Un bilan mitigé donc.

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note3

Choc, T1 : Les fantômes de Knightgrave, Première partie

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Titre : Choc, T1 : Les fantômes de Knightgrave, Première partie
Scénariste : Stéphane Colman
Dessinateur : Éric Maltaite
Parution : Avril 2014


« Monsieur Choc apparaît pour la première fois en 1955 dans le journal de Spirou. Créé par le dessinateur Willy Maltaite – dit Will – et par le scénariste Maurice Rosy, Monsieur Choc est alors destiné à devenir l’indestructible adversaire de Tif et Tondu, tandem de héros traditionnels imaginés par Fernand Dineur en 1938. Avec la création du fascinant Monsieur Choc, Will et Rosy auront donné à la bande dessinée l’un des grands méchants emblématiques d’un certain âge d’or franco-belge. Presque cinquante ans après sa dernière apparition dans une aventure de Tif et Tondu, Monsieur Choc revient sur le devant de la scène. Seul, cette fois ».

Ce prologue précède la première planche de « Les fantômes de Knightgrave – Première partie », premier tome d’une nouvelle série intitulée « Choc ». Le caractère historique de son héros a participé à la visibilité de sa sortie il y a près d’un an. Cet aspect n’a pas eu d’influence sur mon attirance à l’égard de cet ouvrage. L’attrait de sa couverture m’a incité à le feuilleter. Cet homme en costume portant un heaume de chevalier faisait naître une forte curiosité à son égard. Debout dans les rayons de la librairie, j’ai commencé à lire les premières pages. Rapidement, j’ai été happé par l’atmosphère qui les habitait. J’ai donc décidé de me l’offrir pour profiter de la suite bien confortablement à la maison.

Une intrigue dense aux arcanes nombreux.

Choc1bMon premier contact s’est fait à travers les planches d’Eric Maltaite. Je les trouve remarquables. Les décors sont sublimes. Qu’ils soient intérieurs ou extérieurs, pleins de vie ou abandonnés, tous possèdent une identité forte. En tant que lecteur, je me suis plongé avec facilité au côté des différents protagonistes en tout lieu et à toute époque. De plus le dessinateur arrive à donner des rythmes très différents mais toujours adaptés à la grande variété des scènes offertes tout au long des quatre-vingt-dix pages de l’album.

« Les fantômes de Knightgrave » présente une intrigue dense aux arcanes nombreux. Maltaire fait preuve de maestria pour jouer avec la chronologie de son récit. Ils alternent les flashbacks et le présent à un rythme d’une rare fréquence. Ce choix narratif impose une concentration constante du lecteur tout en générant une curiosité permanente. La seconde lecture est tout aussi intéressante car elle nous permet de maîtriser dans les détails le grand d’informations abritées dans la trame.

Le ton de l’histoire est biographique. Tout est centré sur ce fameux Monsieur Choc. Les auteurs font le choix de nous conter le cheminement qui l’a mené à son statut de « chevalier maléfique » ou de « crapule publique numéro un ». Même si ce personnage m’était inconnu en ouvrant le bouquin, j’ai rapidement compris qu’il ne faisait pas partie des gentils. Pourtant, à aucun moment au cours de la lecture, je n’ai ressenti de l’animosité ou de l’antipathie à son égard. La subtilité avec laquelle le scénario distille les événements au gré des pages alimente l’empathie ressentie à l’égard de cet homme.

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Je suis vraiment curieux de découvrir la suite de l’histoire. Je guetterai avec curiosité la parution du second tome. Ce premier acte est, à mes yeux, de qualité. Son ton et son propos s’adressent à un public large. Grands comme petits y trouveront leur compte. S’offrir cet album ravira toute la famille. Cette lecture m’incite à me plonger dans les aventures de Tif et Tondu mettant en œuvre ce grand méchant. Je le verrai alors avec un angle différent…

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