Titre : ChĂąteaux Bordeaux, T1 : Le Domaine
Scénariste : Eric Corbeyran
Dessinateur : Espé
Parution : Mars 2011
 « ChĂąteaux Bordeaux » est une nouvelle sĂ©rie de bandes dessinĂ©es nĂ©e de lâimagination dâEric Corbeyran. Ce dernier est un scĂ©nariste particuliĂšrement prolifique. Il faut ĂȘtre en effet perpĂ©tuellement aux aguets pour guetter chacune de ses nouvelles parutions. NĂ©anmoins, lâapparition de « Le domaine », premier opus de cette nouvelle saga nâest pas passĂ©e inaperçue. Nombreux ont Ă©tĂ© les articles lâĂ©voquant dans la presse gĂ©nĂ©raliste. Il va sans dire que les mĂ©dias plus habituĂ©s du neuviĂšme art ne lâont pas passĂ©e sous silence non plus. Etant un grand adepte de Corbeyran depuis ma dĂ©couverte de « Le chant des stryges », je me suis donc empressĂ© de mâoffrir ce nouvel ouvrage. Paru le mois dernier, il est Ă©ditĂ© chez GlĂ©nat dans un format classique dâune cinquantaine de pages. Son prix est Ă©galement sans grande surprise. Il est possible de se le procurer pour un petit peu plus de treize euros. Le scĂ©nariste sâest associĂ© Ă un dessinateur que je ne connaissais que de nom jusquâĂ maintenant nommĂ© EspĂ©. Cette lecture Ă©tait donc lâoccasion de dĂ©couvrir son style. Le premier contact eu lieu en regardant la couverture nous prĂ©sentant une ravissante jeune femme apprĂ©ciant un verre de vin au beau milieu des vignes, le tout sous un ciel orangĂ©.
« Le domaine » Ă©tant le premier tome de la sĂ©rie, il ne nĂ©cessite donc aucun prĂ©-requis avant de sây plonger. Comme on pouvait sâen douter, lâhistoire nous immerge dans la rĂ©gion bordelaise. On y suit les pas dâAlexandra, venue assister Ă lâenterrement de son pĂšre. Mais Ă peine la cĂ©rĂ©monie terminĂ©e, les guerres de succession se dĂ©clenchent. Ses deux frĂšres veulent vendre le domaine viticole dont ils hĂ©ritent. La propriĂ©tĂ© est criblĂ©e de dettes et un acheteur est intĂ©ressĂ©. Le souci apparaĂźt quand Alexandra, pas Ćnologue pour deux sous, dĂ©cide de reprendre en main lâaffaire et de lui donner Ă nouveau le prestige quâelle possĂ©dait jadis. Mais tout nâest pas si simple et beaucoup de gens ne semblent pas se satisfaire de sa dĂ©cisionâŠ
Une dĂ©couverte de l’univers viticole.
Lâattrait premier de lâalbum rĂ©side dans la dĂ©couverte de lâunivers viticole quâil nous offre. Tout au long de la lecture, on navigue dans les vignes mais Ă©galement dans les bureaux qui rĂ©gulent cet univers a priori particuliers. En plus de cet aspect documentaire, « Le domaine » nous fait dĂ©couvrir une histoire familiale avec les secrets, les non dits et les manipulations qui lâaccompagnent nĂ©cessairement. On rencontre des personnages ambigus et on se doute que chacun nâest pas forcĂ©ment celui quâil parait ĂȘtre. Ensuite, on suit la mission que se fixe une jeune femme Ă la mort de son pĂšre. Novice en la maniĂšre, elle se fixe comme quĂȘte de redonner ses lettres de noblesse au domaine familiale. Tout cela rend la lecture de cet album intĂ©ressante et offre une lecture sâadressant Ă un public large.
Comme je le sous-entends prĂ©cĂ©demment, jâai trouvĂ© le scĂ©nario plutĂŽt rĂ©ussi. Bien quâintroductif, cet album nous amĂšne un certain nombre dâinformations. Quelques retournements de situation apparaissent, les personnages prennent place. Les dialogues sont riches. Etant personnellement Ă©tranger Ă lâunivers du Bordelais, je goĂ»te avec plaisir les informations sur ce milieu qui parsĂšment notre lecture. Elles concernent autant la fabrication pure et simple du breuvage que ses aspects Ă©conomiques. Sans ĂȘtre magistral, lâauteur arrive Ă mettre en avant le cĂŽtĂ© documentĂ© de son travail. Cela donne une dimension trĂšs rĂ©aliste Ă lâensemble.
Du fait de la trame scĂ©naristique, on dĂ©couvre une grande galerie de personnages. Le protagoniste principal est donc Alexandra. ExilĂ©e jusquâalors aux Etats-Unis, elle dĂ©cide changer de vie en sâinstallant au domaine. TrĂšs rapidement, on ressent de lâempathie pour elle. On sent une jeune femme accompagnĂ©e dâun idĂ©al se plonger dans un milieu difficile dans lequel les rĂšgles paraissent rares et obscures. Son cĂŽtĂ© « chevalier blanc » et « seule contre tous » dĂ©clenche forcĂ©ment la sympathie du lecteur. Je ne vais pas lister les autres intervenants de la trame car ce serait alors bien trop vous la divulguer. Mais sachez quâils sont nombreux et plutĂŽt bien amenĂ©s.
La lecture est prenante. DĂšs les premiĂšres pages, on prend plaisir Ă naviguer dans les pas dâAlexandra. Sur ce plan-lĂ , lâambiance est trĂšs rĂ©ussie. Notre lecture nâest pas neutre. On nâest pas indiffĂ©rent Ă ce que lâon dĂ©couvre. La narration nâest pas monotone. Bien au contraire, notre curiositĂ© est souvent alimentĂ©e par une nouvelle information ou un nouvel Ă©vĂ©nement. Le dĂ©paysement est certain est câest une avec une lĂ©gĂšre frustration quâon dĂ©couvre la derniĂšre page et que notre voyage doit sâarrĂȘter lĂ .
Il va sans dire que lâapport des dessins est certain. Dans un premier temps, je trouve que les dĂ©cors et les paysages sont trĂšs rĂ©ussis. Quâils soient champĂȘtres ou urbains, on nâa aucun mal Ă ressentir ou reconnaĂźtre les endroits dans lesquels on se trouve. Quâon se balade dans des vignes ou sur une barque, quâon dĂ©couvre des caves ou des bureaux dâavocats, tout est rĂ©aliste et tout participe Ă dĂ©velopper le plaisir de la lecture. De plus, je trouve les personnages bien dessinĂ©s. On nâa aucune difficultĂ© ni Ă les reconnaĂźtre ni Ă sentir les caractĂšres. Chacun dĂ©gage une impression personnelle qui densifie lâhistoire.
Pour conclure, cette dĂ©couverte de « Le domaine » a Ă©tĂ© un moment trĂšs agrĂ©able. Je me suis trĂšs vite passionnĂ© pour lâhistoire et je ne vous cache pas que je guetterai lâapparition de la suite avec une grande attention. JâespĂšre que cette saga familiale prendra lâampleur que semble lui offrir son premier opus et quâelle ne tombera pas Ă la maniĂšre dâun soufflet. Câest toujours la crainte que je ressens aprĂšs un tome initial rĂ©ussi et prometteur. De plus, le fait que lâintrigue se dĂ©roule dans le milieu viticole est quelque chose qui mâa beaucoup plu, il est toujours intĂ©ressant de dĂ©couvrir un univers jusqu’alors inconnu. Il ne me reste plus quâĂ Â vous conseiller dâaller Ă sa rencontre Ă votre tour.
Note : 16/20