Titre : Shenzhen
Scénariste : Guy Delisle
Dessinateur : Guy Delisle
Parution : Avril 2000
Avec ses quatre carnets de voyage, Guy Delisle a fini par obtenir un prix Ă AngoulĂȘme pour « Chroniques de JĂ©rusalem ». Mais tout a commencĂ© Ă 2000 avec Shenzhen, oĂč il relate son expĂ©rience en Chine, dans la ville de Shenzhen. Si Guy Delisle a visitĂ© des pays trĂšs diffĂ©rents (Chine, CorĂ©e du Nord, Birmanie, IsraĂ«l), il en rĂ©cupĂšre Ă chaque fois tout ce qui en fait le dĂ©calage culturel. En passant plusieurs mois sur place, il sâapproprie rĂ©ellement la vie locale. Le tout est publiĂ© Ă LâAssociation pour 150 pages de dĂ©calage culturel.
Ă lâĂ©poque, Guy Delisle travaille dans lâanimation. Cette derniĂšre Ă©tant dĂ©localisĂ©e en Asie (en Chine donc, puis en CorĂ©e du Nord), il part superviser les Ă©quipes locales et vĂ©rifier que les plans sont correctement faits. Câest lâoccasion dâun premier choc culturel sur la façon de travailler des ChinoisâŠ
Le Lost in translation de la bande-dessinée
Lâautre partie est bien Ă©videmment le choc culturel avec le pays. La Chine nâest pas le pays le plus ouvert du monde et les problĂšmes de passages dans certaines zones le montre bien. Mais surtout, la langue est un vrai souci. Peu de chinois parlent anglais et beaucoup le parlent trĂšs mal. Guy Delisle est donc souvent dans lâincapacitĂ© de communiquer et passent des week-ends seuls⊠Sur ce point, on ressent parfaitement le cĂŽtĂ© « Lost in translation ». Seul membre occidental Ă ĂȘtre venu sur place, il est trĂšs isolĂ©. De plus, la Chine ne propose pas rĂ©ellement de moyen de se rĂ©unir entre expats.
La force des carnets de voyage de Guy Delisle est de ne pas chercher Ă Ă©crire un documentaire dĂ©taillĂ© sur son expĂ©rience. Il dit ce quâil voit, ce qui le choque, sans chercher Ă appuyer sur lâaspect politique des choses. Câest le lecteur qui, guide subtilement, se fait son opinion. Lâauteur exprime un ressenti et ne cherche pas Ă nous le prĂ©senter comme une vĂ©ritĂ© objective.
Concernant le dessin, lâauteur opte pour un dessin plus fouillĂ© que ce quâil produira par la suite. Le trait reste simple, mais la colorisation en niveaux de gris apporte de la matiĂšre. Câest expressif et plutĂŽt rĂ©ussi comme choix graphique. Et plutĂŽt adaptĂ© Ă la saletĂ© de la Chine dĂ©crite par le livre.
« Shenzhen » est une rĂ©ussite. Guy Delisle trouve vite son ton. Son carnet de voyage, sous forme dâanecdotes, passionne. On sâintĂ©resse autant aux pĂ©ripĂ©ties de Guy quâau pays en lui-mĂȘme. Un subtil Ă©quilibre que lâauteur saura garder Ă chacun de ses bouquins.