WollodrĂŻn, T5 : Celui qui dort, 1/2 – David Chauvel & JĂ©rĂŽme Lereculey

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Titre : WollodrĂŻn, T5 : Celui qui dort, 1/2
Scénariste : David Chauvel
Dessinateur : JĂ©rĂŽme Lereculey
Parution : Octobre 2014


« WollodrĂŻn » ravira les adeptes d’heroĂŻc fantasy et d’univers Ă  la Tolkien. Cette sĂ©rie immerge le lecteur dans un monde peuplĂ© de nains, chevaliers, trolls, orques
 Les lĂ©gendes et la magie sont Ă©galement de sortie. Chacune de ses histoires se dĂ©roule sur deux tomes. Le premier s’intitulait « Le matin des cendres » et le second « Le convoi ». Ma critique porte sur le cinquiĂšme Ă©pisode intitulĂ© « Celui qui dort » qui marque l’entrĂ©e dans un nouveau diptyque.

La couverture prĂ©sente un jeune personnage jusqu’alors inconnu au bataillon. Il apparaĂźt sur la dĂ©fensive. Il accueille le lecteur avec une hache et une masse. Sa main gauche intrigue, elle est munie d’un gant qui illumine la planche. A l’arriĂšre-plan, nous dĂ©couvrons ce qui semble ĂȘtre un tombeau. Est-ce la quĂȘte du hĂ©ros ? Le protĂšge-t-il ?

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Pour en savoir davantage, je me suis orientĂ© vers la quatriĂšme de couverture : « TridĂŻk est un jeune nain romantique. Follement amoureux de la belle MĂ«linhh, il rĂȘve de lui offrir un four une fleur de pierre qu’on ne trouve qu’au plus profond des montagnes. Le jour oĂč l’occasion se prĂ©sente, le jeune prĂ©tendant n’hĂ©site pas une seconde. Son paquetage sur le dos, son fidĂšle petit ami ZzĂŒrk sur l’épaule, il part Ă  l’aventure, ignorant qu’en descendant dans les profondeurs du royaume interdit, il va rĂ©veiller celui qui dort et qu’on ne devrait jamais tirer de son sommeil
 »

Un enfant a priori ordinaire qui est parti pour vivre une aventure extraordinaire.

L’histoire choisit un hĂ©ros classique. TridĂŻk est un enfant a priori ordinaire qui est parti pour vivre une aventure extraordinaire. Il s’agit d’une recette souvent usitĂ©e et qui possĂšde bon nombre d’attraits. Le principal est que la nature du personnage principal gĂ©nĂšre immĂ©diatement de l’empathie Ă  son encontre. Nous l’assimilons Ă  un copain, un frĂšre ou un fils. Il en rĂ©sulte une inquiĂ©tude nĂ©e des dangers qu’il risque d’affronter. Ce sentiment alimente positivement notre curiositĂ©.

Wollodrin5bL’autre apport rĂ©sultant des caractĂ©ristiques de TridĂŻk est qu’il avance vers l’inconnu. Il n’est pas un guerrier lĂ©gendaire qui auraient survĂ©cu Ă  moult batailles, dĂ©couverts des contrĂ©es lointaines et surmontĂ©es une quantitĂ© incommensurable d’épreuves. Par consĂ©quent, il rĂ©agit aux Ă©vĂ©nements au fur et Ă  mesure qu’ils se dĂ©roulent. Il ne prĂ©voit rien car il ne sait rĂ©ellement vers oĂč il se dirige. Cet Ă©tat de fait facilite notre projection dans la quĂȘte de l’enfant. Nous partageons ses interrogations et ses apprĂ©hensions. L’implication dans la lecture n’en est que plus forte.

Concernant l’intrigue en elle-mĂȘme, elle se dĂ©roule Ă  un rythme de croisiĂšre. Elle ne prĂ©sente aucun temps mort et chaque planche apporte son lot d’informations. David Chauvel Ă©crit une trame dense mettant en place un grand nombre de personnages et d’enjeux. Il fait naĂźtre une bonne dose de mystĂšre et pose des jalons intĂ©ressant pour la suite. Nous pouvons lĂ©gitimement nous demander oĂč tout cela nous mĂšne et comment cela va terminer. Par contre, je regrette une absence d’intensitĂ© dramatique. Alors que le fil conducteur laissait croire une avancĂ©e irrĂ©mĂ©diable vers de gros soucis, je trouve qu’au final, TridĂŻk rencontre peu d’embĂ»ches. Sans vous dire que son voyage est comparable Ă  une promenade bucolique, il est moins pĂ©rilleux qu’espĂ©rĂ©. Mais peut-ĂȘtre suis-je trop exigeant


Sur le plan graphique, j’ai retrouvĂ© avec joie les dessins nĂ©s de la plume de JĂ©rĂŽme Lereculey. Ses dĂ©cors sont une petite merveille et font exister un monde fantastique et fascinant. Le dĂ©paysement est total. Les couleurs de Lou doivent Ă©galement recueillir leur lot de louanges. En effet, comment ressentir l’atmosphĂšre oppressante de ces grottes ou le cĂŽtĂ© merveilleux de ces belles forĂȘts sans la touche chromatique adĂ©quate. Je regrette jusque que l’intrigue ait empĂȘchĂ© de dĂ©couvrir de nouvelles trognes de trolls. Je dois avouer qu’il s’agissait d’un de mes petits plaisirs dans les opus prĂ©cĂ©dents.

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Pour conclure, cet album fait honneur Ă  la fantasy. Il offre une intrigue travaillĂ©e, des personnages plutĂŽt rĂ©ussis et un univers identifiable. Je regrette un petit peu une dimension Ă©pique un petit peu lĂ©gĂšre. Peut-ĂȘtre prendra-t-elle son ampleur lors du tome suivant ? Il ne reste plus qu’à attendre pour le savoir


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Note : 15/20

Largo Winch, T19 : ChassĂ©-croisĂ© – Jean Van Hamme & Philippe Francq

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Titre : Largo Winch, T19 : Chassé-croisé
Scénariste : Jean Van Hamme
Dessinateur : Philippe Francq
Parution : Novembre 2014


« Largo Winch » est une des plus cĂ©lĂšbres sĂ©ries de bandes dessinĂ©es. En effet, bon nombre de lecteurs guettent la sortie annuelle de la nouvelle aventure du milliardaire en blue jeans. Je fais partie de ces adeptes qui prennent chaque fois plaisir Ă  dĂ©couvrir les pĂ©rĂ©grinations souvent dangereuses dans les arcanes du monde cruel du grand capital. Le dernier opus en date, le dix-neuviĂšme, s’intitule « ChassĂ©-croisé ». Sa sortie en librairie date du mois de novembre dernier.

La particularitĂ© de cette saga est de se composer de diptyques successifs. Cet album marque donc le dĂ©but d’une nouvelle intrigue qui se conclura l’an prochain avec la parution de « 20 secondes ». Celle-ci dĂ©bute Ă  Londres oĂč Largo se rend pour prĂ©sider le Big Board du groupe W. Comme souvent, rĂ©union de travail et moments plus dĂ©tendus se succĂšdent. Evidemment, la situation se complique avec l’apparition dans le jeu de terroristes djihadistes, d’agents troubles et d’espions vĂ©reux


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Le personnage de Largo Winch est assez unique dans son genre dans le monde du neuviĂšme art. Il est dĂ©crit avec les mots suivants sur la quatriĂšme de couverture : « Sans famille ni attaches, contestataire, coureur, vagabond, iconoclaste et bagarreur, il se retrouve, Ă  vingt-six ans Ă  la tĂȘte d’un empire de dix milliards de dollars  » Par les temps qui courent, il peut paraĂźtre de curieux de choisir comme hĂ©ros un patron milliardaire. Evidemment, le scĂ©nariste Jean Van Hamme, en a fait quelqu’un qui possĂšde une fibre sociale et humaniste plutĂŽt dĂ©veloppĂ©e. Cela Ă©vite de tomber dans la caricature du grand chef d’entreprise.

Le cÎté « superhéros » de Winch fait accepter le cÎté manichéen.

Largo est quelqu’un de sympathique. Le lecteur s’y attache rapidement et ne renie jamais l’affection ressentie Ă  l’égard de ce patron pas comme les autres. A aucun moment, on ne lui envie sa richesse ou son pouvoir. Au contraire, on se laisse fasciner par sa capacitĂ© Ă  dĂ©jouer les manipulations des mĂ©chants capitalistes qui l’entourent. L’ensemble est assez manichĂ©en mais le cĂŽtĂ© « superhĂ©ros » de Winch fait accepter cela sans mal. Comme Indiana Jones a du mal Ă  rester un professeur d’universitĂ©, le milliardaire a du mal Ă  rester dans sa tour et ses bureaux pour mener Ă  bien ses affaires.

LargoWinch19bBien souvent, la premiĂšre partie d’un diptyque a pour objectif de poser la situation, de prĂ©senter les enjeux et de mettre le hĂ©ros dans une situation complexe gĂ©nĂ©rant ainsi un suspense Ă  la fin de la lecture. « ChassĂ©-croisé » n’échappe pas Ă  cette rĂšgle. Les personnages principaux arrivent Ă  Londres, s’installent. Pendant ce temps, des inconnus font leur apparition. On les devine animĂ©s de mauvaises intentions mais les zones d’ombre restent nombreuses. Tout ce petit monde se rencontre et de ces interactions naissent des questions pour l’instant sans rĂ©ponse. La recette est efficace mais exĂ©cutĂ©e ici avec une sensation de paresse. Je n’ai pas retrouvĂ© dans cet album l’intensitĂ© dramatique habituelle. J’avais le souvenir que la lecture d’un tome de cette sĂ©rie Ă©tait toujours accompagnĂ©e du sentiment d’ĂȘtre au beau milieu d’un tourbillon d’évĂ©nements qui ne faisaient qu’aggraver la situation de Largo. Ici, le ton est plus lĂ©ger. Les amourettes des diffĂ©rents personnages tendent presque cette histoire d’espionnage vers le vaudeville.

Sur le plan graphique, j’ai retrouvĂ© avec plaisir le trait de Philippe Francq. Je trouve qu’il possĂšde un talent intĂ©ressant pour faire exister ces atmosphĂšres urbaines. Ses dĂ©cors participent au rĂ©alisme de l’ensemble. Cette sensation est indispensable au plaisir de la lecture. Son travail sur les personnages est de qualitĂ© mais plus classique. NĂ©anmoins, nous n’avons aucun mal Ă  s’approprier les personnages qu’ils nous soient familiers ou de nouvelles rencontres.

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Au final, « ChassĂ©-croisé » est un Ă©pisode honnĂȘte des aventures de Largo. J’ai retrouvĂ© cet univers et ce hĂ©ros avec plaisir et j’ai passĂ© un moment agrĂ©able Ă  dĂ©couvrir ses nouveaux soucis. MalgrĂ© tout, ce tome ne fait pas partie des meilleurs de la sĂ©rie. Le scĂ©nario est quelque peu fainĂ©ant en comparaison des meilleurs opus de la saga. Ces bĂ©mols ne m’empĂȘcheront pas de me jeter sur le vingtiĂšme acte pour connaĂźtre le dĂ©nouement de ce sĂ©jour londonien


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Note : 12/20

Les aventures de Philip et Francis, T3 : S.O.S. mĂ©tĂ©o – Pierre Veys & Nicolas Barral

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Titre : Les aventures de Philip et Francis, T3 : S.O.S. météo
Scénariste : Pierre Veys
Dessinateur : Nicolas Barral
Parution : Septembre 2014


Un des indicateurs d’une sĂ©rie appartenant Ă  l’Histoire du neuviĂšme art est le fait que ses codes ont transpirĂ© de ses albums au point de servir de support Ă  la dĂ©rision et au pastiche. « Blake & Mortimer » possĂšde cette caractĂ©ristique depuis la naissance il y a quelques annĂ©es de sa jumelle caricaturale intitulĂ©e « Les aventures de Philip et Francis ». Elle est le fruit de la collaboration du scĂ©nariste Pierre Veys et du dessinateur Nicolas Barral. Ma critique d’aujourd’hui porte sur son troisiĂšme Ă©pisode « S.O.S. MĂ©tĂ©o » paru en septembre dernier chez Dargaud.

La quatriĂšme de couverture nous offre la mise en bouche suivante : « Tout le monde la sait : le professeur Mortimer est gentil. TrĂšs gentil. Un peu trop, mĂȘme. Ce qui fait que beaucoup de ses proches en abusent largement. Le capitaine Blake s’impose chez Mortimer avec un sans-gĂȘne assumĂ©. Nasir, le fidĂšle serviteur, tient tĂȘte Ă  son maĂźtre, et ose mĂȘme Ă©voquer le hideux concept d’augmentation de ses gages. Les commerçants indĂ©licats le traitent avec mĂ©pris. Les voyous du quartier le martyrisent et l’humilient depuis des annĂ©es
 Mais cela a assez durĂ© ! GrĂące Ă  une terrible invention scientifique, notre charmant professeur va se transformer en une crĂ©ature monstrueuse ! Prisonnier de ses instincts criminels incontrĂŽlables, Mortimer va-t-il l’ennemi public numĂ©ro un ? »

Des références qui raviront les habitués de leurs aventures.

PhilipEtFrancis3b« S.O.S. MĂ©tĂ©o » est clairement un hommage Ă  « S.O.S. MĂ©tĂ©ore » un des plus opus les rĂ©ussis de la saga. Il est d’ailleurs clairement Ă©voquĂ© au cours de l’histoire. La cĂ©lĂšbre machine crĂ©Ă©e par le scientifique Miloch est prĂ©sente. Les rĂ©fĂ©rences Ă  l’univers des cĂ©lĂšbres hĂ©ros britanniques sont frĂ©quentes et raviront les habituĂ©s de leurs aventures. Une connaissance de la sĂ©rie de Jacobs me paraĂźt indispensable pour saisir l’ensemble du spectre humoristique de l’album. Il s’agit d’un pastiche de qualitĂ© dans le sens oĂč les codes originaux sont dĂ©tournĂ©s Ă  de nombreux moments et de nombreuses maniĂšres. L’idĂ©e de dĂ©part est originale et elle s’avĂšre bien exploitĂ©e.

PhilipEtFrancis3cNĂ©anmoins, l’ouvrage peut se lire comme une histoire indĂ©pendante dĂ©nuĂ©e de toute filiation prestigieuse. L’intrigue peut se dĂ©couvrir comme une parodie d’enquĂȘte policiĂšre. Tous les aspects du genre sont tournĂ©s en dĂ©rision. Le travail d’écriture de Pierre Veys est suffisamment important pour offrir une quantitĂ© de gags apprĂ©ciable. L’avancĂ©e est rythmĂ©e et la trame ne possĂšde aucun temps mort. Le sourire guide la lecture du dĂ©but Ă  la fin. C’est un album qui se lit avec bonne humeur.

« S.O.S. MĂ©tĂ©o » est un vrai moment de divertissement. Le scĂ©nario n’est pas lutionnaire, les personnages ne possĂšdent pas une profondeur abyssale, l’atmosphĂšre n’est pas envoutante. MalgrĂ© cela le dĂ©roulement des pages se fait avec plaisir et la curiositĂ© est constante au fur et Ă  mesure que les Ă©vĂ©nements se rĂ©vĂšlent. Sur le plan graphique, le trait de Nicolas Barral accompagne parfaitement la narration. Son dessin participe Ă  l’ambiance dĂ©lurĂ©e et sympathique qui transpire de chaque planche. Son style ne bouleverse pas le neuviĂšme art mais valorise correctement le travail scĂ©naristique.

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Pour conclure, « S.O.S. MĂ©tĂ©o » est un album de qualitĂ©. En dĂ©couvrant le menu, les papilles sont Ă©veillĂ©es. AprĂšs dĂ©gustation, je me suis dit que le plat Ă©tait Ă  la hauteur des attentes. Je pense que tout adepte de « Blake & Mortimer » gagnerait Ă  se plonger dans cet hommage haut en couleur. Ce nouvel album confirme la qualitĂ© du travail collaboratif de Pierre Veys et Nicolas Barral et j’attends avec impatience la suite des pĂ©rĂ©grinations de ces deux hĂ©ros dĂ©lurĂ©s


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Note : 13/20

Kickass 3, T1 : Civil War – Mark Millar & John Romita Jr

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Titre : Kickass 3, T1 : Civil War
Scénariste : Mark Millar
Dessinateur : John Romita Jr
Parution : Mai 2014


J’ai dĂ©couvert l’univers de « Kick Ass » lors de la sortie de son adaptation dans les salles obscures il y a quatre ans. Ce film se dĂ©marquait dans l’univers dense des super hĂ©ros pour plusieurs raisons. La premiĂšre, dĂ©noncĂ©e par bon nombre de critiques lors de sa sortie, Ă©tait la violence qui transpirait de l’écran tout au long de la sĂ©ance. L’idĂ©e de voir une gamine de treize ans trucider des mafieux Ă  tout bout de champ et sans aucun Ă©tat d’ñme avait crĂ©Ă© quelques malaises. La seconde concernait la nature mĂȘme du hĂ©ros. Il Ă©tait un ado geek et transparent. Il n’avait ni pouvoirs, ni fortunes, ni revanches Ă  assouvir. Il Ă©tait juste fan de comics et rĂȘver d’ĂȘtre un super hĂ©ros. L’opus de Matthew Vaughn m’a enthousiasmĂ© et m’a incitĂ© logiquement Ă  partir Ă  la dĂ©couverte du bouquin qui l’a inspirĂ©. Cette aventure est coĂ©crite par Mark Millar et John Romita Jr. Les parutions amĂ©ricaines des mĂ©andres de Dave Lizewski sont Ă©ditĂ©es chez Panini Comics dans la collection 100% Fusion Comics. Depuis, je m’offre les diffĂ©rentes suites pour connaĂźtre le devenir de ce super-hĂ©ros pas comme les autres et de son acolyte Hit Girl.

DerniĂšrement je me suis plongĂ© dans « Kick Ass 3 ». DĂ©coupĂ© en deux parties, ma critique d’aujourd’hui porte sur la premiĂšre d’entre elles intitulĂ©e « Civil War ». Elle est apparue dans les librairies au mois de mai dernier. A l’image des opus prĂ©cĂ©dents, elle se compose de cent vingt planches et regroupe les cinq Ă©pisodes amĂ©ricains initiaux de « Kick Ass 3 ». Le tome prĂ©cĂ©dent s’était conclu par une bataille rangĂ©e entre les gentils et les mĂ©chants costumĂ©s. Cette guerre sanglante avait Ă©videmment des consĂ©quences pour nos deux hĂ©ros. Dave avait poussĂ© son ennemi historique et l’avait laissĂ© dans la rue les os brisĂ©s. De son cĂŽtĂ©, Hit Girl avait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© et s’apprĂȘtait Ă  passer une grande partie des annĂ©es Ă  venir derriĂšre les barreaux. L’éditeur offre un rĂ©sumĂ© prĂ©cis et concis des Ă©vĂ©nements passĂ©s et permet ainsi de commencer la lecture avec des prĂ©requis solides.

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Une introspection s’impose.

J’étais curieux de savoir quelle voie allait prendre l’intrigue. En effet, Hit Girl est emprisonnĂ©. Le grand mĂ©chant est hospitalisĂ© pour quelques temps. La quĂȘte de Kick Ass semblait ĂȘtre terminĂ©e. La logique voulait qu’il entre dans une routine de ronde dans les rues de la ville avec ses collĂšgues super hĂ©ros pour aider la veuve et l’orphelin. Evidemment, la confrĂ©rie se fixe rapidement pour mission de dĂ©livrer leur mythique alliĂ©e en organisant son Ă©vasion. Mais le projet est de bien trop grande ampleur pour chacun d’entre eux et leur quĂȘte reste Ă  l’état de mission. Finalement, l’essentiel de la trame se construit autour du personnage de Dave et l’introspection qu’il s’impose. Ses rĂȘves de justicier existent toujours mais la dure rĂ©alitĂ© qu’il a vĂ©cue a tendance Ă  lui rappeler l’attrait d’une vie plus classique. Dave rencontre l’amour et sa nouvelle relation cohabite difficilement avec ses nuits en costume. MĂȘme si ce dilemme n’est pas novateur, il est intĂ©ressant ici tant l’identification avec le hĂ©ros est plus Ă©vident qu’avec un riche hĂ©ritier ou un Ă©tudiant piquĂ© par une araignĂ©e radioactive. Il s’agit, Ă  mes yeux, de l’aspect le plus prenant de la lecture. On erre dans les pas d’un adolescent qui a Ă©tĂ© dĂ©passĂ© par les Ă©vĂ©nements et qui essaie tant bien que mal de remettre sa vie Ă  l’endroit sur des rails moins fragiles.

Kickass3bParallĂšlement, les auteurs font exister Hit Girl et Mother Fucker. La premiĂšre gĂšre de maniĂšre dictatoriale la prison et chacune de ses apparitions sont drĂŽles tant elles sont dĂ©mesurĂ©es et insensĂ©es. Une des forces de la saga est de rendre cohĂ©rent et crĂ©dible dans son univers ce personnage. On est plus choquĂ© de voir une petite fille fumer une clope ou torturer un mafieux de passage. Sa part de l’histoire est incontestablement, par ses excĂšs, la plus lĂ©gĂšre et celle qui utilise le plus l’humour. De son cĂŽtĂ©, les moments passĂ©s auprĂšs de Mother Fucker semblent avoir pour objectif de reconstruire un monstre aux abois jusqu’alors. On sent la montĂ©e en puissance vers un affrontement final. Sans tout vous dĂ©voiler, il faut savoir que le camp des mĂ©chants s’agrandit et se complexifie lĂ©gĂšrement.

Concernant les dessins, ils sont dans la lignĂ©e du reste de la sĂ©rie. Je ne suis pas un grand fan du trait qui m’apparaĂźt moins travaillĂ© que dans certaines sagas plus classiques et europĂ©ennes. NĂ©anmoins, les personnages sont aisĂ©ment assimilables et l’univers urbain dans lequel ils gravitent est crĂ©dible. La force du style de John Romita Jr est de faire gicler le sang et de montrer la violence avec Ă©clats et sans aucun tabou. De ce fait, cet ouvrage n’est pas Ă  mettre en toutes les mains. L’animalitĂ© des affrontements est montrĂ©e sans aucun filtre. Cela fait partie de l’identitĂ© de l’Ɠuvre mais pourra lĂ©gitimement en dĂ©tourner certains lecteurs.

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Pour conclure, ce nouveau tome offre une suite honnĂȘte aux pĂ©rĂ©grinations de Dave. La qualitĂ© est comparable Ă  celle qui accompagnait la lecture des prĂ©cĂ©dents albums. Nous pourrons toujours regretter que l’intrigue ne soit pas sublimĂ©e et ne prenne pas un nouvel envol plus enthousiasmant. La flamme est entretenue sans pour autant ĂȘtre ardemment alimentĂ©e. Il faudra s’en contenter


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Note : 12/20

La guerre des Sambre, Maxime & Constance, T1 : Automne 1775, la fiancĂ©e de ses nuits blanches – Yslaire & Marc-Antoine Boidin

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Titre : La guerre des Sambre, Maxime & Constance, T1 : Automne 1775, la fiancée de ses nuits blanches
Scénariste : Yslaire
Dessinateur : Marc-Antoine Boidin
Parution : Septembre 2014


« Sambre » est une Ɠuvre majeure des trente derniĂšres annĂ©es dans le neuviĂšme art. L’Ɠuvre d’Yslaire est assez unique dans son genre. Tant sur le plan graphique que scĂ©naristique, elle possĂšde une identitĂ© forte qui a su aisĂ©ment me conquĂ©rir. La naissance de la saga date de 1986. Depuis, Yslaire a offert Ă  sa trame principale des appendices qui nous Ă©clairaient sur le passĂ© de cette famille maudite. Ces dĂ©veloppements narratifs prennent la forme de trilogie centrĂ©e sur une Ă©poque et un couple d’ancĂȘtres de Bernard et Julie. « Hugo & Iris » et « Werner & Charlotte » Ă©taient les premiĂšres Ă  naĂźtre. « Maxime & Constance » est la derniĂšre en date.

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C’est le premier tome de cette nouvelle histoire que ma critique traite aujourd’hui. Il s’intitule « Automne 1775 ». MalgrĂ© son insertion dans une toile scĂ©naristique dense, cet album peut se lire sans nĂ©cessairement possĂ©der de gros prĂ©requis de l’univers de « Sambre ». NĂ©anmoins, en maĂźtriser les arcanes permet de saisir certains moments ou certaines informations avec un angle de vue plus riche.

Une famille vouée à ne connaßtre que le malheur.

Les Sambre sont une famille vouĂ©e Ă  ne connaĂźtre que le malheur. En effet, tous les membres dont j’ai eu jusqu’alors dĂ©couvert les vies n’ont connu que souffrance, douleur et dĂ©chĂ©ance. Cet album ne dĂ©roge pas Ă  la rĂšgle en offrant une introduction des plus intenses. Les rĂ©vĂ©lations faites Ă  Charlotte ne peuvent laisser personne indemnes. Le moins qu’on puisse dire est que c’est une armĂ©e de cadavres qui emplissent les armoires du passĂ© familial.

Il est intĂ©ressant de se plonger dans une histoire qui a de grandes chances de mal se terminer. En effet, il est rare d’ĂȘtre rĂ©signĂ© Ă  une issue fatale dĂšs la dĂ©couverte des premiĂšres pages. En tant que lecteur, j’ai acceptĂ© que la malĂ©diction qui domine cette famille soit telle que garder espoir est sans intĂ©rĂȘt. MalgrĂ© cela, je reste curieux de rencontrer ces nouveaux jeunes membres de la saga. Maxime-Augustin est le personnage central de cette nouvelle trilogie. Nous le dĂ©couvrons enfant puis le voyons grandir jusqu’à devenir un jeune adulte.

Son quotidien est rude. Les moments de bonheur sont rares et sont perçus par le lecteur comme des respirations entre deux scĂšnes plus difficiles. Les auteurs arrivent Ă  gĂ©nĂ©rer le malaise avec finesse et offre ainsi une lecture qui ne laisse pas indiffĂ©rent. Les Ă©preuves subies par le personnage principal devraient faire naĂźtre une empathie naturelle Ă  son Ă©gard. Ce n’est pas totalement le cas tant Maxime-Augustin inquiĂšte plus qu’il ne touche. Son dĂ©veloppement personnel en fait quelqu’un de trouble. Sur ce point, le travail d’écriture est remarquable.

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Le bĂ©mol rĂ©side davantage dans la trame gĂ©nĂ©rale. Ce premier acte se contente d’ĂȘtre une introduction Ă  la suite des Ă©vĂ©nements. Au final, il se passe peu de choses. La narration avance Ă  un rythme de sĂ©nateur. Certaines transitions auraient pu ĂȘtre traitĂ©es de maniĂšre plus courtes et densifier ainsi le propos. Une fois la lecture terminĂ©e, j’ai eu le sentiment que l’intrigue allait enfin pouvoir dĂ©marrer rĂ©ellement. Je ne dis pas que cet opus est creux. C’est loin d’ĂȘtre le cas. Mais je pense que le fil narratif aurait pu se dĂ©rouler un petit peu plus rapidement.

Une des richesses de cette grande saga est son immersion dans l’Histoire. Le travail de reconstitution apparait sĂ©rieux. Les auteurs n’hĂ©sitent pas Ă  intĂ©grer de grands moments historiques dans le quotidien de ses personnages. Cette prĂ©sence est moins forte dans cette trilogie que dans la prĂ©cĂ©dente. Ce n’est pas dĂ» Ă  une fainĂ©antise du scĂ©nario mais plutĂŽt au changement de statut social des Sambre. MalgrĂ© tout, l’atmosphĂšre de cette fin du dix-huitiĂšme siĂšcle transpire de chaque page et apporte un Ă©cot Ă  la qualitĂ© de l’ensemble.

Tout cela est sublimĂ© par le trait de Marc-Antoine Boidin. Il Ă©tait dĂ©jĂ  Ă  l’Ɠuvre dans la trilogie prĂ©cĂ©dente et confirme ici son talent d’illustrateur. Que ce soit les dessins ou les couleurs, tout est splendide. Il arrive Ă  respecter le style original d’Yslaire tout en y apportant sa touche personnelle. La couverture est rĂ©ussie et dĂšs la premiĂšre page, le charme agit. Chapeau !

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Pour conclure, « Maxime & Constance – Automne 1775 » prĂ©sente une mise en bouche agrĂ©able au palais mĂȘme si la quantitĂ© apparait un petit peu lĂ©gĂšre. NĂ©anmoins, ce premier acte m’incite Ă  dĂ©guster la suite avec appĂ©tit et curiositĂ©. Ce n’est pas si mal, me semble-t-il


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Note : 13/20

Lune l’envers – Blutch

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Titre : Lune l’envers
Scénariste : Blutch
Dessinateur : Blutch
Parution : Janvier 2014


Blutch reste l’un des auteurs de bande-dessinĂ©e que j’admire le plus. La variĂ©tĂ© des moyens avec lesquels il a pu me toucher en tant que lecteur m’étonne toujours. De ses histoires d’enfance (« Le petit Christian »), Ă  l’humour grinçant (« Blotch ») en passant par le dĂ©stabilisant « Vitesse moderne », j’ai eu droit Ă  tous les sentiments. Cependant, cette force dans la variĂ©tĂ© a fait que je suis Ă©galement passĂ© Ă  cĂŽtĂ© de certains ouvrages
 « Lune l’envers » est un nouveau one-shot publiĂ© par l’auteur chez Dargaud. Le livre se prĂ©sente sous la forme d’un album classique d’une cinquantaine de pages.

LuneLenvers2Quel est le rĂ©el sujet de « Lune l’envers » ? Difficile de le dire. ProfondĂ©ment narcissique (plusieurs personnes sont Blutch), on peut y voir une sorte de fable surrĂ©aliste sur le milieu de la bande-dessinĂ©e (et de l’art en gĂ©nĂ©ral). Mais les critiques sur le monde du travail sont Ă©galement bien prĂ©sentes. L’auteur nous montre notre sociĂ©tĂ©, façon futur dystopique. C’est affreux, sans aucune morale et les mĂ©chants gagnent Ă  la fin. Et devant le cĂŽtĂ© absurde de certaines situations, il va falloir s’accrocher.

Combattre l’aseptisation

Un peu abrupte dans son dĂ©but, l’ouvrage s’éclaircit au fur et Ă  mesure des pages. Les tenants et les aboutissants se dĂ©voilent et le puzzle se constitue. De façon gĂ©nĂ©rale, l’ouvrage s’attaque Ă  l’aspect aseptisĂ© et bien pensant qui s’installe dans notre monde. Ainsi, un jeune Ă©diteur (qui porte le nom
 BlĂŒtch !) dĂ©clare : « votre projet est conventionnel, poussif, sans Ă©lan
 Parfaitement inoffensif
 Bravo, mon vieux. On va vous prĂ©parer un contrat. » C’est le message qui dĂ©coule de l’histoire.

ForcĂ©ment, en crachant dans la soupe et en flinguant tout le monde (de l’auteur indĂ© Ă  l’auteur mainsteam, en passant par l’éditeur), Blutch se devait d’ĂȘtre cohĂ©rent. C’est le cas ! Son rĂ©cit est complexe et riche, son graphisme excellent. J’ai depuis longtemps Ă©tĂ© sĂ©duit par le trait de l’auteur, mais il adopte ici une esthĂ©tique qui rappelle les annĂ©es 70, impression renforcĂ©e par des couleurs originales et marquantes.

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Critiquer l’univers de la BD est facile, le faire avec une telle crĂ©ativitĂ© est une autre paire de manches. Blutch confirme ici, si besoin Ă©tait, son grand talent et sa virtuositĂ©. « Lune l’envers » est un ouvrage corrosif et riche. Une belle Ă©popĂ©e surrĂ©aliste dans le monde d’édition de bande-dessinĂ©e !

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Note : 16/20

Ekhö, monde miroir, T3 : Hollywood boulevard – Christophe Arleston & Alessandro Barbucci

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Titre : Ekhö, monde miroir, T3 : Hollywood boulevard
Scénariste : Arleston
Dessinateur : Alessandro Barbucci
Parution : Novembre 2014


 La publication du premier tome de « Ekhö » avait redonnĂ© un peu des lettres de noblesse Ă  Christophe Arleston. Le scĂ©nariste, qui s’était essoufflĂ© depuis bien longtemps, avait crĂ©Ă© un monde parallĂšle au nĂŽtre, mais oĂč l’électricitĂ© n’existait pas et oĂč les dragons servaient de transport en commun. AidĂ© par le dessin virtuose d’Alessandro Barbucci, les critiques avaient Ă©tĂ© trĂšs positives (peut-ĂȘtre un peu excessives d’ailleurs). Maintenant que le tome 3 est de sortie, oĂč en est cette sĂ©rie de fantasy si proche de notre propre univers ?

ekho3aA chaque tome sa ville et son intrigue. AprĂšs New York et Paris, voilĂ  Hollywood. MalgrĂ© tout, mieux vaut avoir lu les prĂ©cĂ©dents tomes pour profiter pleinement de l’ouvrage. Mais le parallĂšle entre les deux univers est surtout construit autour des personnages de Fourmille et Yuri, qui sont obligĂ©s de rester groupĂ© aprĂšs avoir perturbĂ© l’équilibre entre les deux mondes. Force est de constater qu’au troisiĂšme tome, ils sont dĂ©jĂ  intĂ©grĂ© au monde et rien ne semble plus les Ă©tonner. Le dĂ©calage entre notre univers et celui de fantasy est digĂ©rĂ©. Dommage.

Un tome, une ville.

Un peu comme un cheveu sur la soupe, il arrive que Fourmille soit habitĂ©e par des fantĂŽmes et elle doit rĂ©soudre leurs problĂšmes afin de ne plus ĂȘtre habitĂ©e. Quand c’est le cas, sa coiffure change. Ce systĂšme est un peu Ă©trange et semble conçu avant tout pour crĂ©er des scĂšnes cocasses oĂč Fourmille ne rĂ©agit plus normalement, mais comme d’autres personnes, souvent hautes en couleur.

ekho3bLe principe du monde miroir permet Ă  Arleston de s’adonner Ă  son jeu prĂ©fĂ©ré : jouer avec les rĂ©fĂ©rences. HĂ©las, tout est trĂšs appuyĂ©. Alors que dans les tomes prĂ©cĂ©dents, il dĂ©tournait certains lieux (le central park sauvage, la tour Eiffel comme palais
), ici on a surtout l’impression de revoir l’histoire entre Marilyn et JFK. Et au final, le fil rouge gĂ©nĂ©ral disparaĂźt complĂštement. On n’avance pas du tout sur les mystĂ©rieux Preshauns par exemple. AprĂšs trois tomes, c’est un peu inquiĂ©tant. Arleston a trouvĂ© un bac Ă  sable oĂč il peut donner libre cours Ă  ses envies, mais il manque du coup du fond pour pouvoir nous emballer pleinement. Surtout que l’aspect « fantasy » et monde parallĂšle est peu fourni dans ce tome, comme si tout avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© Ă©puisĂ©.

Au niveau du dessin, Barbucci fait des merveilles. On sent un dessinateur au sommet de son art, tant dans le dessin des personnages (surtout des femmes !), des dĂ©cors, du dynamisme, de la mise en scĂšne
 Bref, c’est du trĂšs lourd. HĂ©las, sa Marilyn (enfin, Norma Jean) ressemble beaucoup Ă  Fourmille et les changements de coiffure ne rendent pas ça trĂšs flagrant. De mĂȘme, sa propension Ă  tout dessiner pour faire des femmes nues ou des dĂ©colletĂ©s plongeants en permanence finit par lasser. Mais force est de constater que c’est un formidable dessinateur de pin-ups.

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J’ai Ă©tĂ© déçu par cet ouvrage. MalgrĂ© une belle idĂ©e de dĂ©part et un dessin de haute volĂ©e, difficile de se passionner par cet amoncellement de rĂ©fĂ©rences sans rĂ©elle histoire, ni dans le tome, ni dans la sĂ©rie. Le systĂšme « un tome, une ville » semble atteindre ses limites ici. Dommage.

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Note : 10/20

L’atelier mastodonte, T2 : Alfred, Guillaume Bianco, BenoĂźt Feroumont, Keramidas, Julien Neel, Nob, Tebo, Lewis Trondheim & Yoann

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Titre : L’atelier Mastodonte, T2
Scénaristes : Alfred, Guillaume Bianco, Benoßt Feroumont, Keramidas, Julien Neel, Nob, Tebo, Lewis Trondheim & Yoann
Dessinateurs : Alfred, Guillaume Bianco, Benoßt Feroumont, Keramidas, Julien Neel, Nob, Tebo, Lewis Trondheim & Yoann
Parution : Juin 2014


« L’atelier Mastodonte » est un projet original nĂ© dans les pages de Spirou. Il est l’Ɠuvre conjointe de neuf auteurs : Alfred, Bianco, Feroumont, Keramidas, Neel, Nob, Tebo, Trondheim et Yoann. Certains me sont familiers depuis longtemps, d’autres sont entrĂ©s rĂ©cemment dans mon univers. Chaque planche de cet ouvrage au format Ă  l’italienne est dessinĂ© avec un trait diffĂ©rent, le tout format un ensemble cohĂ©rent et drĂŽle.

Une diversité des personnalités.

L'atelierMastodonte2bLe bouquin se compose de cent vingt-six planches. Chacune peut ĂȘtre lue indĂ©pendamment tout en Ă©tant liĂ©e Ă  la prĂ©cĂ©dente ou Ă  la suivante. L’originalitĂ© de la structure du propos possĂšde un rĂ©el potentiel. La diversitĂ© des personnalitĂ©s doit relancer en permanence l’attrait du lecteur. De plus, le principe du strip booste l’intensitĂ© de la lecture. A l’opposĂ©, il faut veiller Ă  ne pas diffuser une impression de fouillis brouillon.

Le point de dĂ©part de l’histoire est le suivant : Trondheim crĂ©e un atelier regroupant ses collĂšgues prĂ©cĂ©demment citĂ©s. Cet album nous plonge dans le quotidien crĂ©atif de cette troupe de joyeux lurons. La dimension despotique de Lewis est moins mise en avant que dans le premier tome. MalgrĂ© tout, cela reste un fil conducteur efficace sur le plan humoristique. Chaque apparition du chef  fait sourire sans difficulté ! Certains lecteurs reprochaient Ă  l’opus prĂ©cĂ©dent les blagues trop systĂ©matiquement scatologiques mettant en scĂšne Tebo. Cet aspect est toujours prĂ©sent mais peut-ĂȘtre dissĂ©minĂ© avec davantage de parcimonie.

Mais cette suite ne se rĂ©sume pas Ă  une redondance des mĂ©canismes comiques dĂ©jĂ  utilisĂ©s. Les protagonistes dĂ©cident de dĂ©placer leur lieu de travail dans un superbe chĂąteau. Cela donne lieu Ă  des histoires de chevaliers, de fantĂŽmes et de siestes en forĂȘt. Cela offre un second souffle intĂ©ressant Ă  l’histoire et chatouille aisĂ©ment les zygomatiques. Les auteurs alternent ces vacances studieuses Ă  la campagne avec d’autres scĂšnes dans l’atelier parisien. Elles mettent en scĂšne deux auteurs qui se font passer pour Trondheim. Cela permet Ă  la narration de ne pas ronronner.

La grande diversitĂ© d’auteurs est une force narrative importante. Chacun possĂšde son trait, son ton et sa corde humoristique. L’ensemble s’harmonise plutĂŽt bien et offre une lecture pleine de surprises et de rebondissements. Je connaissais la majoritĂ© d’entre eux de noms mais j’ai pris plaisir Ă  dĂ©couvrir leur style et une petite partie de leur univers. Tous rĂ©unis opĂšrent sur un spectre suffisamment large pour attiser notre curiositĂ© de maniĂšre constante.

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Le bilan est trĂšs positif. Ce second opus donne la banane. Il peut se lire d’une traite dans son lit ou se feuilleter dans les transports en commun. Sa construction scĂ©naristique couplĂ©e Ă  sa petite taille en fait un compagnon en toute circonstance. Le dĂ©nouement laisse croire qu’il n’y aura pas de suite. J’espĂšre l’avoir mal compris et m’ĂȘtre trompĂ© car je regretterai de ne pas suivre les nouvelles aventures de ces joyeux lurons


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Note : 14/20

Slhoka, T8 : L’Ă©pingle des Ă©phĂ©mĂšres – Ulrig Godderidge & Ceyles

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Titre : Slhoka, T8 : L’Ă©pingle des Ă©phĂ©mĂšres
Scénariste : Ulrig Godderidge
Dessinateur : Ceyles
Parution : Juin 2014


« Slhoka » est une sĂ©rie qui, de mon point de vue, se dĂ©tĂ©riore depuis que les auteurs ont dĂ©cidĂ© de lui offrir un second cycle. La premiĂšre tĂ©tralogie Ă©tait rythmĂ©e et divertissante. Elle ne rĂ©volutionnait pas le genre « space fantasy » mais offrait un moment agrĂ©able de lecture. Le scĂ©nariste Ulrig Godderidge et le dessinateur Ceyles ont dĂ©cidĂ© de poursuivre les aventures de ce hĂ©ros au puissant pouvoir. « L’Epingle des EphĂ©mĂšres » est le huitiĂšme acte de la saga et s’inscrit dans cette suite se dĂ©roulant dix ans aprĂšs l’histoire initiale. Je dois vous avouer que les trois tomes prĂ©cĂ©dents m’ont Ă©normĂ©ment déçu. NĂ©anmoins, je suis un lecteur fidĂšle et ai du mal Ă  renier une sĂ©rie que j’ai entamĂ©e. Ainsi, je suis parti Ă  la dĂ©couverte de cette nouvelle aventure avec quelques apprĂ©hensions teintĂ©es d’un lĂ©ger espoir d’amĂ©lioration


L’épisode prĂ©cĂ©dent avait laissĂ© Slhoka prisonnier du JĂ€ipurna, dimension parallĂšle habitĂ©e par les Dieux. Son retour dans la rĂ©alitĂ© s’avĂšre complexe. Le rĂ©sultat est que Shani a envahi et son enveloppe corporelle et que M’Ma Bay abrite son esprit tout en essayant de la dominer. La situation est claire et explicitĂ©e dĂšs les premiĂšres pages. Les enjeux sont simples. Il faut mettre la main sur Shani tout en empĂȘchant l’ñme de M’Ma Bay de dominer celle du hĂ©ros.

Pour les adeptes de vaudou et d’esprit possĂ©dĂ©…

Le souci rencontrĂ© au cours de la lecture est que la situation finale ressemble comme deux gouttes d’eau Ă  la situation initiale. La diffĂ©rence est que l’esprit n’habite plus une vieille dame aux pouvoirs intrigants mais une jolie jeune femme Ă  l’ambition dĂ©vorante. Sorti de cela, il ne se passe rien ! Quarante-six pages pour si peu ! La trame a le droit de faire une pause mais dans ce cas, il faut compenser avec autre chose. Cela peut-ĂȘtre de l’action, de l’humour ou de l’émotion
 Il n’y a rien de tout cela. On se contente de suivre un petit groupe dĂ©ambuler dans ce qui ressemble Ă  un bayou de Louisiane
 Les seuls Ă©vĂ©nements qui agrĂ©mentent leurs pĂ©rĂ©grinations sont des crises existentielles et rĂ©pĂ©titives de deux esprits cohabitant dans un mĂȘme corps.

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Je regrette qu’une nouvelle fois SvendaĂŻ et Kraa soient absents de l’histoire. La premiĂšre est une jeune femme avec une forte personnalitĂ© dont la relation avec Slhoka est centrale dans l’univers de la saga. Le second est un soldat efficace au caractĂšre bourru qui participe activement Ă  la fibre humoristique de l’ensemble. Leurs mises en hibernation est une raison de la baisse de qualitĂ© de la sĂ©rie. De mon point de vue, les pĂ©ripĂ©ties des deux derniers tomes auraient pu aisĂ©ment tenir dans un seul opus sans ĂȘtre particuliĂšrement dense. Les auteurs diluent leur intrigue. Est-ce pour faire durer le plaisir ou parce qu’ils ne savent pas oĂč ils vont ? Dans les cas, cela donne un rĂ©sultat narratif particuliĂšrement faible.

Sur le plan graphique, il n’y a rien de rĂ©volutionnaire Ă  signaler. Je n’ai pas Ă©tĂ© un grand fan du changement de dessinateur opĂ©rĂ© aprĂšs le troisiĂšme acte. Depuis, je ne peux pas dire que le style de Ceyles m’ait conquis. Je trouve que son style manque de personnalitĂ© et que les dĂ©cors sont dĂ©nuĂ©s d’atmosphĂšres. Je n’ai ressenti ni dĂ©paysement ni oppression ni angoisse. Pourtant le dĂ©roulement du scĂ©nario laissait de la place Ă  une ambiance dense et prenante. Mais l’occasion n’a pas Ă©tĂ© saisie et c’est regrettable. NĂ©anmoins, il Ă©tait difficile de sublimer une trame manquant autant d’aspĂ©ritĂ©s.

Vous l’aurez compris, « L’Epingle des EphĂ©mĂšres » ne m’a pas enthousiasmĂ©. Cet opus confirme la dĂ©liquescence de « Slhoka ». Je trouve triste qu’une aventure initialement sympathique et divertissante traine autant en longueur qu’elle en devient horripilante et frustrante. Je doute fortement que la chute en cours puisse ĂȘtre suivie d’une remontĂ©e fut elle lĂ©gĂšre
 Mais qui sait ? L’espoir fait vivre


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Note : 4/20

Block 109, S.H.A.R.K. – Vincent Brugeas & Ryan Lovelock

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Titre : Block 109, S.H.A.R.K.
Scénariste : Vincent Brugeas
Dessinateur : Ryan Lovelock
Parution : FĂ©vrier 2012


Ronan Toulhoat et Vincent Brugeas sont les auteurs d’une uchronie particuliĂšrement rĂ©ussie : « Block 109 ». Ce roman graphique paru il y a plus de quatre ans prend ses libertĂ©s avec l’Histoire en faisant assassiner Adolf Hitler le 22 mars 1941. Suite Ă  son succĂšs, la sĂ©rie a fait des petits. Cinq spin-off sont nĂ©s depuis. Le dernier en date, Ă©ditĂ© cette annĂ©e chez Akileos, s’intitule « S.H.A.R.K. ». C’est sur cet album que se porte ma critique.

La quatriĂšme de couverture Ă©voque le contexte de l’histoire : «  Novembre 1946, le prisonnier Worth, membre du S.H.A.R.K., un parti politique raciste australien, est transfĂ©rĂ© au centre de dĂ©tention de Rabbit Flat, le plus grand camp de prisonniers d’Australie regroupant prĂšs de 4000 dĂ©tenus de guerre allemands, dont une majoritĂ© de SS, ainsi que des activistes du S.H.A.R.K. » 

À chaque opus son identitĂ©.

Block109Shark1Chaque nouvel opus de la saga s’insĂšre dans des contextes gĂ©ographiques et politiques diffĂ©rents. Chacun possĂšde une identitĂ© propre et la plupart du temps emballante. Le dernier Ă©pisode en date n’échappe Ă  la rĂšgle en immergeant le lecteur en Australie au milieu d’une prison perdue au milieu de nulle part. Je dois vous avouer que le dĂ©cor m’attirait beaucoup. La perspective d’ĂȘtre enfermĂ©e dans un huis clos carcĂ©ral semblait ĂȘtre un terreau fertile Ă  une atmosphĂšre oppressante et envoĂ»tante. Il s’agit d’une recette scĂ©naristique classique mais qui, bien exĂ©cutĂ©e, peut offrir une savoureuse dĂ©gustation.

La narration dĂ©but par l’apparition d’un nouveau « locataire ». Worth est amenĂ© Ă  jouer un rĂŽle central au cours des Ă©vĂ©nements qui nous sont contĂ©s. Sa prĂ©sence sur la couverture confirme ce statut Ă  venir. Il s’agit d’une tĂȘte brĂ»lĂ©e qui a des rapports conflictuels avec l’autoritĂ©. Ce n’est pas original mais toujours efficace. A peine arrivĂ©, il envisage dĂ©jĂ  de se faire la malle. Pour cela, il doit entrer en contact avec Otto, un ancien de la SS, qui s’avĂšre ĂȘtre le patron officieux des lieux.

L’intrigue se construit donc autour de la mise en place d’un putsch. Evidemment, tout cela n’est pas un long fleuve tranquille. Otto et Worth doivent apprendre Ă  se connaĂźtre et doser leurs confiances respectives. Il y a aussi le montage pratique de leur tentative de prise de pouvoir. Les auteurs font exister un grand nombre de personnages secondaires plutĂŽt rĂ©ussis. Ils participent Ă  la crĂ©dibilitĂ© de cet univers. NĂ©anmoins, l’atmosphĂšre n’atteint jamais la densitĂ© que le pitch laissait espĂ©rer. Rien n’est bĂąclĂ©, loin s’en faut. Le travail est sĂ©rieux et appliquĂ©. Mais la sauce ne prend jamais autant que dĂ©couverte de la trame le prĂ©sageait. L’histoire se dĂ©roule avec plaisir mais sans ĂȘtre aussi dense que d’autres Ă©pisodes de la saga.

Ce nouveau tome se démarquait des précédents par un changement de dessinateur. TrÚs occupé par « Chaos Team », Ronan Toulhoat passait son tour pour illustrer ce « S.H.A.R.K ». Le travail est donc ici confié à Ryan Lovelock dont je découvre le trait à cette occasion. La transition se fait sans mal tant le style du nouveau est dans la ligné de celui de son prédécesseur. Que ce soit les personnages ou les décors, tout est réussi. Que ce soit les gros plans ou les visions larges, ils sont remarquables. De plus, les dessins participent activement à la nervosité qui habite les planches.

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Pour conclure, « S.H.A.R.K. » est un acte intĂ©ressant de la grande piĂšce qu’est « Block 109 ». MalgrĂ© tout, je n’y ai pas retrouvĂ© l’intensitĂ© et la force de « OpĂ©ration Soleil de Plomb » ou « New York 1947 ». Il satisfera les adeptes de la sĂ©rie et rassurera les lecteurs qui apprĂ©hendaient l’absence de Ronan Toulhoat aux dessins. Ryan Lovelock est aisĂ©ment adoubĂ© aprĂšs sa performance graphique dans cet album. « Block 109 » confirme son statut d’uchronie de qualitĂ©. Il ne me reste plus qu’à espĂ©rer que les prochains tomes confirmeront cet Ă©tat de fait. Mais cela est une autre histoire


gravatar_eric

Note : 13/20