Blankets – Craig Thomson

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Titre : Blankets
Scénariste : Craig Thomson
Dessinateur : Craig Thomson
Parution : Mars 2004


Une fois lu « Habibi », j’avais bien envie de continuer de dĂ©couvrir Craig Thomson. AprĂšs une incursion (dispensable) en carnet de voyage, je rĂ©cupĂ©rais enfin « Blankets », proclamĂ© chef d’Ɠuvre par de nombreuses critiques. « Blankets » est un ouvrage autobiographique sur la jeunesse de l’auteur. On y trouve un peu de son enfance et beaucoup de son adolescence. Au centre de cet Ă©pais bouquin (pas loin de 600 pages quand mĂȘme
), sa premiĂšre relation amoureuse. Le tout est publiĂ© chez Casterman dans la collection Ă©critures.

Blankets1Craig Thomson nous met tout de suite dans un certain misĂ©rabilisme. Enfant, il dort avec son petit frĂšre et ils ont froid quand bien mĂȘme. Quelques anecdotes se succĂšdent, montrant une Ă©ducation Ă  la dure oĂč mieux valait filer droit. HĂ©las, la plupart des pages traitant de l’enfance n’ont pas vraiment d’intĂ©rĂȘt pour la suite. On pourrait bien sĂ»r penser que cela forge le caractĂšre de Craig, mais tout cela est quand mĂȘme bien dĂ©cousu. On rentre rĂ©ellement dans le vif du sujet quand il rencontre son premier amour.

Peu d’empathie pour le personnage.

Les amourettes, quand on est a vĂ©cues, c’est trĂšs touchant. Mais ici, l’histoire entre Craig et Raina n’a pas beaucoup d’intĂ©rĂȘt. Tout cela est trĂšs plat et manque cruellement de recul. Et pourtant il y aurait de quoi dire : Raina a pour frĂšre et sƓur deux enfants handicapĂ©s et adoptĂ©s. Il ne reste plus qu’à ajouter des parents en plein divorce pour parfaire le tout. Du coup, les pistes de dĂ©veloppement se multiplient (on peut ajouter la religion qui saupoudre le tout en permanence) sans vraiment nous intĂ©resser. Et au fur et Ă  mesure de la lecture, on se fatigue un peu de tout ça. Le personnage de Craig est trĂšs passif, peureux et on n’a finalement que peu d’empathie pour lui.

Au niveau du dessin, j’aime le trait de Craig Thomson. DessinĂ© au pinceau, il a beaucoup de force. C’est vraiment le point fort du livre. Le noir et blanc permet de bien traiter la neige (le livre n’est-il pas sous-titrĂ© « manteau de neige » aprĂšs tout ?) et convient au propos. MalgrĂ© tout, il n’y a pas l’incroyable force des planches de « Habibi ». Le sujet s’y prĂȘte moins, certes.

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Quelle dĂ©ception que ce « Blankets ». C’est long, lent, peu passionnant et pas touchant pour un sou. On sent l’intention derriĂšre de traiter de nombreux sujets « graves », mais c’est finalement une amourette banale Ă  laquelle on a droit. Les thĂšmes annexes, survolĂ©s, auraient peut-ĂȘtre mĂ©ritĂ© plus d’attention et non pas quelques pages rapides entre deux coups de tĂ©lĂ©phone Ă  sa chĂ©rie.

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Note : 10/20

Chateaux Bordeaux, T5 : Le classement – Eric Corbeyran & EspĂ©

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Titre : ChĂąteaux Bordeaux, T5 : Le classement
Scénariste : Eric Corbeyran
Dessinateur : Espé
Parution : Septembre 2014


« ChĂąteaux Bordeaux » est une saga familiale nĂ©e de la collaboration d’Eric Corbeyran et d’EspĂ©. Elle nous immerge dans le quotidien d’un grand domaine viticole local. EditĂ© chez GlĂ©nat, cette aventure m’a attirĂ© par le nom de son scĂ©nariste plutĂŽt que par sa thĂ©matique. En effet, depuis ma rencontre avec « Le chant des Stryges », je suis avec attention les diffĂ©rentes parutions signĂ©es du cĂ©lĂšbre auteur bordelais. « Uchronie(s) » ou « Le MaĂźtre de jeu », fruits du mĂȘme arbre crĂ©atif, sont deux autres sĂ©ries que je conseille.

Contrairement Ă  ces derniĂšres intrigues, « ChĂąteaux Bordeaux » est dĂ©nuĂ© de toute trace de fantastique. Elle dĂ©bute par le dĂ©cĂšs de Monsieur Baudricourt, cĂ©lĂšbre gĂ©rant du « ChĂȘne Courbe ». La rĂ©partition de cet hĂ©ritage devenait donc un enjeu de taille. Les deux fils souhaitent vendre ce patrimoine qui n’a de grand que le nom prestigieux. Mais leur petite sƓur jusqu’alors exilĂ©e aux Etats-Unis, se fixe le dĂ©fi impossible de donner Ă  nouveau ses lettres de noblesse au domaine. Alexandra devient alors logiquement l’hĂ©roĂŻne de cette aventure.

ChateauxBordeaux5bLe dernier Ă©pisode en date est le cinquiĂšme de la sĂ©rie. Il s’intitule « Le classement » et est apparu dans les librairies il y a quelques mois. Depuis la reprise de l’entreprise familiale par Alex, les Ă©preuves se sont enchainĂ©es. Pour faire simple, chaque tome nous prĂ©sente un souci majeur dans la mission que s’est fixĂ©e la nĂ©o-propriĂ©taire. Ce nouvel opus est centrĂ© autour de l’appartenance du « ChĂȘne Courbe » Ă  un prestigieux classement de 1855 des vins du MĂ©doc.

Des enjeux dramatiques assez secondaires.

Les auteurs font l’effort de greffer sur la trame familiale, une rĂ©elle prĂ©sentation de l’univers viticole. Je dois vous avouer que ce milieu m’est inconnu et que la lecture de ces albums m’a appris Ă©normĂ©ment de choses dans le domaine. Si je regarde le verre Ă  moitiĂ© plein, je dirais que le travail de recherche de Corbeyran est de grande qualitĂ© et remarquablement exploitĂ©. La vision du verre Ă  moitiĂ© vide gĂ©nĂšre le sentiment que les enjeux dramatiques sont finalement assez secondaires en comparaison de la dimension documentaire de l’ensemble.

Le personnage d’Alexandra est attachant. DĂšs le dĂ©but, le lecteur souhaite sa rĂ©ussite et son bonheur. Les esprits chafouins lui reprocheront d’ĂȘtre dĂ©nuĂ© de toute zone d’ombre. Personnellement, j’ai acceptĂ© sans mal le cĂŽtĂ© parfait de l’hĂ©roĂŻne. J’ai Ă©tĂ© touchĂ© par sa fragilitĂ© et admirĂ© sa force face aux difficultĂ©s. Ce manichĂ©isme est partiellement nuancĂ© par une grande diversitĂ© de personnages secondaires. Certains d’entre eux soulĂšvent des interrogations quant Ă  leurs rĂ©els objectifs et alimentent ainsi positivement l’intrigue.

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Le regret que je ressens Ă  l’égard de ce bouquin est la faible densitĂ© narrative. Au final, une fois la lecture terminĂ©e, on ne peut pas dire que l’histoire est beaucoup avancĂ©e. Je comprends bien qu’il faut du temps pour faire un bon vin mais pour construire une belle saga, il n’est pas interdit de montrer un peu de rythme et d’intensitĂ© dans le dĂ©roulement des Ă©vĂ©nements. C’était dĂ©jĂ  le dĂ©faut des tomes prĂ©cĂ©dents et je ne peux pas dire que ce « Le Classement » dĂ©roge aux habitudes. C’est d’ailleurs cette fragilitĂ© qui fait disparaĂźtre petit Ă  petit l’aspect dramatique au profit du documentaire. Je trouve cela dommage.

Avant de conclure cette critique, je vais Ă©voquer rapidement les dessins d’EspĂ©. Loin de moi l’idĂ©e de nĂ©gliger le travail graphique mais disons que les illustrations offrent un support solide Ă  la narration mais ne la subliment pas. Les dĂ©cors sont travaillĂ©s, les personnages sont identifiables sans difficultĂ©. NĂ©anmoins, je ne peux pas dire que les pages soient habitĂ©s par une atmosphĂšre qui transpire et envahit le lecteur. Je pense que le trait d’EspĂ© est trop acadĂ©mique pour sublimer le propos.

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Au final, « Le classement » est un album honnĂȘte qui s’inscrit parfaitement dans la sĂ©rie Ă  laquelle il appartient. La qualitĂ© de cette saga est constante et c’est un aspect apprĂ©ciable car relativement rare. C’est une lecture qui se fait calmement, qui s’avĂšre agrĂ©able mais qui ne remue pas les tripes et ne chatouillent pas les Ă©motions. C’est dommage car je reste persuadĂ© que le terreau scĂ©naristique pourrait donner lieu Ă  une lecture plus grave et intense. Peut-ĂȘtre pour au prochain Ă©pisode ?

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Note : 12/20

 

ChĂąteaux Bordeaux, T4 : Les millĂ©simes – Eric Corbeyran & EspĂ©

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Titre : Chùteaux Bordeaux, T4 : Les millésimes
Scénariste : Eric Corbeyran
Dessinateur : Espé
Parution : Septembre 2013


Eric Corbeyran est un de mes auteurs de bandes dessinĂ©es prĂ©fĂ©rĂ©es. Il est particuliĂšrement productif et possĂšde une forte capacitĂ© Ă  faire exister des univers trĂšs diffĂ©rents. ChĂąteaux Bordeaux est une saga qui s’inscrit dans l’univers viticole. Il y fait exister le destin d’une jeune femme, Alexandra, qui cherche Ă  faire exister Ă  nouveau le domaine familial. Le quatriĂšme tome est apparu le 4 septembre dernier dans les librairies. EditĂ© dans la collection Grafica chez GlĂ©nat, il s’intitule Les millĂ©simes. D’un format classique, il coĂ»te 14 euros. Comme pour les prĂ©cĂ©dents opus, la couverture est habitĂ©e par l’hĂ©roĂŻne. On la dĂ©couvre  ici dans une cave, un verre la main. Elle donne l’impression de vouloir trinquer avec le lecteur. Tout un programme


La quatriĂšme de couverture offre la mise en bouche suivante : « Alexandra Beaudricourt a repris en main l’exploitation familiale aprĂšs la mort de son pĂšre, malgrĂ© la rĂ©ticence de ses frĂšres et surtout en dĂ©pit de son absence totale de connaissances en matiĂšre de viticulture. Une Ă©nergie et un enthousiasme hors du commun additionnĂ©s Ă  un amour immodĂ©rĂ© pour le bon vin sont ses principaux atouts. Suffiront-ils Ă  lui permettre de surmonter les coups tordus du milieu et les vicissitudes du marchĂ© ? »

ChateauxBordeaux4aChĂąteaux Bordeaux s’inscrit dans la lignĂ©e de grandes sagas familiales telles que Les MaĂźtres de l’orgepar exemple. La diffĂ©rence est qu’elle ne traverse pas les gĂ©nĂ©rations et se concentre sur le destin d’un seul protagoniste. NĂ©anmoins, Ă  travers l’histoire, l’auteur arrive Ă  nous faire dĂ©couvrir le passĂ© du domaine viticole et de la famille Beaudricourt. La structure narrative fait qu’il est indispensable d’avoir lu les trois premiers Ă©pisodes pour ne pas se sentir perdu en dĂ©couvrant Les millĂ©simes. L’intrigue se dĂ©roule de maniĂšre classique et s’adresse Ă  un public large.

Un véritable panier de crabe

Quand elle dĂ©cide de prendre en main l’entreprise familiale, Alexandra revient de plusieurs annĂ©es aux Etats-Unis. Elle n’est pas du tout familier des us et coutumes locaux et dĂ©couvre que l’univers viticole est un vĂ©ritable panier de crabes. Cet aspect est habilement dĂ©crit par Corbeyran. J’ai eu le sentiment qu’un petit groupe de personnes font la pluie et le beau temps quant Ă  la cĂŽte des crus locaux. En tant qu’étrangĂšre au milieu, Alexandra souffre. Chaque nouvel espoir est souvent suivi par une dĂ©sillusion imprĂ©vue et souvent douloureuse. Corbeyran utilise Ă©galement de maniĂšre pertinente les arcanes administratives que sont la gestion d’un domaine. A aucun moment, il dĂ©cide de rendre les choses plus simples pour laisser uniquement la place Ă  une jeune fille qui arrive Ă  faire un vin merveilleux. En ne nĂ©gligeant pas les contraintes juridiques, financiĂšres et humaines, il rend la trame crĂ©dible et offre une tension dramatique plutĂŽt rĂ©ussie.

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Le tome prĂ©cĂ©dent s’était conclu par une vision positive. Alors que l’hĂ©roĂŻne Ă©tait au fond du trou, elle se voit aider par son frĂšre qui lui recrute une Ă©quipe compĂ©tente pour faire naĂźtre de ses vignes un vin de grande qualitĂ©. La consĂ©quence est que ce nouvel opus nous fait dĂ©couvrir entre autre le travail de cette nouvelle Ă©quipe et apporte au lecteur un vrai cours de viticulture et d’Ɠnologie. Une scĂšne de dĂ©gustation nous permet de comprendre tous les aspects qui influencent la qualitĂ© d’un vin. Il nous est listĂ© les diffĂ©rentes erreurs qui ont fait des derniĂšres cuvĂ©es des Ă©checs. Ce moment est envoutant. Bien que personnellement je ne boive pas de vin, j’étais fascinĂ© par le cours dĂ©roulĂ© dans cette cave.

Cette sĂ©rie a nĂ©cessitĂ© une forte et dense recherche documentaire. Le monde du vin et de l’Ɠnologie n’est pas aisĂ© Ă  comprendre et Ă  maĂźtriser. Les auteurs se sont investis de maniĂšre sĂ©rieuse et appliquĂ©e pour offrir une narration crĂ©dible. Certes, Ă  certains moments, cela offre des scĂšnes au contenu magistral. NĂ©anmoins, l’intĂ©rĂȘt l’emporte bien souvent sur ce lĂ©ger dĂ©faut de forme. A aucun moment, je n’ai eu le sentiment que ChĂąteaux Bordeaux se contentait d’ĂȘtre un cours universitaire sur le vin, sa conception et son environnement. Comme toute saga, la sĂ©rie offre son lot de trahisons, de drames et de secrets. Tout cela reste classique mais est plutĂŽt bien amenĂ©. L’empathie gĂ©nĂ©rĂ©e par l’hĂ©roĂŻne fait que je me suis laissĂ© prendre sans mal par cette vieille recette sĂ©rieusement cuisinĂ©e.

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Par contre, je ne suis pas totalement sous le charme du trait d’EspĂ©. Les planches sont travaillĂ©es. Le travail sur les dĂ©cors est Ă©vident. C’est important quand une histoire s’implique dans l’univers local. Les personnages sont suffisamment bien dessinĂ©s pour que le lecteur n’ait aucun mal Ă  les diffĂ©rencier et Ă  se les approprier. NĂ©anmoins, je trouve qu’ils manquent de personnalitĂ© et que les dessins sont froids. Je trouve que les illustrations se contentent de servir de support au texte et Ă  la narration. Je regrette que qu’ils ne subliment pas la trame. La thĂ©matique et l’hĂ©roĂŻne se prĂȘtent Ă  des envolĂ©es sensorielles et Ă©motionnelles. HĂ©las, le travail d’EspĂ© reste en retrait dans le domaine.

Pour conclure, Les millĂ©simes poursuit avec qualitĂ© les aventures d’Alexandra. L’hĂ©roĂŻne est attachante et gĂ©nĂšre une rĂ©elle curiositĂ© chez le lecteur quant Ă  la rĂ©ussite de son entreprise. Les personnages nous sont dĂ©sormais familiers et c’est donc avec un vrai plaisir que je les ai retrouvĂ©s. La derniĂšre page fait naĂźtre un vrai suspense pourtant imprĂ©visible. Tout est donc fait que je sois attentif Ă  la sortie du cinquiĂšme tome dans les mois Ă  venir. Mais cela est une autre histoire


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Note : 14/20

ChĂąteaux Bordeaux, T3 : L’amateur – Eric Corbeyran & EspĂ©

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Titre : ChĂąteaux Bordeaux, T3 : L’amateur
Scénariste : Eric Corbeyran
Dessinateur : Espé
Parution : Mars 2013


« ChĂąteaux Bordeaux » est une sĂ©rie nĂ©e il y a deux ans de la collaboration d’Eric Corbeyran et EspĂ©. Son objectif Ă©tait de faire naĂźtre une histoire dans l’univers du vin et de ses vignobles. Le premier tome m’avait plu. La dimension familiale de l’intrigue couplĂ©e Ă  son immersion dans un milieu qui m’était inconnu avait fini de me conquĂ©rir. Ma critique d’aujourd’hui Ă©voque le dernier Ă©pisode en date. Paru chez GlĂ©nat le treize mars dernier, « L’amateur » est le troisiĂšme opus de la saga. Sa couverture nous prĂ©sente son hĂ©roĂŻne, Alexandra, dans une cave habitĂ©e de nombreuses bouteilles qu’on suppose pleines de secrets.

La quatriĂšme de couverture de l’album prĂ©sente plutĂŽt bien les enjeux de la trame : « Suite Ă  la mort de son pĂšre, Alexandra Baudricourt est dĂ©terminĂ©e Ă  reprendre en main le « ChĂȘne Courbe », vaste propriĂ©tĂ© viti-vinicole que sa famille possĂšde au cƓur du MĂ©doc. La belle hĂ©ritiĂšre avait bien conscience de l’humilitĂ© dont il lui faudrait faire preuve pour apprendre le mĂ©tier de vigneron, car la fabrication d’un grand cru ne s’improvise pas, mais elle n’imaginait pas que son domaine allait faire tant de convoitises, de jeu de dupes et de manipulations
 »

L’intrigue fait du surplace.

Le premier tome nous prĂ©sentait la situation. Les lieux et les personnages nous Ă©taient dĂ©crits. La construction Ă©tait rigoureuse, la curiositĂ© attisĂ©e. Le deuxiĂšme se centrait davantage encore sur le personnage d’Alexandra qui se lançait pleinement dans son aventure entrepreneuriale. On suivait ses pas avec plaisir. Le dĂ©nouement faisait attendre avec impatience le troisiĂšme volet. J’étais donc optimiste en dĂ©couvrant les premiĂšres pages de « L’amateur ».

ChateauxBordeaux3bL’histoire dĂ©marre par l’apparition d’un nouveau personnage. Il prend les traits d’un amĂ©ricain prĂ©nommĂ© Logan. Il se prĂ©sente comme Ă©tant photographe et rencontre l’hĂ©roĂŻne au cours de son travail artistique. Il est intrigant. On se doute que le Bostonien ne nous dit pas tout et possĂšde quelques secrets. Cet apport est attrayant et amĂšne une nouvelle corde Ă  l’arc narratif. Le nouveau venu apparaĂźt tout au long de l’album et s’avĂšre ĂȘtre un fil conducteur des pĂ©rĂ©grinations d’Alexandra.

Si on met de cĂŽtĂ© l’arrivĂ©e de ce protagoniste, l’intrigue a tendance Ă  faire du surplace. Le scĂ©nario distille beaucoup d’informations mais de maniĂšre, Ă  mes yeux, trop brouillonne. On a droit Ă  des flashbacks historiques, Ă  des discussions familiales, Ă  des problĂšmes techniques ou encore Ă  des cadavres dans les placards. Bref, les ingrĂ©dients sont nombreux. Mais l’assaisonnement est mal dosĂ©. C’est dommage. Au final, quand j’ai refermĂ© le bouquin, j’ai pensĂ© trĂšs fort : « Tout ça pour ça ! ». La conclusion de cet acte aurait pu arriver bien plus tĂŽt dans l’histoire et cela aurait offert une lecture plus dense et prenante.

L’histoire se dĂ©roule dans le vignoble bordelais. Le fait d’ĂȘtre inscrit dans une rĂ©alitĂ© impose une certaine rigueur dans le travail de documentation. Le travail d’EspĂ© sur les dĂ©cors est sĂ©rieux. On n’a aucun mal Ă  se sentir dans les rues bordelaises ou dans les vignes locales. Le dĂ©paysement n’est pas envoutant mais il existe. Ce n’est dĂ©jĂ  pas si mal. Les personnages sont dessinĂ©s avec prĂ©cision. Je ne peux pas dire qu’ils soient attachants graphiquement mais je n’ai aucun Ă  les diffĂ©rencier et me les approprier malgrĂ© leur nombre important.

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En conclusion, mon impression est un petit peu mitigĂ©e. Ce troisiĂšme tome est de mon point de vue le moins abouti de la sĂ©rie. Je n’irai pas jusqu’à dire qu’il est mauvais. Ce n’est pas le cas. Par contre, je n’ai pas retrouvĂ© l’attrait qui se dĂ©gageait de la lecture des deux premiers opus. Cela ne m’empĂȘchera pas d’attendre la suite avec curiositĂ© en espĂ©rant que l’intrigue trouvera un second souffle et offrira une lecture pleine de plaisir


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Note : 13/20

ChĂąteaux Bordeaux, T2 : L’oenologue – Eric Corbeyran & EspĂ©

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Titre : Chñteaux Bordeaux, T2 : L’Ɠnologue
Scénariste : Eric Corbeyran
Dessinateur : Espé
Parution : Mars 2012


« L’Ɠnologue » est le deuxiĂšme tome de la sĂ©rie « ChĂąteaux Bordeaux » nĂ©e il y a peu de temps. Le premier album m’avait beaucoup plu. Je m’étais laissĂ© prendre par cette histoire. Je n’ai donc eu aucun mal Ă  m’offrir rapidement la suite apparue dans les librairies il y a un petit peu plus de deux mois. EditĂ© chez GlĂ©nat, cet ouvrage de format classique est vendu pour environ quatorze euros. La couverture nous prĂ©sente une jeune femme entrant dans une cave remplie de tonneaux. La thĂ©matique viticole prĂ©sentĂ©e par le titre se confirme par l’image. Les tons marron et jaunes gĂ©nĂšrent une atmosphĂšre envoutante. Le travail d’EspĂ© est donc dans la lignĂ©e de ses travaux habituels. Mais, malgrĂ© ses talents, ce n’est pas le nom du dessinateur qui m’avait attirĂ© vers cet ouvrage. C’est le nom d’Eric Corbeyran comme scĂ©nariste qui m’avait incitĂ© Ă  dĂ©couvrir cette nouvelle histoire. Depuis « Le chant des stryges », « Uchronies » ou encore « Black Stone » plus rĂ©cemment je suis trĂšs attentif aux diffĂ©rentes parutions nĂ©es de la plume de cet auteur prolifique


La quatriĂšme de couverture de l’album nous offre les mots suivants : « DĂ©terminĂ©e Ă  reprendre en main le « ChĂȘne Courbe », un vaste domaine viticole situĂ© au cƓur du MĂ©doc, Alexandra Baudricourt se retrouve rapidement au pied du mur. D’un cĂŽtĂ©, elle doit affronter l’hostilitĂ© de son entourage de l’autre, elle sait que pour rĂ©ussir elle va devoir tout apprendre car la production d’un grand cru ne s’improvise pas. Tandis qu’elle tente de percer les secrets de la propriĂ©tĂ© familiale, la jeune femme s’initie Ă  la dĂ©gustation aux cĂŽtĂ©s d’un Ɠnologue rĂ©putĂ© afin de pouvoir se consacrer pleinement Ă  sa nouvelle passion
 »

Une grande saga familiale.

chateaubordeaux2a« ChĂąteaux Bordeaux » entre la catĂ©gorie de ces grandes sagas familiales. Bon nombre de sĂ©ries de bandes dessinĂ©es nous ont immergĂ©s Ă  travers les mĂ©andres de cĂ©lĂšbres familles sur plusieurs gĂ©nĂ©rations. On peut citer « Les maitres de l’orge » en est un cĂ©lĂšbre exemple. NĂ©anmoins, la sĂ©rie que j’évoque aujourd’hui n’a pas fait tout Ă  fait le mĂȘme choix. On retrouve l’unitĂ© de lieu et la notion de domaine familial. Par contre, on ne navigue Ă  travers les Ă©poques. Le premier tome dĂ©marrait par le dĂ©cĂšs du patriarche et se concluait par le choix de sa fille de reprendre le domaine malgrĂ© sa non connaissance de cet univers. Cet opus reprend donc oĂč le prĂ©cĂ©dent nous avait laissĂ©. On retrouve donc avec plaisir cette chĂšre Alexandra pour qui on avait ressenti trĂšs vite de l’empathie.

Cette empathie envers l’hĂ©roĂŻne Ă©tait nĂ©e trĂšs vite dans l’opus prĂ©cĂ©dent. Elle arrivait des Etats-Unis pour les obsĂšques de son pĂšre. Ses frĂšres l’incitent Ă  vendre le domaine qui est un gouffre financier. Mais Alexandra, dans un Ă©lan de romantisme, dĂ©cide de refuser cet Ă©tat de fait et se met en tĂȘte de redonner au « ChĂȘne Courbe » son lustre d’antan. Elle n’y connait rien mais ses compĂ©tences Ă©conomiques et son envie doivent ĂȘtre ses outils. De plus, elles comptent sur ses frĂšres pour l’accompagner. Mais ces derniers la lĂąchent et la mettent devant un ultimatum. Elle souffre mais ne renonce pas. Dans ce deuxiĂšme opus, comme son nom l’indique, elle profite des conseils dans un des plus grands Ɠnologues du monde. Ce dernier l’accompagne dans son immersion dans cet univers. Ce parcours initiatique est assez passionnant. On s’implique pleinement en suivant les pas de notre jolie nĂ©ophyte. Cet aspect de sa personnalitĂ© fait que le lecteur n’est pas uniquement spectateur et a une aisance Ă  se mettre Ă  la place du hĂ©ros. C’est un choix scĂ©naristique trĂšs intĂ©ressant Ă  ce niveau-lĂ .

Ce voyage dans le monde du vin permet de mettre en valeur la qualitĂ© et l’ampleur du travail de recherche de l’auteur. Sans tomber dans la tentation d’un cours magistral, Corbeyran arrive Ă  nous faire dĂ©couvrir ce monde sous tous ses aspects. Les rencontres entre Alexandra et l’Ɠnologue nous prĂ©sentent l’axe du vin pur, de sa qualitĂ©, de ses goĂ»ts. Je suis totalement inculte dans le domaine et j’ai pris Ă©normĂ©ment de plaisir Ă  lire leurs diffĂ©rentes rencontres. Mais la dimension gustative est loin d’ĂȘtre la seule pour maitriser ce monde. GĂ©rer un domaine a une dimension Ă©conomique Ă©vidente mais Ă©galement un aspect politique certain. Tout cela offre tous les ingrĂ©dients pour offrir une intrigue dans laquelle les coups bas sont lĂ©gions et dans lesquels la confiance est une valeur toute relative. Les liens sont avant tout axĂ©s sur le pouvoir de nuisance. En tant que lecteur, notre attention est ainsi totalement sollicitĂ©e. Nos repĂšres sont remis en cause en permanence. On n’arrive pas Ă  statuer sur le camp de chacun des protagonistes. Qui est vraiment gentil ? A quoi pense untel ? Tel autre est-il si mĂ©chant ? Bref, cela nous offre une histoire prenante dans laquelle on souhaite de tout cƓur la rĂ©ussite d’Alexandra.

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Les dessins d’EspĂ© accompagnent parfaitement notre lecture. Ils participent activement Ă  notre immersion dans le monde du MĂ©doc. Que ce soit les domaines viticoles, les chĂąteaux ou encore les rues de la ville, tout participe Ă  crĂ©er Ă  ce monde dans lequel se construit cette histoire et dans lequel gravitent les diffĂ©rents protagonistes. Je pense que le travail de documentation mis en Ɠuvre pour l’écriture du scĂ©nario est Ă©galement mis Ă  profit dans la crĂ©ation des dĂ©cors. EspĂ© n’a pas un style rĂ©volutionnaire ou qui marquent de maniĂšre indĂ©lĂ©bile le lecteur. Par contre, son style classique correspond parfaitement Ă  cette saga familiale. Le travail de Dimitri Gofolin sur les couleurs accompagne parfaitement cet univers graphique.

En conclusion, « L’Ɠnologue » est dans la lignĂ©e de la qualitĂ© du premier ouvrage. On se trouve dans une sĂ©rie classique mais agrĂ©able. Il s’agit d’un bon cru dans le genre. J’ai pris vraiment beaucoup de plaisir Ă  m’immerger Ă  nouveau dans les pas d’Alexandra. J’espĂšre que le prochain tome sera de la mĂȘme trempe mais cela est une autre histoire
 

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Note : 14/20

ChĂąteaux Bordeaux, T1 : Le Domaine – Eric Corbeyran & EspĂ©

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Titre : ChĂąteaux Bordeaux, T1 : Le Domaine
Scénariste : Eric Corbeyran
Dessinateur : Espé
Parution : Mars 2011


 « ChĂąteaux Bordeaux » est une nouvelle sĂ©rie de bandes dessinĂ©es nĂ©e de l’imagination d’Eric Corbeyran. Ce dernier est un scĂ©nariste particuliĂšrement prolifique. Il faut ĂȘtre en effet perpĂ©tuellement aux aguets pour guetter chacune de ses nouvelles parutions. NĂ©anmoins, l’apparition de « Le domaine », premier opus de cette nouvelle saga n’est pas passĂ©e inaperçue. Nombreux ont Ă©tĂ© les articles l’évoquant dans la presse gĂ©nĂ©raliste. Il va sans dire que les mĂ©dias plus habituĂ©s du neuviĂšme art ne l’ont pas passĂ©e sous silence non plus. Etant un grand adepte de Corbeyran depuis ma dĂ©couverte de « Le chant des stryges », je me suis donc empressĂ© de m’offrir ce nouvel ouvrage. Paru le mois dernier, il est Ă©ditĂ© chez GlĂ©nat dans un format classique d’une cinquantaine de pages. Son prix est Ă©galement sans grande surprise. Il est possible de se le procurer pour un petit peu plus de treize euros. Le scĂ©nariste s’est associĂ© Ă  un dessinateur que je ne connaissais que de nom jusqu’à maintenant nommĂ© EspĂ©. Cette lecture Ă©tait donc l’occasion de dĂ©couvrir son style. Le premier contact eu lieu en regardant la couverture nous prĂ©sentant une ravissante jeune femme apprĂ©ciant un verre de vin au beau milieu des vignes, le tout sous un ciel orangĂ©.

chateauxbordeaux1a« Le domaine » Ă©tant le premier tome de la sĂ©rie, il ne nĂ©cessite donc aucun prĂ©-requis avant de s’y plonger. Comme on pouvait s’en douter, l’histoire nous immerge dans la rĂ©gion bordelaise. On y suit les pas d’Alexandra, venue assister Ă  l’enterrement de son pĂšre. Mais Ă  peine la cĂ©rĂ©monie terminĂ©e, les guerres de succession se dĂ©clenchent. Ses deux frĂšres veulent vendre le domaine viticole dont ils hĂ©ritent. La propriĂ©tĂ© est criblĂ©e de dettes et un acheteur est intĂ©ressĂ©. Le souci apparaĂźt quand Alexandra, pas Ɠnologue pour deux sous, dĂ©cide de reprendre en main l’affaire et de lui donner Ă  nouveau le prestige qu’elle possĂ©dait jadis. Mais tout n’est pas si simple et beaucoup de gens ne semblent pas se satisfaire de sa dĂ©cision


Une dĂ©couverte de l’univers viticole.

L’attrait premier de l’album rĂ©side dans la dĂ©couverte de l’univers viticole qu’il nous offre. Tout au long de la lecture, on navigue dans les vignes mais Ă©galement dans les bureaux qui rĂ©gulent cet univers a priori particuliers. En plus de cet aspect documentaire, « Le domaine » nous fait dĂ©couvrir une histoire familiale avec les secrets, les non dits et les manipulations qui l’accompagnent nĂ©cessairement. On rencontre des personnages ambigus et on se doute que chacun n’est pas forcĂ©ment celui qu’il parait ĂȘtre. Ensuite, on suit la mission que se fixe une jeune femme Ă  la mort de son pĂšre. Novice en la maniĂšre, elle se fixe comme quĂȘte de redonner ses lettres de noblesse au domaine familiale. Tout cela rend la lecture de cet album intĂ©ressante et offre une lecture s’adressant Ă  un public large.

Comme je le sous-entends prĂ©cĂ©demment, j’ai trouvĂ© le scĂ©nario plutĂŽt rĂ©ussi. Bien qu’introductif, cet album nous amĂšne un certain nombre d’informations. Quelques retournements de situation apparaissent, les personnages prennent place. Les dialogues sont riches. Etant personnellement Ă©tranger Ă  l’univers du Bordelais, je goĂ»te avec plaisir les informations sur ce milieu qui parsĂšment notre lecture. Elles concernent autant la fabrication pure et simple du breuvage que ses aspects Ă©conomiques. Sans ĂȘtre magistral, l’auteur arrive Ă  mettre en avant le cĂŽtĂ© documentĂ© de son travail. Cela donne une dimension trĂšs rĂ©aliste Ă  l’ensemble.

chateauxbordeaux1bDu fait de la trame scĂ©naristique, on dĂ©couvre une grande galerie de personnages. Le protagoniste principal est donc Alexandra. ExilĂ©e jusqu’alors aux Etats-Unis, elle dĂ©cide changer de vie en s’installant au domaine. TrĂšs rapidement, on ressent de l’empathie pour elle. On sent une jeune femme accompagnĂ©e d’un idĂ©al se plonger dans un milieu difficile dans lequel les rĂšgles paraissent rares et obscures. Son cĂŽtĂ© « chevalier blanc » et « seule contre tous » dĂ©clenche forcĂ©ment la sympathie du lecteur. Je ne vais pas lister les autres intervenants de la trame car ce serait alors bien trop vous la divulguer. Mais sachez qu’ils sont nombreux et plutĂŽt bien amenĂ©s.

La lecture est prenante. DĂšs les premiĂšres pages, on prend plaisir Ă  naviguer dans les pas d’Alexandra. Sur ce plan-lĂ , l’ambiance est trĂšs rĂ©ussie. Notre lecture n’est pas neutre. On n’est pas indiffĂ©rent Ă  ce que l’on dĂ©couvre. La narration n’est pas monotone. Bien au contraire, notre curiositĂ© est souvent alimentĂ©e par une nouvelle information ou un nouvel Ă©vĂ©nement. Le dĂ©paysement est certain est c’est une avec une lĂ©gĂšre frustration qu’on dĂ©couvre la derniĂšre page et que notre voyage doit s’arrĂȘter lĂ .

Il va sans dire que l’apport des dessins est certain. Dans un premier temps, je trouve que les dĂ©cors et les paysages sont trĂšs rĂ©ussis. Qu’ils soient champĂȘtres ou urbains, on n’a aucun mal Ă  ressentir ou reconnaĂźtre les endroits dans lesquels on se trouve. Qu’on se balade dans des vignes ou sur une barque, qu’on dĂ©couvre des caves ou des bureaux d’avocats, tout est rĂ©aliste et tout participe Ă  dĂ©velopper le plaisir de la lecture. De plus, je trouve les personnages bien dessinĂ©s. On n’a aucune difficultĂ© ni Ă  les reconnaĂźtre ni Ă  sentir les caractĂšres. Chacun dĂ©gage une impression personnelle qui densifie l’histoire.

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Pour conclure, cette dĂ©couverte de « Le domaine » a Ă©tĂ© un moment trĂšs agrĂ©able. Je me suis trĂšs vite passionnĂ© pour l’histoire et je ne vous cache pas que je guetterai l’apparition de la suite avec une grande attention. J’espĂšre que cette saga familiale prendra l’ampleur que semble lui offrir son premier opus et qu’elle ne tombera pas Ă  la maniĂšre d’un soufflet. C’est toujours la crainte que je ressens aprĂšs un tome initial rĂ©ussi et prometteur. De plus, le fait que l’intrigue se dĂ©roule dans le milieu viticole est quelque chose qui m’a beaucoup plu, il est toujours intĂ©ressant de dĂ©couvrir un univers jusqu’alors inconnu. Il ne me reste plus qu’à vous conseiller d’aller Ă  sa rencontre Ă  votre tour.

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Note : 16/20

Breakfast after noon

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Titre : Breakfast after noon
Scénariste : Andi Watson
Dessinateur : Andi Watson
Parution : Septembre 2002


Les romans graphiques ont explosĂ© dans les annĂ©es 2000, rĂ©vĂ©lant Ă  la fois des pĂ©pites comme des Ɠuvres sans grand intĂ©rĂȘt. L’allongement de la pagination a permis aux auteurs de s’exprimer plus longuement et de travailler Ă  la psychologie de leurs personnages plus en profondeur. Atteignant prĂšs de 200 pages, « Breakfast after noon » d’Andi Watson saura-t-il titiller l’intĂ©rĂȘt jusqu’au bout de la lecture ? Surtout que c’est le trait au pinceau de l’auteur qui m’a au premier abord attirĂ©. Le tout est publiĂ© chez Casterman dans la collection Ă©critures. Continuer la lecture de « Breakfast after noon »

Blast, T4 : Pourvu que les bouddhistes se trompent – Manu Larcenet

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Titre : Blast, T4 : Pourvu que les bouddhistes se trompent
Scénariste : Manu Larcenet
Dessinateur : Manu Larcenet
Parution : Mars 2014


« Blast » est un OVNI du neuviĂšme art. Depuis la sortie de son premier tome il y a presque quatre ans, cette sĂ©rie est amenĂ©e Ă  marquer profondĂ©ment ses lecteurs. Ce roman graphique nĂ© de l’imagination et de la plume de Manu Larcenet est un uppercut permanent. Cette saga est une tĂ©tralogie. Le sept mars dernier est apparu l’épisode ultime du parcours de Polza Mancini, ce personnage pas comme les autres. Ce dernier opus s’intitule « Pourvu que les bouddhistes se trompent ». EditĂ© chez Dargaud, cet ouvrage se compose de cent quatre-vingt-quinze pages. Il coĂ»te vingt-trois euros. La couverture se partage en deux plans. Le premier nous prĂ©sente Polza, revenu Ă  l’état sauvage. Le second nous prĂ©sente Carole assise un rĂ©volver dans la main. Le dĂ©nouement approche et nous pouvons lĂ©gitimement l’apprĂ©hender.

La quatriĂšme de couverture fait parler Mancini qui s’adresse Ă  nous : « Un vent lourd, puant suie et cadavre, gronde sur la route et me glace. L’orage approche. Je ne cherche aucun abri, il n’en existe pas Ă  ma taille. Je claudique au bord du chemin, ivre comme toujours, dans l’espoir que la distance entre nous se rĂ©duise que nos peaux se touchent enfin. Sali, battu, hagard, je repousse le moment oĂč, le souffle court et les pieds meurtris par de mauvaises chaussures, je devrai m’arrĂȘter. Serai-je encore assez vivant pour repartir ? »

Tour Ă  tour Ă©mu, touchĂ©, Ă©nervĂ©, choquĂ©, compatissant, dĂ©goĂ»tĂ©, horrifiĂ©…

Polza Mancini est un personnage riche qui ne peut pas laisser indiffĂ©rent. Pire que cela, il arrive Ă  gĂ©nĂ©rer tous les spectres des sentiments possibles. Tour Ă  tour j’ai Ă©tĂ© Ă©mu, touchĂ©, Ă©nervĂ©, choquĂ©, compatissant, dĂ©goĂ»tĂ©, horrifiĂ© et j’en passe. D’une page Ă  l’autre, nos Ă©motions sont chamboulĂ©es. La vie de Polza est celle d’un clochard comme il l’affirme. Elle alterne donc entre des moments de poĂ©sie dans la forĂȘt ou prĂšs d’une riviĂšre avec des moments durs inhĂ©rents Ă  la vie dehors. Tous les marginaux ne sont pas stables et bienveillants, loin s’en faut. D’ailleurs le Mancini n’est pas dĂ©nuĂ© de dĂ©faut : il est alcoolique, droguĂ©, instable, sale. A cela s’ajoute un physique difforme qui incite Ă  dĂ©tourner le regard. Bref, il fait partie des gens qu’on n’oublie mais qu’on ne souhaite pas croiser Ă  nouveau.

Mais Polza ne nous conte pas son histoire au coin du feu. Il est en garde Ă  vue. Il est accusĂ© du meurtre de Carole, une jeune femme que les premiers tomes ont petit Ă  petit fait apparaĂźtre dans la vie de Mancini. L’album prĂ©cĂ©dent se concluait par une rude rĂ©vĂ©lation : Carole aurait tuĂ© son propre pĂšre. C’est donc ici que reprend la trame pour ce dernier acte.

A la suite de son Ă©vasion de l’hĂŽpital, Polza est hĂ©bergĂ© chez un des anciens pensionnaires prĂ©nommĂ© Roland. Ce dernier vit dans une ferme reculĂ©e avec sa fille Carole. Mancini ne quittera plus cette ferme jusqu’à son interpellation par la police. Pour la premiĂšre fois, Polza est sĂ©dentaire. Bien qu’il affirme ĂȘtre irrĂ©mĂ©diablement attirĂ© par un dĂ©part dans la forĂȘt, il ne franchit jamais le pas. Il semble attachĂ© Ă  sa nouvelle famille. L’équilibre qui rĂ©git la vie de cette petite communautĂ© est remarquable dĂ©crit par Larcenet. Alors qu’on pourrait y voir une fille aimante et dĂ©vouĂ©e qui s’occupe de son pĂšre malade et qui accueille un sans-abri en quĂȘte d’affection. Mais tout cela est bien plus compliquĂ©, malsain et inquiĂ©tant. Chaque rayon de soleil prĂ©cĂšde une longue pĂ©riode sombre sans lumiĂšre. L’issue nous est connue. Elle est triste et fatale. Le moins que nous puissions dire est que le chemin qui y mĂšne n’est pas plus joyeux.

CĂŽtĂ© dessin, le voyage est intense. Le travail graphique de Larcenet est impressionnant. Son Ɠuvre est quasiment entiĂšrement en noir et blanc. Il fait naĂźtre une grande galerie d’atmosphĂšre. Que les scĂšnes soient intimes ou que ce soient des paysages, que les moments soient lĂ©gers ou horribles, tout nous pĂ©nĂštre profondĂ©ment. Je n’ai pas le vocabulaire suffisamment riche pour vous transcrire les sentiments ressentis devant les planches ou les termes prĂ©cis et techniques qui permettraient d’expliquer la qualitĂ© du travail. Je ne peux donc que vous inciter Ă  ouvrir aux hasards ce tome et en lire quelques pages. Ce sera la meilleure maniĂšre de vous imprĂ©gner et de savourer les remarquables illustrations qui accompagnent cette histoire qui l’est tout autant.

« Pourvu que les bouddhistes se trompent » conclue avec maestria cette grande saga. La derniĂšre partie de l’ouvrage est une invitation Ă  la redĂ©couvrir avec un regard neuf. Cette sĂ©rie est une Ɠuvre majeure de ma bibliothĂšque. Je pense que je m’y plongerai rĂ©guliĂšrement quitte Ă  prendre du plaisir de lecteur Ă  souffrir. « Blast », c’est une expĂ©rience qui ne laisse pas indemne


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Note : 19/20

Blast, T3 : La tĂȘte la premiĂšre – Manu Larcenet

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Titre : Blast, T3 : La tĂȘte la premiĂšre
Scénariste : Manu Larcenet
Dessinateur : Manu Larcenet
Parution : Octobre 2012


« Blast » est incontestablement un OVNI dans la bibliographie de Manu Larcenet. Sa cĂ©lĂ©britĂ© est nĂ©e du succĂšs de sĂ©ries telles que « Le retour Ă  la Terre », « Donjon Parade », « Le combat ordinaire » ou encore « Chez Francisque ». J’ai toujours suivi son travail. Il a su me faire rire souvent et m’émouvoir de temps Ă  autre. Bref, cet auteur est incontestablement un des Ă©crivains en vogue du neuviĂšme art. Son aura prend une toute autre ampleur lorsqu’apparait « Grasse carcasse » dans les librairies. Premier Ă©pisode de sa nouvelle saga, cet album se dĂ©marque. Le format est plus carrĂ©, il se compose de deux cents pages et l’identitĂ© graphique est noire et blanche. Une fois la lecture entamĂ©e, l’atmosphĂšre glauque, triste et dĂ©pressive nous envahit et ne nous laisse pas indemne une fois terminĂ©e. Bref, « Blast » organise un voyage unique qui ne peut pas laisser indiffĂ©rent. C’est donc avec un plaisir intense que j’ai dĂ©couvert la parution en octobre dernier du dernier acte des aventures de Polza Mancini.

Son hĂ©ros est accusĂ© d’avoir agressĂ© une femme. Il est en garde Ă  vue, Ă©coutĂ© par des policiers. Ces derniers cherchent Ă  savoir comment cet acte a pu avoir lieu. Mais Polza veut tout expliquer. Cela part de son enfance, de la mort de son frĂšre et de son pĂšre. Et surtout il Ă©voque son premier Blast, Ă©tat d’extase profonde qu’il obtient en abusant d’alcool ou de substances illicites. Sa vie de clochard, en dehors des sentiers battus, se rĂ©sument donc Ă  des rencontres hasardeuses et la quĂȘte du blast. Son physique ingrat fait de lui un paria volontaire de la sociĂ©tĂ©. Dans l’opus prĂ©cĂ©dent, il croisait Jacky qui s’avĂ©rait ĂȘtre un serial killer. Ce nouvel acte prĂ©sente de nouvelles rencontres qui ne laissent pas indemne Ă  la fois le hĂ©ros et ses lecteurs


Un hĂ©ros malade Ă  l’intelligence particuliĂšre et alambiquĂ©e.

Cet ouvrage se dĂ©marque des deux prĂ©cĂ©dents par la narration de l’internement de Polza. Suite Ă  une tentative de suicide difficile Ă  soutenir, Mancini se trouve enfermĂ© dans une structure hospitaliĂšre qui lui impose une thĂ©rapie psychanalytique. On n’a jamais doutĂ© du fait que le hĂ©ros est malade et nĂ©cessite des soins. Mais c’est la premiĂšre fois depuis le dĂ©but de l’histoire qu’on le dĂ©couvre dans les mains du corps mĂ©dical. Son intelligence particuliĂšre, inquiĂ©tante et alambiquĂ©e prend une autre ampleur quand elle se confronte Ă  la rĂ©alitĂ©. Son refus de se soigner, sa maniĂšre de manipuler et de mĂ©priser les codes font que tout espoir Ă  son Ă©gard disparaĂźt. Il ne veut pas saisir la main qu’on lui tend. On s’en doutait mais on souffre de voir cela se confirmer.

En dehors de la pĂ©riode mĂ©dicale de l’intrigue, Larcenet nous offre des scĂšnes particuliĂšrement dures qui mettent mal Ă  l’aise et qui font souffrir. L’auteur n’utilise aucun filtre pour dĂ©crire la vie de cet homme errant. On sent particuliĂšrement bien l’angoisse de la nuit. Toutes les bĂȘtes fĂ©roces sortent de leur taniĂšre et l’animalitĂ© de l’homme prend une toute autre ampleur qui est loin de laisser indiffĂ©rent. Le talent de l’auteur pour alterner des moments bavards et des moments complĂštement silencieux participe activement Ă  cette atmosphĂšre oppressante. La capacitĂ© que possĂšde l’écrivain Ă  dessiner des paysages nocturnes ou diurnes fait que nos Ă©motions sont en permanence sollicitĂ©es.

Je ne voudrais trop vous en dĂ©voiler. En effet, le plaisir rĂ©side Ă©galement dans les nombreuses interrogations qui se posent Ă  nous quant au devenir de Polza. Le suspense est stressant tant la descente aux enfers du hĂ©ros est permanente. Cet ouvrage est donc dans la lignĂ©e des deux premiers opus. Il s’agit lĂ  d’un vrai compliment tant je suis adepte de cette saga qui est unique dans son genre et qui ne laissera personne indemne une fois le bouquin refermĂ©. Mancini continue Ă  nous hanter


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Note : 17/20

Blast, T2 : L’apocalypse selon Saint Jacky – Manu Larcenet

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Titre : Blast, T2 : L’Apocalypse selon Saint Jacky
Scénariste : Manu Larcenet
Dessinateur : Manu Larcenet
Parution : Avril 2011


« L’apocalypse selon Saint Jacky » est le titre du deuxiĂšme opus de la sĂ©rie de bandes dessinĂ©es « Blast ». Ecrit par Manu Larcenet, cet album est Ă©ditĂ© chez Dargaud depuis le mois d’avril dernier. Cet ouvrage est d’un format original. En effet, l’histoire s’étale sur environ deux cents pages. Le prix est Ă  peine supĂ©rieur Ă  vingt euros. La couverture est coupĂ©e en deux parties. La partie supĂ©rieure, en noir et blanc, nous prĂ©sente un homme obĂšse les yeux dans les yeux avec un Ă©lĂ©phant. L’infĂ©rieure est colorĂ©e et nous fait dĂ©couvrir un homme en train de lire, allongĂ© dans ce qui semble ĂȘtre un livre.

Ce bouquin est la suite du prĂ©cĂ©dent tome de « Blast » intitulĂ© « Grasse carcasse ». Cette nouvelle histoire reprend oĂč nous avait laissĂ©s la prĂ©cĂ©dente. C’est l’occasion de prĂ©ciser qu’il m’apparaĂźt indispensable d’avoir lu le prĂ©cĂ©dent pour profiter pleinement de cet ouvrage. On y avait rencontrĂ© Mancini. Ancien Ă©crivain, il se revendique clochard. On dĂ©couvre son choix de vie qui consiste Ă  errer et Ă  vivre oĂč le mĂšne la vie sans aucune contrainte. Il vit dans la forĂȘt, y rencontre des SDF. Et surtout il boit et se drogue. Tout cela a pour but de lui faire ressentir Ă  nouveau le blast, sensation extrĂȘme de nirvana qui lui fait quitter sa misĂ©rable existence et son horrible corps d’obĂšse dĂ©goutant. Mais le problĂšme est qu’on a dĂ©couvert Mancini en garde Ă  vue et qu’il est accusĂ© de tentative de meurtre sur une femme


« L’apocalypse selon Saint Jacky » commence par l’annonce du dĂ©cĂšs de la prĂ©sumĂ©e victime de Mancini. Les policiers refusent de l’annoncer Ă  leur suspect et continuent Ă  le faire parler. En effet, Mancini continue de leur conter le cheminement de sa vie qui l’a amenĂ© Ă  se trouver Ă  cet endroit Ă  ce moment. Le centre de sa narration va tourner autour d’un personnage prĂ©nommĂ© Jacky qui l’a accueilli un temps et qui a fait durant quelques temps de Mancini un sĂ©dentaire


Un personnage principal qui n’a rien de rĂ©ellement sympathique.

Cette sĂ©rie ne s’adresse pas Ă  tous les publics. Autant des sĂ©ries de Larcenet comme « Le retour Ă  la terre » ou « Nic Oumouk » utilisent un ton lĂ©ger et humoristique, autant « Blast » adopte une ambiance lourde et dure. Le personnage principal n’a rien de rĂ©ellement sympathique. Son statut de SDF devrait dĂ©clencher un sentiment d’empathie. Ce n’est pas vraiment le cas. Il a choisi sa situation et semble en revendiquer de la fiertĂ©. De plus, sa situation d’alcoolique et de droguĂ© assumĂ©e ne favorise pas la sympathie. La narration est rĂ©aliste. Elle prĂ©sente quelque part les codes du chemin initiatique. Mancini nous offre une rĂ©flexion sur sa vie.

Le scĂ©nario s’étale sur deux cents pages. C’est relativement rare dans la bande dessinĂ©e. Le risque Ă©tait que la trame souffre de quelques vides ou encore de quelques lenteurs. Ce n’est absolument pas le cas. La lecture est intense. J’ai dĂ©vorĂ© cet opus d’une seule traite. On est rĂ©ellement transportĂ© dans l’univers de Mancini. On est fascinĂ© par le parcours de cet homme qui se met sciemment Ă  l’écart de la sociĂ©tĂ© et de ses codes. Les diffĂ©rentes rencontres sont autant de rebondissements. Les moments d’introspection sont Ă©galement passionnants.

Le personnage principal possĂšde une emprise Ă©norme sur le rĂ©cit. D’une part, il en est le narrateur et d’autre part ils occupent quasiment toutes les cases de l’ouvrage. Les deux policiers qui l’interrogent ont un rĂŽle trĂšs secondaire et ont pour unique utilitĂ© de relancer la trame. Ce deuxiĂšme tome nous fait rencontrer un nouveau protagoniste qui prend une place trĂšs importante. PrĂ©nommĂ© Jacky, il s’agit d’un homme, dealer, vivant dehors et fanatique de littĂ©rature qui va hĂ©berger Mancini pendant quelques temps. On pourrait qu’ils deviennent amis. Leur cohabitation nous est contĂ©e durant une grande majoritĂ© des pages. J’ai trouvĂ© cet aspect passionnant et savamment narrĂ©. Cette rencontre entre deux auto-exclus de la sociĂ©tĂ© ne laisse pas indiffĂ©rent.

Mais la richesse de cet album ne rĂ©side uniquement dans sa narration. L’atmosphĂšre de la lecture est intense. De temps en temps touchant, trĂšs souvent mettant mal Ă  l’aise, l’ambiance ne nous laisse jamais indiffĂ©rent ni insensible. Et pour aboutir Ă  ce rĂ©sultat, les dessins jouent un rĂŽle prĂ©pondĂ©rant. Manu Larcenet nous offre une Ɠuvre de grande qualitĂ© sur le plan graphique. Les dessins sont en noir et blanc. Il nous offre une grande variĂ©tĂ© de point de vue. D’une part, les paysages sont remarquables. Que ce soit la forĂȘt ou des immeubles de banlieue. D’autre les personnages sont Ă©galement trĂšs bien nĂ©s. Certains visages sont splendides. Ils possĂšdent une rĂ©elle profondeur.

Je ne peux donc que vous conseiller la lecture de cet album. Je le trouve trĂšs rĂ©ussi. De plus, il s’avĂšre ĂȘtre original, ce qui ne gĂąche rien. Pour ceux qui avaient dĂ©jĂ  dĂ©couvert le premier opus de la sĂ©rie, ce nouveau tome est Ă  la hauteur de son prĂ©dĂ©cesseur. Quant Ă  ceux pour qui « Blast » Ă©tait un univers inconnu, n’hĂ©sitez pas Ă  vous y plonger en commençant par « Grasse carcasse ». Bonne lecture


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Note : 17/20