De cape et de crocs, T2 : Pavillon noir ! – Alain Ayroles & Jean-Luc Masbou

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Titre : De cape et de crocs, T2 : Pavillon noir !
Scénariste : Alain Ayroles
Dessinateur : Jean-Luc Masbou
Parution : Mai 1997


« Pavillon noir ! » est le deuxiĂšme tome de « De Cape et de Crocs ». Cette saga composĂ©e de dix albums a vu le jour il y a plus de quinze ans et s’est conclue rĂ©cemment. Le premier ouvrage m’avait conquis sur tous les plans. J’étais donc impatient de me plonger Ă  nouveau dans cet univers. EditĂ© chez Delcourt dans la collection « Terres de LĂ©gendes », ce bouquin est scĂ©narisĂ© par Alain Ayroles et dessinĂ© par Jean-Luc Masbou. Son prix avoisine quatorze euros. La couverture nous plonge dans l’univers de la piraterie. On se trouve sur le pont d’un bateau rempli de pirates. VoilĂ  qui promet de belles aventures !

La quatriĂšme de couverture nous prĂ©sente le texte suivant : « Hildalgo, corsaire barbaresque, gentilhomme et lapin font voile vers les Ăźles Tangerines et leur trĂ©sor. Mais avant d’atteindre le mythique archipel battu par les tempĂȘtes, oĂč rode l’ombre de vaisseaux engloutis et de monstres marins, nos hardis compagnons devront affronter un nouvel adversaire
 joyeux, certes, mais cruel et sans merci : les pirates ! »

Des duels, de l’amour, un trĂ©sor


Le premier nous avait offert le dĂ©but d’une grande saga. Il y avait des duels, de l’amour, un trĂ©sor
 Bref, il ne manquait aucun ingrĂ©dient pour gĂ©nĂ©rer une trame passionnante. De plus, on avait rencontrĂ© une galerie de personnages dense et variĂ©e qui ne faisait qu’attiser notre attrait. La couverture de l’album donne l’impression qu’elle va ajouter la piraterie aux nombreuses cordes de l’intrigue. J’étais donc vraiment curieux de savoir ce qu’allait devenir nos hĂ©ros et de quelle maniĂšre allait avancer leur quĂȘte du trĂ©sor des Ăźles Tangerines.

decapeetdecrocs2aLe fil conducteur de l’histoire est la recherche de ce fameux trĂ©sor en suivant une carte dĂ©couverte dans une bouteille. Cet aspect est habilement construit dans le scĂ©nario d’Alain Ayroles. Les Ă©vĂ©nements se succĂšdent Ă  un rythme soutenu et les surprises sont nombreuses. Notre attention est en permanence relancĂ©e pour notre plus grand plaisir. Mais la richesse de cette saga rĂ©side dans les nombreuses trames secondaires qui accompagnent notre lecture. Il y a des histoires d’amour contrariĂ©es, des vengeances sous-jacentes, des manigances, etc. Chaque moment modifie bon nombre de variable et nous oblige Ă  nous impliquer pleinement dans l’histoire. L’album ne souffre d’aucun temps mort. A l’image de l’opus prĂ©cĂ©dent, la qualitĂ© est au rendez-vous et c’est agrĂ©able de voir que les auteurs ne se sont pas endormis sur leurs lauriers.

Le scĂ©nario ne se contente pas de nous offrir une histoire passionnante. Il nous fait rencontrer des personnages hauts en couleur. On s’intĂ©resse rĂ©ellement Ă  leur devenir et aucun ne nous laisse indiffĂ©rent. Que ce soit le renard, le loup ou le lapin, il nous sont sympathiques et apportent chacun leur Ă©co Ă  la rĂ©ussite de l’ensemble. MĂȘme les mĂ©chants nous intĂ©ressent. Ils possĂšdent une personnalitĂ© originale. Sans vous dĂ©voiler les qualitĂ©s et les dĂ©fauts de chacun, sachez que vous irez de surprise en surprise et que vous prendrez beaucoup de plaisir Ă  naviguer dans cet univers intriguant.

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L’histoire est prenante, les personnages attachants
 Mais la liste des qualitĂ©s de cet album n’est pas terminĂ©e. Les dialogues sont assez uniques dans leur genre. On a droit Ă  de grandes tirades théùtrales qui sont des petits bijoux d’écriture. Mais au-delĂ  de ces monologues remarquables, chaque dialogue est travaillĂ©. Aucun Ă©change n’est bĂąclĂ© et chaque case nous offre un petit bonheur de lecture. Une telle densitĂ© scĂ©naristique est rare dans le neuviĂšme art. Je me dois donc de la signaler.

Les dessins sont dans la lignĂ©e de tous les bons points citĂ©s depuis le dĂ©but de ma critique. Vu de loin, le style n’a rien d’original. Mais une fois qu’on se plonge dans la lecture, on lui trouve une patte particuliĂšre. N’étant pas spĂ©cialiste du genre, je ne possĂšde pas le vocabulaire adĂ©quat pour vous dĂ©crire l’essence du style de Jean-Luc Masbou. NĂ©anmoins, je trouve qu’il arrive Ă  gĂ©nĂ©rer une vraie atmosphĂšre Ă  l’album. Ils nous prĂ©sentent des personnages trĂšs expressifs. Cela coĂŻncide avec l’esprit « théùtre » de la sĂ©rie. De plus, les dĂ©cors sont trĂšs travaillĂ©s. Sans ĂȘtre surchargĂ©s, ils sont remplis de petits dĂ©tails souvent drĂŽles. C’est un dosage compliquĂ© d’offrir autant d’informations dans les cases sans tomber dans l’indigestion. Masbou s’en sort merveilleusement.

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En conclusion, « Pavillon noir ! » confirme que « De Cape et de crocs » est amenĂ© Ă  devenir une sĂ©rie de grande qualitĂ©. Cet album possĂšde beaucoup de qualitĂ©s et n’a aucun dĂ©faut. Il va donc sans dire que j’ai hĂąte de lire le troisiĂšme opus intitulĂ© « L’archipel du danger ». Mais cela est une autre histoire
 

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Note : 17/20

De cape et de crocs, T1 : Le secret du janissaire – Alain Ayroles & Jean-Luc Masbou

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Titre : De cape et de crocs, T1 : Le secret du janissaire
Scénariste : Alain Ayroles
Dessinateur : Jean-Luc Masbou
Parution : Novembre 1995


« De Cape et de crocs » est une sĂ©rie qui s’est close rĂ©cemment avec la parution de son dixiĂšme et dernier tome. Cela a fait naitre en moi l’envie de redĂ©couvrir cette grande saga du neuviĂšme art en commençant par son premier opus intitulĂ© « Le secret du janissaire ». Il faut remonter huit ans en arriĂšre pour dĂ©couvrir la premiĂšre parution de cet ouvrage chez Delcourt. On peut se l’offrir pour un petit peu moins de quatorze euros. Alain Ayroles s’occupe du scĂ©nario et Jean-Luc Masbou se charge des dessins. La couverture nous plonge dans une atmosphĂšre nocturne. Deux personnages vĂȘtus tels des mousquetaires cachent leur visage avec leur cape. L’un semble ĂȘtre un loup, l’autre semble ĂȘtre un renard. Qui sont-ils ? Que veulent-ils ? Il ne reste plus qu’Ă  se plonger dans la lecture pour le dĂ©couvrir…

La quatriĂšme de couverture nous prĂ©sente les mots suivants : « A bord d’un vaisseau turc, un coffre. Dans le coffre, un Ă©crin, dans l’Ă©crin, une bouteille, dans la bouteille, une carte, et sur cette carte… l’emplacement du fabuleux trĂ©sor des Ăźles Tangerines !… Il n’en faut pas plus Ă  deux fiers gentilshommes, fins bretteurs, batailleurs et rimailleurs, pour se jeter dans une aventure qui, de geĂŽles en galĂšres, les mĂšnera jusqu’aux confins du monde. »

decapeetdecrocs1aL’histoire exerce rapidement une emprise sur le lecteur. DĂšs les premiĂšres pages, on s’attache Ă  notre duo de hĂ©ros. Le premier, un loup, est un bel hidalgo nommĂ© Don Lope. Le second, un renard, est un adepte de la poĂ©sie nommĂ© Don Armando. La prĂ©sentation est rapide et notre immersion dans leurs aventures immĂ©diates. On y fera un grand nombre de rencontres avec des personnages trĂšs diffĂ©rents. On dĂ©couvre un armateur avare, pĂšre d’un fils fainĂ©ant et peureux. On croise le chemin d’une belle gitane et d’une jeune femme blonde et orpheline qui feront chavirer les cƓurs de nos deux gentilshommes. Enfin on dĂ©couvrira un curieux lapin sur des galĂšres et un fier guerrier ottoman en quĂȘte de trĂ©sor. Bref, les ingrĂ©dients sont appĂ©tissants et devraient faire naitre une lecture des plus plaisantes…

On entre tout de suite dans le vif du sujet.

Pour que la rĂ©ussite soit totale, il fallait que cette galerie de protagonistes gravite dans un scĂ©nario dense et bien construit. On est rapidement rassurĂ© sur ce plan-lĂ . Les auteurs ne se perdent pas en digression pour nous prĂ©senter les jalons de la saga. On entre tout de suite dans le vif du sujet. On voit naitre deux histoires d’amour. On dĂ©couvre une tentative de chantage. Et surtout, une chasse au trĂ©sor Ă  grande ampleur semble ĂȘtre en passe d’ĂȘtre lancĂ©. On est heureux de se trouver sur ces navires en quĂȘte du mythe des iles Tangerines sur les mers. Une fois l’album terminĂ©, on a une intense envie de se plonger dans le tome suivant.decapeetdecrocs1b

Au-delĂ  de suspense inhĂ©rent aux diffĂ©rentes Ă©preuves qui se mettent sur le chemin de nos hĂ©ros, le plaisir que se dĂ©gage de ce tome rĂ©side dans la qualitĂ© des dialogues. Je n’ai pas le souvenir d’avoir lu rĂ©cemment une telle densitĂ© et originalitĂ© dans les textes. Beaucoup de bulles sont cultes. Voir nos hĂ©ros parler en rimes est le fruit d’un travail Ă©norme. Le rĂ©sultat est au rendez-vous. Il faut plusieurs lectures pour profiter pleinement de tous les jeux de mots offerts par le talent d’Alain Ayroles. Je me garde de vous citer quelques exemples car le plaisir rĂ©side Ă©galement dans la dĂ©couverte et la surprise.

CĂŽtĂ© dessins, je trouve que la rĂ©ussite est Ă©galement au rendez-vous. Jean-Luc Masbou offre des cases denses sans ĂȘtre surchargĂ©es. Ils gĂšrent particuliĂšrement bien les diffĂ©rentes entre premier plan, second plan et arriĂšre-plan. Cette subtilitĂ© lui permet d’agrĂ©menter ses planches de plein de petits dĂ©tails qu’on prend plaisir Ă  trouver au grĂ© des lectures. De plus, les personnages possĂšdent une identitĂ© graphique intĂ©ressante. Leurs expressions trĂšs théùtrales gĂ©nĂšrent une atmosphĂšre vraiment unique qui caractĂ©rise la sĂ©rie.

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En conclusion, « Le secret du janissaire » est une genĂšse de grande qualitĂ© qui explique aisĂ©ment le succĂšs que rencontre « De Cape et de Crocs » presque dix ans plus tard. Je ne peux que vous conseiller de vous plonger dans cet ouvrage et par consĂ©quent dans cette sĂ©rie. Vous ne regretterez pas ce voyage synonyme de grand dĂ©paysement. De mon cĂŽtĂ©, il ne me reste plus qu’Ă  partir une nouvelle fois Ă  la dĂ©couvre du deuxiĂšme tome intitulĂ© « Pavillon noir ». Mais cela est une autre histoire… 

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Note : 17/20

Pierre Tombal, T30 : Questions de vie ou de mort – Raoul Cauvin & Marc Hardy

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Titre : Pierre Tombal, T30 : Questions de vie ou de mort
Scénariste : Raoul Cauvin
Dessinateur : Marc Hardy
Parution : Avril 2014


Pierre Tombal est un hĂ©ros qui est nĂ© pour moi dans la bibliothĂšque de mes parents. J’ai lu et relu la petite quinzaine d’album du cĂ©lĂšbre fossoyeur qui agrĂ©mentait les Ă©tagĂšres familiales. Les annĂ©es passant, je n’ai jamais coupĂ© le lien avec ce hĂ©ros assez unique dans son genre. Je m’offre rĂ©guliĂšrement un recueil de ses aventures comme on s’autoriserait une jolie pĂątisserie au dĂ©tour d’une rue. Le dernier des Ă©pisodes que je me suis offert est le trentiĂšme de la sĂ©rie. Il s’intitule « Questions de vie et de mort ». Sorti en avril dernier, il est l’Ɠuvre conjointe du scĂ©nariste Raoul Cauvin et du dessinateur Marc Hardy. Les couleurs sont confiĂ©es au Studio Cerise.

Le site BD Gest’ (www.bdgest.com) prĂ©sente l’album avec les mots suivants : « Qui a dit qu’avec la mort, tout s’arrĂȘte ? Certainement pas Pierre Tombal, qui gĂšre au quotidien ses pensionnaires du cimetiĂšre avec leurs hauts, leurs bas, leurs doutes et leurs chamailleries. PerpĂ©tuellement taquinĂ©e par la Vie, Mme la Mort n’entend pas cĂ©der un pouce de terrain aux effronteries des uns et des autres. ƒil pour Ɠil, dent pour dent, telle est sa devise ! Et ce n’est pas toujours de tout repos  » 

PierreTombal30aPierre Tombal est fossoyeur. Nous partageons son quotidien tout au long des quarante-cinq planches qui se dĂ©coupent en gags allant chacun de une Ă  trois pages. Les auteurs nous font visiter un cimetiĂšre tout au long de la lecture. Les rencontres sont nĂ©cessairement originales et cocasses. Je trouve l’idĂ©e inĂ©dite et habilement exploitĂ©e depuis tant d’annĂ©es. J’étais confiant quant au bonheur que m’inspirerait ce nouveau tome.

Pourquoi construire une sĂ©rie humoristique au milieu des tombes funĂ©raires ? Ce sont des lieux gĂ©nĂ©ralement associĂ©s Ă  la douleur, la tristesse, l’abandon ou la perte. Les blagues s’appuient rarement sur cet endroit-lĂ  et les comĂ©dies naviguent peu dans ces eaux. Cela rend l’idĂ©e intrigante et intĂ©ressante. Elle attise la curiositĂ©. Le potentiel comique du concept Ă©tait nĂ©buleux mais le jeu mĂ©ritait d’ĂȘtre tentĂ©. La plume de Raoul Cauvin allait valider ce choix. La premiĂšre rĂ©ussite est son hĂ©ros. Pierre Tombal est un fossoyeur sympathique et attachant. Il se montre accueillant envers le lecteur. Ce n’est pas la moindre des qualitĂ©s tant elle semble antinomique des dĂ©cors qui l’abritent. Il arrive Ă  rendre son mĂ©tier passionnant et plein d’aventures.

« La Faucheuse devient la vraie star de l’histoire. « 

Les premiers tomes se contenaient au monde des vivants. Au fur et Ă  mesure de la parution des albums, d’autres protagonistes sont intervenus. Les premiers Ă  entrer dans la danse sont les locataires des lieux : les morts. Ils interagissent avec le fossoyeur et les visiteurs et font ainsi naĂźtre une corde scĂ©naristique riche. Enfin, les auteurs ont personnalisĂ© la Mort et la Vie. L’idĂ©e est prenante car la Faucheuse devient mĂȘme la vraie star de l’histoire.

PierreTombal30cCette diversitĂ© d’angles d’attaque permet de varier la structure des gags. A ce niveau-lĂ , ce trentiĂšme opus est une rĂ©ussite. Depuis toujours, Pierre Tombal conte aux visiteurs de son cimetiĂšre des causes ou des circonstances de dĂ©cĂšs abracadabrantesques. L’imagination de Cauvin dans le domaine n’est pas Ă©culĂ©e. Il offre des anecdotes trĂšs drĂŽles mettant en jeu un accident d’avion ou une manƓuvre de Heimlich par exemple. Mais la vie dans ce lieu de repos Ă©ternel ne se rĂ©sume Ă  cela. La dimension professionnelle du fossoyeur est utilisĂ©e pour nous faire rire. Le vidage de l’ossuaire devient un moment trĂšs plaisant pour le lecteur.

Une sociĂ©tĂ© de l’au-delĂ  identique Ă  celle des vivants.

Mais les auteurs ne se contentent d’exploiter le lieu du cĂŽtĂ© des vivants. Les morts sont les vraies stars de cet album. Un des principes de base posĂ© par le scĂ©nariste est que la sociĂ©tĂ© de l’au-delĂ  est rĂ©gie d’une maniĂšre identique que celle qui nous est familiĂšre. Il est dĂ©sopilant de voir un mort refusĂ© de voir sa tombe dĂ©localisĂ©e, de subir les excĂšs d’un mort internĂ© psychiatrique ou de dĂ©couvrir la maniĂšre utilisĂ©e par un dĂ©funt pour rĂ©pondre Ă  son courrier. LĂ  encore, le terreau narratif s’avĂšre trĂšs fertile.

Il reste un dernier axe comique Ă  l’aura certaine : la Mort. MĂȘme si elle cohabite avec la Vie dans le quotidien de Pierre Tombal, c’est elle qui est la vraie star. Il faut dure que la dĂ©couvrir sous sa capuche brune escortĂ©e de sa lĂ©gendaire faux gĂ©nĂšre une plus forte personnalitĂ© que la jeune fille qui reprĂ©sente la Vie. Tout en conservant son pouvoir de nuisance certain, la grande faucheuse possĂšde ici des faiblesses. Cet album l’expose dĂ©pressive, jalouse, heureuse, dans le doute, reconnaissante, mĂ©chante
 Bref, l’échantillon Ă©motionnel est large et prĂ©sente une vision des plus originales de la Mort. Cet axe est parfaitement cultivĂ© dans « Questions de vie et de mort » pour la plus grande joie du lecteur.

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Le dessin de Marc Hardy accompagne merveilleusement les gags. Son style possĂšde une vraie identitĂ© et il se retrouve qu’elle s’accorde avec le ton de la narration. Pierre Tombal est un hĂ©ros au caractĂšre graphique certain. Les diffĂ©rents visiteurs qui agrĂ©mentent les histoires sont Ă©galement bien construits. Enfin, j’apprĂ©cie particuliĂšrement les expressions des morts que je trouve hilarantes. Pour conclure, « Questions de vie et de mort » est un bon cru. Il est rare de voir un album composĂ© de gags courts ĂȘtre d’une qualitĂ© constante. C’était un plaisir de la lire et ce sera une joie de s’y replonger Ă  l’occasion


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Note : 14/20

Les vieux fourneaux, T1 : Ceux qui restent – Wilfrid Lupano & Paul Cauuet

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Titre : Les vieux fourneaux, T1 : Ceux qui restent
Scénariste : Wilfrid Lupano
Dessinateur : Paul Cauuet
Parution : Avril 2014


 Wilfrid Lupano est l’un des scĂ©naristes qui monte. For de plusieurs succĂšs et sachant s’entourer de dessinateurs talentueux, il est devenu synonyme d’auteur Ă  suivre. « Les vieux fourneaux » ne dĂ©roge pas Ă  la rĂšgle. DotĂ©e de critiques trĂšs positives et du Prix des libraires de bande dessinĂ©e 2014, il n’en fallait pas plus pour que je m’y intĂ©resse. Il est accompagnĂ© au dessin par Paul Cauuet, que je ne connaissais pas. Le tout est publiĂ© chez Dargaud pour un total de 56 pages. Ce tome 1 est nommĂ© « ceux qui restent ». Le succĂšs de la sĂ©rie a, depuis, vu paraĂźtre une suite. Je prĂ©cise tout de suite que ce premier tome se suffit Ă  lui-mĂȘme.

LesVieuxFourneaux1aLe titre de l’album est assez explicite : on s’intĂ©resse ici Ă  une bande de personnes ĂągĂ©es qui viennent rendre hommage Ă  l’une de leur amie, dĂ©cĂ©dĂ©e. Le thĂšme de « vieux fourneaux » prend d’autant plus de sens lorsque l’on apprend qu’ils ont tous travaillĂ© dans la mĂȘme usine et ont montrĂ© un activisme syndical particuliĂšrement important. Mais quand l’un d’eux pĂšte les plombs lorsque le notaire dĂ©voile certains secrets, ses copains se serrent les coudes pour lui Ă©viter de faire une connerie.

« Des portraits plein de vie et de caractÚre. »

Trois grands thĂšmes viennent se tĂ©lescoper dans cette sĂ©rie. La vieillesse bien Ă©videmment, mais aussi l’amitiĂ© et la lutte des classes.  Au milieu de tout ça, la petite fille de Lucette vient apporter sa fraĂźcheur et son dĂ©calage par rapport Ă  nos vieux bonhommes. Ces portraits sont plein de vie et cohĂ©rents, chacun ayant son caractĂšre et, surtout, son histoire.

LesVieuxFourneaux1cDans cet album, chaque personnage est prĂ©sentĂ© de façon satisfaisante pour assouvir notre plaisir de lecture. Cependant, on sent que les auteurs en ont sous le pied. Ils savent Ă©viter de produire trop de flashbacks inutiles et se concentre sur le prĂ©sent. Sans ĂȘtre absolument le plus intĂ©ressant dans l’ouvrage, le fil rouge possĂšde suffisamment de suspense pour nous donner envie de lire la suite. Mais ce sont bien les situations cocasses dues Ă  l’ñge des protagonistes qui font tout le sel du bouquin.

Au niveau du dessin, Paul Cauuet réalise un travail remarquable. Bien aidé par une couleur qui met en valeur son trait, il croque des personnages semi-réalistes souvent proches de la caricature.  Son dessin est à la fois riche et dynamique et le dessinateur excelle aussi bien dans les dessin des personnages que des décors. Une véritable découverte !

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« Les vieux fourneaux » est une bande-dessinĂ©e rĂ©ussie. DotĂ© de personnages hauts en couleur et d’un dessin parfaitement adaptĂ©, elle aurait pu ĂȘtre un one-shot percutant. Mais les auteurs ont prĂ©fĂ©rĂ© en faire une sĂ©rie. EspĂ©rons que la suite saura confirmer les qualitĂ©s de ce premier tome drĂŽle et attachant.

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Note : 16/20

Johnny Jungle, T2 – Jean-Christophe Deveney & JĂ©rĂŽme Jouvray

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Titre : Johnny Jungle, T2
Scénariste : Jean-Christophe Deveney
Dessinateur : JérÎme Jouvray
Parution : Septembre 2014


Le premier tome de « Johnny Jungle » avait Ă©tĂ© une bonne surprise. Narrant l’histoire d’un Ă©quivalent de Tarzan champion de natation et de cinĂ©ma (vous avez dit « Johnny Weismuller » ?), cette histoire faisait preuve de beaucoup d’humour dĂ©calĂ©. A la fermeture du premier opus du diptyque, on se demandait presque l’intĂ©rĂȘt de continuer le tout, malgrĂ© la fin surprenante. Alors, cette deuxiĂšme partie transforme-t-elle l’essai ?

Johnny n’est pas vraiment parvenu Ă  se faire Ă  la vie citadine. Acteur star, il succombe trop facilement aux jeunes actrices qui lui sont associĂ©es, mettant Ă  mal sa vie avec Jane. Et quand les enfants illĂ©gitimes commencent Ă  faire leurs apparitions, c’est le bouquet


Ce tome s’intĂ©resse Ă  la dĂ©gringolade du personnage. AprĂšs son ascension, cette chute Ă©tait inĂ©vitable. On le voit vieillir et devenir has been. Si bien que ce livre est beaucoup moins drĂŽle que le premier. TeintĂ© de nostalgie et de regrets, il met l’émotion plus en avant. HĂ©las, les blagues sont quand mĂȘme lĂ , mais nous atteignent beaucoup moins. La lecture est loin d’ĂȘtre dĂ©sagrĂ©able, mais il est difficile de ne pas ĂȘtre déçu lorsqu’on le compare au premier. Ainsi, aprĂšs une vingtaine de pages, je me suis surpris Ă  me dire que l’histoire n’avançait pas vraiment. Heureusement, la suite est plus pertinente. MalgrĂ© tout, ce tome est loin de confirmer nos attentes.

La comparaison entre les deux ouvrages fait mal.

Ce diptyque peut ĂȘtre vu de cette façon : le premier tome correspond Ă  la partie d’innocence du personnage. Il dĂ©couvre les choses avec Ă©merveillement et on rit avec lui. Le deuxiĂšme tome est la dĂ©sillusion. Ainsi, le principe de deux livres serait pleinement pertinent. Cependant, ce tome manque de rebondissement et les pĂ©ripĂ©ties sont loin de s’accumuler. Il manque aussi de personnages pittoresques (comme le rĂ©alisateur escroc du premier tome par exemple). Cette dichotomie m’a dĂ©rangĂ©, la comparaison entre les deux ouvrages fait mal.

MalgrĂ© tout, on retrouve une analyse au vitriol d’Hollywood avec ses acteurs ratĂ©s, ses budgets limitĂ©s par la crise et ses films de propagande pendant la Seconde Guerre Mondiale. Certaines trouvailles font mouche, mais leur densitĂ© est plus faible. Surtout, la surprise n’est plus lĂ .

Concernant le dessin, j’ai trouvĂ© l’ensemble inĂ©gal. Si le premier tome m’avait enchantĂ©, c’est moins le cas ici. Le trait de JĂ©rĂŽme Jouvray est toujours aussi agrĂ©able, mais les intĂ©rieurs notamment sont trĂšs vides. Le manque de jungle se fait cruellement sentir ! Du coup, la couleur (assurĂ©e par Anne-Claire Jouvray) est beaucoup moins marquante que dans le premier opus. C’est surtout une impression d’inĂ©gale qualitĂ© qui nous imprĂšgne. Certaines planches sont toujours aussi belles et dynamiques. D’autres semblent dĂ©sespĂ©rĂ©ment vides. Peut-ĂȘtre que le temps imparti pour dessiner cet album Ă©tait-il trop court ? Car l’ensemble fait quand mĂȘme 76 pages.

La chute de « Johnny Jungle » est traitĂ©e avec nostalgie. Mais les auteurs semblent beaucoup moins Ă  l’aise dans ce registre. Difficile de s’attacher Ă  un personnage qui succombe en permanence Ă  ses pulsions. Maintenant qu’il vieillit, il est difficile d’avoir de l’empathie pour son immaturitĂ©. J’ai retrouvĂ© une partie du plaisir que j’avais eu pour le premier tome, mais la dĂ©ception est bien rĂ©elle. Dommage.

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Note : 10/20

Johnny Jungle, T1 – Jean-Christophe Deveney & JĂ©rĂŽme Jouvray

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Titre : Johnny Jungle, T1
Scénariste : Jean-Christophe Deveney
Dessinateur : JérÎme Jouvray
Parution : Janvier 2013


Johnny Jungle a eu une vie mouvementĂ©e. Enfant sauvage, il fut Ă©levĂ© par des singes avant de se retrouver en pleine civilisation et de devenir champion de natation et star d’Hollywood. Aujourd’hui, Johnny est traquĂ© et il se rappelle de sa jeunesse
 « Johnny Jungle » est la premiĂšre partie d’un diptyque. Ce premier tome fait plus de 70 pages et est publiĂ© aux Ă©ditions GlĂ©nat.

Tout rapport entre la vie de Johnny Weismuller n’est Ă©videmment que pure coĂŻncidence. Johnny ici est donc un mix de Tarzan et de Weismuller, ces deux derniers Ă©tant bien sĂ»r trĂšs entremĂȘlĂ©s. Dans cette fausse biographie, l’humour est le maĂźtre mot de l’aventure. Johnny se raconte avec une part de narration non-nĂ©gligeable que vient renforcer les dialogues.

Johnny dĂ©couvre la civilisation et le succĂšs… au risque de s’y perdre ?

La mĂ©thode du flashback Ă©tant uniquement un prĂ©texte Ă  relancer le suspense Ă  la fin du tome, on dĂ©couvre la vie de Johnny avant tout de façon chronologique. On dĂ©couvre sa vie dans la jungle avec sa mĂšre et son copain frĂšre de liane Kinka. Un curieux missionnaire allemand lui apprend Ă  crier comme Tarzan
 Mais c’est surtout sa rencontre avec Jane qui va tout changer. Johnny dĂ©couvre la civilisation et le succĂšs… au risque de s’y perdre ?

Si l’histoire en soit ne surprendra pas le lecteur (puisque ce n’est pas le but), c’est l’humour qui donne tout le sel Ă  l’ouvrage. Le cynisme des auteurs pour l’humanitĂ© couplĂ© Ă  la naĂŻvetĂ© de Johnny fonctionne parfaitement. Les seconds rĂŽles sont parfaitement rĂ©ussis, de l’imprĂ©sario au rĂ©alisateur, en passant par le missionnaire. De plus, entre les Ă©pisodes de la vie de Johnny, il nous est donnĂ© Ă  voir un des personnages interviewĂ© des annĂ©es aprĂšs l’histoire qui nous parle  de Johnny. Ces petits moments sont trĂšs drĂŽles et donnent d’autant plus de piquant Ă  l’ouvrage. On peut citer Ă©galement les affiches de films, rĂ©guliĂšrement parsemĂ©es dans le livre qui jouent le mĂȘme rĂŽle d’authentifier cette biographie.

Le dessin possĂšde un trait expressif, parfaitement adaptĂ© Ă  l’humour de l’ouvrage. Cependant, le dessin parvient Ă  fonctionner Ă©galement dans les passages oĂč l’émotion se fait plus forte. Il faut mentionner en particulier le travail sur les dĂ©cors, qui navigue de la jungle luxuriante Ă  Paris ou New York. Ces derniers sont enrichit par des couleurs de toute beautĂ©, partie intĂ©grante du dessin. Le dessin est assurĂ© par JĂ©rĂŽme Jouvray, Ă©paulĂ© aux couleurs par Anne-Claire
 Jouvray ! On comprend alors comment les couleurs sont aussi intĂ©grĂ©es dans le dessin de l’ouvrage. Une belle rĂ©ussite.

« Johnny Jungle » est une trĂšs bonne surprise. Plein d’idĂ©e, Ă  l’humour efficace, il prĂ©sente une vision de la sociĂ©tĂ© (et notamment du cinĂ©ma) bien cynique. ProposĂ© en diptyque, il ne reste plus qu’à espĂ©rer que la deuxiĂšme partie transforme l’essai !

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Note : 14/20

Tu mourras moins bĂȘte, T3 : Science un jour, science toujours !

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Titre : Tu mourras moins bĂȘte, T3 : Science un jour, science toujours !
Scénariste : Marion Montaigne
Dessinatrice : Marion Montaigne
Parution : Septembre 2014


 AprĂšs une petite pause en 2013 consacrĂ©e Ă  d’autres projets, Marion Montaigne nous revient avec sa sĂ©rie de vulgarisation scientifique, « Tu mourras moins bĂȘte », sous-titrĂ©e « Mais tu mourras quand mĂȘme » ! Ce troisiĂšme tome est intitulĂ© « Science un jour, science toujours ! ». Contrairement aux prĂ©cĂ©dents opus qui Ă©taient chacun basĂ©s sur un thĂšme (les films et sĂ©ries tĂ©lĂ©, puis la mĂ©decine), celui-ci est beaucoup plus ouvert. Symbole de ce changement de ligne, le tout est publiĂ© chez Delcourt et non plus chez Ankama. MalgrĂ© tout, que les collectionneurs se rassurent, la maquette est quasiment identique et votre bibliothĂšque n’en sera pas gĂȘnĂ©e. Le tout est un pavĂ© de 250 pages !

Si l’idĂ©e d’un thĂšme par livre Ă©tait sĂ©duisante sur le papier, elle ne l’était pas forcĂ©ment rĂ©ellement. L’effet de rĂ©pĂ©tition s’installait. Ici, on sent Marion Montaigne plus libre de parler de ce qu’elle veut. Du coup, l’ensemble est trĂšs variĂ© dans ses sujets : cryogĂ©nie, adolescence, menstruations
 Les questions aussi essentielles que « peut-on avaler des araignĂ©es en dormant ? » trouvent enfin leur rĂ©ponse ! Cette variĂ©tĂ© donne un vrai coup de fouet Ă  la sĂ©rie. L’effet de rĂ©pĂ©tition est nul et on se surprend Ă  lire l’ouvrage d’une traite, ce que l’on ne faisait pas forcĂ©ment pour les prĂ©cĂ©dents. Marion Montaigne parvient donc Ă  se bonifier Ă  son troisiĂšme opus. Une belle performance.

Apprendre en s’amusant.

Lorsque l’on lit les ouvrages de Marion Montaigne, on remarque trĂšs vite un amour pour la vulgarisation scientifique, mais Ă©galement un humour trĂšs personnel. Cette originalitĂ© fait mouche ! On sourit beaucoup et on rit rĂ©guliĂšrement Ă  la lecture des pages. « Apprendre en s’amusant » n’a jamais Ă©tĂ© autant d’actualitĂ©. Car derriĂšre l’humour se cache des vĂ©ritĂ©s bien entendu. Montaigne visite des laboratoires et nous fait partager les Ă©tudes scientifiques les plus incongrues qui existent.

Marion Montaigne aime Ă©galement intĂ©grer de nombreuses rĂ©fĂ©rences (notamment cinĂ©ma et sĂ©ries tĂ©lĂ©) dans ses planches. J’avoue ne pas toujours y ĂȘtre sensible, ne regardant pas les sĂ©ries citĂ©es. Du coup, il y a des chances pour que ses ouvrages vieillissent un peu avec le temps. Ce tome m’a semblĂ© moins blindĂ© de rĂ©fĂ©rences, comme si l’auteure se sentait plus en confiance pour Ă©viter de mettre des rĂ©fĂ©rences partout.

Digne hĂ©ritiĂšre de Reiser, l’auteure dĂ©veloppe un trait trĂšs relĂąchĂ© soutenu par des touches de couleur Ă  l’aquarelle. Clairement, ça ne plaira pas Ă  tout le monde, mais son dessin participe fortement Ă  l’humour du bouquin. Les expressions de ses personnages sont particuliĂšrement rĂ©ussies !

Marion Montaigne dĂ©veloppe une Ɠuvre basĂ©e sur l’humour et la vulgarisation scientifique. « Tu mourras moins bĂȘte » apporte sa pierre Ă  l’édifice avec brio. Ce troisiĂšme tome permet Ă  la sĂ©rie de passer un cap supplĂ©mentaire Ă  tous les niveaux. On peut donc se dire que l’on mourra moins bĂȘte aprĂšs lecture de l’ouvrage, mais aussi avec le sourire aux lĂšvres.

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Note : 18/20

Tu mourras moins bĂȘte, T2 : Quoi de neuf, Docteur Moustache ? – Marion Montaigne

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Titre : Tu mourras moins bĂȘte, T2 : Quoi de neuf, Docteur Moustache ?
Scénariste : Marion Montaigne
Dessinatrice : Marion Montaigne
Parution : Septembre 2012


J’ai dĂ©couvert le travail de Marie Montaigne Ă  travers son blog. Chacun de ses nouveaux billets Ă©tait un condensĂ© d’humour et de science. L’auteur montrait une vraie capacitĂ© Ă  rendre accessible la biologie, la physique ou la chimie Ă  tout le monde grĂące Ă  un vrai talent de vulgarisation couplĂ© Ă  un ton rĂ©ellement dĂ©calĂ©. C’était donc avec beaucoup de joie que j’avais dĂ©couvert la transcription de son univers sur papier via la parution de « Tu mourras moins bĂȘte – La science, c’est pas du cinĂ©ma ! ». Elle y regroupait toute une sĂ©rie d’histoire dont le point commun Ă©tait le cinĂ©ma. L’ouvrage s’avĂ©rait ĂȘtre de qualitĂ© et a Ă©tĂ© accompagnĂ© dans les rayons d’un honnĂȘte succĂšs critique. En septembre dernier, est sorti le second opus des aventures du docteur Moustache intitulĂ© « Quoi de neuf, Docteur Moustache ? ». Le professeur nous plonge maintenant dans le corps humain. Et c’est loin d’ĂȘtre triste !

Comme dans l’épisode prĂ©cĂ©dent, l’ouvrage se dĂ©compose en une succession de petites histoires tout au long des deux cent cinquante pages. Chacune est la rĂ©ponse Ă  une question telle que « Comment le corps traque les virus ? » ou « Comment ça marche, les rĂȘves ? ». Cela permet de ne pas lire le bouquin d’une seule traite. On peut le feuilleter Ă  tout moment en choisissant une page au hasard. La densitĂ© des propos fait qu’il est dur de digĂ©rer tout l’album d’une traite. Pour la savourer, il me parait indispensable de le lire en plusieurs Ă©tapes. Il ne faut pas voir dans cette remarque une critique. Les dialogues sont travaillĂ©s et une lecture trop longue risque d’empĂȘcher d’en profiter pleinement.

On peut apprendre en s’amusant.

Le fait que Marion Montaigne vulgarise la science ne l’empĂȘche pas de s’appuyer sur des vĂ©ritĂ©s scientifiques Ă©tayĂ©es. Les rĂ©fĂ©rences bibliographiques qui concluent le livre en sont la preuve. Cet album veut donner raison Ă  la thĂ©orie qui dit qu’on peut apprendre en s’amusant. Il est donc Ă  la fois drĂŽle et intĂ©ressant de dĂ©couvrir les rĂ©flexions du cerveau pour reconnaitre les gens ou le quotidien d’un globule blanc traquant les bactĂ©ries Ă©trangĂšres. Certaines anecdotes tendent davantage vers le cĂŽtĂ© universitaire, d’autre vers un cĂŽtĂ© plus graveleux. Mais dans l’immense majoritĂ© des exposĂ©s, l’équilibre science – humour est respectĂ©.

On trouve quasiment une trentaine d’histoires. Elles ne sont Ă©videmment pas toutes d’un mĂȘme attrait. Certaines rĂ©pondent Ă  une interrogation trĂšs dĂ©calĂ©e : « Est-ce grave d’avoir un petit zizi ? » ou « Pourquoi l’ovulation de la femme est invisible ? ». D’autres sont plus classiques mĂ©dicalement : « Comment fonctionne le systĂšme immunitaire ? » ou « Comment le corps traque les virus ? ». Enfin, certaines nous plongent dans l’Histoire auprĂšs d’Ambroise ParĂ© ou d’Aristote. Certains pourraient trouver que beaucoup des propos sont situĂ©s sous la ceinture. Je n’ai pas eu ce sentiment. De plus, il faut se l’avouer, bon nombre des interrogations concernant notre corps sont liĂ©es de prĂšs ou de loin Ă  cet endroit.

Les dessins ne sont pas nĂ©cessairement faciles d’accĂšs. Le trait apparait brouillon et nĂ©gligĂ© Ă  la maniĂšre de celui d’un Reiser. NĂ©anmoins, on s’y habitue rapidement et la capacitĂ© de Montaigne Ă  donner un ton caricatural Ă  ses illustrations participe Ă  la bonhommie de la lecture. Les textes Ă©tant denses, il est important que les dessins ne surchargent pas davantage la page. L’auteur arrive Ă  trouver cet Ă©quilibre en faisant disparaitre tout dĂ©coupage apparent des cases et en se contentant de faire apparaitre le minimum de dĂ©cors utile Ă  la cohĂ©rence du propos.

Tout cela fait que « Quoi de neuf, docteur Moustache ? » un ouvrage de qualitĂ© qui s’avĂšre assez unique dans son genre. AprĂšs le trĂšs rĂ©ussi « La science, c’est pas du cinĂ©ma ! », l’essai est transformĂ© avec ce voyage au plus profond de chacun d’entre nous. Je ne peux donc vous en conseiller la lecture. De mon cĂŽtĂ©, il ne me reste plus qu’à attendre la parution du prochain Ă©pisode. Mais cela est une autre histoire


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Note : 14/20

Tu mourras moins bĂȘte, T1 : La science, c’est pas du cinĂ©ma ! – Marion Montaigne

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Titre : Tu mourras moins bĂȘte, T1 : La science, c’est pas du cinĂ©ma !
Scénariste : Marion Montaigne
Dessinatrice : Marion Montaigne
Parution : Septembre 2011


Marion Montaigne s’est créé une forte rĂ©putation dans la blogosphĂšre grĂące Ă  ton blog « Tu mourras moins bĂȘte ». Dans ce dernier, elle se reprĂ©sente en Professeur Moustache (avec un moustache donc, curieux pour une femme !) ayant pour but de vulgariser la science. Avec un thĂšme original, Marion Montaigne s’est ainsi garanti une forte visibilitĂ©. Ajoutez Ă  cela beaucoup d’humour et vous avez un blog Ă  succĂšs !

Comme beaucoup de blogs cĂ©lĂšbres, « Tu mourras moins bĂȘte » est dĂ©sormais Ă©ditĂ© en format papier chez Ankama Editions. Cette conversion d’un numĂ©rique gratuit vers un objet papier payant est toujours dĂ©licate et pas toujours rĂ©ussie. Qu’en est-il ici ?

Ce premier tome est intitulĂ© « La science, c’est pas du cinĂ©ma ». Marion Montaigne s’attaque donc aux films et aux sĂ©ries qui, souvent, vulgarisent eux-mĂȘmes la science. On retrouve donc plusieurs chapitres : action, science-fiction et sĂ©ries tĂ©lĂ© (oĂč on retrouvera une analyse de Jurassic Park
). Ce regroupement en chapitres n’est pas forcĂ©ment trĂšs judicieux car il reprend des thĂšmes proches, apportant un peu de redite. Un mĂ©lange simple aurait peut-ĂȘtre Ă©tĂ© plus pertinent.

On prend alors pleinement conscience du travail effectué.

Car ce premier tome est trĂšs fourni. 255 pages sont au rendez-vous avec beaucoup de textes. Bref, il y a peu de chances que vous le lisiez d’une traite. On prend alors pleinement conscience du travail qu’effectue rĂ©guliĂšrement Marion Montaigne sur son blog. Alors que sur internet, la lecture verticale est choisie, ici on retrouve une lecture plus traditionnelle. Le tout est segmentĂ© (le plus souvent en trois cases verticales) et on s’aperçoit que de nombreuses pages constituent une seule note de blog.

La vulgarisation scientifique menĂ©e par Marion Montaigne est efficace et facilement comprĂ©hensible. Quelques chiffres et donnĂ©es sont soutenus par un humour grinçant trĂšs efficace. Il n’est pas rare que l’on rit devant les aventures du Professeur Moustache. C’est vraiment lĂ  oĂč rĂ©side la grande qualitĂ© de cet ouvrage : on apprend des choses tout en rigolant. Seul bĂ©mol : les liens que Marion Montaigne ajoutaient Ă  la fin de chaque note qui faisaient office de bibliographie ne sont Ă©videmment pas disponibles ici. Pour ma part, je n’allais pas les visiter et ça ne m’a jamais empĂȘchĂ© d’apprĂ©cier son blog !

Ce premier tome est orientĂ© sĂ©ries/films et possĂšde donc de nombreuses rĂ©fĂ©rences. MĂȘme si connaĂźtre les films en question n’est pas forcĂ©ment nĂ©cessaire pour apprĂ©cier les diffĂ©rentes histoires, c’est quand mĂȘme mieux. Concernant les films, je les avais (presque) tout vus ou au moins, j’en connaissais les grandes lignes. En revanche, je ne connaissais absolument pas les sĂ©ries et cela ne m’a pas empĂȘchĂ© de rire.

Le dessin, trĂšs relĂąchĂ© de Marion Montaigne avec des touches de couleur, n’est pas sans rappeler Reiser. De mĂȘme que ses techniques narratives d’ailleurs. Tout le monde n’aimera pas ce style de dessin Ă  l’aspect brouillon. Personnellement, je trouve que c’est un rĂ©gal !

Chaque dĂ©but de note commence par une carte postale qui pose une question au Professeur Moustache. Pour l’occasion, ce sont des auteurs qui les ont dessinĂ©es. On ne peut que saluer cette initiative. De mĂȘme, l’ouvrage en lui-mĂȘme est de trĂšs bonne qualitĂ©. Le papier est Ă©pais, l’ouvrage bien finalisĂ©. Clairement, l’acheteur n’aura pas l’impression de se faire avoir !

Au final, ce passage au format papier est rĂ©ussi. L’ouvrage est de bonne qualitĂ© et l’humour de Marion Montaigne fait mouche. Certes, les rĂ©pĂ©titions sont plus flagrantes en papier que sur une mise Ă  jour d’un blog, mais l’humour fait mouche bien souvent.

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Note : 15/20

Les femmes en blanc, T36 : Neuf fois de gros stress – Raoul Cauvin & Philippe Bercovici

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Titre : Les femmes en blanc, T36 : Neuf mois de gros stress
Scénariste : Raoul Cauvin
Dessinateur : Philippe Bercovici
Parution : Mars 2014


Depuis plus de dix ans, les rayons de librairie sont envahis par bon nombre de sĂ©ries centrĂ©es sur un corps de mĂ©tier. Les enseignants, les CRS, les pompiers, les psys
 Tout le monde possĂšde ses albums dĂ©crivant son quotidien de maniĂšre humoristique. Le moins que je puisse dire est qu’il y a Ă  boire et Ă  manger. Bien souvent, il s’agit d’albums relativement mĂ©diocres dont les ficelles sont trop grosses pour chatouiller efficacement les zygomatiques. NĂ©anmoins, parmi les plus anciennes, certaines m’ont conquis depuis que je suis enfant. « Pierre Tombal » ou « Les femmes en blanc » font partie de celles-lĂ . Ma critique d’aujourd’hui porte sur le dernier de tome de la derniĂšre citĂ©e. Il s’intitule « Neuf mois de gros stress » et est sorti dans les bacs en avril dernier. Cet album est scĂ©narisĂ© par Raoul Cauvin et dessinĂ© par Philippe Bercovici.

Le site BDGest’ propose le rĂ©sumĂ© suivant : « Le miracle de la vie
 dans les coulisses de l’hĂŽpital. GĂ©rer le stress, c’est la spĂ©cialitĂ© des femmes en blanc, et Ă  l’hĂŽpital, elles ont de quoi faire ! Entre les futurs pĂšres en panique, les inquiets chroniques et les Ă©clopĂ©s en tout genre, pas moyen de lever le pied. C’est ça, le miracle de la vie
 dans les coulisses de l’hĂŽpital ! »

Divertir sans trop réfléchir.

Pour les personnes qui n’ont jamais eu l’occasion de lire un des tomes de la sĂ©rie, je vais rapidement vous prĂ©senter la structure narrative. L’ouvrage est de format classique et se compose de quarante-six planches. Il se dĂ©compose en une suite de gags qui peuvent s’étaler sur une Ă  trois pages. Chacun est indĂ©pendant du prĂ©cĂ©dent et du suivant. Cela fait qu’un tel album peut se feuilleter au grĂ© des envies et du temps libre. Il peut ĂȘtre ouvert Ă  n’importe quel page sans gĂącher la lecture. Son seul but est de divertir sans trop rĂ©flĂ©chir. C’est un objectif louable et apprĂ©ciĂ© quand il est atteint.

Comme son titre l’indique, les blagues s’insĂšrent pleinement dans la vie des infirmiĂšres. L’auteur arrive Ă  utiliser une certaine variĂ©tĂ© de cordes Ă  son arc humoristique pour nous faire rire. Il y a Ă©videmment la gestion des patients, les relations avec les mĂ©decins, les interactions entre elles mais Ă©galement leur quotidien de femme en dehors de leur lieu de travail. Chacune de ses thĂ©matiques est exploitĂ©e de maniĂšre Ă©quitable tant en quantitĂ© qu’en qualitĂ©. Raoul Cauvin a une imagination fertile car cela des dizaines d’histoires qu’il a construites dans l’univers hospitalier et il arrive encore Ă  me surprendre.

En effet, une des forces de l’album est d’offrir des chutes imprĂ©visibles. Sans forcĂ©ment nous faire pleurer de rire, l’auteur arrive par la derniĂšre case Ă  nous surprendre ou Ă  nous faire sourire. J’ai souvent essayĂ© de connaĂźtre le dĂ©nouement de son gag au fur et Ă  mesure de son dĂ©roulement et bien souvent je n’y suis pas arrivĂ©. Il utilise souvent une espĂšce d’anaphores scĂ©naristiques. Une infirmiĂšre nous contente une succession d’anecdotes liĂ©es en trĂšs peu de temps dans le but d’aboutir Ă  une conclusion marrante. MalgrĂ© le nombre parfois important d’évĂ©nements contĂ©s, dĂ©jĂ  drĂŽles en soi, je n’arrive pas Ă  dĂ©couvrir la conclusion de la narratrice. ParallĂšlement, Cauvin nous prĂ©sente Ă©galement des gags en une planche. Ils sont efficaces et lĂ©gers. La mise en situation est rapide et la fin joue davantage avec les mots que les situations.

Mon seul bĂ©mol pourrait concerner les dessins de Bercovici. Je ne leur trouve pas de dĂ©fauts particuliers. Par contre, je regrette qu’ils se contentent – tout est relatif – d’accompagner le propos sans chercher Ă  le sublimer ou Ă  intensifier son cĂŽtĂ© humoristique ou parfois caricatural. J’ai toujours le plaisir de retrouver ce trait qui a accompagnĂ© mes lectures d’enfance quand je farfouillais dans la bibliothĂšque parentale. NĂ©anmoins, j’ai toujours l’espoir que la sĂ©rie exploite un de ses axes de progression.

Pour conclure, « Neuf mois de gros stress » fait honneur Ă  la sĂ©rie en se montrant trĂšs fidĂšle aux ingrĂ©dients de son succĂšs. Cet album ne possĂšde rien d’exceptionnel mais demeure assez efficace. J’ai pris du plaisir Ă  m’y plonger et l’ai trouvĂ© divertissant. Je pourrais regretter qu’il se lise rapidement mais ce lĂ©ger dĂ©faut est compenser par le fait qu’il se relira toujours avec amusement quand on recherchera un passe-temps plaisant.

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Note : 12/20